Archive pour la catégorie 'De liturgia'

2021-37. Solennité de la Saint-Louis au Puy-en-Velay avec la Confrérie Royale.

Pèlerinage
au Puy-en-Velay
pour la
Solennité de Saint Louis

- du 27 au 29 août 2021 -

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Le sixième pèlerinage annuel de la Confrérie Royale au Puy-en-Velay, pour le Roi et la France, a – en cette année 2021 comme en 2020 – été empêché à sa date normale, qui est celle des jours suivants l’Ascension, en raison des difficultés liées au contexte social et ecclésiastique, conséquent à « l’épidémie » de Covid-19…

Néanmoins, comme en 2020, la Confrérie Royale tient à marquer la présence annuelle de ses représentants – de son ambassade pourrait-on dire – dans la sainte cité mariale du Puy.
Ainsi, comme en 2020, a-t-elle l’opportunité d’organiser un petit rassemblement (places limitées) au Puy les 27 et 29 août prochains, afin d’y célébrer la solennité de Saint Louis, céleste protecteur de la confrérie, saint patron de notre Roi légitime et de Monseigneur le Dauphin.

L’arrivée peut se faire dès le vendredi 27 en fin d’après-midi (une Messe basse sera célébrée à 18 h ce jour-là pour les pèlerins qui souhaiteraient y assister), mais il est aussi possible de n’arriver que pour le samedi 28 au matin (de bonne heure : pour la première conférence).
Comme d’habitude pendant ces journées des pèlerinages de la Confrérie Royale, il y aura évidemment des Saintes Messes solennelles, des temps de prière, ainsi que des visites et des conférences.
Le programme détaillé en sera communiqué en son temps aux pèlerins inscrits.

Les personnes qui souhaiteraient profiter de ce pèlerinage pour faire leur entrée dans la Confrérie Royale sont priées de se signaler auprès de ses responsables sans retard.
Ni le laisser-passer ni la vaccination ou les certificats de tests ne sont requis pour l’accès au lieu d’hébergement et aux édifices cultuels.

Les organisateurs invitent les personnes qui viendraient au Puy-en-Velay en automobile et qui disposeraient de places à se faire connaître, de manière à organiser des covoiturages.
Pour les autre modalités pratiques, et le bulletin d’inscription, veuillez vous reporter au site internet de la Confrérie Royale > ici.

Les organisateurs ont bien conscience que cette annonce, ainsi que les délais pour l’inscription (le plus rapidement possible et de toute façon avant le 20 août) sont assez courts, mais dans le contexte actuel, avec des confirmations qui ne sont arrivées que ces jours derniers, il ne leur était pas possible, d’en publier l’annonce plus tôt.

Merci pour votre compréhension
et pour vos réponses les plus promptes possibles !

Messe à l'autel de la Vierge Noire 2019

Sainte Messe solennelle à l’autel de la Vierge Noire
dans l’insigne basilique-cathédrale Notre-Dame de l’Annonciation du Puy-en-Velay
lors du pèlerinage de la Confrérie Royale en 2019

2021-36. Saint Laurent de Brindes, une « source à laquelle puiser afin que notre témoignage chrétien soit lumineux et soit capable de conduire les hommes de notre temps à Dieu ».

21 juillet,
Fête de Saint Laurent de Brindes, docteur de l’Eglise.

Continuons d’approfondir notre connaissance des Docteurs de l’Eglise à l’aide des catéchèses que leur a consacré Sa Sainteté le Pape Benoît XVI.

Messe de Saint Laurent de Brindes

Saint Laurent de Brindes favorisé de l’apparition du Saint Enfant Jésus pendant sa messe

* * * * * * *

Catéchèse
de
Sa Sainteté le Pape Benoît XVI

prononcée à l’occasion de l’audience générale
du
mercredi 23 mars 2011

Chers frères et sœurs,

       Je me souviens encore avec joie de l’accueil festif qui m’a été réservé en 2008 à Brindisi, la ville où, en 1559, naquit un éminent docteur de l’Eglise, saint Laurent de Brindisi, nom que Giulio Cesare Rossi prit en entrant dans l’Ordre des capucins.
Dès son enfance, il fut attiré par la famille de saint François d’Assise. En effet, orphelin de père à l’âge de sept ans, il fut confié par sa mère aux soins des frères conventuels de sa ville. Quelques années plus tard, toutefois, il s’installa avec sa mère à Venise, et c’est précisément en Vénétie qu’il connut les capucins qui, à cette époque, s’étaient placés généreusement au service de l’Eglise tout entière, pour approfondir la grande réforme spirituelle promue par le Concile de Trente. En 1575, Laurent, à travers la profession religieuse, devint frère capucin, et en 1582, fut ordonné prêtre. Dès l’époque de ses études ecclésiastiques, il révéla les éminentes qualités intellectuelles dont il était doté. Il apprit facilement les langues anciennes, comme le grec, l’hébreu et le syriaque, et modernes, comme le français et l’allemand, qui s’ajoutaient à sa connaissance de la langue italienne et de la langue latine, à l’époque couramment parlée par tous les ecclésiastiques et hommes de culture.

