Archive pour la catégorie 'De liturgia'

2014-34. La chaloupe qui n’avançait pas…

Dimanche de Laetare.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Nous avons passé le cap de la mi-carême (jeudi de la troisième semaine de carême) et nous voici au dimanche de Laetare - dimanche de la rose et dimanche rose – , étape importante dans notre parcours spirituel vers Pâques.

   De tout cœur, j’espère que, pour chacun de vous, ce temps du carême est marqué par une profonde et véritable progression spirituelle, et que, malgré les combats et les difficultés inhérents à cette période de grandes grâces, les jours et les semaines qui passent n’érodent pas votre courage, votre détermination, votre persévérance et vos résolutions…
Il est assez fréquent, en effet, que l’on commence le carême avec un certain enthousiasme et de belles ambitions spirituelles, mais que l’usure du temps et la tyrannie de nos routines reprennent le dessus : de là, la nécessité de « relancer la machine », et de sans cesse ré-alimenter notre ferveur et notre générosité. A cet égard, avant d’aborder la partie la plus austère et la plus dramatique du cheminement vers Pâques – le temps de la Passion puis la Semaine Sainte – , le dimanche de Laetare joue justement un rôle de re-motivation et de ré-activateur de nos énergies spirituelles.

   Mais je ne vais pas m’étendre davantage en sermons ! Pour marquer ce dimanche de Laetare par une petite « pause sourire », non dépourvue de profondeur et d’enseignements spirituels toutefois, je vous adresse l’une de ces petites bandes dessinées de notre Frère Maximilien-Marie, dont un certain nombre d’entre vous m’écrivent qu’ils sont friands.
Lisez attentivement… Souriez… Et, par dessus tout, retenez-en la leçon afin de la mettre en pratique !

Bon, beau, et surtout fervent dimanche de Laetare à vous tous, chers Amis !

Patte de chat Lully.

la chaloupe qui n'avançait pas

Chat gif en marche

Toutes les bandes dessinées publiées sur ce blogue sont accessibles ici > B.D.

Chemin de Croix pour honorer les Saintes Plaies de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

nika

       Au vendredi de la troisième semaine de carême, d’anciennes traditions liturgiques placent la possibilité de célébrer une fête des Cinq Plaies de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

   Nous avons déjà publié dans les pages de ce blogue le « Chapelet des Saintes Plaies » (ici > chapelet des Saintes Plaies), et une notice concernant la vie de la sainte Visitandine, Sœur Marie-Marthe Chambon qui a reçu de Notre-Seigneur des révélations concernant les bienfaits et les fruits spirituels de la dévotion aux Saintes Plaies (ici > Sœur Marie-Marthe Chambon).
Nous avons aussi déjà publié deux textes proposant des méditations pour le Chemin de la Croix : celui du chanoine Antoine Crozier intitulé « Chemin de Croix pour la France » (ici > Chemin de Croix pour la France) et celui écrit par notre Frère Maximilien-Marie (ici > méditation du Chemin de la Croix).
En rapport avec la dévotion aux Saintes Plaies de Notre-Seigneur, voici aujourd’hui un autre texte, court mais dense, que certains d’entre vous connaissent d’ailleurs peut-être déjà, et qu’il est toujours bon de reprendre comme support de notre prière des vendredis de carême…

Vitrail église St Jean de Montmartre

Vitrail central de l’abside de l’église Saint-Jean de Montmartre (Paris, place des Abbesses)
(oeuvre de Léon Tournel – 1906)

Chemin de Croix
pour honorer
les Saintes Plaies de Notre-Seigneur Jésus-Christ :

Prière préliminaire :

Pour donner plus de prix à nos faibles prières, nous nous adressons à Vous, très aimable Jésus Christ et nous vous supplions humblement : offrez Vous-même à Votre Père Eternel les Plaies Sacrées de Vos pieds, de Vos mains et de Votre côté ; offrez-Lui en même temps Votre Sang très précieux, Votre agonie et Votre mort.
Et vous aussi, Vierge Marie, Mère des douleurs, offrez-Lui avec la cruelle passion de votre Fils bien-aimé, vos soupirs, vos larmes et toutes les douleurs que vos souffrances vous ont causées, afin que, par leurs mérites, les âmes qui sont dans les flammes dévorantes du purgatoire obtiennent le rafraîchissement, que, délivrées de cette douloureuse prison, elles soient dans le Ciel, revêtues de la gloire et qu’elles y chantent à jamais les divines miséricordes. Ainsi soit-il. 

Sacré-Coeur gif

 1ère station : Jésus est condamné à mort.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies de Notre Seigneur Jésus Christ, flagellé, rejeté par son peuple et condamné à la mort cruelle et ignominieuse de la Croix pour expier les péchés du genre humain.
Par les mérites des Saintes Plaies de Jésus Christ, accordez-nous le pardon de nos péchés et faites que tous les agonisants trouvent miséricorde auprès de Vous.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

2ème station : Jésus est chargé de sa Croix.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies profondes et douloureuses de Jésus Christ couronné d’épines.
Par les mérites de ces Saintes Plaies, accordez-moi la contrition de mes péchés et la grâce d’accepter avec paix et douceur d’esprit, toutes les Croix qu’il Vous plaira de m’envoyer.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

3ème station : Jésus tombe sous le poids de sa Croix.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies de Notre Seigneur Jésus Christ, tombé sous le poids écrasant de sa Croix et je Vous prie, par les mérites de cette première chute et des Saintes Plaies de Jésus, de nous accorder la grâce de commencer une nouvelle vie de ferveur et d’amour et de marcher d’un pas ferme et constant dans la voie de Vos Saints commandements.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

4ème station : Jésus rencontre Sa Très Sainte Mère.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies de Notre Seigneur Jésus Christ qui transpercèrent d’un glaive de douleur le Cœur si aimant de Sa Très Sainte Mère lorsqu’elle Le rencontra, chargé de Sa Croix, sur le chemin du calvaire.
Par l’angoisse des Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie et par les mérites des Saintes Plaies de Jésus, accordez-nous la contrition parfaite de nos péchés, maintenant et à l’heure de la mort.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

5ème station : Simon le Cyrénéen aide Jésus à porter Sa Croix.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies si profondes de Notre Seigneur Jésus Christ, qui L’épuisèrent de sang et de force, de sorte que Ses ennemis, malgré leur cruauté, furent obligés de Le décharger de Sa Croix et de Le faire aider par le Cyrénéen.
Par les mérites des Saintes Plaies de Jésus Christ et par Son épuisement total, accordez-nous le véritable esprit de pénitence et l’amour de la Croix.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

6ème station : Sainte Véronique essuie la Sainte face de Jésus.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies de la Sainte Face de Jésus Christ, qui Le rendirent semblable à un lépreux, sans forme ni beauté, ou, selon la parole du prophète : « comme un objet dont on se détourne ».
Par les mérites des Saintes Plaies de Jésus Christ, purifiez, je Vous en supplie, la face de mon âme et donnez-moi, comme à Sainte Véronique, un cœur bon et compatissant pour le prochain.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

7ème station : Jésus tombe pour la deuxième fois.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies de Notre Seigneur Jésus Christ rouvertes et avivées par ses chutes réitérées.
Par les mérites de cette deuxième chute si douloureuse et des Saintes Plaies de Jésus, préservez-moi de la rechute dans le péché, et accordez-moi la grâce de mettre en pratique des moyens efficaces pour me corriger de mes défauts et de mes mauvaises habitudes.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

8ème station : Jésus console les filles de Jérusalem.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies de Notre Seigneur Jésus Christ qui émurent de pitié les pieuses femmes de Jérusalem, pleurant de compassion de Le voir si maltraité et si défiguré.
Au Nom des Saintes Plaies de Jésus, jetez un regard de miséricorde sur les enfants d’Israël, afin que, reconnaissant leur Divin Messie, ils aient part au grand bienfait de la rédemption et deviennent de zélés apôtres du Christ.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

9ème station : Jésus tombe une troisième fois.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies de Notre Seigneur Jésus Christ, aggravées et élargies par la violence de cette chute si douloureuse qui excita la colère et les moqueries de ses ennemis.
Par les mérites de cette troisième chute et des Saintes Plaies de Jésus Christ, préservez-nous de l’aveuglement spirituel, et accordez à tous Vos prêtres et à Vos religieux et religieuses la grâce de marcher d’un pas ferme et constant dans le chemin de l’abnégation et du renoncement à soi-même.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

10ème station : Jésus est dépouillé de Ses vêtements.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies béantes du Corps Sacré de Jésus Christ, tout ruisselant de sang, après avoir été inhumainement dépouillé de Ses vêtements qui étaient collés à Ses chairs.
Par les mérites des Saintes Plaies de Jésus et de la confusion dont il était couvert, accordez-moi la sainte humilité et un complet détachement de moi-même.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

11ème station : Jésus est cloué à la Croix.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies des mains et des pieds de notre Divin Sauveur et la douleur de sa tête adorable qui, à chaque coup de marteau, bondit et retombe durement contre le bois de la Croix.
Par les mérites des douleurs indicibles de Jésus et par Ses Saintes Plaies, transpercez d’un rayon de votre grâce les cœurs endurcis des infidèles et des pécheurs obstinés, et amenez-les, contrits et humiliés, au pied de la croix de Votre Fils bien-aimé.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

12ème station : Jésus meurt sur la Croix.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre, en réparation des péchés du monde, les Plaies Sacrées de Votre Fils bien-aimé, agonisant sur la Croix, les tortures lancinantes de Sa tête adorable, couronnée d’épines, de Ses mains et de Ses pieds transpercés de gros clous, et de tout Son corps en proie à des souffrances indicibles.
Au Nom et par les Saintes Plaies de Jésus, délivrez, nous Vous en supplions, les Saintes âmes du purgatoire, faites miséricorde aux âmes agonisantes, et ensevelissez tous nos péchés dans l’abîme sans fond de Votre divine miséricorde.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

13ème station : Jésus est remis à Sa Très Sainte Mère.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies de Notre Seigneur Jésus Christ, déposé dans les bras de Sa Très Sainte Mère.
O Reine des martyrs, imprimez dans mon cœur les plaies de Jésus Crucifié. Apprenez-moi à méditer comme vous Sa sainte couronne d’épines, Ses mains et Ses pieds transpercés, Son côté ouvert par la lance et tout Son corps labouré par les fouets de la flagellation.
Par les mérites des Saintes Plaies de Jésus, obtenez-nous, ô Mère Bien-aimée, la contrition parfaite de nos péchés maintenant et à l’heure de la mort.

