Archive pour la catégorie 'De liturgia'

2013-56. Du joug de Jésus-Christ, doux et humble de cœur.

Sermon de notre glorieux Père Saint Augustin
sur ces paroles du Saint Evangile :
« Mon joug est doux et mon fardeau léger »

Vendredi 21 juin 2013,
fête de Saint Louis de Gonzague (cf. > ici).

A la suite des textes que j’ai précédemment livrés à vos réflexion et méditation au cours de ce mois du Sacré-Coeur, voici le texte d’une prédication de notre bienheureux Père Saint Augustin commentant le seul passage de l’Evangile dans lequel Notre-Seigneur Jésus-Christ parle Lui-même de Son Sacré-Cœur : Matthieu XI, 28-30.
On y verra à quel point les révélations reçues par la sainte Visitandine de Paray-le-Monial sont dans la pleine continuité de la tradition patristique.

2013-56. Du joug de Jésus-Christ, doux et humble de cœur. dans De liturgia sacre-coeur-de-jesus

§1 – Notre-Seigneur dit que Son joug est doux et cependant bien des choses donnent l’impression que, lorsqu’on se met à la suite de Jésus-Christ, on subit les épreuves et la peine. L’Ecriture elle-même annonce des tribulations pour les disciples du Seigneur.

Plusieurs s’étonnent, mes frères, d’entendre dire par le Seigneur : « Venez à Moi, vous tous qui fatiguez et qui êtes chargés, et Je vous soulagerai. Prenez mon joug sur vous et apprenez de Moi que Je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez du repos pour vos âmes ; car mon joug est doux et mon fardeau léger » (Matth. XI, 28-30).
Ceux qui sans frémir se sont courbés sous ce joug et qui ont avec une docilité parfaite présenté leurs épaules à ce fardeau, leur semblent tourmentés et éprouvés par tant de difficultés dans ce siècle, qu’ils les considèrent comme étant appelés, non pas du travail au repos, mais du repos au travail, l’Apôtre disant lui-même : « Tous ceux qui veulent vivre pieusement en Jésus-Christ souffriront persécution » (2 Tim. III, 12).
Comment donc, s’écrie-t-on, le joug du Seigneur serait-il doux et Son fardeau léger, puisque porter ce joug et ce fardeau n’est autre chose que de vivre pieusement en Jésus-Christ ? Comment aussi le Sauveur dit-Il : « Venez à Moi, vous tous qui fatiguez et qui êtes chargés, et Je vous soulagerai ? » Ne devrait-Il pas dire au contraire : Vous qui êtes en repos, venez travailler ? Ainsi trouva-t-Il en repos les ouvriers qu’Il loua et qu’Il envoya à Sa vigne pour y porter le poids de la chaleur (Matt. XX, 3-7). 

sacre-coeur Coeur de Jésus dans Lectures & relectures

§2 – Exemples de Saint Paul : le joug du Christ lui a valu de nombreuses souffrances et persécutions, mais le Saint-Esprit lui enseignait que la perspective du bonheur de la vie future est un puissant contrepoids aux peines d’ici-bas.

Et sous ce joug si doux, sous ce fardeau si léger, l’Apôtre nous dit encore : « Montrons-nous en toutes choses comme des ministres de Dieu par une grande patience dans les tribulations, dans les nécessités, dans les angoisses, sous les coups » (2 Cor. VI, 4). Ailleurs encore, dans la même épître : « Cinq fois j’ai reçu des Juifs quarante coups de fouet moins un ; j’ai été trois fois déchiré de verges, lapidé une fois ; trois fois j’ai fait naufrage, j’ai été un jour et une nuit au fond de la mer » (1 Cor. XI, 24-25). Combien d’autres dangers encore, qu’il est facile d’énumérer mais que l’on ne saurait affronter qu’avec l’aide de l’Esprit-Saint!
L’Apôtre ressentait donc souvent et abondamment les travaux et les angoisses dont il parle : mais il était sans aucun doute soutenu par l’Esprit de Dieu ; et pendant que l’homme extérieur s’usait, cet Esprit renouvelait l’homme intérieur de jour en jour, il le comblait de saintes délices, lui faisait goûter ainsi le repos de l’âme ; et l’espoir du bonheur futur aplanissait toutes les aspérités de la vie, et relevait toutes les pesanteurs. Voilà comment le joug du Christ devenait doux et son fardeau léger. Paul allait même, jusqu’à nommer « tribulation légère » toutes ces afflictions et toutes ces extrémités dont on ne saurait entendre le récit sans frémir.
Ah ! son œil intérieur saisissait parfaitement à quel prix on doit acheter, dans te temps, cette vie future où l’on est exempt des éternelles souffrances des impies, et où l’on jouit sans inquiétude de l’éternelle félicité des justes.

sacre-coeur doux et humble de coeur dans Nos amis les Saints

§3 – Saint Augustin fait ressortir que l’on voit partout des hommes se livrer avec un certain bonheur aux plus rudes travaux afin d’atteindre des satisfactions terrestres qu’ils se sont fixées et la jouissance qui en résultera pour eux.

On se laisse tailler et brûler les chairs afin d’échapper, par ces douleurs aiguës, à d’autres douleurs qui ne sont pas éternelles, mais qui viennent d’un mal dont la durée se prolonge un peu plus. Dans l’espoir incertain d’obtenir un court et languissant repos sur la fin de ses jours, le soldat use sa vie au milieu des guerres les plus horribles ; exposé à passer plus d’années dans l’agitation et la fatigue que dans la paix et le repos. A quelles tempêtes, à quels écueils, à quelles affreuses et redoutables colères du ciel et de la mer ne s’exposent pas, les négociants pour acquérir de volages richesses, des richesses d’où s’échapperont plus de dangers et de tempêtes qu’il n’en a fallu braver pour les acquérir ? A quelles chaleurs, à quels frimas, à quels périls ne s’exposent pas les chasseurs ? Chevaux, fossés, précipices, fleuves et bêtes sauvages, tout est pour eux plein de dangers. Comme ils souffrent la faim et la soif, comme ils se contentent des aliments les plus vils et de la plus insuffisante quantité, quand il s’agit de s’emparer d’un animal, dont parfois, malgré tout ce qu’ils endurent, la chair ne saurait être offerte sur leurs tables ! Il faut même le reconnaître, s’il leur arrive de prendre un sanglier ou un cerf, la pensée de l’avoir pris les flatte plus que le plaisir de le manger. A quels tourments et à quels coups ne sont pas exposés chaque jour les plus tendres enfants ? A combien de veilles, à combien de dures abstinences on les condamne, dans les écoles, non pour les former à la sagesse, mais pour les préparer aux vaines richesses et aux vains honneurs, pour leur enseigner le calcul et les lettres, pour leur apprendre les détours trompeurs de l’éloquence !

sacre-coeur fardeau léger

§4 – Ce qui fait que certains portent allègrement les épreuves tandis que d’autres s’en trouvent accablés, c’est l’amour. Les uns souffrent facilement parce qu’ils aiment, et les autres difficilement parce qu’ils n’aiment pas. Ainsi aussi est-ce l’amour qui rend doux le joug de Jésus-Christ et son fardeau léger.

Observons-le néanmoins : quand on n’aime pas on trouve tout cela difficile, et la difficulté disparaît quand on aime ; car l’amour rend léger, il ne laisse presque pas sentir ce qui est en soi lourd et accablant.
Quelle fermeté donc, et quelle facilité bien plus grandes ne donne pas la charité pour faire en vue de l’éternelle béatitude ce que fait la concupiscence en vue de la misère présente ! Avec quelle aisance on endure toutes les peines temporelles pour échapper aux éternels châtiments et parvenir à l’éternel repos ! Ce n’est pas sans motif que ce Vase d’élection s’écriait avec de si vifs transports : « Les souffrances de ce temps ne sont point comparables à la gloire future qui sera révélée en nous » (Rom. VIII, 18).
Voilà ce qui rend ce joug doux et ce fardeau léger. S’il en coûte au petit nombre de le prendre sur leurs épaules, l’amour le fait supporter à tous aisément. « A cause des paroles de vos lèvres, dit le Psalmiste, j’ai gardé de dures voies » (Ps. XVI, 4). Mais ce qui est dur en soi, s’adoucit par l’amour.
Aussi admirez la sage économie de la bonté divine. Elle veut qu’affranchi de la loi et déchargé par la grâce du poids de ces innombrables observantes qui faisaient du joug divin un joug réellement lourd, quoiqu’il dût être tel pour les opiniâtres qui le portaient alors, l’homme intérieur qui se renouvelle de jour en jour (2 Cor. IV, 16), trouve allégées par la joie intérieure, par la facilité de pratiquer la foi pure, l’espérance qui soutient et la sainte charité, toutes les vexations produites contre l’homme extérieur par le prince rebelle qui a été mis dehors. Rien ne pèse moins à la bonne volonté que cette volonté même, et Dieu s’en contente.
Quelles que soient donc les persécutions du monde, c’est avec une incontestable vérité que les Anges s’écrièrent après la naissance temporelle du Seigneur : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et, sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté ! », car l’Enfant nouveau-né n’apportait qu’un joug doux et un fardeau léger ; d’ailleurs, comme s’exprime l’Apôtre : « Dieu est fidèle, Il ne souffre pas que nous soyons  tentés au dessus de nos forces ; mais Il nous fait tirer profit de la tentation même, afin que nous puissions persévérer » (1 Cor. X, 13).

frise-avec-lys-naturel joug de Jésus-Christ

2013-53. L’Evangéliste ne dit pas que le côté du Sauveur a été blessé, mais qu’il a été ouvert.

du cent-vingtième traité
de
notre glorieux Père Saint Augustin

sur
l’Evangile de Saint Jean

à propos du côté ouvert de Notre-Seigneur Jésus-Christ
(Johan. XIX, 31-37) 

2013-53. L'Evangéliste ne dit pas que le côté du Sauveur a été blessé, mais qu'il a été ouvert. dans Chronique de Lully creation-deve-mosaique-palerme

La création d’Eve – mosaïque de Palerme

* * *

Résumé :
Saint Augustin commente les versets de l’Evangile selon Saint Jean racontant de quelle manière le côté du Sauveur a été transpercé : il attire notre attention sur le verbe précis choisi par l’Evangéliste, et montre – à partir de là – que l’arche de Noé et le récit de la création d’Eve étaient des prophéties en acte annonçant ce qui s’est passé à la mort du Sauveur ainsi que les fruits spirituels de cette mort.  Notre foi se trouve confortée par l’accomplissement des Ecritures en Notre-Seigneur Jésus-Christ.

sacre-coeur-gif arche de Noé dans De liturgia

   § 1. Tout ce que le Sauveur prévoyait comme devant avoir lieu avant Sa mort, ayant été accompli, Il rendit l’esprit au moment choisi par Lui. L’Evangéliste nous raconte ce qui arriva ensuite ; voici son récit : « Les Juifs, parce que c’était la veille du sabbat, afin que les corps ne demeurassent point sur la croix le jour du sabbat (car le sabbat était un jour très-solennel), prièrent Pilate de faire rompre les jambes aux criminels et de les enlever ». D’enlever non pas les jambes, mais les criminels, à qui l’on brisait les jambes pour les faire mourir et les détacher de la croix : on agissait ainsi, afin de ne point prolonger le supplice des crucifiés, et de ne point attrister par le spectacle de leurs tourments un grand jour de fête.