   Grâce à la connaissance de tant de langues, Laurent put accomplir un intense apostolat auprès de diverses catégories de personnes. Prédicateur efficace, il connaissait de façon si profonde non seulement la Bible, mais également la littérature rabbinique, que les rabbins eux-mêmes en étaient stupéfaits et admiratifs, manifestant à son égard estime et respect. Théologien expert de l’Ecriture Sainte et des Pères de l’Eglise, il était en mesure d’illustrer de façon exemplaire la doctrine catholique également aux chrétiens qui, surtout en Allemagne, avaient adhéré à la Réforme. A travers une présentation claire et douce, il montrait le fondement biblique et patristique de tous les articles de la foi mis en discussion par Martin Luther. Parmi ceux-ci, le primat de saint Pierre et de ses successeurs, l’origine divine de l’épiscopat, la justification comme transformation intérieure de l’homme, la nécessité des bonnes œuvres pour le salut. Le succès dont Laurent bénéficia nous aide à comprendre qu’aujourd’hui aussi, en poursuivant avec tant d’espérance le dialogue œcuménique, la confrontation avec la Sainte Ecriture, lue dans la Tradition de l’Eglise, constitue un élément incontournable et d’une importance fondamentale, comme j’ai voulu le rappeler dans l’Exhortation apostolique Verbum Domini (n. 46).

   Même les fidèles les plus simples, dépourvus d’une grande culture, tirèrent profit de la parole convaincante de Laurent, qui s’adressait aux personnes humbles pour rappeler à tous la cohérence de leur vie avec la foi professée.
Cela a été un grand mérite des capucins et d’autres ordres religieux, qui, aux XVI° et XVII° siècles, contribuèrent au renouveau de la vie chrétienne en pénétrant en profondeur dans la société à travers leur témoignage de vie et leur enseignement. Aujourd’hui aussi, la nouvelle évangélisation a besoin d’apôtres bien préparés, zélés et courageux, afin que la lumière et la beauté de l’Evangile prévalent sur les orientations culturelles du relativisme éthique et de l’indifférence religieuse, et transforment les diverses façons de penser et d’agir en un authentique humanisme chrétien.
Il est surprenant que saint Laurent de Brindisi ait pu accomplir de façon ininterrompue cette activité de prédicateur apprécié et inlassable dans de nombreuses villes d’Italie et dans divers pays, alors qu’il occupait d’autres charges lourdes et de grandes responsabilités. Au sein de l’Ordre des capucins, en effet, il fut professeur de théologie, maître des novices, plusieurs fois ministre provincial et définiteur général, et enfin ministre général de 1602 à 1605.

   Parmi tant de travaux, Laurent cultiva une vie spirituelle d’une ferveur exceptionnelle, consacrant beaucoup de temps à la prière et, de manière particulière, à la célébration de la Messe, qu’il prolongeait souvent pendant des heures, absorbé et ému par le mémorial de la Passion, de la Mort et de la Résurrection du Seigneur.
A l’école des saints, chaque prêtre, comme cela a souvent été souligné au cours de la récente Année sacerdotale, peut éviter le danger de l’activisme, c’est-à-dire d’agir en oubliant les motivations profondes de son ministère, seulement s’il prend soin de sa propre vie intérieure. En m’adressant aux prêtres et aux séminaristes dans la cathédrale de Brindisi, la ville natale de saint Laurent, j’ai rappelé que «le moment de la prière est le plus important dans la vie du prêtre, celui où la grâce divine agit avec le plus d’efficacité, en donnant sa fécondité au ministère. Prier est le premier service à rendre à la communauté. Les temps de prière doivent donc avoir une véritable priorité dans notre vie… Si l’on n’est pas intérieurement en communion avec Dieu, on ne peut rien donner non plus aux autres. Dieu est donc la première priorité. Nous devons toujours réserver le temps nécessaire pour être en communion de prière avec notre Seigneur».
Du reste, avec l’ardeur incomparable de son style, Laurent exhorte chacun, et pas seulement les prêtres, à cultiver la vie de prière car au moyen de celle-ci nous parlons à Dieu et Dieu nous parle : «Oh, si nous considérions cette réalité ! — s’exclame-t-il — C’est-à-dire que Dieu est vraiment présent à nous quand nous lui parlons en priant ; qu’il écoute vraiment notre prière, même si nous prions seulement avec le cœur et avec l’esprit. Et que non seulement il est présent et nous écoute, mais qu’il peut même et qu’il désire volontiers répondre, et avec le plus grand plaisir, à nos questions».

   Un autre trait qui caractérise l’œuvre de ce fils de saint François est son action pour la paix.
Les Souverains Pontifes, ainsi que les princes catholiques lui confièrent à plusieurs reprises d’importantes missions diplomatiques pour résoudre des controverses et favoriser la concorde entre les Etats européens, menacés à cette époque par l’empire ottoman. L’autorité morale dont il jouissait faisait de lui un conseiller recherché et écouté. Aujourd’hui, comme à l’époque de saint Laurent, le monde a un grand besoin de paix, il a besoin d’hommes et de femmes pacifiques et pacificateurs. Tous ceux qui croient en Dieu doivent toujours être des sources et des agents de paix.
Ce fut précisément à l’occasion d’une de ces missions diplomatiques que Laurent conclut sa vie terrestre, en 1619 à Lisbonne, où il s’était rendu auprès du roi d’Espagne, Philippe III, pour défendre la cause de ses sujets napolitains, opprimés par les autorités locales.