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

14ème station : Jésus est déposé dans le tombeau.

V./ : Nous Vous adorons, ô Christ, et nous Vous bénissons.
R./ : Parce que Vous avez racheté le monde par Votre Sainte Croix.

Père Eternel, je Vous offre les Plaies du corps sacré de Jésus, dans le sépulcre, de ce corps dont le prophète Isaïe nous dit que « de la plante des pieds jusqu’au sommet de la tête, il n’y avait plus rien de sain en Lui… Ce n’était que blessures, meurtrissures, plaies vives qui n’ont pas été pansées, ni bandées, ni adoucies avec de l’huile ».
Par les mérites des Saintes Plaies de Jésus, ayez pitié de mon âme lorsqu’elle se séparera de mon corps. Ne soyez pas alors mon Juge mais mon Sauveur !

V./ : Mon Jésus, pardon et miséricorde.
R./ : Par les mérites de Vos Saintes Plaies.

Sacré-Coeur de Jésus.jpg

Oraison de la Messe des Cinq Plaies de Notre-Seigneur :

O Dieu qui, par la Passion de Votre Fils unique, et par l’effusion de Son Sang découlant de Ses cinq plaies, avez rétabli la nature humaine perdue par le péché, faites, nous Vous en supplions, qu’en vénérant ici-bas les plaies qu’Il a reçues pour nous, nous méritions de recueillir dans le ciel le fruit de ce même Sang très précieux. Nous Vous le demandons par ce même Jésus-Christ Notre-Seigneur, Votre fils, qui vit et règne avec Vous, dans l’unité du Saint-Esprit, pour les siècles des siècles. Ainsi soit-il !

Piéta de Villeneuve les Avignon par Enguerrand Quarton (XVème siècle)

2014-33. Ô Annonciation miraculeuse !

25 mars,
Fête de l’Annonciation de la Bienheureuse Vierge Marie.
C’est aussi aujourd’hui l’anniversaire du miracle de « l’osier sanglant » (25 mars 1649).

Annonciation Charles Poerson

Charles Poerson : l’Annonciation (1651-1652)

Sermon de notre glorieux Père Saint Augustin
sur
l’Annonciation.

§ 1 – Joie de l’Eglise qui célèbre le mystère de l’Incarnation.

   Le Verbe éternel Se faisant homme, et daignant habiter parmi les hommes, tel est le grand mystère que célèbre aujourd’hui l’Église universelle, et dont elle salue chaque année le retour par des transports de joie.
Après l’avoir une première fois reçu pour sa propre rédemption, le monde fidèle en a consacré le souvenir de génération en génération, afin de perpétuer l’heureuse substitution de la vie nouvelle à la vie ancienne. Maintenant donc, lorsque le miracle depuis longtemps accompli nous est remis annuellement sous les yeux dans le texte des divines Écritures, notre dévotion s’enflamme et s’exhale en chants de triomphe et de joie.

§ 2 – La salutation de l’ange Gabriel.

   Le saint Évangile que nous lisions nous rappelait que l’archange Gabriel a été envoyé du ciel par le Seigneur pour annoncer à Marie qu’elle serait la mère du Sauveur.
L’humble Vierge priait, silencieuse et cachée aux regards des mortels ; l’ange lui parla en ces termes : « Je vous salue, Marie, » dit-il, « je vous salue, pleine de grâce, le Seigneur est avec vous » (Luc I, 28).
Ô annonciation miraculeuse ! ô salutation céleste, apportant la plénitude de la grâce et illuminant ce cœur virginal !
L’ange était descendu porté sur ses ailes de feu et inondant de clartés divines la demeure et l’esprit de Marie. Député par le Juge suprême et chargé de préparer à son Maître une demeure digne de Lui, l’ange, éblouissant d’une douce clarté, pénètre dans ce sanctuaire de la virginité, rigoureusement fermé aux regards de la terre : « Je vous salue, Marie, » dit-il, « je vous salue, pleine de grâce, le Seigneur est avec vous » ; Celui qui vous a créée vous a prédestinée ; Celui que vous devez enfanter vous a remplie de Ses dons.

§ 3 – Trouble et inquiétude de la Vierge.

   A l’aspect de l’ange, la Vierge se trouble et se demande quelle peut être cette bénédiction. Dans son silence humble et modeste, elle se rappelle le vœu qu’elle a formé, et, jusque-là, tout à fait étrangère au langage d’un homme, elle se trouble devant un tel salut, elle est saisie de stupeur devant un tel langage, et n’ose d’abord répondre au céleste envoyé.
Plongée dans l’étonnement, elle se demandait à elle-même d’où pouvait lui venir une telle bénédiction. Longtemps elle roula ces pensées dans son esprit, oubliant presque la présence de l’ange que lui rappelaient à peine quelques regards fugitifs attirés par l’éclat de l’envoyé céleste. Elle hésitait donc et s’obstinait dans son silence ; mais l’ambassadeur de la Sainte Trinité, le messager des secrets célestes, le glorieux archange Gabriel, la contemplant de nouveau, lui dit : « Ne craignez pas, Marie, car vous avez trouvé grâce devant Dieu ; voici que vous concevrez et enfanterez un fils, et vous le nommerez Jésus. Il sera grand et sera appelé le Fils du Très-Haut, et le Seigneur Dieu Lui donnera le trône de David Son père ; Il régnera éternellement sur la maison de Jacob, et Son règne n’aura pas de fin » (Luc I, 30-31).
Alors Marie, pesant sérieusement ces paroles de l’ange et les rapprochant de son vœu de virginité perpétuelle, s’écria : « Comment ce que vous me dites pourra-t-il se réaliser, puisque je ne connais point d’homme ? » Aurai-je un fils, moi qui ne connais point d’homme ? Porterai-je un fruit, moi qui repousse l’enfantement ? Comment pourrai-je engendrer ce que je n’ai point conçu ? De mon sein aride, comment pourrai-je allaiter un fils, puisque jamais l’amour humain n’est entré dans mon cœur et n’a pu me toucher.

§ 4 – Marie concevra en demeurant vierge.

   L’ange répliqua : « Il n’en est point ainsi, Marie, il n’en est point ainsi ; ne craignez rien ; que l’intégrité de votre vertu ne vous cause aucune alarme ; vous resterez vierge et vous vous réjouirez d’être mère ; vous ne connaîtrez point le mariage, et un fils fera votre joie ; vous n’aurez aucun contact avec un homme mortel, et vous deviendrez l’épouse du Très-Haut, puisque vous mettrez au monde le Fils de Dieu. Joseph, cet homme chaste et juste, qui est pour vous, non point un mari mais un protecteur, ne vous portera aucune atteinte ; mais « l’Esprit-Saint surviendra en vous », et, sans qu’il s’agisse ici d’un époux et d’affections charnelles, « la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre : voilà pourquoi le Saint qui naîtra de vous sera appelé le Fils de Dieu ».
Ô séjour digne de Dieu ! Avant que l’ange ne lui eût fait connaître clairement le Fils qui lui était promis au nom du Ciel, Marie ne laissa échapper de ses lèvres pudiques aucune parole d’assentiment.

§ 5 – Marie donne son assentiment au mystère – Saint Augustin l’illustre par de nombreuses citations des livres sacrés.

   Mais dès qu’elle sut que sa virginité ne subirait aucune atteinte, dès qu’elle en reçut l’attestation solennelle, faisant de son cœur un sanctuaire digne de la Divinité, elle répondit : « Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole ». Comme si elle eût dit : « Mon cœur est prêt, ô Dieu, mon cœur est prêt », puisque mon sein doit rester intact. « Qu’il me soit fait selon votre parole », ô glorieux archange Gabriel ; qu’il vienne dans sa demeure, « Celui qui a placé sa tente dans le soleil » (Ps. XVIII, 6). Puisque je dois demeurer vierge, « que le Soleil de justice Se lève en moi » (cf. Mal. IV, 2) sous Ses rayons je conserverai ma blancheur, et la fleur de mon intégrité s’épanouira dans une chasteté perpétuelle. « Que le juste sorte dans toute Sa splendeur » (Is. LVI, 1), et que le Sauveur brille « comme un flambeau » (Eccli. XLVIII, 1). Le flambeau du soleil illumine l’univers ; il pénètre ce qui semble vouloir lui faire obstacle, et il n’en jette pas moins ses flots de lumière. Qu’il apparaisse donc aux yeux des hommes « le plus beau des enfants des hommes » ; « qu’Il S’avance comme un époux sort du lit nuptial » (Ps. XLIV, 3) » ; car maintenant je suis assurée de persévérer dans mon dessein.

§ 6 – La génération du Christ Rédempteur est un ineffable mystère.

   Quelle parole humaine pourrait raconter cette génération ? Quelle éloquence serait suffisante pour l’expliquer ?
Les droits de la virginité et de la nature sont conservés intacts, et un fils se forme dans les entrailles d’une vierge. Lorsque les temps furent accomplis, le ciel et la terre purent contempler cet enfantement sacré auquel toute paternité humaine était restée complétement étrangère. Telle est cette ineffable union nuptiale du Verbe et de la chair, de Dieu et de l’homme. C’est ainsi qu’entre Dieu et l’homme a été formé « le Médiateur de Dieu et des hommes, un homme, le Christ Jésus » (1 Tim. II, 5).
Ce lit nuptial divinement choisi, c’est le sein d’une Vierge. Car le Créateur du monde venant dans le monde, sans aucune coopération du monde, et pour racheter le monde de toutes les iniquités qui le souillaient, devait sortir du sein le plus pur et entourer Sa naissance d’un miracle plus grand que le miracle même de la création. Car, comme le dit lui-même le Fils de Dieu et de l’homme, le Fils de l’homme est venu « non point pour juger le monde, mais pour le sauver » (Jean XII, 47).