   § 2. « Les soldats vinrent donc et rompirent les jambes de ceux qu’on avait crucifiés avec Lui ; et, s’approchant de Jésus, quand ils virent qu’Il était déjà mort, ils ne Lui rompirent pas les jambes, mais un des soldats Lui ouvrit le côté d’un coup de lance ; et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau ».
L’Evangéliste se sert d’une expression choisie à dessein : il ne dit pas qu’on a frappé ou blessé le côté du Sauveur, ou qu’on a fait quelque autre chose semblable ; mais : « on l’a ouvert ».
Effectivement, la porte de la, vie devait s’ouvrir à l’endroit où ont pris naissance les Sacrements de l’Eglise ; sans lesquels il est impossible d’arriver à la vie, qui est la seule véritable. Ce sang a été répandu pour la rémission des péchés ; cette eau est un salutaire liquide, car elle nous sert de bain et de breuvage.
Dieu annonçait d’avance cet événement (Gen. VI, 16), en donnant à Noé l’ordre d’ouvrir, au flanc de l’arche, une porte par laquelle devaient entrer les animaux destinés à ne point périr sous les eaux du déluge ; ces animaux préfiguraient l’Eglise.
Voilà encore pourquoi la première femme a été tirée du côté d’Adam, pendant qu’il dormait (Gen. II, 22) ; voilà pourquoi elle a reçu le nom de vie et de mère des vivants (note : c’est la signification du nom d’Eve ; cf. Gen. III, 20). Même avant l’incalculable mal de sa prévarication, elle a été ainsi l’annonce d’un bien infini. Le second Adam, Jésus-Christ, ayant baissé la tête, S’est endormi sur la croix, pour qu’une épouse Lui fût donnée, et, pendant Son sommeil, cette épouse est sortie de Son côté.
O mort, qui fait revivre les morts ! Y a-t-il rien de plus pur que ce sang ? Quoi de meilleur pour guérir nos plaies ?

   § 3. « Et celui qui l’a vu a rendu témoignage, et son témoignage est véritable, et il sait qu’il dit vrai, afin que vous aussi vous croyiez ».
Jean ne dit pas : Afin que vous aussi, vous sachiez ; mais : « afin que vous croyiez » ; car celui qui a vu, sait, et celui qui n’a pas vu, doit croire à son témoignage. Le propre de la foi est plutôt de croire que de voir. Qu’est-ce, en effet, que croire une chose, sinon y conformer sa foi ?
« Car cela a été fait pour accomplir ces paroles de l’Ecriture : Vous ne briserez aucun de ses os. L’Ecriture dit encore : Ils verront quel est Celui qu’ils ont percé ». Il tire des Ecritures deux témoignages à l’appui des différents faits dont il raconte l’accomplissement. Il avait dit : « Et s’étant approchés de Jésus, ils virent qu’Il était déjà mort, et ils ne Lui rompirent point les jambes ». A ce passage se rapporte le témoignage suivant : « Vous ne briserez aucun de ses os » . Voilà l’ordre donné à tous ceux qui, sous l’ancienne loi, devaient célébrer la Pâque par l’immolation de l’agneau ; cette immolation était l’ombre antécédente de la Passion du Sauveur. C’est pourquoi « Jésus-Christ, notre Agneau pascal, a été immolé » (1
 Cor. V, 7). Le prophète Isaïe avait dit d’avance à Son sujet : « Il a été conduit à la mort comme une brebis » (Isaïe LIII, 7). De même encore l’Evangéliste avait ajouté : « Mais l’un des soldats ouvrit Son côté d’un coup de lance ». A cela se rapporte l’autre témoignage : « Ils verront quel est Celui qu’ils ont percé ». Voilà la promesse de la venue du Christ avec le même corps que celui avec lequel il a été crucifié. (…)

mont-st-odile-crucifixion-dapres-herrade-de-landsberg-hortus-deliciarum Coeur de Jésus dans Lectures & relectures

Monastère du Mont-Sainte-Odile (Alsace) – peinture murale de la Crucifixion
reproduisant une miniature du « Hortus deliciarum » de l’abbesse Herrade de Landsberg (XIIe siècle) 

2013-52. Concerto floral pour la fête du Sacré-Cœur de Jésus.

2013-52. Concerto floral pour la fête du Sacré-Cœur de Jésus. dans Chronique de Lully chatons-jardiniers

Vendredi 7 juin 2013,
fête du Sacré-Cœur de Jésus.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

Après un hiver qui nous a semblé interminable et un printemps qui n’a été qu’un prolongement de l’hiver, notre modeste jardin de fleurs, qui borde la petite route, au pied de notre Mesnil-Marie, commence à prendre plutôt belle allure…
Tout à l’heure, alors que j’étais bien caché sous les feuilles d’iris, à l’affût de quelque sans-culotte de rat-taupier qui vient saccager les lys que Frère Maximilien-Marie se donne tant de mal à faire pousser (certains commencent juste à pointer leur nez hors de terre), des randonneurs néerlandais sont passés : ils se sont arrêtés pour admirer nos fleurs (car même si je ne comprends pas le flamand, j’ai bien entendu qu’il s’agissait d’admiration) et j’en ai été plutôt fier.
Alors cela m’a donné l’idée de vous offrir, à vous nos amis qui êtes à des kilomètres du Mesnil-Marie, un petit album présentant une sélection de photographies de notre jardin : petit concerto floral pour le plaisir des yeux et cadeau d’amitié en l’honneur de cette fête du Sacré-Cœur qui nous est si chère…

Lully.

Concerto floral pour la fête du Sacré-Coeur

sacre-coeur-gif album photos dans De liturgia

Pour aider le Refuge Notre-Dame de Compassion > ici

2013-51. Réparation ! Réparation ! Réparation !

La « grande révélation » de 1675 :

Cette apparition se produisit après l’arrivée de Saint Claude de La Colombière à Paray-le-Monial, donc en 1675 ; elle eut lieu « devant le Saint Sacrement, un jour de son octave », Sainte Marguerite-Marie ne spécifie pas davantage.
A-t-elle voulu dire le jour de l’octave, ou bien un jour durant l’octave ? On ne peut préciser davantage. Il  faut donc, dans l’expression « un jour de son octave » laisser au mot « un » son sens indéfini ; cette année-là, la Fête-Dieu se trouvait être le jeudi 13 juin, l’octave de la fête était par conséquent le jeudi 20 juin : c’est donc entre le 14 juin et le 20 juin inclus que la sainte Visitandine fut gratifiée de cette « grande révélation ».

2013-51. Réparation ! Réparation ! Réparation ! dans De liturgia chapelle-nd-du-sacre-coeur-quebec

Vitrail de la chapelle Notre-Dame du Sacré-Coeur à Québec.

« Etant une fois devant le Saint Sacrement, un jour de son octave, je reçus de mon Dieu des grâces excessives de son amour, et me sentis touchée du désir de quelque retour, et de lui rendre amour pour amour, et il me dit : « Tu ne m’en peux rendre un plus grand qu’en faisant ce que je t’ai déjà tant de fois demandé ».
Alors me découvrant son divin Cœur : « Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes, qu’il n’a rien épargné jusqu’à s’épuiser et se consommer pour leur témoigner son amour ; et pour reconnaissance je ne reçois de la plupart que des ingratitudes, par leurs irrévérences et leurs sacrilèges, et par les froideurs et les mépris qu’ils ont pour moi dans ce sacrement d’amour. Mais ce qui m’est encore le plus sensible est que ce sont des cœurs qui me sont consacrés qui en usent ainsi. C’est pour cela que je te demande que le premier vendredi d’après l’octave du Saint Sacrement soit dédié à une fête particulière pour honorer mon Cœur, en communiant ce jour-là, et en lui faisant une réparation d’honneur par une amende honorable, pour réparer les indignités qu’il a reçues pendant le temps qu’il a été exposé sur les autels. Je te promets aussi que mon Cœur se dilatera pour répandre avec abondance les influences de son divin amour sur ceux qui lui rendront cet honneur, et qui procureront qu’il lui soit rendu. »

sacre-coeur-gif Acte public de réparation dans Lectures & relectures

On n’insistera jamais assez pour rappeler que cette grande apparition ne consiste pas en ces seules paroles : « Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes », suivies d’un point final, et qu’elle n’a pas pour but de demander une « simple » fête liturgique en l’honneur du Sacré-Cœur de Jésus.
A l’instigation de Saint Jean Eudes, une fête du Cœur de Jésus existait déjà en certains diocèses. Le Cœur de Jésus considéré comme symbole de l’amour divin était déjà un objet d’attention spirituelle et de vénération depuis le Moyen-Age…

A la sainte Visitandine de Paray-le-Monial, Notre-Seigneur Jésus-Christ vient préciser l’esprit dans lequel son divin Cœur doit être vénéré, l’esprit dans lequel sa fête doit être célébrée, l’esprit dans lequel toutes les pratiques en son honneur doivent être observées : cet esprit qui doit être l’âme de la dévotion à son Cœur, c’est celui de la réparation.