   Il fut canonisé en 1881 et, en raison de son activité vigoureuse et intense, de sa science vaste et harmonieuse, il mérita le titre de Doctor apostolicus, «Docteur apostolique», que lui donna le bienheureux Pape Jean XXIII en 1959, à l’occasion du quatrième centenaire de sa naissance. Cette reconnaissance fut accordée à Laurent de Brindisi également parce qu’il fut l’auteur de nombreuses œuvres d’exégèse biblique, de théologie et d’écrits destinés à la prédication. Il y offre une présentation organique de l’histoire du salut, centrée sur le mystère de l’Incarnation, la plus grande manifestation de l’amour divin pour les hommes. En outre, étant un mariologiste de grande valeur, auteur d’un recueil de sermons sur la Vierge intitulé «Mariale», il met en évidence le rôle unique de la Vierge Marie, dont il affirme avec clarté l’Immaculée Conception et la coopération à l’œuvre de la rédemption accomplie par le Christ.

   Avec une fine sensibilité théologique, Laurent de Brindisi a également mis en évidence l’action de l’Esprit Saint dans l’existence du croyant. Il nous rappelle qu’avec ses dons, la Troisième Personne de la Très Sainte Trinité, éclaire et aide notre engagement à vivre dans la joie le message de l’Evangile. «L’Esprit Saint — écrit saint Laurent — rend doux le joug de la loi divine et léger son poids, afin que nous observions les commandements de Dieu avec une très grande facilité, et même avec plaisir».

   Je voudrais compléter cette brève présentation de la vie et de la doctrine de saint Laurent de Brindisi en soulignant que toute son activité a été inspirée par un grand amour pour l’Ecriture Sainte, qu’il savait presque par cœur, et par la conviction que l’écoute et l’accueil de la Parole de Dieu produit une transformation intérieure qui nous conduit à la sainteté. «La Parole du Seigneur — affirme-t-il — est lumière pour l’intelligence et feu pour la volonté, pour que l’homme puisse connaître et aimer Dieu. Pour l’homme intérieur, qui au moyen de la grâce vit de l’Esprit de Dieu, il est pain et eau, mais un pain plus doux que le miel et une eau meilleure que le vin et le lait… C’est un maillet contre un cœur durement obstiné dans les vices. C’est une épée contre la chair, le monde et le démon, pour détruire tout péché».
Saint Laurent de Brindisi nous enseigne à aimer l’Ecriture Sainte, à croître dans la familiarité avec elle, à cultiver quotidiennement le rapport d’amitié avec le Seigneur dans la prière, pour que chacune de nos actions, chacune de nos activités ait en Lui son commencement et son achèvement. Telle est la source à laquelle puiser afin que notre témoignage chrétien soit lumineux et soit capable de conduire les hommes de notre temps à Dieu.

Saint Laurent de Brindes à la bataille d'Albareale

Saint Laurent de Brindes à la bataille d’Albareale contre les mahométans

2021-38. Nous devons retremper notre courage et notre espérance, sans nous départir d’une constante sérénité intérieure, malgré les combats !

Triomphe de la foi Vincenzo Meucci - détail)

Le triomphe de la foi
fresque de Vincenzo Meucci (1747), au palais Corsini, à Rome.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Le 8 août ramène chaque année en sus des fêtes des saints propres à ce jour, l’anniversaire du rappel à Dieu – dans sa centième année – du Révérend Père Jean Charles-Roux (+ 8 août 2014), prêtre remarquable par sa personnalité – originale et très attachante -, et par sa fidélité : fidélité à la Sainte Messe de son ordination et fidélité à son Souverain légitime, puisqu’il fut en même temps une figure éminente de la Légitimité et de la résistance à la réforme liturgique consécutive au concile vaticandeux.
Cette année 2021, où les fidèles attachés à la liturgie latine traditionnelle ont été indignés par une nouvelle injustice perpétrée par l’occupant du siège pontifical, est celle du septième anniversaire du rappel à Dieu du cher Père Charles-Roux, et ces événements m’amènent à vous livrer quelques réflexions, évidemment incorrectes.

   J’ai rapporté au moment de l’annonce de sa mort (cf. > ici), cette anecdote célèbre autant que savoureuse : « (…) lorsque la nouvelle messe avait été imposée, il l’avait « essayée » mais s’était promptement rendu compte de l’indigence du nouveau rite : « J’ai donc écrit au pape Paul, que j’avais connu quand il était cardinal Montini, et dit : Saint-Père, soit vous me permettez de célébrer l’ancienne messe, soit je quitte la prêtrise et j’épouse la première jolie fille que je rencontre. »

   Ce cher Père disait même : « Quand on m’a dit qu’il fallait désormais célébrer selon un nouveau rite, loyalement, par obéissance, j’ai essayé. Oui, j’ai loyalement essayé : j’ai essayé en anglais, en italien, en français, et même en latin ! Et je me suis dit que cela n’était vraiment pas possible : nous étions par trop loin de la Messe catholique qui avait fait pendant des siècles la force de l’Eglise et qui avait sanctifié tant de générations de fidèles ! » C’est alors qu’il avait écrit au pape Montini avec ce trait d’humoristique chantage rapporté ci-dessus.
J’écris : « humoristique chantage », mais j’eusse aussi pu écrire « chantage d’une cruelle lucidité », car, en pleine débâcle postconciliaire, qui voyait des prêtres et des religieux défroquer par milliers, le Révérend Père Charles-Roux mettait le doigt là où cela faisait mal : Paul VI, qui signa des centaines et des centaines de « réductions à l’état laïc », exprimait sa désolation devant toutes ces désertions, bien qu’il n’en tirât pas les conclusions qui se fussent logiquement imposées et qu’il refusât toujours de nommer par leur nom véritable la cause de ces innombrables naufrages et apostasies.