§ 7 – C’est en raison de son humilité que Marie est devenue mère de Dieu.

   Ô vous, Mère du Saint des Saints, qui avez semé dans le sein de l’Église le parfum de la fleur maternelle et la blancheur du lis des vallées, en dehors de toutes les lois de la génération et de toute intervention purement humaine ; dites-moi, je vous prie, ô Mère unique, de quelle manière, par quel moyen la Divinité a formé dans votre sein ce Fils dont Dieu seul est le Père.
Au nom de ce Dieu qui vous a faite digne de Lui donner naissance à votre tour, dites-moi, qu’avez-vous fait de bien ? Quelle grande récompense avez-vous obtenue ? Sur quelles puissances vous êtes-vous appuyée ? Quels protecteurs sont intervenus ? A quels suffrages avez-vous eu recours ? Quel sentiment ou quelle pensée vous a mérité de parvenir à tant de grandeur ?
La vertu et la sagesse du Père « qui atteint d’une extrémité à l’autre avec force et qui dispose toutes choses avec suavité » (Sages. VIII, 1), le Verbe demeurant tout entier partout, et venant dans votre sein sans y subir aucun changement, a regardé votre chasteté dont Il S’est fait un pavillon, dans lequel Il est entré sans y porter atteinte et d’où Il est sorti en y mettant le sceau de la perfection.
Dites-moi donc comment vous êtes parvenue à cet heureux état ?
Et Marie de répondre : Vous me demandez quel présent m’a mérité de devenir la mère de mon Créateur ? J’ai offert ma virginité, et cette offrande n’était pas de moi, mais de l’Auteur de tout bien ; « car tout don excellent et parfait nous vient du Père des lumières » (Jac. I, 17). Toute mon ambition, c’est mon humilité ; voilà pourquoi « mon âme exalte le Seigneur, et mon esprit a tressailli en Dieu mon Sauveur » (Luc I, 47) ; car Il a regardé, non pas ma tunique garnie de nœuds d’or, non pas ma chevelure pompeusement ornée et jetant l’éclat de l’or, non pas les pierres précieuses, les perles et les diamants suspendus à mes oreilles, non pas la beauté de mon visage trompeusement fardé ; mais « Il a regardé l’humilité de Sa servante ».

§ 8 – Douceur et humilité du Verbe Incarné.

   Le Verbe est venu plein de douceur à Son humble servante, selon l’oracle du Prophète : « Gardez-vous de craindre, fille de Sion. Voici venir à vous votre Roi plein de douceur et de bonté, assis sur un léger nuage » (Is. LXII, 11 & Zach. IX, 9 ; Is. XIX, 1 ; Matth. XXI, 5).
Quel est ce léger nuage ? C’est la Vierge Marie dont Il S’est fait une Mère sans égale. Il est donc venu plein de douceur, reposant sur l’esprit maternel, humble, « calme et craignant Ses paroles » (Is. XLVI, 1). Il est venu plein de douceur, remplissant les cieux, S’abaissant parmi les humbles pour arriver aux superbes, ne quittant pas les cieux et présentant Ses propres humiliations pour guérir avec une mansuétude toute divine ceux qu’oppressent les gonflements de l’orgueil.
Ô profonde humilité ! « Ô grandeur infinie des trésors de la sagesse et de la science de Dieu ; que les jugements de Dieu sont incompréhensibles et Ses voies impénétrables » (Rom. XI, 33).

§ 9 – Par Son Incarnation le Fils de Dieu vient accomplir des merveilles en faveur des hommes.

   Le pain des Anges est allaité par les mamelles d’une mère ; la source d’eau vive jaillissant jusqu’à la vie éternelle demande à boire à la Samaritaine, figure de l’Église ; Il ne refuse pas de manger avec les publicains et les pécheurs, Lui que les Anges au ciel servent dans la crainte et la terreur. Le Roi des rois a rendu à la santé le fils de l’officier, sans employer aucun remède et par la seule efficacité de Sa parole. Il guérit le serviteur du centurion et loue la foi de ce dernier, parce qu’il a cru que le Seigneur commande à la maladie et à la mort comme lui-même commandait à ses soldats. Quelque cruelles que fussent les souffrances de la paralysie, il en trouva la guérison infaillible dans la visite miséricordieuse de Jésus-Christ. Une femme affligée depuis de longues années d’une perte de sang qui faisait de ses membres une source de corruption, s’approche avec foi du Sauveur qui sent aussitôt une vertu s’échapper de Lui et opérer une guérison parfaite.
Mais comment rappeler tant de prodiges ? Le temps nous manque pour énumérer tous ces miracles inspirés à notre Dieu par Sa puissance infinie et Sa bonté sans limite.
Abaissant Sa grandeur devant notre petitesse et Son humilité devant notre orgueil, Il est descendu plein de piété, et, nouveau venu dans le monde, Il a semé dans le monde des prodiges nouveaux.

§ 10 – Par Son Incarnation, le Christ est le tétramorphe qui avait été prophétisé : explication des figures de l’homme, du lion, du bœuf et de l’aigle.

   C’est Lui que les évangélistes nous dépeignent sous différentes figures : l’homme, le lion, le bœuf et l’aigle.
Homme, Il est né d’une Vierge sans le concours de l’homme ; lion, Il S’est précipité courageusement sur la mort et S’est élevé sur la croix par Sa propre vertu ; bœuf, Il a été volontairement immolé dans Sa passion pour les péchés du peuple ; et comme un aigle hardi, Il a repris Son corps, est sorti du tombeau, a fait de l’air le marchepied de sa gloire, « est monté au-dessus des chérubins, prenant Son vol sur les ailes des vents », et maintenant Il siège au ciel, et c’est à Lui qu’appartiennent l’honneur et la gloire dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

frise avec lys naturel

2014-30. Si le jeûne nous impose des sacrifices, il profite d’autant à notre salut.

Samedi après les Cendres.

Sermon de
notre glorieux Père Saint Augustin

pour le carême :

       Nous avons sans cesse besoin d’approfondir la richesse spirituelle du temps du carême, et de nous motiver à une observance fructueuse de la pénitence et du jeûne.
Voici ci-dessous un sermon de notre glorieux Père Saint Augustin bien propre à stimuler notre ferveur et notre générosité.

Moretto da Brescia vers1540

Le Christ au désert (Moretto da Brescia – vers 1540)

§1 - Le carême est le temps du jeûne, et le Christ Lui-même nous en a donné l’exemple, car c’est par l’abstinence que l’homme peut recouvrer ce que lui a fait perdre l’intempérance. 

   « Voici le temps favorable, voici les jours de salut » (2 Cor. VI, 2).
Mes frères, voici les jours où, par les macérations corporelles, nous opérons le salut de nos âmes. Sans doute, nous y mortifions l’homme extérieur, mais aussi nous y vivifions l’homme intérieur. Le jeûne est, en effet, comme la nourriture de notre âme ; car s’il nous impose des sacrifices, il profite d’autant à notre salut. Entre autres exemples de sanctification, notre Seigneur et Dieu, Jésus-Christ, nous a donné celui du jeûne et du carême ; Il a même indiqué le nombre de jours qu’il doit durer, puisqu’Il a jeûné pendant quarante jours. C’est donc Lui qui est l’auteur de ton jeûne, comme Il sera plus tard le rémunérateur de tes mortifications.
Le Rédempteur a donc jeûné l’espace de quarante jours ; il est, néanmoins, de toute évidence, qu’Il n’avait commis aucun péché et qu’Il n’avait rien à craindre. Or, si le Dieu qui était à l’abri de toute erreur S’est dévoué à cet acte de pénitence, combien devient-il plus nécessaire à l’homme de s’y soumettre, puisqu’il est si exposé à se tromper ! Et si de telles macérations ont été imposées à un innocent, avec combien plus de justice ne peut-on pas les exiger d’un coupable ? En goûtant du fruit de l’arbre, en violant la loi du jeûne à laquelle il avait été soumis, Adam, le chef du genre humain, est devenu maître ès péchés, après avoir été le maître du paradis, et, comme conséquence de sa prévarication, la mort a jeté jusque sur nous son aiguillon.
Quiconque désire vivre, doit donc aimer l’abstinence ; car, vous le savez, c’est en convoitant des aliments que l’homme s’est condamné à mourir : et le rusé serpent, qui a séduit nos premiers parents en les excitant à la gourmandise, ne s’est-il pas approché du Sauveur, au moment de son jeûne, pour le tenter ? Est-ce qu’il n’ose pas tout, cet audacieux ?
Mais en observant le jeûne, le Seigneur a confondu cet antique ennemi de l’homme, le nouvel Adam a repoussé le vainqueur du vieil Adam. Oh ! l’admirable pouvoir de l’abstinence ! Par le jeûne, elle triomphe du diable, à qui la gourmandise a donné jadis la victoire.

Boticelli tentations détail (chapelle sixtine)

Boticelli : les tentations du Christ au désert, détail (chapelle Sixtine)

§ 2. L’exemple du jeûne de Moïse auquel s’oppose l’intempérance du peuple dans le désert.

   On dit que Moise a de même observé un jeûne de quarante jours avant de recevoir la loi de Dieu. C’est le jeûne qui obtient la faveur des commandements divins et la grâce de les observer. Moïse s’est privé d’entretiens avec Dieu, mais il a joui de sa présence ; le peuple, au contraire, en s’adonnant aux excès du boire et du manger, s’est précipité dans le culte des faux dieux, et parce qu’il n’avait cherché qu’à se rassasier, il ne chercha plus qu’à pratiquer les superstitions des Gentils.

§3. Avantages et utilité du jeûne. 