La fête liturgique dont il demande l’institution, en précisant la date particulière à laquelle il veut la voir célébrée, doit être une fête réparatrice ; la pratique de la sainte communion qu’il réclame, en particulier les premiers vendredis du mois, est une communion réparatrice ; l’heure sainte dont il réclame l’observance toutes les nuits du jeudi au vendredi est une heure de prière réparatrice

Par l’intermédiaire de Sainte Marguerite-Marie, Jésus ne se contente pas de « montrer » son divin Cœur, il fait nettement ressortir que ce Cœur est « rassasié d’opprobres » – selon l’expression qui sera retenue plus tard pour les litanies – et  les apparitions de Paray-le-Monial ne sont pas « la révélation de l’amour de Jésus pour nous », ainsi que je l’ai parfois entendu dire à certains prêtres (comme si l’Eglise avait dû attendre le XVIIe siècle pour découvrir l’amour de Jésus !), mais elles sont la manifestation d’un amour outragé, d’un amour méprisé, d’un amour insulté, d’un amour qui n’est pas aimé comme il le faudrait par ceux-là mêmes qui devraient en être les plus exacts observateurs, à savoir les baptisés, les religieux, les prêtres : « Ce sont des coeurs qui me sont consacrés qui en usent ainsi » !!!

Tout ceci a été mis dans une insistante lumière par le magistère authentique de l’Eglise dans l’encyclique « Miserentissimus Redemptor«  du Pape Pie XI (dont on trouvera le texte ici > ici), qui a prescrit que pour la fête du Sacré-Cœur soit récité, dans tout l’univers catholique, cet acte solennel de réparation dont nous reproduisons le texte ci-dessous et dont les termes gardent une douloureuse actualité (note : à cette récitation publique est attaché l’octroi de l’indulgence plénière). 

sacre-coeur-gif apparitions du Sacré Coeur dans Nos amis les Saints

Acte solennel de réparation prescrit par Sa Sainteté le Pape Pie XI
pour la fête du Sacré-Cœur
(normalement on le récite devant le Saint Sacrement exposé
après le chant ou la récitation des litanies du Sacré-Cœur) 

Très doux Jésus, vous avez répandu sur les hommes les bienfaits de votre charité, et leur ingratitude n’y répond que par l’oubli, le mépris. Nous voici donc prosternés devant votre autel, animés du désir de réparer par un hommage spécial, leur coupable indifférence et les outrages dont, de toutes parts, ils accablent votre Cœur très aimant.

Cependant, nous souvenant que nous-mêmes, nous nous sommes dans le passé rendus coupables d’une si indigne conduite, et pénétrés d’une profonde douleur, nous implorons d’abord pour nous-mêmes votre miséricorde. Nous sommes prêts à réparer, par une expiation volontaire, les fautes que nous avons commises, tout prêts aussi à expier pour ceux qui, égarés hors de la voie du salut, s’obstinent dans leur infidélité, refusant de Vous suivre, Vous, leur Pasteur et leur Chef, ou, secouant le joug si doux de votre loi, foulent aux pieds les promesses de leur baptême.

Nous voudrions expier pour tant de fautes lamentables, réparer pour chacune d’elles : désordre de la conduite, indécence des modes, scandales corrupteurs des âmes innocentes, profanations des dimanches et des fêtes, blasphèmes exécrables contre Vous et contre vos Saints, insultes à votre Vicaire et à vos prêtres, abandon et violations odieusement sacrilèges du divin Sacrement de votre amour, péchés publics enfin des nations qui se révoltent contre les droits et l’autorité de votre Église.

Que pouvons-nous effacer de notre propre sang tant d’offenses ! Du moins, pour réparer votre honneur outragé, nous vous présentons cette même satisfaction que Vous avez offerte à votre Père sur la Croix et dont Vous renouvelez l’offrande, chaque jour, sur l’autel ; nous Vous la présentons, accompagnée de toutes les satisfactions de la Très Sainte Vierge Votre Mère, des Saints, des chrétiens fidèles. Nous Vous promettons, de tout notre cœur, autant qu’il dépend de nous et avec le secours de votre grâce, de réparer nos fautes passées, celles de notre prochain, l’indifférence à l’égard d’un si grand amour, par la fermeté de notre foi, la pureté de notre vie, la docilité parfaite aux préceptes de l’Évangile, à celui surtout de la charité. Nous Vous promettons aussi de faire tous nos efforts pour Vous épargner de nouvelles offenses et pour entraîner à votre suite le plus d’âmes possible.

Agréez, nous Vous en supplions, ô très bon Jésus, par l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie réparatrice, cet hommage spontané d’expiation ; gardez-nous jusque à la mort, inébranlablement fidèles à notre devoir et à votre service, accordez-nous ce don précieux de la persévérance qui nous conduise tous enfin à la patrie où, avec le Père et le Saint-Esprit, Vous régnez, Dieu, dans les siècles des siècles.

Ainsi soit-il. 

exposition-saint-sacrement Coeur de Jésus dans Prier avec nous

2013-48. Mon divin Cœur est si passionné d’amour pour les hommes, qu’il ne peut plus contenir en lui-même les flammes de son ardente charité…

La première « grande révélation » du Sacré-Cœur
à Sainte Marguerite-Marie : 

Au cours du mois de juin, et à l’approche de la fête du Sacré-Cœur de Jésus, il est bon de relire, sous la plume même de Sainte Marguerite-Marie, le récit des « grandes révélations » au cours desquelles Notre-Seigneur Jésus-Christ lui a manifesté les mystères, les richesses et les grâces que renferme Son divin Cœur.

2013-48. Mon divin Cœur est si passionné d'amour pour les hommes, qu'il ne peut plus contenir en lui-même les flammes de son ardente charité... dans De liturgia stemarg

Voici donc la « première grande révélation », qui eut lieu un 27 décembre, probablement de l’année 1673 (note : les passages mis en caractères gras l’ont été par nos soins) :

« Une fois donc, étant devant le Saint-Sacrement (…), me trouvant toute investie de cette divine présence, mais si fortement, que je m’oubliai de moi-même et du lieu où j’étais, et je m’abandonnai à ce divin Esprit, livrant mon [cœur] à la force de son amour. Il me fit reposer fort longtemps sur sa divine poitrine, où il me découvrit les merveilles de son amour, et les secrets inexplicables de son sacré Cœur, qu’il m’avait toujours tenus cachés, jusqu’alors qu’il me l’ouvrit pour la première fois, mais d’une manière si effective et sensible qu’il ne me laissa aucun lieu d’en douter, pour les effets que cette grâce produisit en moi, qui crains pourtant toujours de me tromper en tout ce que je dis se passer en moi. Et voici comme il me semble la chose s’être passée.

Il me dit : « Mon divin Cœur est si passionné d’amour pour les hommes, et pour toi en particulier que, ne pouvant plus contenir en Lui-même les flammes de son ardente charité, il faut qu’il les répande par ton moyen et qu’il se manifeste à eux pour les enrichir de ses précieux trésors que je te découvre, et qui contiennent les grâces sanctifiantes et salutaires, nécessaires pour les retirer de l’abîme de perdition ; et je t’ai choisie comme un abîme d’indignité et d’ignorance pour l’accomplissement de ce grand dessein, afin que tout soit fait par moi. » (…)

Ensuite, Notre-Seigneur demande à Sœur Marguerite-Marie si elle veut lui donner son cœur. Elle le supplie de le prendre : effectivement elle voit Jésus lui prendre son cœur, le plonger dans le sien, semblable à une fournaise, l’en retirer sous l’apparence d’une flamme ardente en forme de cœur pour le lui remettre dans la poitrine, lui annonçant que cette ardeur la consumera désormais et qu’elle sera marquée par des souffrances et des humiliations. Et il ajoute : « Et pour marque que la grande grâce que je te viens de faire n’est point une imagination, et qu’elle est le fondement de toutes celles que j’ai encore à te faire, quoique j’ai refermé la plaie de ton côté, la douleur t’en restera pour toujours, et si jusqu’à présent tu n’as pris que le nom de mon esclave, je te donne celui de la disciple bien-aimée de mon sacré Cœur. »

Sœur Marguerite-Marie raconte ensuite que pendant plusieurs jours elle reste dans un état de très grande élévation spirituelle qui lui rend l’attention aux choses ordinaires de la vie quasi impossible, en même temps qu’elle éprouve d’une manière très vive la douleur de cette plaie mystique au côté.

Cette « (…) douleur de côté m’était renouvelée les premiers vendredis du mois en cette manière : ce sacré Cœur m’était présenté comme un soleil brillant d’une éclatante lumière, dont les rayons tout ardents donnaient à plomb sur mon cœur, qui se sentait d’abord embrasé d’un feu si ardent, qu’il me semblait m’aller réduire en cendres, et c’était particulièrement en ce temps-là que ce divin Maître m’enseignait ce qu’il voulait de moi, et me découvrait les secrets de cet aimable Cœur. »

Lire la suite > ici

sacrec15 apparitions du Sacré Coeur dans Lectures & relectures

Prière :

O Cœur adorable de Jésus, qui brûlez pour moi de l’amour le plus ardent, communiquez à mon cœur quelques unes de vos flammes.
Daignez, ô Cœur Sacré, Vous faire Vous-même mon maître pour m’enseigner à pratiquer les vertus qui Vous plaisent et dont Vous avez donné l’exemple…
Vous êtes, ô Jésus, le sceau du Père Eternel : par Vous sont marquées les âmes de tous les élus. Je vous supplie donc de Vous graver Vous-même dans mon cœur, et d’y imprimer la marque indélébile d’une plus exacte ressemblance avec Vous, puisque je suis appelé du nom de « christianus : chrétien, c’est-à-dire celui qui appartient au Christ » !
Que tout mon être Vous appartienne et soit sanctifié par Vous : appliquez-Vous à mes yeux, pour sanctifier mes regards ; à ma bouche, pour consacrer toutes mes paroles ; à mon intelligence, pour purifier mes pensées ; à ma volonté, pour régler toutes mes affections ; à mon corps tout entier et à mon âme, pour les remplir de votre douceur, de votre humilité, de votre pureté, de votre charité, et de toutes vos vertus !