   Ce n’étaient pas quelques « fumées de satan » qui s’étaient introduites dans l’Eglise par « quelques fissures », c’est le modernisme mortifère qui, à l’occasion du concile vaticandeux et de la réforme liturgique, s’était engouffré à pleins flots dans la Maison de Dieu, dévastant tout sur son passage, et cela parce que les portes lui en avaient été grandes ouvertes !

   L’aveuglement des chefs, leur obstination à refuser l’évidence, ainsi que l’entêtement à maintenir une direction dont on constate chaque jour les conséquences désastreuses restent un profond mystère : Dieu seul est juge des cœurs et des responsabilités, mais on ne peut penser que cela soit exempt de faute !

   Bref ! Dans le contexte de ces jours d’été 2021, consécutifs au sinistre brigandage bergoglien honteusement daté du jour de la fête de Notre-Dame du Mont Carmel, le rappel de la figure du Révérend Père Jean Charles-Roux et de la manière dont il avait obtenu de Paul VI la permission de continuer à célébrer la Sainte Messe latine traditionnelle, faisait dire à l’un de mes amis « cum grano salis » : « Vous savez ce qu’il vous reste à faire… » Cela m’a aussitôt porté à lui répondre que, au contraire de son geignard mais inefficace prédécesseur, l’actuel occupant du siège pontifical, lui, serait capable de répondre aux prêtres qui s’adresseraient à lui de la même manière que le Père Charles-Roux : « Mais oui, prenez femme et ne nous cassez plus les pieds avec la Messe ancienne ! », puisqu’il est explicite qu’il en veut l’éradication absolue et qu’il cherche par tous les moyens à chasser de l’Eglise ceux qui ne voudraient pas se plier aux diktats de sa solution finale.

   C’est la première fois que j’aborde la question de l’oukase bergoglien dans les pages de ce blogue.
Certains m’ont déjà fait part de leur étonnement de ce silence que j’ai gardé jusqu’ici…
Au risque de choquer, je vous dirai tout simplement que je ne veux pas m’étendre sur ce que je considère comme une espèce de non-événement.
Ce serait une véritable perte de temps que de lui accorder trop d’importance !

   Nous ne nous étonnons en effet pas du tout des mesures de persécutions contre la Sainte Messe latine traditionnelle édictées le 16 juillet dernier, puisque nous nous y attendions et nous y préparions depuis le moment même de la parution de « François » à la loggia de la basilique vaticane au soir du 13 mars 2013.
Si nous devions nous étonner de quelque chose, c’est plutôt du fait qu’il a attendu plus de huit années pour enfin cracher tout le venin de sa méchanceté et exprimer sa détestation de la Tradition liturgique pleinement catholique.

   « Que ferons-nous ? » me demandent certains, avec inquiétude.
Mais c’est très simple : nous continuerons à résister et à maintenir, quoi qu’il doive nous en coûter !

   J’ai connu, dans mon adolescence, les célébrations clandestines de la Sainte Messe latine, alors réputée « interdite ».
Il n’y avait alors pas de « fraternités » ou « instituts » qui existassent pour la célébrer : nous n’avions que de bons vieux prêtres, plus ou moins persécutés par leurs évêques, qui tenaient bon et qui la célébraient, malgré toutes les pressions et condamnations, dans des chapelles de fortune aménagées dans des maisons particulières, ou parfois dans de véritables chapelles, dans des châteaux ou de grandes demeures.
Nous avons tenu bon, alors.
Nous tiendrons bon, encore et toujours.

   Dans ces « années soixante-dix » du précédent siècle, l’Eglise « officielle », en France, malgré les dégâts déjà nombreux occasionnés par les suites du concile vaticandeux, pouvait encore faire illusion et donner l’impression de quelque force… Mais aujourd’hui ? Ce n’est vraiment plus le cas avec des diocèses croupions et des paroisses en pleine déconfiture.
Que pouvons-nous véritablement craindre de ces évêques qui, pour la plupart, sont devenus complètement transparents pour la société, dont le discours est habituellement d’une telle insipidité qu’il n’a pas le pouvoir de mobiliser les quelques fidèles qui leur restent, qui continuent à fermer des séminaires, qui voient l’effondrement constant de la courbe des ordinations pour le clergé diocésain, qui sont aux prises avec des difficultés financières abyssales… etc.

   La vitalité n’appartient pas au modernisme, même s’il occupe pour un peu de temps encore la place, dans les structures et dans la liturgie de l’Eglise.
Sa mort est inéluctable, ce n’est qu’une question d’années (même si elles nous semblent longues parfois).
Ce n’est qu’une question de patience !
Même s’il ne faut jamais oublier que le mot patience dérive du verbe « pâtir »…

   Les papes passent, comme tout le reste.
François a 85 ans. Sa santé n’est pas bonne. Il n’est pas éternel. Il passera donc lui aussi comme ont passé ceux qui avant lui ont voulu, s’opposer à la reconquête catholique qu’opère, envers et contre tout, la Sainte Messe traditionnelle, laquelle est investie d’une puissance divine contre laquelle tous les hommes qui l’ont voulu abolir se sont finalement brisés…

   Nous, nous savons, par expérience – par une expérience quotidienne -, où se trouvent la vitalité et la fécondité.
Et elles ne se trouvent pas dans les institutions vérolées par le concile vaticandeux !