   Nous venons de vous le démontrer, non-seulement Jésus-Christ, mais Moïse, mais plusieurs autres, nous ont donné l’exemple du jeûne ; voyons maintenant quels en sont les avantages et l’utilité.
Le Sauveur parle du diable à ses disciples, et leur dit : « Ces démons et ne peuvent être chassés que par le jeûne et la prière » (Marc, IX, 28). Ce possédé du diable, que les Apôtres ne pouvaient délivrer, Jésus déclare que le jeûne était capable de le rendre à lui-même ; c’est pour nous le seul moyen de nous grandir par la pratique des vertus.
Voyez donc, mes frères, quelle force est celle du jeûne, quelles grâces précieuses il peut procurer aux hommes, puisqu’il peut même servir de remède à d’autres ! Voyez comme il sanctifie celui qui l’observe personnellement, puisqu’il est si propre à purifier ceux-là mêmes qui ne l’observent pas ! C’est chose vraiment admirable, mes frères, que les mortifications de l’un deviennent profitables à l’autre.

Distribution d'aumônes

Distribution de vêtements aux nécessiteux
(détail des « Sept oeuvres de miséricorde » – Maître de Alkmaar, 1504)

§ 4. La perfection du jeûne n’est pas dans une observance formelle mais elle se réalise dans la pratique de la charité envers les nécessiteux.

   Toutefois, n’allez pas vous imaginer qu’en mettant en pratique le jeûne, auquel vous vous croyez maintenant obligés, vous n’en avez pas d’autre à accomplir.
Il en est un autre, bien plus parfait : c’est celui qui s’observe dans le secret du coeur ; et il est d’autant plus agréable à Dieu, qu’il échappe davantage aux regards des hommes. Ce jeûne consiste à s’abstenir de toutes les convoitises que la chair soulève en nous contre l’esprit. C’est peu de nous priver d’aliments, si nous nous accordons les plaisirs du vice ; ce n’est pas assez de nous tenir en garde contre la gourmandise, il faut encore nous mettre à l’abri de l’avarice, en nous montrant généreux à l’égard des pauvres. A quoi bon nous montrer sévères en fait de nourriture, si nous nous laissons encore aller à des disputes et que nous soyons indulgents pour notre caractère emporté ?
Par conséquent, mettons un frein à notre intempérance de paroles, comme nous en mettons à notre intempérance de bouche. Evitons avec soin les dissensions, les rixes, les iniquités, afin que ne s’applique pas à nous cette parole du Prophète : « Ce jeûne », dit le Seigneur, « n’est pas celui de mon choix : romps plutôt les liens de l’iniquité, détruis les titres d’échanges forcés, remets leurs dettes à ceux qui en sont écrasés, déchire tout contrat injuste. Partage ton pain avec celui qui a faim, fais entrer dans ta maison celui qui n’a pas d’abri. Lorsque tu vois un homme nu, couvre-le et ne méprise point la chair dont tu es formé. Alors ta lumière brillera comme l’aurore, et je te rendrai aussitôt la santé, et ta justice marchera devant toi, et tu seras environné de la gloire du Seigneur. Alors tu invoqueras le Seigneur, et il t’exaucera; à ton premier cri, le Seigneur répondra : Me voici » (Isaïe, LVIII, 6-9).
Vous le voyez, mes très-chers frères, voilà le jeûne que le Seigneur a choisi ; voilà la récompense promise par lui aux observateurs de ce jeûne : « Partage ton pain avec celui qui a faim, fais entrer dans ta maison celui qui n’a pas d’abri ». Telle est donc la nature du jeûne qui plaît à Dieu : c’est que, pendant ces jours, tu donnes aux indigents ce que tu te retranches ; car il est digne d’une âme religieuse et croyante d’observer l’abstinence au profit, non pas de l’avarice, mais de la charité. Ne seras-tu pas largement récompensé de tes sacrifices, si ton jeûne sert à procurer à autrui la tranquillité ?

Donner à manger aux affamés

Distribution de nourriture aux pauvres
(détail des « Sept oeuvres de miséricorde » – Maître de Alkmaar, 1504)

Autres sermons de Saint Augustin consacrés au carême et à la pénitence :
– Sur l’obligation de faire pénitence > ici
– Deux sermons sur le jeûne (sa nécessité & l’esprit qui doit l’animer) > ici
– Sur la Passion et les deux larrons > ici

Prière pour demander des grâces par l’intercession du Vénérable Pie XII

et
pour obtenir la glorification de ce grand serviteur de Dieu :

Sa Sainteté Pie XII donnant la bénédiction Urbi et Orbi

Sa Sainteté le Pape Pie XII
donnant la bénédiction Urbi et Orbi.

   O Jésus, Pontife éternel, qui avez daigné élever Votre Serviteur fidèle Pie XII à la suprême dignité de Votre Vicaire ici-bas, et lui avez concédé la grâce d’être un défenseur intrépide de la Foi, un courageux champion de la justice et de la paix, un glorificateur zélé de Votre très Sainte Mère, et un exemple lumineux de charité et de toutes les vertus, daignez maintenant, en vue de ses mérites, nous accorder les grâces que nous Vous demandons (…), afin que, assurés de son efficace intercession auprès de Vous, nous puissions le voir un jour élevé à la gloire des autels.

Ainsi soit-il !

Imprimatur
+ Petrus Canisius
Vic. Gen. Civit. Vatic.
die 8 decembris 1958

Armoiries et devise de Pie XII

Armoiries et devise de Sa Sainteté le Pape Pie XII

2014-27. A l’approche du carême, quelques rappels importants…

Mercredi de la Sexagésime.

Brueghel bataille du carnaval et du carême

Pierre Brueghel le jeune : la bataille de carnaval et du carême

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Le compte à rebours a commencé : dans une semaine nous serons à l’entrée du carême, à l’entrée de ce temps particulièrement saint et bénit qui – prélude au Triduum Sacré dans lequel nous revivrons le mystère actualisé de notre Rédemption, en célébrant la mort, la descente aux enfers et la résurrection de Notre-Seigneur Jésus-Christ – est l’un des moments les plus importants de toute l’année chrétienne.

   J’ai déjà eu l’occasion de le dire, et je le redis : je suis effrayé de constater que beaucoup de catholiques ne se préparent pas bien (voire pas du tout) au carême, et que – de ce fait – ils perdent totalement ou en partie le profit spirituel qu’ils pourraient retirer de ce temps de grâce.
Je suis aussi véritablement aterré lorsque certaines remarques ou réflexions que j’entends me donnent à comprendre que les prescriptions spirituelles, les prescriptions pénitentielles, les prescriptions disciplinaires imposées par l’Eglise à ses enfants, sont prises par eux à la légère ou de manière purement formelle, sans profondeur, sans qu’ils y attachent leur coeur et leur intelligence.

   Il y a quatre ans, j’avais publié un résumé réalisé par Frère Maximilien-Marie sous forme de questions et de réponses (ce pourquoi je l’avais intitulé « Petit catéchisme sur le carême et la pénitence »), expliquant en quoi consiste le carême, et quel esprit l’anime.
Ce texte est toujours valable ; il est conforme à la discipline actuellement en vigueur dans l’Eglise catholique latine. Aussi est-il toujours bon de le lire, et même de le relire à plusieurs reprises, à l’approche de ce temps (ici > petit catéchisme sur le carême).

   Mais il faut bien comprendre que les prescriptions actuelles concernant le jeûne et l’abstinence sont véritablement minimales, et qu’elles n’imposent pas de se contenter d’une pratique minimaliste !
Frère Maximilien-Marie écrivait : « Si dans l’Eglise latine la loi commune n’est plus aussi sévère que jadis, ce n’est cependant pas une invitation au laisser aller. La loi détermine le minimum obligatoire pour tous, mais elle n’oblige pas à se contenter du minimum. Il est donc louable, en fonction de la situation et des possibilités de chacun, de continuer à pratiquer une véritable ascèse alimentaire et une plus grande austérité de vie… »

Brueghel bataille détail=carnaval

Pierre Brueghel le jeune, détail de la bataille de carnaval et du carême :
Carnaval à califourchon sur un tonneau brandissant une broche de viandes grasses.

   Je le sais, je l’ai observé : beaucoup de catholiques n’observent pas l’abstinence des vendredis de carême. Or celle-ci est prescrite par la loi de l’Eglise – le droit canonique – , et c’est un péché de ne pas s’y plier !
Je sais également que certains, s’ils ne mangent pas de viande les vendredis de carême, en profitent alors pour se régaler avec un délicieux (et coûteux) plat de poisson ou de fruits de mer : c’est une manière de se conformer à la loi qui est uniquement extérieure, pharisaïque, et qui ne répond pas à l’esprit de pénitence et de conversion qui s’impose.
Il y en a qui sont convaincus que c’est faire beaucoup que de s’abstenir de viande les vendredis de carême, alors qu’en réalité ce n’est là qu’un minimum, et qu’il n’y a vraiment rien d’héroïque en cela.
Et je connais même des fidèles qui se disent traditionnels, qui vont à « la bonne Messe », et qui à l’occasion ne manquent pas de vitupérer contre le laxisme et le libéralisme qui se sont introduits dans l’Eglise depuis une cinquantaine d’années, mais qui se rendent eux-mêmes sans état d’âme à des dîners mondains organisés certains vendredis en carême, s’ils n’en sont pas eux-mêmes les organisateurs !

   « L’observance du Carême est le lien de notre milice ; c’est par elle que nous nous distinguons des ennemis de la Croix de Jésus-Christ ; par elle que nous détournons les fléaux de la divine colère ; par elle que, protégés du secours céleste durant le jour, nous nous fortifions contre les princes des ténèbres. Si cette observance vient à se relâcher, c’est au détriment de la gloire de Dieu, au déshonneur de la religion catholique, au péril des âmes chrétiennes ; et l’on ne doit pas douter que cette négligence ne devienne la source de malheurs pour les peuples, de désastres dans les affaires publiques et d’infortunes pour les particuliers », écrivait le pape Benoît XIV au XVIIIe siècle (Constitution « Non ambigimus » – mai 1741).
Ces lignes me paraissent terriblement actuelles : chacun ne doit-il pas s’interroger loyalement et sans complaisance pour se demander si – aujourd’hui – sa manière de pratiquer le carême n’est pas relâchée, si son observance n’est pas superficielle et ne contribue pas au déshonneur de la religion chrétienne, si son manque de générosité ne met pas en péril les âmes au salut desquelles il doit travailler, si sa négligence n’est pas responsable des malheurs actuels et des désastres publics de notre société, si – en vérité – il se comporte en ami ou en ennemi de la Croix de Jésus-Christ…

Brueghel bataille détail=carême

Pierre Brueghel le jeune, détail de la bataille de carnaval et du carême :
Carême et ses mets de jeûne.