Divin Cœur de Jésus,
prenez mon cœur, qu’il soit tout vôtre!

Ainsi soit-il !

frise-avec-lys-naturel Coeur de Jésus dans Nos amis les Saints

Consécration du genre humain au Coeur immaculé de Marie (Vénérable Pie XII)

   Par la lettre encyclique « Ad caeli Reginam » du 11 octobre 1954 (cf. > ici), Sa Sainteté le Pape Pie XII institua la fête de la Bienheureuse Vierge Marie Reine, fixée à la date du 31 mai, en conclusion du mois de Marie.
Il ordonna que ce jour-là fut renouvelé, dans toutes les églises et chapelles de la catholicité, l‘acte de consécration du genre humain au Coeur immaculé de Marie qu’il avait lui-même composé en 1942.
Voici donc le texte de cette prière que, en paroisse ou en famille, en groupe ou seuls, nous aurons à coeur de réciter avec une ferveur renouvelée car les « heures tragiques de l’histoire humaine » ne sont pas seulement limitées à la seconde guerre mondiale, mais elles se perpétuent en nos temps d’apostasie et de recrudescence des persécutions ou vexations contre le christianisme et contre la loi divine.

Consécration du genre humain au Coeur immaculé de Marie (Vénérable Pie XII) dans Chronique de Lully enguerrand-quarton-couronnement-de-la-vierge

Le couronnement de la Vierge
Enguerrand Quarton (1412 – 1466) – Villeneuve-lès-Avignon

fleurdelys2 31 mai dans De liturgia

       Reine du Très Saint Rosaire, Secours des Chrétiens, Refuge du genre humain, Victorieuse de toutes les batailles de Dieu, nous voici prosternés, suppliants au pied de votre trône, dans la certitude d’obtenir miséricorde et de recevoir les grâces, l’aide et la protection opportunes dans les calamités présentes, non en vertu de nos mérites, dont nous ne saurions nous prévaloir, mais uniquement par l’effet de l’immense bonté de votre Cœur maternel.

   C’est à vous, c’est à votre Cœur immaculé qu’en cette heure tragique de l’histoire humaine nous nous confions et nous nous consacrons, non seulement en union avec la Sainte Église —Corps mystique de votre Fils Jésus — qui souffre et verse son sang en tant de lieux, qui est en proie aux tribulations de tant de manières, mais en union aussi avec le monde entier, déchiré par de farouches discordes, embrasé d’un incendie de haine et victime de ses propres iniquités.

   Laissez-vous toucher par tant de ruines matérielles et morales ; par tant de douleurs, tant d’angoisses de pères et de mères, d’époux, de frères, d’enfants innocents ; par tant de vies fauchées dans la fleur de l’âge ; par tant de corps déchiquetés dans l’horrible carnage ; par tant d’âmes torturées et agonisantes, par tant d’autres en péril de se perdre éternellement.

   Ô Mère de miséricorde, obtenez-nous de Dieu la paix et surtout les grâces qui peuvent en un instant convertir le cœur des hommes, ces grâces qui préparent, concilient, assurent la paix ! Reine de la paix, priez pour nous et donnez au monde en guerre la paix après laquelle les peuples soupirent, la paix dans la vérité, dans la justice, dans la charité du Christ. Donnez-lui la paix des armes et la paix des âmes, afin que dans la tranquillité de l’ordre s’étende le règne de Dieu.

   Accordez votre protection aux infidèles et à tous ceux qui gisent encore dans les ombres de la mort ; donnez-leur la paix et faites que se lève pour eux le soleil de la Vérité et qu’ils puissent avec nous, devant l’unique Sauveur du monde, répéter : « Gloire à Dieu au plus haut des Cieux et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté » (Luc II, 14).

   Aux peuples séparés par l’erreur ou par la discorde, et particulièrement à ceux qui professent pour vous une singulière dévotion et chez lesquels il n’y a pas de maison qui n’honorât votre vénérable icône (peut-être aujourd’hui cachée et réservée pour des jours meilleurs), donnez la paix et reconduisez-les à l’unique bercail du Christ, sous l’unique et vrai Pasteur.

   Obtenez à la Sainte Église de Dieu une paix et une liberté complètes ; arrêtez les débordements du déluge néo-païen ; développez dans le cœur des fidèles l’amour de la pureté, la pratique de la vie chrétienne et le zèle apostolique, afin que le peuple des serviteurs de Dieu augmente en mérites et en nombre.

   Enfin, de même qu’au Cœur de votre Fils Jésus furent consacrés l’Église et le genre humain tout entier, afin que, toutes leurs espérances étant placées en Lui, Il devînt pour eux signe et gage de victoire et de salut, ainsi et pour toujours nous nous consacrons à vous, à votre Cœur immaculé, ô notre Mère et Reine du monde ; pour que votre amour et votre protection hâtent le triomphe du règne de Dieu et que toutes les nations, en paix entre elles et avec Dieu, vous proclament bienheureuse et entonnent avec vous, d’une extrémité du monde à l’autre, l’éternel magnificat de gloire, d’amour, de reconnaissance au Cœur de Jésus en qui Seul elles peuvent trouver la vérité, la vie et la paix.

fleurdelys2 ad caeli Reginam dans De Maria numquam satis

2013-46. Du miracle de Bolsena.

Jeudi de la Fête du Très Saint Sacrement (* voir la note en bas de page).

2013-46. Du miracle de Bolsena. dans Chronique de Lully raphael-le-miracle-de-bolsena-vatican

Raphaël : le miracle de Bolsena (détail) – musées du Vatican.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       L’année 2013, nous a donné de commémorer le sept-cent cinquantième anniversaire d’un événement qui eut des conséquences extraordinaires dans la vie de toute l’église catholique : le miracle de Bolsena.

   Ce prodige advint au mois de décembre : décembre de l’an 1263. Mais il convient spécialement de le rappeler en ce jeudi de la fête du Très Saint Sacrement, puisque il fut déterminant pour l’établissement de cette fête dans l’Eglise universelle.

   Voici les faits tels qu’ils sont racontés dans l’ouvrage « Les miracles historiques du Saint Sacrement », publié en 1898 par le Rd. Père Eugène Couet, avec l’imprimatur du Rd. Père Lepidi, maître du Sacré Palais :

   « C’était l’époque où l’Allemagne, sans cesse déchirée par la guerre depuis la mort de l’impie Frédéric II, n’avait pu encore se choisir un empereur ; et les compétiteurs, se disputant la couronne, jetaient le trouble dans toutes les provinces germaniques.
Un prêtre de ces contrées, jusque-là distingué par sa piété et par la pratique des vertus sacerdotales, vit un jour sa foi attaquée par de terribles doutes ; ils portaient spécialement sur l’adorable Sacrement de l’autel. A chaque instant, il avait à subir de nouveaux assauts de la part de l’esprit des ténèbres : Hoc est Corpus meum ; Hic est Sanguis meus ! comment ces paroles, si simples et si courtes, peuvent-elles faire, du pain et du vin, la vraie Chair et le vrai Sang de Jésus-Christ ? Telles étaient les questions que le père du mensonge faisait renaître dans cette âme d’ailleurs fort attachée au service de Dieu. Il l’amenait peu à peu à ne voir dans le prêtre qu’un homme ordinaire, sans considérer le pouvoir auguste que lui a conféré l’onction sainte. Or, s’arrêter à la faiblesse du ministre et ne pas remonter jusqu’à Dieu, dont la puissance est sans bornes, c’est s’exposer aux plus fatales erreurs.
Mais le pauvre prêtre, ainsi tourmenté par l’épreuve, avait recours à la prière et demandait au Ciel la lumière qui lui rendrait la paix. Dieu ne dédaigna pas les cris de détresse de son ministre : et le Sacrement de vie, après avoir été l’occasion des manœuvres infernales, dut bientôt servir à la défaite de Satan.

bolsena-basilique-de-sainte-christine Bolsena dans De liturgia

Bolsena : la basilique de Sainte Christine dans laquelle eut lieu le miracle.

   « Il est sur la terre un lieu privilégié, où jaillit toujours vive et pure la source de la foi : c’est à la ville de Pierre qu’il faut aller puiser la vérité. Notre infortuné prêtre le compris, il fit vœu de visiter le tombeau des saints Apôtres pour s’y raffermir dans la croyance catholique. Après un long et pénible voyage, il arriva à Bolsena, antique cité qui, du temps des Romains, comptait parmi les principales villes de Toscane, mais qui ne garde plus de sa grandeur passée que des ruines et des tombeaux. C’était en décembre 1263. Un vieux temple, dédié jadis à Apollon, et dès les premiers siècles consacré à la glorieuse vierge Christine, se recommandait à la piété du pèlerin ; il voulut célébrer la sainte messe à l’autel où l’on voit encore, miraculeusement gravée dans le marbre, l’empreinte des pieds de l’illustre martyre.

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Bolsena, basilique Sainte Christine : autel où se produisit le miracle.

   « Parvenu au moment où il devait diviser l’Hostie sainte, le célébrant tenait ce Pain sacré sur le calice, quand il le vit, ô prodige ! prendre l’aspect d’une chair vive d’où le sang s’échappait goutte à goutte. La partie cependant qu’il tenait entre les doigts conservait l’apparence du pain, comme pour attester (suivant la remarque de Saint Pierre Damien au sujet d’un fait semblable) que cette Hostie, si subitement changée dans sa forme extérieure, était bien celle qui, peu d’instants avant, cachait sous le voile des accidents le Corps et le Sang de Jésus-Christ. Bientôt l’abondance du sang fut si grande qu’il empourpra le corporal de taches nombreuses ; plusieurs purificatoires, avec lesquels le prêtre essayait d’étancher cet écoulement mystérieux, furent aussi imbibés en peu de temps.