   Les belles figures des prêtres qui ont incarné la résistance immédiatement postconciliaire au modernisme, comme le Révérend Père Jean Charles-Roux que nous avons évoqué ci-dessus, mais aussi – sans vouloir ni pouvoir être exhaustif dans mon énumération -, Monseigneur François Ducaud-Bourget, l’abbé Louis Coache, l’abbé Vincent Serralda, l’abbé Bryan Houghton, le Révérend Père Michel André, le chanoine Porta, l’abbé Michel de Fommervault, l’abbé Quentin Montgomery-Wright, l’abbé Philippe Sulmont… et tant d’autres, sans oublier bien sûr Son Excellence Monseigneur Marcel Lefebvre, sont là comme de magnifiques exemples auprès desquels nous devons retremper notre courage et notre espérance, sans nous départir d’une constante sérénité intérieure, malgré les combats : la Sainte Messe latine traditionnelle vaincra, comme elle a déjà triomphé dans les siècles passés !

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

Pierre Le Gros, dit le jeune - la religion terrassant l'hérésie et la haine - Rome, Gesù

La Religion terrassant l’hérésie et la haine
par Pierre Le Gros, dit le jeune, dans l’église du Gesù, à Rome.

2021-35. Quelques dates à retenir pour ces prochaines semaines d’été :

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Oyez ! Oyez, bonnes gens !

Voici quelques dates à retenir concernant des célébrations qui auront lieu dans les prochaines semaines au Mesnil-Marie (souvent liées au passage d’amis prêtres) :

1) Mercredi 14 juillet 2021 :
Pas de « promenade » organisée par le Cercle légitimiste du Vivarais cette année, mais au Mesnil-Marie même sera célébrée une Sainte Messe de Requiem à la pieuse mémoire des victimes de la révolution, suivie d’une absoute.
Il est possible ensuite de pique-niquer sur place.
Après le pique-nique sera proposé un enseignement sur la révolution.

2) Fête de Sainte Philomène :
Ainsi que cela a été annoncé (cf. > ici), un pèlerinage de trois jours, à pied depuis la vallée du Rhône, est organisé – modestement – pour venir fêter Sainte Philomène au Mesnil-Marie.
Le jour de la fête de Sainte Philomène, mercredi 11 août, il y aura bien évidemment la Sainte Messe de notre chère protectrice, le repas partagé, et le chapelet suivie de la bénédiction du Très Saint Sacrement.
Nous aurons besoin d’aide dans les jours précédents pour monter la grande tente dans la prairie.

3) Autour de la fête de l’Assomption :
- Samedi 14 août – vigile de l’Assomption, jour de jeûne et d’abstinence – est aussi la fête de Saint Maximilien-Marie Kolbe : la Sainte Messe de cette fête sera célébrée au Mesnil-Marie.
- Dimanche 15 août, fête de l’Assomption de Notre-Dame et fête patronale de la France, la Sainte Messe sera célébrée au Mesnil-Marie, possibilité de partager le repas et, dans l’après-midi, procession pour l’accomplissement du Vœu de Louis XIII, avec la statue de Notre-Dame et la relique de son Voile.
- Lundi 16 août (fête de Saint Roch) : Sainte Messe au Mesnil-Marie et, dans l’après-midi, pèlerinage à La Louvesc.

Les personnes qui souhaitent participer à l’une ou l’autre de ces célébrations sont priées de se faire connaître au moyen de notre formulaire de contact > ici : les détails pratiques et les horaires leur seront communiqués alors.

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Publié dans:Annonces & Nouvelles, Chronique de Lully, De liturgia, Vexilla Regis |on 8 juillet, 2021 |Commentaires fermés

2021-32. Le vaisseau de l’Église abrite tous ceux qui veulent se soustraire à la corruption du monde, et ils retrouvent dans ses flancs la liberté et la vie.

Quatrième dimanche après la Pentecôte :
Dimanche de la première pêche miraculeuse et de l’appel des premiers Apôtres.

       Après l’octave du Sacré-Cœur, nous entrons dans la série des « dimanches verts » (puisque les premier, deuxième et troisième dimanches après la Pentecôte cèdent la place aux fêtes de la Sainte Trinité puis aux solennités du Saint-Sacrement et du Sacré-Cœur) qui nous font approfondir les mystères adorables de la vie publique de Notre-Seigneur et de Ses enseignements.

   Le quatrième dimanche met donc sous nos yeux la première pêche miraculeuse et la vocation des premiers apôtres, en particulier celle de Simon-Pierre (Luc V 1-11).
Cette péricope évangélique est propice à un très grand nombre de réflexions et de méditations, parce que – en quelques versets seulement – elle est riche d’un très grand nombre d’enseignements.
Nous pouvons en particulier nous attacher à réfléchir aux voies que nous ouvre notre Bienheureux Père Saint Augustin dans ce court sermon sur « la pêche de Pierre ».

Luca Giordano - l'appel des premiers apôtres

Luca Giordano (1634-1705) : l’appel des premiers apôtres.

nika

Cinquante-neuvième sermon
de
notre bienheureux Père Saint Augustin
sur
la pêche de Pierre

§ 1 – La barque de Pierre est la figure de l’Eglise de Jésus-Christ.