   Voilà pourquoi j’ai résolu aujourd’hui, chers Amis, de rappeler ci-dessous ce qu’était la discipline du carême dans l’Eglise des origines, et la manière dont il a été observé pendant de nombreux siècles.
Après avoir lu cela, qui osera prétendre que s’abstenir de viande les vendredis de carême est quelque chose d’exorbitant ?
Après avoir lu cela, qui osera se plaindre des deux jours de jeûne actuellement obligatoires ?
Mais surtout, après avoir lu cela, je souhaiterais que chacun s’interroge sérieusement devant Dieu pour voir s’il ne peut pas faire davantage que le minimum requis !

* * * * * * *

Discipline originelle du carême chrétien :

Dans les premiers siècles de l’Eglise, donc, voici quelles étaient les prescriptions imposées à tous les fidèles sur le plan alimentaire :

1 – Tous les jours du carême étaient des jours de jeûne : c’est à dire qu’on ne pouvait prendre qu’un unique repas ; ce repas était, à l’origine, pris après l’office de Vêpres (célébré au coucher du soleil), mais progressivement il a été admis qu’il pourrait être pris en milieu de journée et que, le soir, on pourrait prendre une collation (ce qui ne constitue cependant pas un repas).

2 – Toutefois, les dimanches (et dans l’Eglise d’Orient les samedis aussi) n’étaient pas des jours de jeûne et l’on y prenait les repas de manière habituelle.

3 – Tous les jours du carême étaient des jours d’abstinence (même les dimanches).
En outre, l’abstinence ne se réduisait pas à la privation de viande, mais signifiait la privation de toute nourriture provenant du règne animal : c’est à dire que le poisson, les graisses animales, les fromages, le beurre et les laitages, ainsi que les oeufs étaient proscrits. C’était donc un régime strictement végétalien qui s’imposait pendant toute la durée du carême.
Restaient autorisés le miel et certaines huiles végétales. Le poisson (mais pas la viande ni les oeufs) pouvait être consommé seulement à certaines très grandes fêtes qui tombent pendant le carême, telle que l’Annonciation.

4 – Etaient également proscrits le vin et toute boisson alcoolisée.

   Il faut ajouter à cela que les époux chrétiens devaient s’abstenir de toutes relations conjugales et vivre la continence parfaite pendant tout le temps du carême (même les dimanches, car la loi primitive de l’Eglise n’autorisait jamais les rapports sexuels le jour consacré au Seigneur).
Pour les personnes non mariées, rien ne change puisqu’elles sont tenues à la chasteté en tout temps – carême ou pas – , faut-il le rappeler ?

   En ce qui concerne la vie sociale, jusqu’à une date relativement récente, dans les pays officiellement catholiques et pendant toute la durée du carême, tous les divertissements publics étaient suspendus : les salles de spectacles et de concerts, les théâtres (et les cinémas) étaient fermés, les bals interdits, les soirées mondaines et les réceptions prohibées…
Dans la première moitié du XXe siècle encore, même dans nos pays laïcisés où la loi civile ne prohibait plus les divertissements, les familles catholiques veillaient à ce que leurs enfants (même majeurs) n’allassent point au cinéma, au spectacle, au bal… etc.
En outre, on ne recevait pas à déjeuner ou à dîner, même les dimanches, sauf de très proches parents accueillis à la table de famille sans que l’on enfreigne en rien les strictes prescriptions de l’Eglise.

Pierre Brueghel le jeune, les sept oeuvres de miséricorde

Pierre Brueghel le jeune : les sept oeuvres de miséricorde.

   Cette pratique du jeûne et de la pénitence ne se sépare pas, bien évidemment, de celle des deux autres grands préceptes du carême : l’aumône et la prière.

- L’aumône résulte d’une part des économies que l’on réalise sur la nourriture pendant ce temps, et d’autre part des sacrifices que l’on s’impose en plus : il ne s’agit pas de donner son superflu, mais de se priver d’une part du nécessaire pour subvenir aux besoins des plus nécessiteux et d’y ajouter ce qui résulte d’une privation réelle.

- La prière : la prière personnelle quotidienne doit être plus intense, de jour et de nuit. Ainsi par exemple au Moyen-Age, mais cela a continué en beaucoup d’endroits jusqu’au temps de la sinistre révolution, beaucoup de laïcs profitaient du carême pour réciter, au moins en partie, le bréviaire ou pour aller assister aux offices des religieux dans les couvents et abbayes (qui étaient fort nombreux : il y en avait même dans les petites villes).
Mais la prière doit en outre avoir une dimension visible et sociale plus développée, pendant le carême. Les fidèles sont donc encouragés à avoir une plus grande assiduité aux offices paroissiaux, qui ne se résument pas seulement à la célébration de la Sainte Messe : il y a les prédications de carême (parfois quotidiennes), les processions de pénitence des confréries, les adorations du Très Saint Sacrement, la pratique de l’heure sainte (voir > ici), les chemins de croix (à Rome au XIXe siècle encore il était quotidien au Colisée, et pas uniquement les vendredis de carême).
On peut encore ajouter à cela des pèlerinages vers des sanctuaires dédiés à la Sainte Croix où à la Mère des Douleurs, des églises où sont conservées des reliques de la Passion, des chapelles où l’on invoque des saints qui ont été proches de Notre-Seigneur dans Sa sainte Passion (Sainte Marie-Magdeleine par exemple).

 

* * * * * * *

   Aujourd’hui, l’Orient chrétien (catholiques de rites orientaux et orthodoxes) est resté globalement fidèle à ces règles des origines, tandis que, on le voit bien, tout au long des siècles, l’Occident latin n’a cessé d’apporter des adoucissements, des mitigations aux observances physiques du carême.

   On m’objectera – et c’est une évidence que je ne conteste pas, bien au contraire – que le plus important, c’est la pratique spirituelle, la pénitence intérieure : mais c’est être manichéen, et c’est aussi faire une insulte aux chrétiens des premiers siècles, tout comme à nos frères chrétiens d’Orient, que d’opposer la pratique extérieure de la pénitence à une pratique spirituelle qui pourrait se passer du jeûne et de l’abstinence réels.
Les deux pratiques ne s’opposent pas, mais elles se complètent et se soutiennent l’une l’autre. Qui peut prétendre pratiquer la pénitence de manière spirituelle s’il ne la traduit pas dans des actes concrets et visibles ?

   Le jeûne et l’abstinence ne sont évidemment pas pratiqués comme une fin en eux-mêmes, ils sont cependant une nécessité qui découle de notre condition d’êtres en même temps spirituels et corporels.
Le christianisme n’est pas un idéalisme, il est la religion de l’Incarnation !

Ainsi, de même que notre corps contribue souvent à nous éloigner de Dieu et à nous entraîner au péché, de même encore doit-il participer à notre pénitence, à notre expiation du péché, à la réparation de nos transgressions, et à notre effort spirituel.

   Bien sûr, les adoucissements physiques qui ont été autorisés par l’Eglise, l’ont été parce que les tempéraments sont aujourd’hui moins résistants, moins endurants que ceux des chrétiens des premiers âges, et parce que l’Eglise ne veut ni la ruine de la santé ni la mort prématurée de ses enfants, tout comme elle ne veut pas que la pratique du jeûne empêche ou gêne l’accomplissement de son devoir d’état.
Mais – encore une fois – ne nous contentons pas du minimum, ne soyons pas des chrétiens minimalistes !
Chacun de nous peut, en fonction de ses forces, examiner loyalement devant Dieu, ce qu’il peut ajouter au minimum requis. Pour cela, il est bon de recourir à un conseiller spirituel prudent et avisé, doté d’un bon discernement : ce faisant, en outre, on pratique la vertu d’obéissance, qui est elle aussi un élément essentiel de la mortification spirituelle…

   Chers Amis, je n’ai pour finir qu’une seule chose à vous dire, à la suite de la Très Sainte Vierge Marie elle-même en ses multiples apparitions : soyez généreux pour pratiquer, de corps et d’esprit, une sérieuse pénitence authentiquement chrétienne !

Lully.

Pierre Brueghel le jeune, la Crucifixion

Pierre Brueghel le jeune : la Crucifixion.

2014-26. Quand la barque de l’Eglise est ballotée par la tempête et secouée par les épreuves…

Sermon de
notre glorieux Père Saint Augustin
sur
la barque dans la tempête
(Matth. XIV, 24-33)

la Navicella mosaïque d'après Giotto Vatican

La « Navicella » : mosaïque du narthex de la basilique vaticane, d’après Giotto.

Le 22 février, la fête de la Chaire de Saint Pierre à Antioche est une occasion très particulière qui nous est offerte de prier pour l’Eglise.

Afin de nourrir votre prière, votre réflexion et votre méditation, je vous propose, ci-dessous, un long mais très remarquable sermon dans lequel notre glorieux Père Saint Augustin commente le passage évangélique de barque des apôtres aux prises avec la tempête sur le lac (Matth. XIX, 24-33). 

On peut véritablement affirmer que ce sermon du grand évêque d’Hippone est revêtu d’un caractère prophétique : en s’attachant, en effet, à montrer de quelle manière cette péricope évangélique est annonciatrice des épreuves et des combats de l’Eglise dans le monde jusqu’à la fin des temps, Saint Augustin n’énonce pas seulement des vérités qui sont pour tous les temps, mais aussi des leçons fortes qui sont pour notre temps, le temps actuel de l’Eglise.