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Miniature représentant le miracle de Bolsena : l’Hostie sanglante.

   « La vue de cette Hostie changée en chair, ce sang qui coulait sans interruption remplirent le célébrant d’une frayeur indicible, mais aussi d’une sainte joie : car il reconnaissait que Dieu venait d’exaucer ses prières et répondait à ses doutes d’une manière irréfragable. Mais pour ne pas scandaliser les fidèles, s’ils venaient à savoir le motif qui avait déterminé ce prodige, il voulut tenir secret un événement si extraordinaire.
C’était compter sans les desseins de Dieu, qui voulait par là raviver la foi d’un grand nombre : aussi, comme il repliait le corporal pour dissimuler les taches qui en couvraient une grande partie, les merveilles se multiplièrent. Dans chacune des gouttes qui continuaient à couler de l’Hostie apparaissait une figure humaine, la face adorable du Sauveur couronné d’épines, telle qu’elle était à cette heure douloureuse où Pilate montra Jésus au peuple altéré de son sang.
La terreur empêcha le prêtre d’achever le Saint Sacrifice. Dans ces cas extraordinaires, comme l’enseigne Saint Thomas (summ. theol. p.3, qu.82 a.4), le célébrant peut se dispenser de terminer les fonctions sacrées. Il enveloppa donc dans le corporal tout maculé de sang l’Hostie changée en chair, la plaça dans le calice et quitta l’autel.

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Le prêtre tente de dissimuler le miracle en quittant l’autel
(toile dans la basilique Sainte Christine de Bolsena)

   « Mais le sang coulait si abondamment que, durant le trajet de la chapelle à la sacristie, de grosses gouttes tombèrent sur les pierres du pavé. C’est ce qui trahit le prêtre, et le miracle fut bientôt connut dans toute la ville.

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Basilique Sainte Christine de Bolsena : l’une des dalles tachée du sang miraculeux.

   « Le Souverain Pontife résidait alors avec sa cour à Orvieto, à six milles de Bolsena. Le pèlerin alla sans retard se jeter à ses pieds ; il raconta au Pape Urbain IV les épreuves que sa foi avait eu à subir et le miracle provoqué par ses doutes. Puis, muni de la bénédiction apostolique et désormais délivré de toute tentation, il se rendit au tombeau des saints Apôtres pour rendre grâce de ce bienfait et accomplir son vœu.
Le Pape Urbain IV ne resta pas indifférent à cet éclatant prodige. Deux grandes lumières de l’Eglise, saint Thomas d’Aquin et saint Bonaventure, se trouvaient alors à Orvieto ; il les députa sur le champ à Bolsena pour y faire une enquête. La vérité du miracle fut reconnue ; et le Pontife chargea l’évêque d’Orvieto d’aller chercher à l’église Sainte Christine l’adorable Hostie, le corporal et les autres linges ensanglantés. Urbain lui-même, entouré des cardinaux, du clergé et d’une foule immense, sortit en procession solennelle et vint au-devant de ce précieux trésor jusqu’au pont de Rivochiaro, à un quart de mille environ de la ville. Les enfants et les jeunes gens portaient des palmes et des branches d’olivier ; on chantait des hymnes et des cantiques au Dieu du Sacrement. Le Pape s’agenouilla pour prendre les vénérables Mystères et les porta comme en triomphe jusqu’à la cathédrale de Sainte Marie d’Orvieto. »

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Urbain IV accueillant les reliques du miracle de Bolsena pour les conduire à Orvieto.

   Pour compléter le récit du Rd. Père Couet, j’ajouterai les précisions suivantes :

   1) le Pape Urbain IV (1195 – 1264), né Jacques Pantaléon, de Troyes, avait été de 1241 à 1253 archidiacre de Liège : dans cette ville, il avait été été instruit des demandes de Notre-Seigneur concernant l’institution d’une fête en l’honneur du Saint Sacrement, transmises par la moniale augustinienne, sainte Julienne du Mont-Cornillon. Avec d’autres théologiens, il avait authentifié les voies mystiques de Julienne et la fête du Très Saint Sacrement avait été instituée à Liège en 1246 (voir > ici).
Elu au Souverain Pontificat le 19 août 1261, le miracle de Bolsena vint lui rappeler les demandes de Notre-Seigneur que sainte Julienne avait faites connaître ; ainsi, le 11 août 1264, par la bulle Transiturus (texte de cette constitution apostolique > ici), il étendit la fête du Très Saint Sacrement à l’Eglise universelle.
Urbain IV rendit son âme à Dieu quelques mois plus tard, le 2 octobre 1264. 

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Orvieto : la cathédrale reconstruite à partir de 1290 pour servir d’écrin au corporal du miracle.

   2) La cathédrale d’Orvieto, dans laquelle Urbain IV avait emmenée solennellement l’Hostie miraculeuse et le corporal taché de sang, fut réédifiée d’une manière somptueuse à partir de 1290. Ce linge miraculeux existe toujours ; le reliquaire dans lequel il est exposé (photo ci-dessous) est conçu de telle manière qu’il peut également servir d’ostensoir : un « cercle » d’orfèvrerie le surmonte dans lequel est insérée la lunule avec la Sainte Hostie, et pour la procession de la Fête-Dieu il est porté à travers les rues d’Orvieto au milieu d’un cortège magnifique. 

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Orvieto : le corporal miraculeux.

   3) Les dalles du pavement de la basilique Sainte Christine de Bolsena tachées par le sang qui gouttait en abondance de l’Hostie miraculeuse, ont été enlevées du sol. Quatre d’entre elles se trouvent toujours à Sainte Christine : trois sont de simples dalles de pierre et se trouvent enchâssées dans des reliquaires muraux et la quatrième, qui était une pierre tombale, est exposée dans le reliquaire dont la photographie se trouve plus haut. La cinquième – qui est aussi une pierre tombale – a été offerte en 1602 à l’église paroissiale de Porchiano del Monte, où elle est également exposée dans un reliquaire.

* * * * * * *

   En un temps malheureux où de nombreuses erreurs se sont à nouveau introduites dans l’Eglise au sujet du Saint-Sacrifice de la Messe, où la croyance et la dévotion des fidèles envers la Très Sainte Eucharistie a été amoindrie, souvent par la faute de clercs qui manquent eux-mêmes de foi et sont coupables de graves désinvoltures ou manques de respect lorsqu’ils célèbrent les Saints Mystères, le rappel opportun du miracle de Bolsena vient à point nommé pour nous rappeler la foi authentique reçue de la Tradition ininterrompue depuis les Apôtres!

Que toujours soit loué, béni et adoré Jésus présent et vivant dans le Très Saint Sacrement de l’autel !

Lully.                           

                 Voir aussi :
- La biographie de Ste Julienne du Mont-Cornillon > ici
- l‘institution de la Fête-Dieu par Urbain IV et Jean XXII > ici

eucaristia04copie Sainte Julienne du Mont-Cornillon

(*) note : Faut-il le rappeler ? La fête du Très Saint Sacrement est fixée, dans l’Eglise universelle, au jeudi qui suit le dimanche de la Sainte Trinité : c’est une fête d’obligation, qui doit être fériée (canon 1246 §1). En France où – hélas ! – , depuis les limitations des fêtes religieuses imposées par l’impie Napoléon, les lois civiles ne permettent plus aux fidèles de chômer et d’assister à la Messe comme les dimanches et jours de grandes fêtes, la solennité est reportée au dimanche qui suit.

2013-45. «Il Vous est impossible de ne pas me faire miséricorde, car la miséricorde Vous est consubstantielle!»

Sermon de Saint Augustin
sous forme d’une prière embrassée au Saint-Esprit

2013-45. «Il Vous est impossible de ne pas me faire miséricorde, car la miséricorde Vous est consubstantielle!» dans De liturgia champaigne-st-augustin-detail-300x224

Philippe de Champaigne : Saint Augustin (détail) 

(la division du texte et les titres donnés aux paragraphes sont de notre fait)

§1. Invocation initiale au Saint-Esprit :

Esprit-Saint, mon Dieu, j’éprouve le désir de parler de Vous, et, néanmoins, je crains pour moi de le faire, car je ne trouve en moi rien qui me le permette.
Pourrais-je, en effet, dire autre chose que ce que Vous m’inspirerez? Pourrai-je prononcer un seul mot, si Vous ne venez en moi pour Vous substituer à moi et Vous parler de Vous-même?
Donnez-Vous donc à moi pour commencer, ô généreux Bienfaiteur, ô Don parfait ; car, quant à Vous, Vous m’appartenez ; rien ne peut m’appartenir, je ne puis m’appartenir moi-même, si je ne Vous possède d’abord. Soyez à moi, et ainsi serai-je à moi, et aussi à Vous : si je ne Vous possède pas, rien ne m’appartiendra. Près de qui aurai-je le droit de Vous posséder? Près de personne, si ce n’est près de Vous.
Il faut donc que Vous Vous donniez à moi, afin que je puisse faire auprès de Vous votre acquisition. Prévenez-moi donc, préparez mon âme à Vous recevoir, et quand Vous y serez entré, parlez-Vous pour moi et écoutez-Vous en moi. Ecoutez-Vous en mon lieu et place, ô Vous qui êtes si bienveillant! Ecoutez une bonne fois, et ne Vous irritez pas. Voyez de quel esprit s’inspirent mes paroles pour moi, je l’ignore, mais je sais pertinemment que, dépourvu de votre assistance, je ne puis rien dire.