   La circonstance présente nous invite à méditer le chapitre de l’Évangile dont on vient de nous donner lecture, et où nous entendons le Sauveur porté sur la barque de Pierre dire à ce dernier : « Gardez-vous de craindre, car à partir de ce moment vous serez pêcheur d’hommes » (Luc V, 10). Cette seule parole nous dévoile tout le mystère de ce passage de l’Évangile.
Au moment même où les disciples contemplaient avec étonnement leurs barques remplies de poissons, quel motif avait le Sauveur de refuser à Pierre l’objet de sa demande et de lui faire une réponse à laquelle cet Apôtre ne pouvait rien comprendre ?
Quand 
on est monté sur une barque, la plus ordinaire préoccupation n’est-elle pas de se maintenir en équilibre, au lieu de songer à convertir les hommes ?
Comprenez donc déjà que cette barque confiée à la direction de Pierre, ce n’est pas une barque ordinaire, mais bien l’Église même de Jésus-Christ. L’Église, tel est ce vaisseau qui, s’élevant au-dessus des flots de l’océan agité de ce monde, a pour mission, non pas de détruire ce qui surnage, mais de le vivifier.
Le pêcheur, monté sur son léger esquif, sauve et conserve les petits poissons arrachés à l’abyme ; de même le vaisseau de l’Église abrite tous ceux qui veulent se soustraire à la corruption du monde, et ils retrouvent dans ses flancs la liberté et la vie. Tel est, en effet, le sens du mot vivifier ; on ne vivifie que ce qui était en vie peu de temps auparavant.
A tous ceux donc qui se sentaient meurtris par les tourbillons du monde et étouffés dans les flots du siècle, Pierre est appelé à rendre la vie ; et s’il s’étonnait de la multitude de poissons qu’il venait de prendre, il s’étonnera bien plus encore de voir des multitudes d’hommes portés sur le vaisseau de l’Eglise.

§ 2 – Pierre pêcheur d’hommes. 

   Toute cette lecture que nous venons de faire doit donc recevoir une interprétation prophétique.
Un peu plus haut nous voyons que le Sauveur, toujours assis dans la barque de Pierre, dit à celui-ci : « Dirigez vers la haute mer et jetez vos filets pour pêcher » ; le Sauveur lui apprend moins à jeter ses instruments en pleine mer, qu’à jeter au loin les paroles de la prédication. Saint Paul a saisi toute l’étendue de cette parole, lorsqu’il s’écrie : « O profondeur des richesses de la sagesse et de la science de Dieu ! » (Rom. XI, 33) et la suite.
Il ne s’agit donc plus d’envelopper des poissons dans un filet, mais de rassembler les hommes sous la bannière de la foi. Ce que fait un filet dans les flots, la foi l’opère sur la terre. Les poissons enveloppés dans un filet ne peuvent plus errer en liberté ; de même la foi protège contre toute erreur l’intelligence de ceux qui croient; le filet conduit à la barque les poissons saisis dans ses plis ; de même la foi conduit au repos ceux qui se laissent guider par sa lumière.
Afin de nous faire mieux comprendre que le Seigneur parlait 
de la pêche spirituelle, Pierre s’écria : « Maître, nous avons fatigué toute la nuit sans rien prendre, mais sur votre parole je jetterai le filet » (Luc V, 10) ; comme s’il eût dit : Puisque la pêche que nous avons continuée toute la nuit est restée pour nous sans résultat, je pêcherai désormais, non plus avec un instrument, mais avec la grâce ; non plus avec des moyens humains, mais avec tout le zèle de la dévotion.
« Sur votre parole, je jetterai le filet » : Nous lisons dans l’Evangile que Notre-Seigneur est le Verbe incarné : « Au commencement était le Verbe » (Jean I, 1), et la suite. Quand donc, se confiant dans la parole, Pierre jette les filets, cela nous indique que c’est en Jésus-Christ qu’il pêche ; pour se conformer aux ordres du Maître, il déroule ses enseignements et sa doctrine, mais toujours c’est au nom de Jésus-Christ qu’il parle, c’est son Evangile qu’il expose ; car c’est à l’Evangile seul qu’il appartient de sauver les âmes.
« Nous avons fatigué toute la nuit sans rien prendre » : Pierre avait réellement travaillé toute la nuit, car en dehors de Jésus-Christ il était plongé dans des ténèbres qui ne lui permettaient pas de voir ce qu’il prenait. Mais dès que la lumière du Sauveur a brillé, les ténèbres ont disparu et Pierre, éclairé par la foi, put distinguer ceux qu’auparavant il ne voyait pas. Jusqu’à ce qu’il eut rencontré Jésus-Christ, Pierre n’avait connu que les ténèbres. De là cette parole de saint Paul : « La nuit a précédé, mais le jour s’est approché » (Rom. XIII, 12).

Voir aussi la méditation publiée > ici.

 Duc in altum - Luc V 1-11

 « Duc in altum » : dirigez-vous vers la haute mer

2021-31. De Saint Ephrem, diacre et docteur de l’Eglise, surnommé « la lyre de l’Esprit-Saint ».

18 juin,
Fête de Saint Ephrem de Nisibe, docteur de l’Eglise ;
Anniversaire de la victoire de Patay en 1429 (cf. > ici).