La dénonciation de l’hérésie négatrice de l’Incarnation du Verbe de Dieu n’est pas pour la seule époque où Saint Augustin devait combattre les manichéens et les docètes, mais s’applique aussi à cette époque-ci où une pseudo-religion conquérante nie que Dieu s’est fait chair et qu’il a réellement souffert sur la croix.
La dénonciation de ceux qui en prennent et en laissent dans les Saintes Ecritures, au gré de leurs interprétations personnelles, et qui – sous le prétexte de l’amour et de la miséricorde divins – nient la réalité de l’enfer et de la damnation, s’applique aussi à notre époque où tant de prétendus théologiens et de prêtres enseignent, à la remorque d’un chanteur de variété, qu’ « on ira tous au paradis ».
La dénonciation du péché, de tous nos péchés personnels liés à nos démissions et à nos manques de courage, à laquelle se livre Saint Augustin n’est pas moins importante, puisqu’elle fait ressortir que l’état général actuel de l’Eglise est lié à l’état de chacune des âmes qui la composent.
L’affirmation énergique selon laquelle la tempête qui s’acharne sur la barque n’est pas un motif valable pour quitter cette barque, est encore très actuelle : n’y en a-t-il pas beaucoup aujourd’hui qui s’autorisent des scandales et des faiblesses du « personnel » de l’Eglise pour justifier leur désertion voire leur apostasie ?
Les encouragements à la persévérance et à tenir bon dans l’espérance que Saint Augustin prodiguait à ses auditeurs du IVe siècle, sont eux aussi d’une pertinente actualité : à combien de tentations de découragement ne sont pas exposés les fidèles du XXIe siècle, affrontés au drame de la crise dans l’Eglise, et aux innombrables mesures vexatoires que déploient contre le christianisme la société civile et certains gouvernements ?
Enfin, les graves mises en garde que Saint Augustin énonçait, à l’attention de l’Eglise, à l’attention de Pierre, au sujet des éloges et des louanges qui viennent du monde, ne rendent-elles pas elles aussi un son particulièrement actuel ?
Quant aux exhortations à prier avec insistance et ferveur, pour notre salut et pour le triomphe de l’Eglise, leur actualité n’est pas à démontrer… 

Oui, ce long et beau sermon de notre glorieux Père Saint Augustin est véritablement prophétique,
et je ne puis que vous exhorter à le lire et à le méditer avec la plus grande attention !

Lully.

Tiare et clefs

§1. Saint Augustin commence par établir que la scène évangélique possède une signification spirituelle qui nous concerne tous.

La lecture de l’Évangile que nous venons d’entendre avertit l’humilité de chacun de nous de rechercher et de savoir où nous sommes, où nous devons tendre et nous empresser d’arriver.
Ne croyez pas en effet qu’il n’y a aucune signification relevée dans ce vaisseau qui portait les disciples et qui luttait sur les flots contre le vent contraire. Ce n’est pas sans motif non plus que, laissant la foule, le Seigneur gravit la montagne pour y prier seul, ni que, venant et marchant sur la mer, Il trouva Ses disciples en danger, les rassura en montant sur la barque et apaisa les vagues.

§2. Première explication : nous sommes tous des voyageurs et, dans les tempêtes de cette vie, le bois de la Croix nous permet de ne pas sombrer.

Faut-il s’étonner que Celui qui a tout créé puisse apaiser tout ? De plus, quand Il fut dans le vaisseau, les passagers vinrent à Lui en disant : « Vous êtes vraiment le Fils de Dieu ! ». Mais avant de le reconnaître avec tant d’éclat, ils s’étaient troublés en Le voyant sur la mer et avaient dit : « C’est un fantôme ! » Pour Lui, montant sur la barque, Il fit cesser l’incertitude de leurs coeurs, incertitude qui mettait plus leur âme en danger que les vagues n’y mettaient leur corps.
Il est bien vrai, le Seigneur, dans toutes ses actions, nous trace des règles de vie. Tous ne sont-ils pas étrangers dans ce siècle, quoique tous ne désirent pas leur retour dans la patrie ? Nous rencontrons dans le voyage des flots et des tempêtes ; il nous faut donc au moins un navire, et si, sur le navire même, nous courons des dangers, en dehors du navire notre perte serait certaine. Quelques vigoureux que soient les bras d’un homme qui nage, sur l’océan, il finit par être vaincu, entraîné et submergé dans les vastes abîmes. Afin donc de traverser cette mer, il nous faut être sur un navire, appuyés sur le bois. Et ce bois qui soutient notre faiblesse, est la croix même du Seigneur, dont nous sommes marqués et qui nous préserve des gouffres de ce monde. Les flots se soulèvent contre nous ; mais le Seigneur est Dieu, et Il nous vient en aide.

§3. Sens spirituel de la prière solitaire de Notre-Seigneur sur la montagne.

Si le Seigneur laisse la foule et va seul sur la montagne pour y prier, c’est que cette montagne figure le haut des cieux. Ainsi, en effet, le Sauveur après Sa Résurrection, laissa les hommes et monta seul au ciel, où Il intercède pour nous, comme le dit l’Apôtre (Rom. VIII, 34).
Il y a donc un mystère dans cet abandon de la multitude et cette ascension sur la montagne pour y prier solitaire. Seul, encore aujourd’hui, Il est le premier-né d’entre les morts et, depuis Sa Résurrection, placé à la droite de Son Père pour y être notre pontife et l’appui de nos supplications. Ainsi le Chef de l’Église est élevé, afin que tous Ses membres Le suivent jusqu’au terme suprême ; et s’Il va pour prier au sommet de la montagne, c’est qu’élevé au dessus des plus nobles créatures, Il prie réellement seul.

§4. La barque affrontée à la tempête représente l’Eglise que le diable veut faire sombrer. Néanmoins, quelque forte que soit la tempête, il ne faut pas quitter la barque, et il ne faut pas cesser d’implorer l’assistance divine, puisque Dieu.

Cependant le navire qui porte les disciples, ou l’Église, est ballotté par la tempête et secoué par les tentations. Le vent contraire ne cesse pas, parce que le diable, son ennemi, travaille à l’empêcher de parvenir au repos.
Mais notre Intercesseur l’emporte ; car au milieu des secousses qui nous tourmentent, Il nous inspire confiance,  en venant à nous et en nous fortifiant. Ayons soin seulement de ne pas nous troubler, sur le vaisseau, de ne pas nous renverser ni de nous jeter à la mer. Le vaisseau peut s’agiter ; mais c’est un vaisseau, un vaisseau qui seul porte les disciples et reçoit le Christ. Il est exposé sur les vagues ; sans lui néanmoins la mort serait prompte. Reste donc dans ce vaisseau, et prie Dieu.
Lorsqu’on ne sait plus que faire, lorsque le gouvernail ne peut plus diriger et que le déploiement des voiles contribue à accroître le danger plutôt que de pourvoir au salut, on laisse de côté tous les moyens et toutes les forces humains, et les nautonniers n’ont plus d’autre soin que de prier Dieu et d’élever la voix jusqu’à Lui.
Or Celui qui donne aux navigateurs ordinaires d’arriver au port, laissera-t-Il Son Église sans la mettre en repos ?

§5. Ce qui signifie l’absence du Seigneur : ce n’est pas Lui qui se retire, c’est nous qui nous refusons à Sa Lumière.

Cependant, mes frères, les grandes secousses qu’éprouve ce navire ne se font sentir qu’en l’absence du Seigneur.
Quoi ? Le Seigneur peut-il être absent pour qui est dans l’Église ?
Quand arrive cette absence ?
Quand on est vaincu par quelque passion. Il est dit quelque part, et on peut l’entendre d’une façon mystérieuse : « Que le soleil ne se couche pas sur votre colère, et ne donnez point lieu au diable » (Ephés. IV, 28-27). Ceci s’entend non pas de ce soleil, qui paraît si grand parmi les corps célestes et qui peut-être regardé par les animaux comme par nous ; mais de cette lumière que peuvent contempler les coeurs purs des fidèles seulement, ainsi qu’il est écrit : « Il était la Lumière véritable qui éclaire tout homme venant en ce monde » (Jean, I, 9) ; au lieu que la lumière de ce visible soleil éclaire aussi les plus petits et les derniers des insectes.
La Lumière véritable est donc celle de la justice et de la sagesse ; l’esprit cesse de la voir lorsque le trouble de la colère l’offusque comme d’un nuage, et c’est alors que le soleil se couche sur la colère.
C’est ainsi qu’en l’absence du Christ, chacun sur ce navire est battu par la tempête, par les péchés et les passions auxquelles il s’abandonne.
La loi dit par exemple : « Tu ne feras point de faux témoignage » (Exod. XX, 16). Si tu es attentif à la vérité qui réclame ta déposition, la lumière brille dans ton esprit ; mais si entraîné par la passion d’un gain honteux, tu te détermines intérieurement à rendre un faux témoignage, tu vas être, en l’absence du Christ, battu par la tempête, emporté par les vagues de ton avarice, exposé aux tourments de tes passions, et, toujours en l’absence du Christ, sur le point d’être submergé.

§6. Ne pas s’abandonner au péché, pour ne pas souffrir de l’absence du Christ et ne pas être vulnérable dans la tempête.

Qu’il est à craindre que ce vaisseau ne se retourne et ne regarde en arrière ! C’est ce qui arrive lorsque, renonçant à l’espoir des célestes récompenses, on se laisse aller à la remorque de ses passions pour s’attacher aux choses qui se voient et qui passent.
Il ne faut pas désespérer si fort de celui que troublent les tentations et qui néanmoins tient le regard attaché sur les choses invisibles, demandant pardon de ses péchés et s’appliquant à dompter et à traverser les flots courroucés de la mer.
Mais celui qui s’oublie jusqu’a dire dans son coeur : « Dieu ne me voit pas ; Il ne pense pas à moi et ne se soucie point si je pèche », celui-là tourne la proue de son vaisseau, se laisse aller à l’orage et emporter d’où il venait.
Combien effectivement sont nombreuses les pensées qui s’élèvent dans le coeur de l’homme ! Aussi quand le Christ n’y est plus, les flots du siècle et des tempêtes sans cesse renaissantes se disputent son navire.

§7. Sens mystique de la quatrième veille de la nuit et de la marche du Christ sur les eaux.