§2. Merveilles accomplies par le Saint-Esprit dans l’histoire du salut :

Je m’en souviens : il Vous a suffi jadis de toucher un homme adultère et assassin pour en faire le psalmiste ; Vous avez délivré l’innocente Suzanne ; vos regards se sont abaissés sur une femme possédée par sept démons, sur Magdeleine, et la charité surabondante dont Vous l’avez remplie en a fait l’apôtre des Apôtres ; le larron a été visité par Vous, pendant qu’il était en croix, et, le même jour, Vous l’avez placé dans le ciel pour l’y faire jouir de la gloire du Christ.
Sous votre influence, l’apostat a versé des larmes de repentir, et Vous l’avez préparé à recevoir le souverain pontificat. N’est-ce point à votre appel que le publicain est devenu un évangéliste? N’avez-Vous point terrassé le persécuteur, et, quand il s’est relevé, n’était-il point devenu un docteur hors ligne?
N’êtes-Vous pas venu du ciel pour visiter les Juifs orgueilleux, et en les voyant consumés par les ardeurs de la plus audacieuse doctrine, ne les avez-Vous pas délaissés?
Dieu de sainteté, quand je réfléchis à ce que Vous avez inspiré à tous ces personnages, je me sens encouragé, par leur exemple, à Vous parler ainsi, et je sais, à n’en pas douter un instant, que Vous m’avez appris à Vous répondre de la sorte : voilà aussi pourquoi je soupire vers Vous et me jette dans vos bras.
Ecoutez-moi, Bonté sans limites, et que votre misérable créature n’encoure point votre indignation. Si mes crimes surpassent, par leur nombre, les crimes de tous ces personnages qui me rappellent vos miséricordes, votre indulgence dépasse de beaucoup en étendue ma culpabilité ; car n’est-elle pas infinie? Il lui est facile de pardonner un péché! Ne lui est-il pas aussi aisé d’en pardonner des centaines de mille?

§3. Invocation ardente à l’Esprit-Saint dont la miséricorde éclate
à travers même l’exercice de la justice divine :

A l’un il a suffi d’un seul péché mortel pour se voir réservé à la damnation, quand il est sorti de ce monde : avec des milliers de fautes, un autre a été réservé par Dieu, comme étant prédestiné à la vie.
Qu’y a-t-il en cela, ô très-doux Esprit? C’est que, d’un côté, se manifeste votre miséricorde, et, de l’autre, votre justice. Ces deux hommes, bien différents l’un de l’autre, se trouvent également destinés après une multitude de crimes énormes et pour la fin du monde, celui-ci à entrer dans la vie, celui-là à tomber dans d’affreux tourments. Qu’en conclure, ô Dieu plein de bonté? C’est qu’en tout cela votre miséricorde sans bornes reste toujours égale à elle-même, bien que Vous agissiez diversement.
Le petit nombre des péchés ne donne pas plus la certitude d’arriver à la vie éternelle, que la grandeur et la multiplicité des fautes ne doit donner lieu au désespoir.
Mais parce que votre miséricorde est préférable à toutes les vies, je l’invoque, je la désire, il m’est doux de m’y attacher. Donnez-Vous à moi par son intermédiaire, et donnez-la moi par Vous : que je la possède en Vous, et qu’elle Vous serve de chemin pour venir en moi. C’est elle qui m’inspire le confiant courage de Vous parler ; elle rend mon âme supérieure à elle-même : en la possédant je Vous possède.
Je ne demande donc rien que Vous, car Vous êtes le Docteur et la Science, le Médecin et le Remède, Vous voyez l’état des âmes et Vous les préparez : Vous êtes l’Amour et l’Amant, la Vie et le Conservateur de la vie.
Que dire de plus? Vous êtes tout ce qu’on peut appeler bon!
Car si nous ne sommes point anéantis, c’est l’effet de votre indulgence : elle seule nous soutient en nous attendant ; elle seule nous conserve en ne nous condamnant pas, nous rappelle sans nous faire de reproches, nous renvoie sans nous juger, nous accorde la grâce sans nous la reprendre, et nous sauve par sa persévérance.

§4. Exhortation à soi-même pour une très grande confiance :

Ame pécheresse, ô mon âme, lève-toi donc! redresse-toi! sois attentive à ces consolantes paroles! ne refuse pas un secours qui peut t’aider si puissamment à te réformer!
Remarque-le bien : pour ta restauration, cette Personne divine est la seule qui te soit nécessaire. Lève-toi donc tout entière, ô mon âme! et, puisqu’en cette Personne seule se trouve ton salut, consacre-Lui toutes tes forces, prépare-toi à Lui servir de demeure ; reçois-La, afin qu’Elle te reçoive à son tour.

§5.  Ardents soupirs adressés à l’Esprit Réparateur et Sanctificateur :

Venez donc, ô très-doux Esprit! étendez votre doigt, aidez-moi à me lever.
Que ce saint doigt s’approche de moi, m’attire vers Vous, se pose sur mes plaies et les guérisse. Qu’il fasse disparaître l’enflure de mon orgueil ; qu’il ôte la pourriture de ma colère ; qu’il arrête en moi les ravages du poison de l’envie ; qu’il en retranche la chair morte de la nonchalance ; qu’il y calme la douleur de la cupidité et de l’avarice ; qu’il en ôte la superfluité de la gourmandise, et y remplace l’infection de la luxure par les parfums odorants de la plus parfaite continence.
Puisse-t-il me toucher, ce doigt qui fait couler sur les blessures le vin, l’huile et la myrrhe la plus pure! Puisse-t-il me toucher, ô Dieu plein de bonté!
Alors disparaîtra toute ma corruption, alors je reviendrai à ma primitive innocence, et quand Vous viendrez habiter en moi, qui ne suis maintenant qu’un sac déchiré, Vous y trouverez une demeure en bon état, fondée sur la vérité de la foi, bâtie sur la certitude de l’espérance et parachevée avec une charité ardente.
Bien que nous ne Vous désirions pas depuis longtemps, venez, Hôte aimable! oui, venez! Demeurez avec nous, car si Vous n’y restez pas, il se fera tard, et le jour baissera (Luc XXIV, 29). Frappez et ouvrez! car si Vous ouvrez la porte, personne ne la fermera : entrez et fermez-la derrière Vous, et personne ne l’ouvrira (Apoc. III, 7). Tout ce que Vous possédez est en paix (Luc XI, 21), et, sans Vous, il n’y a point de paix possible, Vous, le Repos des travailleurs, la Paix des combattants, le Plaisir de ceux qui souffrent, la Consolation des malades, le Rafraîchissement de ceux que la chaleur accable, la Joie des affligés, la Lumière des aveugles, le Guide de ceux qui doutent, le Courage des timides…
Car personne ne goûte la tranquillité, s’il ne travaille pour Vous : celui-là seul jouit de la paix, qui combat pour Vous. Souffrir pour Vous, c’est le comble du bonheur ; pleurer pour Vous, c’est la suprême consolation. Quand mon âme gémit pour Vous, alors, à vrai dire, elle se livre au vice et aux plaisirs. Ineffable Bonté, Vous ne pouvez souffrir qu’on souffre, qu’on pleure ou qu’on travaille à cause de Vous ; car, au même moment commencent le travail et le repos, le combat et la paix, la peine et le bonheur. Etre en Vous, c’est être dans l’éternelle félicité.

§6. Contrition et componction appelant le pardon et la grâce du salut :

O mon Bien-Aimé, touchez donc, oui, touchez mon âme! cette âme que Vous avez créée et choisie pour votre demeure au jour de mon baptême.
Mille fois, hélas! vous avez été honteusement et injurieusement chassé de cette maison qui Vous appartenait en propre, et voilà que votre misérable hôtesse Vous rappelle à grands cris ; car c’est pour elle le plus grand des malheurs de se trouver privée de Vous.
Revenez, ô Esprit bon, prenez pitié de cette séditieuse qui Vous a chassé de chez elle. Maintenant, ah! maintenant, elle se rappelle vivement tout le bonheur qu’elle éprouvait à se trouver auprès de Vous. Tous les biens lui étaient venus à cause de Vous (Sag. 
VII, 11) ; sitôt que Vous Vous êtes retiré d’elle, ses ennemis l’ont dépouillée ; ils ont emporté avec eux tous les trésors que Vous lui aviez apportés, et, non contents de l’appauvrir, ils l’ont accablée de coups et de blessures et laissée presque morte (Luc X, 30).
Revenez donc, Seigneur bien-aimé! descendez à nouveau dans votre maison, avant que votre hôtesse insensée rende le dernier soupir.
Aujourd’hui je vois, aujourd’hui je sens combien je suis malheureuse en vivant séparée de Vous : je rougis et tombe dans une confusion extrême de ce que Vous Vous êtes éloigné de moi ; mais les inénarrables faiblesses dont votre absence a été pour moi le principe me forcent à Vous rappeler : Précieux Gardien, venez dans la maison de votre misérable Marthe, et gardez-la dans la vérité, « pour qu’elle ne s’endorme pas un jour dans la mort et que son ennemi ne dise point : J’ai prévalu contre elle » (
Ps. XII, 5).
Mes oppresseurs triompheront si je suis ébranlée (
Ps. XII, 6). Mais, avec votre secours, j’espérerai dans votre miséricorde, je m’y attacherai, j’y mettrai ma confiance : en elle sera la part de mon héritage, et, ainsi, je ne craindrai pas ce que peut contre moi un homme mortel (Ps. LV, 5).
Il Vous est impossible de ne pas me faire miséricorde, car la miséricorde Vous est consubstantielle.
Voyez ma pauvreté, voyez mes pressants besoins, et prenez pitié de moi selon votre infinie grandeur, et non selon mes iniquités. Daigne votre commisération montrer qu’elle est au-dessus de toutes vos oeuvres (Ps. CXLIV. 9). Que la malice du péché ne prévale pas sur la grandeur de votre bonté. C’est par indulgence que Vous dites : « Je ne veux pas la mort du pécheur, mais Je veux qu’il se convertisse et qu’il vive » (Ezéch. XXXIII, 11). Car Vous voulez la miséricorde et non le sacrifice (Matth. IX, 13).
Très-généreux Bienfaiteur, étendez votre droite, cette sainte main qui n’est jamais vide, qui ne sait point refuser, qui ne cesse de donner à l’indigent : étendez donc, aimable Bienfaiteur, étendez cette main toute pleine de vos dons : c’est la main des pauvres. Donnez à votre pauvre, ou plutôt à la pauvreté elle-même, ces armes ou ces trésors qui enrichissent l’indigent sans lui laisser rien à craindre.