Saint Ephrem de Nisibe

Saint Ephrem de Nisibe
(tableau dans l’église Saint Ephrem des Syriens, à Paris)

 frise

Catéchèse de Sa Sainteté le Pape Benoît XVI
dispensée à l’occasion de l’audience pontificale générale
du mercredi 28 novembre 2007

Chers frères et sœurs,

   Selon l’opinion commune d’aujourd’hui, le christianisme serait une religion européenne, qui aurait ensuite exporté la culture de ce continent dans d’autres pays. Mais la réalité est beaucoup plus complexe, car la racine de la religion chrétienne se trouve dans l’Ancien Testament, et donc à Jérusalem et dans le monde sémitique.
Le christianisme se nourrit toujours à cette racine de l’Ancien Testament. Son expansion au cours des premiers siècles a eu lieu aussi bien vers l’Occident – vers le monde gréco-latin, où il a ensuite inspiré la culture européenne – que vers l’Orient, jusqu’à la Perse, à l’Inde, contribuant ainsi à susciter une culture spécifique, en langues sémitiques, avec une identité propre.

   Pour montrer cette multiplicité culturelle de l’unique foi chrétienne des débuts, j’ai parlé dans la catéchèse de mercredi dernier d’un représentant de cet autre christianisme, Aphraate le Sage persan, presque inconnu chez nous.
Dans cette même optique, je voudrais aujourd’hui parler de saint Ephrem le Syrien, né à Nisibe vers 306 dans une famille chrétienne.
Il fut le représentant le plus important du christianisme de langue syriaque et réussit à concilier d’une manière unique la vocation du théologien et celle du poète. Il se forma et grandit à côté de Jacques, évêque de Nisibe (303-338), et il fonda avec lui l’école de théologie de sa ville. Ordonné diacre, il vécut intensément la vie de la communauté chrétienne locale jusqu’en 363, année où la ville de Nisibe tomba entre les mains des Persans. Ephrem immigra alors à Edesse, où il poursuivit son activité de prédicateur. Il mourut dans cette ville en l’an 373, victime de la contagion de la peste qu’il avait contractée en soignant les malades. On ne sait pas avec certitude s’il était moine, mais il est cependant certain qu’il est resté diacre pendant toute sa vie et qu’il a embrassé l’état de virginité et de pauvreté. C’est ainsi qu’apparaît dans la spécificité de son expression culturelle, l’identité chrétienne commune et fondamentale : la foi, l’espérance – cette espérance qui permet de vivre pauvre et chaste dans ce monde, en plaçant toutes ses attentes dans le Seigneur – et, enfin, la charité, jusqu’au don de soi-même dans le soin des malades de la peste.

   Saint Ephrem nous a laissé un grand héritage  théologique :  sa  production considérable peut se regrouper en quatre catégories : les œuvres écrites en prose ordinaire (ses œuvres polémiques, ou bien les commentaires bibliques) ; les œuvres en prose poétique ; les homélies en vers ; et enfin les hymnes, qui sont certainement l’œuvre la plus vaste d’Ephrem.

   Il s’agit d’un auteur riche et intéressant sous de nombreux aspects, mais en particulier sous le profil théologique. Si nous voulons aborder sa doctrine, nous devons insister dès le début sur ceci : le fait qu’il fait de la théologie sous une forme poétique. La poésie  lui permet d’approfondir la réflexion  théologique  à  travers  des paradoxes et des images. Dans le même temps sa théologie devient liturgie, devient musique : en effet, c’était un grand compositeur, un musicien.
Théologie, réflexion sur la foi, poésie, chant, louange de Dieu vont de pair ; et c’est précisément dans ce caractère liturgique qu’apparaît avec limpidité la théologie d’Ephrem, la vérité divine. Dans sa recherche de Dieu, dans sa façon de faire de la théologie, il suit le chemin du paradoxe et du symbole. Il privilégie largement les images contrastantes, car elles lui servent à souligner le mystère de Dieu.

   Je ne peux pour le moment présenter que peu de chose de lui, également parce que la poésie est difficilement traduisible, mais pour donner au moins une idée de sa théologie poétique, je voudrais citer en partie deux hymnes. Tout d’abord, également en vue du prochain Avent, je vous propose plusieurs images splendides tirées des hymnes Sur la Nativité du Christ.
Devant la Vierge, Ephrem manifeste son émerveillement avec un ton inspiré :

« Le Seigneur vint en elle pour Se faire serviteur.
Le Verbe vint en elle pour Se taire dans son sein.
La foudre vint en elle pour ne faire aucun bruit.
Le pasteur vint en elle et voici l’Agneau né, qui pleure sans bruit.
Car le sein de Marie a renversé les rôles :
Celui qui créa toutes choses est entré en possession de celles-ci, mais pauvre.
Le Très-Haut vint en Elle (Marie), mais il y entra humble.
La splendeur vint en elle, mais revêtue de vêtements humbles.
Celui qui dispense toutes choses connut la faim.
Celui qui étanche la soif de chacun connut la soif.
Nu et dépouillé Il naquit d’elle, lui qui revêt (de beauté) toutes choses »
(Hymne « De Nativitate » 11, 6-8)

   Pour exprimer le mystère du Christ, Ephrem utilise une grande diversité de thèmes, d’expressions, d’images. Dans l’une de ses hymnes, il relie de manière efficace Adam (au paradis) au Christ (dans l’Eucharistie) :

« Ce fut en fermant avec l’épée du chérubin,
que fut fermé le chemin de l’arbre de la vie.
Mais pour les peuples, le Seigneur de cet arbre
s’est donné comme nourriture Lui-même dans l’oblation (eucharistique).
Les arbres de l’Eden furent donnés comme nourriture au premier Adam.
Pour nous, le jardinier du Jardin en personne S‘est fait nourriture pour nos âmes.
En effet, nous étions tous sortis du Paradis avec Adam, qui le laissa derrière lui.
A présent que l’épée a été ôtée là-bas (sur la croix) par la lance nous pouvons y retourner »
(Hymne 49, 9-11).