La quatrième veille est la fin de la nuit, car chaque veille est de trois heures. Cette circonstance signifie donc que, vers la fin des temps, le Seigneur vient secourir Son Église et semble marcher sur les eaux. Car, bien que ce vaisseau soit en butte aux attaques et aux tempêtes, il n’en voit pas moins le Sauveur glorifié marcher sur toutes les élévations de la mer, c’est-à-dire sur toutes les puissances du siècle.
A l’époque où il nous servait dans sa chair de modèle d’humilité, et, où il souffrait pour nous, il était dit de lui que les flots s’élevèrent contre Sa personne et que pour l’amour de nous Il céda volontairement devant cette tourmente, afin d’accomplir cette prophétie : « Je Me suis jeté dans la profondeur de la mer, et la tempête M’a submergé » (Ps. LXVIII, 3). En effet, Il n’a point repoussé les faux témoins ni confondu les cris barbares qui demandaient qu’Il fût crucifié (Matth. XXVII, 23). Il n’a point employé Sa puissance à comprimer la rage de ces coeurs et de ces bouches en fureur, mais Sa patience à l’endurer. On Lui a fait tout ce qu’on a voulu, parce qu’Il S’est fait Lui-même obéissant jusqu’à la mort de la croix (Philip. II, 8).

Mais, lorsqu’après Sa Résurrection d’entre les morts Il voulut prier seul pour ses disciples, placés dans l’Église comme dans un vaisseau, appuyés sur le bois, c’est-à-dire sur la foi de Sa croix, et menacés par les vagues des tentations de ce siècle, Son Nom commença à être honoré dans ce monde même, où Il avait été méprisé, accusé, mis à mort ; et Lui qui en souffrant dans Son corps S’était jeté dans la profondeur de la mer et y avait été englouti, foulait les orgueilleux ou les flots écumants, aux pieds de Sa gloire.
C’est ainsi qu’aujourd’hui encore nous Le voyons marcher en quelque sorte sur la mer, puisque toute la rage du ciel expire à Ses pieds.

§8. Le fait que les disciples prenne le Christ pour un fantôme est une représentation symbolique des fausses doctrines des hérétiques qui n’enseignent pas la vérité au sujet de Notre-Seigneur. Saint Augustin réfute en particulier les erreurs de ceux qui, au prétexte de la grandeur de Dieu, nient la réalité de l’Incarnation.

Aux dangers des tempêtes se joignent encore les erreurs des hérétiques.
Il est des hommes qui pour attaquer les passagers du vaisseau mystique publient que le Christ n’est point né de la Vierge, qu’Il n’avait pas un corps véritable et qu’Il paraissait ce qu’Il n’était point.
Ces opinions perverses viennent de naître, maintenant que le Christ marche en quelque sorte sur la mer, puisque Son Nom est glorifié parmi tous les peuples.
« C’est un fantôme ! » disaient les disciples épouvantés. Mais Lui, pour nous rassurer contre ces doctrines contagieuses : « Ayez confiance, dit-Il, c’est Moi ; ne craignez point ! »
Ce qui a contribué à former ces opinions trompeuses, c’est la vaine crainte dont on s’est trouvé saisi à la vue de la gloire et de la majesté du Christ. Comment aurait pu avoir une telle naissance Celui qui a mérité tant de grandeur ? On croyait Le voir encore avec saisissement marcher sur la mer, car cette action prodigieuse est la marque de Sa prodigieuse élévation, et c’est elle qui a donné lieu de croire qu’Il était un fantôme.
Mais en répondant : « C’est Moi ! », le Sauveur ne veut-Il pas qu’on ne voie point en Lui ce qui n’y est point ?
Si donc Il montra en Lui de la chair, c’est qu’il y en avait ; des os, c’est qu’il y avait des os ; des cicatrices enfin, c’est qu’il en avait aussi. « Il n’y avait pas en lui, comme s’exprime l’Apôtre, le oui et le non ; mais le oui était en Lui » (2 Cor. I, 19). De là cette parole : « Ayez confiance, c’est Moi ; ne craignez point ! »
En d’autres termes : n’admirez pas Ma grandeur jusqu’à vouloir Me dépouiller de Ma réalité. Il est bien vrai, Je marche sur la mer, Je tiens sous Mes pieds, comme des flots écumants, l’orgueil et le faste du siècle ; Je Me suis montré néanmoins véritablement homme, et Mon Évangile dit vrai quand il publie que Je suis né d’une Vierge, que Je suis le Verbe fait chair, que J’ai dit avec vérité : « touchez et voyez, car un esprit n’a point d’os comme vous en voyez en Moi » (Luc, XXIV, 39) ; enfin que Mon Apôtre dans son doute constata de sa propre main la réalité de mes cicatrices. Ainsi donc : « C’est Moi ; ne craignez point ! »

§9. Il y a aussi l’hérésie qui prétend que le Christ ne peut réprouver : ce qui consiste en définitive à affirmer que Jésus n’a pas dit la vérité dans Son Evangile. Celui qui croit à la vérité du Christ, croit aussi à la réalité du risque de la damnation.

En s’imaginant que le Seigneur était un fantôme, les disciples ne rappellent pas seulement les sectaires qui lui refusent une chair humaine et qui vont quelquefois, dans leur aveuglement pervers, jusqu’à ébranler les voyageurs présents dans le navire ; ils désignent aussi ceux qui se figurent que le Sauveur n’a pas dit vrai en tout, et qui ne croient pas à l’accomplissement des menaces faites contre les impies. Il serait donc en partie véridique et en partie menteur, espèce de fantôme dans Ses discours où se trouveraient le oui et le non.
Mais qui comprend bien cette parole : « C’est Moi ; ne craignez point » ajoute foi à tout ce qu’a dit le Seigneur ; et s’il espère les récompenses qu’Il a promises, il redoute également les supplices dont Il a menacé. C’est la vérité qu’Il fera entendre aux élus placés à Sa droite, quand Il leur dira : « Venez, les bénis de Mon Père, recevez le Royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde » ; c’est aussi la vérité qu’entendront les réprouvés placés à sa gauche : « Allez au feu éternel, qui a été préparé pour le diable et pour ses anges » (Matth. XXV, 34, 41).
Aussi bien le sentiment de la fausseté des menaces adressées par le Christ aux impies et aux réprouvés, vient de ce que l’on voit des peuples nombreux et d’innombrables multitudes soumis à son nom : et si le Christ semblait être un fantôme parce qu’Il marchait sur la mer, aujourd’hui encore on ne croit pas à la réalité des peines dont Il menace ; on ne Le croit pas capable de perdre des peuples si nombreux qui L’honorent et se prosternent devant Lui. Qu’on l’entende dire, néanmoins : « C’est Moi ! »
Rassurez-vous donc, vous qui Le croyez véridique en tout et qui fuyez les supplices dont Il menace, comme vous aspirez aux récompenses qu’Il promet. Car s’Il marche sur la mer, si toutes les parties de l’humanité Lui sont soumises dans ce siècle, Il n’est pas un fantôme et Il ne ment pas quand il s’écrie : « Ce ne sont pas tous ceux qui Me disent : Seigneur, Seigneur, qui entreront dans le Royaume des cieux » (Matth. VIII, 21).

§10. Signification de la marche de Pierre sur les eaux : les éloges et les louanges qui viennent de la terre peuvent faire sombrer l’Eglise. Par la prière, on échappe aux séductions du monde. Si l’on est fidèle et persévérant à crier vers Dieu, Il n’abandonnera pas son Eglise aux prises avec la tempête.

Que signifie encore la hardiesse de Pierre à venir à Lui en marchant sur les eaux ?
Pierre représente souvent l’Église ; et ces mots : « Si c’est Vous, Seigneur, ordonnez-moi de venir à Vous sur les eaux », ne reviennent-ils pas à ceux-ci : Seigneur, si Vous dites vrai, si Vous ne mentez jamais, glorifiez Votre Église dans le monde, car les prophètes ont prédit que Vous le feriez ? Qu’elle marche donc sur les eaux et qu’elle parvienne ainsi jusqu’à Vous, puisqu’il lui a été dit : « Les opulents de la terre imploreront tes regards » (Ps. XLIV, 13).
Le Seigneur n’a rien à craindre des louanges humaines, tandis que dans l’Église même les éloges et les honneurs sont souvent pour les mortels un sujet de tentation. Et presque de ruine. Aussi Pierre tremble-t-il sur les flots, il redoute l’extrême violence de la tempête.
Eh ! qui ne craindrait devant cette parole : « Ceux qui vous disent heureux vous trompent et font trembler le sentier où vous marchez » (Isaïe, III, 12) ?
L’âme résiste donc au désir des louanges humaines ; aussi convient-il, au milieu de ce danger, de recourir à l’oraison et à la prière ; car il pourrait bien se faire que charmé des applaudissements des hommes on succombât sous leur blâme.
Que Pierre s’écrie, en chancelant sur l’onde : « Sauvez-moi, Seigneur ! »
Le Seigneur étend la main, et – quoiqu’Il le réprimande en lui disant : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté », pourquoi, les yeux fixés directement sur Celui vers qui tu marchais, ne t’es tu pas glorifié uniquement dans le Seigneur ? – Il ne laisse pas de le tirer des flots sans le laisser périr, parce qu’il a confessé sa faiblesse et sollicite son secours. 

§11. Fin du discours : par la foi pleine et ferme, l’âme de chacun et l’Eglise tout entière, victorieuses des tempêtes, parviennent aux rives du salut et du bonheur éternels.

Le Seigneur enfin est entré dans le navire, la foi est affermie, il n’y a plus de doute, la tempête est apaisée et l’on va mettre en paix le pied sur la terre ferme. Tous alors se prosternent en s’écriant : « Vous êtes vraiment le Fils de Dieu !»
C’est l’éternelle joie, joie produite par la connaissance et l’amour de la vérité contemplée dans tout son éclat, du Verbe de Dieu et de Sa Sagesse par laquelle tout a été fait, et de Son infinie miséricorde.

Le Christ tirant Pierre des flots - cathédrale de Monreale

Le Christ tirant Pierre des flots
(cathédrale Santa Maria Nuova, à Monreale – Sicile)

2014-22. « Ne brisez pas le miroir ! »

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Le carême approche à grands pas : nous voici au temps de la Septuagésime (cf. > ici) où nous avons déjà déposé l’alléluia (cf. > ici) et le « Gloria in excelsis Deo », et pris les ornements violets.