§7. Invocation finale pleine d’une douce confiance :

Achevez, Seigneur, ce que votre bras a commencé (Ps. LXVII, 29). Car, je le vois, si Vous nous sauvez, c’est, non pas à cause des oeuvres de justice que nous avons faites, mais par votre miséricorde (Tit. III, 5). Donc, très-sainte Communication, accordez-moi le don de piété, dont le propre est d’inspirer la douceur, comme aussi de conserver et de rendre celui à qui il a été départi libre de toute attache aux biens de la terre ; ainsi pourrons-nous dire avec l’Apôtre Pierre : « Voilà que nous avons tout abandonné et que nous Vous avons suivi » (Matth. XIX, 27). Dès lors que nous aurons renoncé à ce qui est de ce monde passager, votre esprit secourable nous conduira dans la voie droite (Ps. CXLII, 10), jusqu’à la terre des vivants, et par l’affectueuse piété qu’il nous inspirera, il nous introduira dans ce séjour où nous pourrons éternellement jouir de Vous pendant la suite sans fin des siècles des siècles.

Ainsi soit-il!

vitrail-saint-esprit-basilique-vaticane Esprit-Saint dans Lectures & relectures

Vitrail du Saint-Esprit au centre de la gloire du Bernin (basilique vaticane)

voir aussi la prière au Saint-Esprit
extraite des oeuvres de Saint Augustin publiée > ici

2013-40. « Benoît Labre, c’est la contre-révolution en personne ! »

16 avril, fête de Saint Benoît-Joseph Labre.

       Nous avons vu ce qu’avaient été les derniers jours et la mort de Saint Benoît-Joseph Labre (cf. > ici). Voici maintenant quelques éléments de réflexion et de méditation, mettant en évidence les leçons que sa vie et ses exemples donnent aux fidèles d’aujourd’hui.

   A la suite de la béatification du saint pèlerin et mendiant, célébrée à Rome le 20 mai 1860 par le Bienheureux Pie IX devant quelque 40000 fidèles, le diocèse d’Arras, Boulogne et Saint-Omer organisa un triduum solennel : le jour de la clôture de ces fêtes de béatification, le 18 juillet 1860, Monseigneur Louis-Edouard Pie, évêque de Poitiers et futur cardinal, prononça un splendide panégyrique qui occupe presque quarante pages à la fin du troisième volume de ses oeuvres complètes.

   Il ne nous est bien sûr pas possible de reproduire ici cette magnifique oeuvre oratoire dans sa totalité ; toutefois je ne peux résister à la tentation d’en copier quelques morceaux choisis, extraits de la seconde partie de ce panégyrique, parce que – plus d’un siècle et demi après l’époque où ils furent prononcés dans la chaire de la cathédrale d’Arras et peut-être plus encore qu’alors – ils restent d’une saisissante actualité, au point qu’on pourrait dire que ce sont des paroles véritablement prophétiques.
En les lisant, il vous sera aisé d’établir des liens avec les circonstances actuelles de l’Eglise, du monde et de la France…

2013-40. « Benoît Labre, c'est la contre-révolution en personne ! » dans Chronique de Lully cardinal-edouard-pie

S.Exc. Mgr. Louis-Edouard Pie, évêque de Poitiers

   « A ne considérer que toute une grande portion de l’humanité contemporaine, on pourrait dire, mes Frères, que le détrônement de la chose chrétienne est un fait accompli ; que la face du monde est changée, renouvelée ; que le christianisme a disparu sans retour, qu’il est vaincu, enterré, remplacé. Le christianisme, c’est l’édifice de la grâce s’élevant sur les ruines de la nature.
Or, le monde moderne, c’est la nature reprenant fastueusement ce qu’elle appelle ses droits, étalant hautement ses titres, dilatant sans réserve ses moyens d’action et de jouissance. Concupiscence de la chair, concupiscence des yeux, orgueil de la vie : voilà la triple puissance que le christianisme entend briser. Or, le monde moderne a cassé ce triple anathème ; et, des trois choses renversées par le Christ, il a fait la triple colonne du temple de l’humanité émancipée, le trépied de la chaire où elle trône et d’où elle rend ses oracles. Prêtez l’oreille à ses enseignements, et vous reconnaîtrez qu’elle a ses dogmes, sa morale, son culte, ses sacrements, ses béatitudes, son ciel, son enfer, qui forment l’exacte contre-partie de tout le système chrétien.
Il est vrai, dans ce temple nouveau, tout n’est pas encore harmonie. Au sein de ce vaste naturalisme, il reste des dissensions, des guerres intestines. En face du sensualisme repu qui jouit et qui veut conserver, se dresse le sensualisme affamé qui conspire et qui veut partager. Au-dessus du sensualisme abaissé qui s’arrête et se complaît dans la jouissance animale, s’élève le sensualisme raisonné qui veut devenir une doctrine et prétend à la dignité de l’idée. Conservatorisme donc et communisme ou socialisme ; spiritualisme et matérialisme ; libéralisme et despotisme ; déisme même et athéisme : tout cela, comme on le voit, forme un concert assez discordant, et présente la religion moderne sous des noms et des aspects assez divers. Mais enfin toutes ces nuances savent se rapprocher et se fondre ; toutes ces lignes aboutissent dans un cadre commun, toutes ces diversités se relient dans un même symbole, se rencontrent dans un même programme, à savoir, la supplantation de l’élément révélé par l’élément humain, la substitution des droits de l’homme aux droits du Christ et de Son Eglise, le triomphe du naturalisme sur le christianisme.
Aussi trouve-t-on de toutes parts le même patois sur toutes les lèvres, la même fièvre dans toutes les âmes. Civilisation, progrès, conquêtes de l’humanité ; industrie, spéculation, agiotage ; émancipation de l’esprit ou de la chair, sécularisation de la loi et du pouvoir : que sais-je? complétez un peu cette énumération, et vous aurez tout le bagage de mots, d’idées et d’aspirations qui font un homme de ce temps, véritable antipode de tout ce qui constitue la doctrine, la morale et la discipline chrétienne.
Or, mes Frères, à cette génération qui ne connaît, ne sert et n’adore que la nature, voici que la Providence vient opposer un phénomène inattendu. C’est un homme qui foule aux pieds tous les dons, tous les droits, tous les avantages même les plus légitimes de la nature, et qui embrasse volontairement et par vertu le genre de vie le plus opposé à la nature ; c’est un homme qui, prenant les préceptes et les conseils de l’Evangile pour la règle unique de son esprit et de ses actions, abandonne sa famille, son patrimoine, traite son corps en ennemi, épouse la pauvreté, l’abjection, le mépris, et ne vit ici-bas que pour Dieu ; c’est un homme qui immole complètement le sens humain et la prudence de la chair pour n’obéir qu’à la sagesse surnaturelle ; un homme qui prise si haut la virginale intégrité de la foi, la pureté de l’orthodoxie, qu’il ne peut supporter la rencontre d’un hérétique, et qu’il n’hésite point à tripler la fatigue d’un voyage pour éviter de mettre le pied sur une terre protestante. Et cet homme, que notre siècle serait si enclin à ne pas regarder, à dédaigner, à insulter, voici que, bon gré mal gré, notre siècle est obligé à lui prêter son attention. Car enfin, Dieu S’est encore réservé des moyens de Se faire entendre ; Sa voix a des accents qui dominent toujours tous les bruits de la terre (…).
C’est un principe de la science que les contraires sont guéris par les contraires. Tout était contesté dans le code moral de Jésus-Christ : voici ce code observé dans sa dernière rigueur. L’Evangile était déclaré absurde, impossible : le voici pratiqué au pied de la lettre. Le remède est proportionné au mal, la résistance à l’attaque. Seigneur tout-puissant, cette fois encore vous aurez choisi ce qu’il y a de plus faible pour confondre ce qu’il y a de plus fort (1 Cor. I,27). Le naturalisme, comme un fleuve qui a brisé toutes ses digues, allait engloutir la terre. Un humble serviteur de Dieu s’est levé pour repousser le torrent dévastateur. Benoît Labre a planté sur le sol son bâton de pèlerin ; et le flot s’est arrêté, et le naturalisme a fait un pas en arrière. »

(Oeuvres de Monseigneur l’Evêque de Poitiers – Tome III – pp. 663-666) 

st-benoit-joseph 18 juillet 1860 dans De liturgia

Saint Benoît-Joseph pèlerin
(tableau de l’église d’Erin – Artois)

   « (…) Le saint français de la seconde moitié du XVIIIe siècle sera issu des rangs de cette petite bourgeoisie, de cette condition moyenne, qui allait opérer la plus grande révolution qu’ait jamais vue  le monde. Mais sa carrière aura été à l’inverse de toutes les idées, de toutes les aspirations, de tous les entraînements de sa caste. Laissez-moi le dire ainsi : Benoît Labre, c’est le révolutionnaire retourné, c’est la contre-révolution en personne, c’est l’homme du XVIIIe et du XIXe au rebours. Aussi, ne le cherchez point parmi les philosophes ou les encyclopédistes, point parmi les constituants ou les conventionnels, point parmi les présidents de district ni parmi les patriotes renommés. Non, à l’heure où s’ouvriront les états généraux qui préluderont au renversement de la monarchie, à l’heure où la plus ancienne dynastie du monde descendra les marches du trône et gravira celles de l’échafaud, Benoît-Joseph, par une mort prématurée et par les prodiges accomplis autour de sa tombe ou dus à son invocation, aura déjà commencé à monter les degrés de l’autel sur lequel il doit être publiquement honoré au siècle suivant. Et les siens, durant les jours de la tempête, protégés par son souvenir et par leurs traditions héréditaires, figureront au dehors parmi les émigrés et les confesseurs de la foi, au dedans parmi les suspects et les recéleurs de prêtres.»