   Chaque année, il importe de le redire et d’insister : ce n’est pas à la dernière minute, ce n’est pas le mardi gras ou le mercredi des cendres, qu’il faudra penser à nos résolutions et efforts de carême.
C’est maintenant, c’est aujourd’hui qu’il convient d’y réfléchir posément, attentivement, sérieusement…

   Il y a des catholiques qui soupirent et rechignent à la pensée du carême. Ce type d’attitude me sidère et me laisse perplexe : le carême n’est-il pas en définitive le temps où se vérifient notre amour pour Dieu, la réalité de nos dispositions religieuses, et la vérité de notre démarche spirituelle… qui ne peut s’exonérer de la pénitence et de la conversion ?

   Certes, il n’est pas toujours agréable pour notre ego chatouilleux de se rendre compte de ses limites, de ses défauts, de ses imperfections, de ses fautes et de ses péchés.
Certes encore, il n’est pas vraiment confortable de s’entendre dire que nous avons à nous amender, à nous corriger, à nous convertir plus profondément à l’Evangile, à faire toujours plus d’efforts.
Certes enfin, il n’est pas facile de mettre effectivement ses pas, en actes plus qu’en paroles, dans ceux de Notre-Seigneur Jésus-Christ pour gravir à Sa suite le chemin du Calvaire.
Mais cela est nécessaire à notre salut.
Cela est nécessaire au salut de beaucoup d’autres âmes, lequel peut dépendre de notre ferveur et de notre générosité.
Cela est nécessaire à l’Eglise dans son combat de toujours « contre les principautés et les puissances, contre les chefs de ce monde de ténèbres, contre les esprits de malice répandus dans les airs » (Eph. VI. 12).

   Dans la continuité de ce que je vous transmettais il y a seulement quelques jours (cf. > ici), et pour vous encourager à vous examiner sans fard dans le miroir céleste de la Parole divine afin de préparer un saint carême de progrès spirituel, je vous livre aujourd’hui une autre des petites B.D. de notre Frère Maximilien-Marie.
Si la révélation de notre véritable visage n’est pas toujours agréable, elle est néanmoins salutaire. Aussi décapante que puisse être la vérité, elle n’est « cruelle » qu’à la manière des chirurgiens (pour reprendre une comparaison du Bienheureux Vladimir Ghika) :  au lieu de la refuser, au lieu de briser le miroir, profitons de la chance qui nous est donnée…

Bonne lecture ! et surtout bon travail de réflexion et de vérité sur vous-mêmes !

Lully.                             

Ne brisez pas le miroir-1

Ne brisez pas le miroir-1

Ne brisez pas le miroir-2

Ne brisez pas le miroir-1 - Copie

Pour approfondir avec d’autres publications de ce blogue :
– Petit catéchisme sur le carême et la pénitence > ici
– « Bas les masques ! » (B.D.) > ici
– Sermon de St Augustin sur l’obligation de faire pénitence > ici
- 2 sermons de St Augustin sur le jeûne > ici
- « Session Santé & Bien-être » (B.D.) > ici
- « St Joseph et le carême » (B.D.) > ici
- Méditation sur la « Madeleine repentante » de G. de La Tour > ici

Prière de Sa Sainteté le Pape Pie XII à Notre-Dame de Lourdes.

Sa Sainteté le Pape Pie XII en prière

Cette prière constitue la péroraison du discours que prononça en français, le 28 avril 1935,
Son Eminence Révérendissime le Cardinal Eugenio Pacelli,
Secrétaire d’Etat et Légat a latere de Sa Sainteté le Pape Pie XI,
à Lourdes,
à l’occasion de la clôture du jubilé de la Rédemption (voir la note en bas de page).

l'apparition de ND de Lourdes

       O Vierge immaculée, très clémente et très puissante, vous êtes notre Mère. De votre trône de Reine du Ciel, vous avez daigné venir parmi nous en ce coin fortuné de la terre de France ; et, à l’égal de la réalité de la foi, invisible au monde, mais non à l’innocente enfant choisie par vous comme confidente et collaboratrice des merveilles de votre amour pour nous, vous avez fait de cette roche de Massabielle une nouvelle montagne de la gloire de Dieu au milieu des ténèbres de l’incrédulité et du péché, un phare lumineux d’espérance pour le salut des peuples. Mais cette montagne et cette grotte bienheureuse évoquent en nous le souvenir d’une autre montagne et d’une autre grotte, le Golgotha et le Sépulcre, où votre douleur et vos larmes de Mère, à l’heure la plus terrible et la plus divine de la Rédemption, s’unissaient à la suprême torture, à la mort et à la sépulture de votre Fils crucifié, Rédempteur du monde.

   Ce jour là, dans ces ténèbres, ô Reine des martyrs, votre foi, votre espérance, votre amour demeurèrent fermes et dirigés vers le ciel comme vous demeuriez vous-même debout auprès de la Croix ; là vous avez été proclamée notre Mère par la divine parole de votre divin Fils et par le sang qui de ses plaies descendait sur vous, pour empourprer et consacrer votre amour pour nous. De ces ténèbres a surgi le soleil de ce jour où nous commémorons l’accomplissement de notre Rédemption.

   Vous, notre Corédemptrice, vous, prémices de la grâce et de la Rédemption, ayez pitié de nous, vos pauvres fils. Donnez-nous le courage de votre foi, l’inébranlable fermeté de votre espérance, l’ardeur de votre amour pour Jésus, Fils du Père et votre Fils, notre Rédempteur et notre Frère ; intercédez pour nous auprès de Lui, apaisez sa justice ; obtenez-nous la lumière de la vérité, et que celle-ci parvienne aussi aux esprits aveuglés de ceux dont l’orgueil se dresse contre l’Eternel ; que les dévoyés et les fourvoyés retrouvent le droit chemin, et que par vous, Reine de la paix, victorieuse de toute erreur, l’Eglise poursuive librement sa tâche et répande par le monde les fruits divins de la Rédemption. Protégez le troupeau béni de votre Fils, et le Pasteur auguste qui le conduit dans les pâturages du salut et qui est en esprit présent parmi nous. Protégez cette nation si chère à votre coeur et tout le peuple chrétien accouru ici à vos pieds de toutes les parties du monde, ou qui du moins est tourné vers ce lieu par le désir et nous est uni par la prière.

   Que par vous, ô Vierge immaculée, ô Mère du Rédempteur, notre espérance et notre salut, l’olivier de la concorde et de la paix refleurisse sur la terre, dans les coeurs la pureté, l’ardeur et la constance de la vertu et du sacrifice pour le bien ; et que par ses mérites le sang du Rédempteur nous ouvre les portes du ciel et nous plonge dans la joie de vous contempler, vous, ô Marie, et la Trinité bienheureuse, parmi les splendeurs des saints !

Ainsi soit-il !

Grotte de Lourdes état ancien

Lourdes : la Grotte des apparitions (avant les modifications de la seconde moitié du XXe siècle)

Note :
Les « années saintes » ou « jubilés » ont lieu habituellement tous les 25 ans dans l’Eglise Catholique (1900, 1925, 1950, 1975, 2000, 2025). Il peut toutefois arriver que le Souverain Pontife décrète des années saintes  exceptionnelles : ce fut le cas par exemple en 1933, pour marquer le dix-neuvième centenaire de la Rédemption, ce fut le « Jubilé du Salut » qui commença le dimanche de Pâques 2 avril 1933.

Un usage très récent (cela date du pontificat de Jean-Paul II) fait qu’actuellement les jubilés sont célébrés simultanément à Rome et dans toute la Chrétienté, mais ce n’était pas le cas naguère.
En effet, le jubilé – dont l’une des principales démarches demeure l’obtention des indulgences, particulièrement à travers le pèlerinage à Rome et aux lieux saints – était traditionnellement célébré à Rome uniquement pendant l’année du jubilé, puis, une fois seulement qu’il avait été clos à Rome, le Pape l’étendait – pendant quelques mois ou pendant une année entière – au reste des sanctuaires de la Chrétienté.

Selon l’usage traditionnel donc, le jubilé de la Rédemption fut célébré à Rome de Pâques 1933 à Pâques 1934, puis étendu aux autres grands sanctuaires de la Chrétienté de Pâques 1934 à la fin avril 1935.

   Deux cardinaux, Francis Bourne, archevêque de Westminster (qui décéda le 1er janvier 1935), et Jean Verdier, archevêque de Paris, émirent l’idée que pour la conclusion du Jubilé – le 28 avril 1935 – soit célébré un triduum continu de Messes, célébrées à l’autel de la grotte de Lourdes : c’est-à-dire que pendant trois jours et trois nuits, de manière ininterrompue, des prêtres se succèdent à l’autel pour offrir le Très Saint Sacrifice, actualisation et renouvellement du Sacrifice Rédempteur du Golgotha.
A cette époque, où les règles du jeûne eucharistique (il fallait être à jeun depuis minuit pour pouvoir célébrer et communier) ne permettaient pas de célébrations l’après-midi, cela demandait des autorisations spéciales que seul le Pape pouvait accorder. L’évêque de Lourdes, Monseigneur Pierre-Marie Gerlier, futur archevêque de Lyon et cardinal, soumit cette idée au Pape Pie XI qui l’accepta et donna les dérogations requises.
A Lourdes, des Messes furent donc célébrées sans interruption pendant ces trois journées : c’était quelque chose de jamais vu et ce sont environ 250 000 pèlerins qui, pour la circonstance, accoururent de toutes les parties du monde.

   Ces circonstances expliquent le rappel incessant du mystère de la Rédemption et de la place qu’y occupe la Très Sainte Vierge Marie, dans la prière dont nous avons donné ici le texte ci-dessus.
Pour la circonstance, Sa Sainteté le Pape Pie XI envoya à Lourdes comme Légat a latere son Secrétaire d’Etat, S.Em. le cardinal Eugenio Pacelli, futur pape Pie XII.
Sur la photo ci-dessous, prise sur le parvis de la basilique du Rosaire, Son Eminence est entourée de cinq cardinaux, de soixante-dix archevêques et évêques, d’une très grande quantité prêtres, religieux, séminaristes, servants d’autels… etc.

Le Cardinal Pacelli et le clergé, à Lourdes le 28 avril 1935

(cliquer sur la photo pour la voir en grand format)

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