(ibid. p. 668)

amettes-maison-natale-calvaire béatification dans Nos amis les Saints

Amettes : le grand calvaire érigé au sommet de la prairie devant la maison natale de Saint Benoît-Joseph

   « Benoît Labre, ai-je dit, est une grande leçon donnée à un monde qui n’est plus chrétien. Oui, car la nature, aux yeux du monde actuel, est quelque chose de saint et sacré. Notre siècle s’indigne à l’idée que nous soyons dans un état de dégradation et de péché où la vie de la nature doive être refrénée, doive être circonscrite, doive être immolée, pour faire place à la vie de la grâce ; il va jusqu’à considérer comme un outrage au Créateur, comme un attentat et une insulte à Sa sagesse, la répression des sens, la mortification de la chair, la circoncision de l’esprit et du coeur, le retranchement du bien-être et des douceurs de la vie ; la première condition qu’il entend faire à la religion, c’est qu’elle restera compatible avec le plein usage de ce qu’il nomme les droits de la nature. Or, notre siècle aura beau faire et beau dire, la parole de Jésus-Christ restera dans toute sa force : « Si votre main ou votre pied vous est un sujet de scandale et une occasion de péché, coupez-les et jetez-les loin de vous ; car il vaut mieux pour vous d’entrer dans la vie manchot ou boiteux, que d’avoir deux mains ou deux pieds et d’être précipité dans le feu éternel. Et si votre oeil droit vous tend des pièges, arrachez-le et jetez-le loin de vous : car il vaut mieux pour vous qu’un de vos membres périsse, que si tout votre corps était jeté dans l’enfer » (Matth. V, 28-30 & XVIII, 8-9).
Ainsi a fait notre Bienheureux. Il ne s’est pas littéralement mutilé : il savait que telle n’est pas la signification de la sentence évangélique. mais tout ce qui, dans la vie naturelle, aurait pu le souiller, le pervertir, l’énerver, l’amoindrir, il l’a résolument abandonné et sacrifié. Il a su acheter la vie future aux dépens de la vie présente. C’est ainsi, par exemple, qu’aux dangers de la séduction que ses charmes naturels pouvaient faire naître, il n’hésita point à opposer ces dehors qui vous révoltent (…). Et, en pourvoyant ainsi à son propre salut, il a sciemment réagi contre une société sybarite, il a expié et réparé le sensualisme qui débordait dès lors dans le monde et jusque dans l’Eglise. Car, malgré son humilité, Benoît Labre a eu la conscience de son rôle ; il a compris qu’il était une victime, un contrepoids, et qu’il serait une leçon. C’est ce sentiment qui faisait sa force, comme il constitue sa vraie grandeur (…).

   L’exemple de Benoît-Joseph est donc grandement opportun pour un monde qui avait cessé d’être chrétien. J’ai dit aussi, et je finis par là, qu’il vient à propos pour un monde qui ne l’est plus assez.
Beaucoup d’hommes de ce temps, mes Frères, non-seulement ne connaissent et ne pratiquent plus qu’un christianisme très imparfait, mais s’érigent en oracles et en docteurs pour canoniser ce christianisme appauvri.
A les en croire, l’Eglise chrétienne n’est plus et ne peut plus être qu’un grand institut mitigé, où la première intégrité de la règle ne saurait jamais renaître ; où les esprits les plus sages et les plus pratiques seront désormais les plus condescendants, ceux qui sauront faire la part du temps, et sacrifier quelque chose de l’antique dépôt dans le but de sauver le reste. Dans ce christianisme attempéré, les anciennes et larges thèses de la foi se laissent modestement mesurer les ailes au compas de la philosophie ; l’antique folie de la Croix se dissout, s’évapore, et, pour ainsi parler, se volatilise dans je ne sais quel creuset. Le droit public des âges chrétiens s’efface avec respect devant les grands principes, les principes réputés immortels de l’ère moderne ; et, quand il ne désavoue pas son origine et son passé, il confesse du moins la légitimité de sa défaite et proclame la supériorité de son vainqueur. La morale évangélique elle-même se prête à des complaisances, à des accomodements ; elle se laisse tirer, allonger en divers sens, à la façon de ces trames élastiques si usitées dans l’industrie actuelle. Enfin la discipline est sommée de retirer peu à peu toutes ses prescriptions gênantes pour la nature ; et volontiers on laisse entrevoir un progrès de la loi d’amour et de liberté dans l’abaissement de la loi d’expiation et de pénitence. Que sais-je, mes Frères? il y a ainsi toute une synthèse de théologie rajeunie, tout un évangile de nouvelle fabrique. Jugez si ces théories sont accueillies, si l’amolissement intellectuel et moral des âmes s’accomode de cette atténuation des doctrines et des pratiques, si la tendance naturaliste et semi-pélagienne de notre temps déguste et savoure avec plaisir ce christianisme édulcoré (…).

   Mes Frères, ce que Jésus-Christ a fait par Lui-même, ce qu’Il a fait par Sa doctrine et par Sa vie, Il continue de le faire dans Son Eglise par la doctrine et par la vie de Ses saints. Un saint, à lui tout seul, fait reculer toute la génération contemporaine, il a raison contre tous, et il reste maître du terrain (…). Oui, un saint replace une vérité dans tout son jour, il la remet en crédit, il la venge, il la ressuscite, il la popularise.
Théophantes de je ne sais quelle nouvelle ère chrétienne, faites de la théologie de transaction et d’accommodement ; montrez-nous votre Eglise réformée ou transformée ; tracez-nous le programme d’un nouveau régime religieux ; acclamez comme une forme perfectionnée du progrès chrétien les axiomes et les principes que Rome repousse ; donnez des armes à ses adversaires et aux vôtres en caressant des utopies tout à fait analogues à celles dont ils poursuivent l’application ; mettez-vous en quête d’un second Charlemagne dont la gloire sera d’avoir assujetti l’Eglise aux exigences de l’idée moderne, comme ce fut la gloire du premier d’avoir organisé la société laïque en conformité avec l’idée chrétienne, alors toute puissante ; jetez vos sarcasmes ingénieux aux défenseurs d’une orthodoxie arriérée ; enfin, lancez-vous dans mille témérités de mots, d’idées et de systèmes. La Providence, qui vous voit faire et qui vous entend dire, nous envoie au même instant un chrétien de la plus dure trempe et du plus rude calibre ; un chrétien de la vieille espèce, qui immole toute la sagesse humaine devant la folie de la Croix, qui bâtit le règne de la grâce sur les débris de la nature, qui soumet son intelligence sans réserve à l’autorité de la foi et de l’Eglise, qui dit solennellement anathème à l’esprit du monde, à ses pompes et à ses oeuvres. Et tandis que cet homme fait ainsi revivre dans sa personne toute la première austérité de la croyance, toute la première vigueur de la pratique chrétienne, le Ciel vient mettre sur sa tête la sanction du miracle, l’Eglise vient y mettre la sanction de son culte.
Tous vos raisonnements, toutes vos susceptibilités, tous vos ménagements et vos compromis viendront échouer là (…).
Tant pis pour les programmes de conciliation, pour les théories d’économie religieuse et sociale dont le cadre ne comporterait pas une existence comme celle de notre Bienheureux. C’est par des coups de cette portée que Dieu sauve intégralement dans le monde Son esprit, Sa vérité, Sa loi ; c’est ainsi qu’Il fait acte conservatoire, qu’Il empêche et arrête la prescription. Force reste à l’Evangile et à la Croix de Jésus-Christ (…)».

(Ibid. pp. 675-680)

portrait-via-dei-serpenti contre-révolution dans Vexilla Regis

Portrait de Saint Benoît-Joseph au-dessus de l’autel de la chapelle aménagée dans la chambre où il mourut dans la maison du boucher Zaccarelli (via dei Serpenti)

   « Benoît Labre est un saint, il a été un héros, il a été presque un martyr, il est un thaumaturge. Mais, dans le plan d’En-Haut, il est en outre un docteur. Il l’est à notre profit à tous.
Est-ce que, même chez les âmes chrétiennes, même dans les ministres du sanctuaire, l’estime de la pénitence, la pratique de la pénitence, l’esprit de la pénitence n’aurait pas faibli dans ces derniers temps?
Est-ce que les privations, les veilles, les jeûnes volontaires ne seraient pas sortis des habitudes de ceux-là même qui veulent servir Dieu et sauver leur âme?
Est-ce que l’efficacité même des sacrements ne serait pas souvent compromise par l’absence de la vertu de pénitence?
Est-ce que l’enfer ne se peuplerait pas de nos immortifications?
Notre Bienheureux n’a-t-il pas dit que le manque de contrition et de satisfaction y fait descendre à toute heure les âmes par milliers, comme tombent les flocons de neige dans un jour d’hiver?
Merci, ô Bienheureux Benoît, merci de vos instructions, merci de vos exemples qui resteront pour nous des leçons (…).

   Merci pour nous donc. Merci aussi pour l’Eglise. O Sainte Eglise de Dieu, on avait dit que vous étiez trop affaiblie pour produire des chrétiens comme ceux d’autrefois, pour refaire des ascètes comme ceux du désert, on vous croyait réduite à ne plus donner que des avortons. Vous voici revenue à votre première puissance, vous n’avez rien perdu de votre énergique fécondité, vous savez encore enfanter des pénitents dignes de vos plus belles années.
O Seigneur Jésus, dans ce visage amaigri de notre Benoît-Joseph, dans ces joues hâves et creuses, sur ce front couvert de rides prématurées, ce que j’aime et ce que je vénère avec transport, c’est le visage de Votre Eglise, qui ne vieillit point, elle, qui n’a ni taches ni rides, et qui sait retrouver jusqu’à la fin d’admirables retours de jeunesse et de virilité (…). » 

(Ibid. pp. 680-681)

cesare-tiazzi-buste-de-benoit-joseph-labre-realise-en-1784 Monseigneur Pie

Cesare Tiazzi : buste de Benoît-Joseph Labre réalisé en 1784 (année qui suivit sa mort)
d’après les descriptions de ceux qui l’avaient connu à la fin de sa vie.

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