   Pour parler de l’Eucharistie, Ephrem se sert de deux images :  la braise ou le charbon ardent, et la perle. Le thème de la braise est tiré du prophète Isaïe (cf. VI, 6). C’est l’image du séraphin, qui prend la braise avec les pinces, et effleure simplement les lèvres du prophète pour les purifier ; le chrétien, en revanche, touche et consume la Braise, qui est le Christ lui-même :

« Dans ton Pain se cache l’Esprit qui ne peut être consommé ;
dans ton vin se trouve le feu qui ne peut être bu.
L’Esprit dans ton pain, le feu dans ton vin :
voilà une merveille accueillie par nos lèvres.
Le séraphin ne pouvait pas approcher ses doigts de la braise,
qui ne fut approchée que de la bouche d’Isaïe ;
les doigts ne l’ont pas prise, les lèvres ne l’ont pas avalée ;
mais à nous, le Seigneur a permis de faire les deux choses.
Le feu descendit avec colère pour détruire les pécheurs,
mais le feu de la grâce descend sur le pain et y reste.
Au lieu du feu qui détruisit l’homme,
nous avons mangé le feu dans le pain,
et nous avons été vivifiés »
(Hymne « De Fide » 10, 8-10).

   Voilà encore un dernier exemple des hymnes de saint Ephrem, où il parle de la perle comme symbole de la richesse et de la beauté de la foi :

« Je posai (la perle), mes frères, sur la paume de ma main,
pour pouvoir l’examiner.
Je me mis à l’observer d’un côté puis de l’autre :
elle n’avait qu’un seul aspect de tous les côtés.
(Ainsi) est la recherche du Fils, impénétrable, car elle n’est que lumière.
Dans sa clarté, je vis la Limpidité, qui ne devient pas opaque ;
et dans sa pureté, le grand symbole du corps de Notre Seigneur, qui est pur.
Dans son indivisibilité, je vis la vérité, qui est indivisible »
(Hymne « Sur la Perle » 1, 2-3).

   La figure d’Ephrem est encore pleinement actuelle pour la vie des différentes Eglises chrétiennes. Nous le découvrons tout d’abord comme théologien, qui, à partir de l’Ecriture Sainte, réfléchit poétiquement sur le mystère de la Rédemption de l’homme opérée par le Christ, le Verbe de Dieu incarné. Sa réflexion est une réflexion théologique exprimée par des images et des symboles tirés de la nature, de la vie quotidienne et de la Bible. Ephrem confère un caractère didactique et catéchistique à la poésie et aux hymnes pour la liturgie ; il s’agit d’hymnes théologiques et, dans le même temps, adaptées à la récitation ou au chant liturgique. Ephrem se sert de ces hymnes pour diffuser, à l’occasion des fêtes liturgiques, la doctrine de l’Eglise. Au fil du temps, elles se sont révélées un moyen de catéchèse extrêmement efficace pour la communauté chrétienne.

   La réflexion d’Ephrem sur le thème de Dieu créateur est importante : rien n’est isolé dans la création, et le monde est, à côté de l’Ecriture Sainte, une Bible de Dieu. En utilisant de manière erronée sa liberté, l’homme renverse l’ordre de l’univers. Pour Ephrem, le rôle de la femme est important. La façon dont il en parle est toujours inspirée par la sensibilité et le respect : la demeure de Jésus dans le sein de Marie a grandement élevé la dignité de la femme. Pour Ephrem, de même qu’il n’y a pas de Rédemption sans Jésus, il n’y a pas d’Incarnation sans Marie. Les dimensions divines et humaines du mystère de notre Rédemption se trouvent déjà dans les textes d’Ephrem ; de manière poétique et avec des images fondamentalement tirées des Ecritures, il anticipe le cadre théologique et, d’une certaine manière, le langage même des grandes définitions christologiques des conciles du Vème siècle.

   Ephrem, honoré par la tradition chrétienne sous le titre de « lyre de l’Esprit Saint », resta diacre de son Eglise pendant toute sa vie. Ce fut un choix décisif et emblématique : il fut diacre, c’est-à-dire serviteur, que ce soit dans le ministère liturgique, ou, plus radicalement, dans l’amour pour le Christ, qu’il chanta de manière inégalable, ou encore, dans la charité envers ses frères, qu’il introduisit avec une rare habileté dans la connaissance de la Révélation divine.

Nota bene :
On trouvera dans ce blogue une prière de Saint Ephrem pour demander la guérison intérieure > ici

Saint Esprit

2021-30. « Visite comparée » de la basilique de Saint Jean-François Régis à La Louvesc.

16 juin,
Fête de Saint Jean-François Régis (cf. > ici et > ici).

Châsse de Saint Jean-François Régis

Châsse renfermant la majeure partie des ossements de Saint Jean-François Régis (basilique de La Louvesc)

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Tous ceux qui nous connaissent savent à quel point nous sommes attachés à Saint Jean-François Régis (1597-1640) dont le zèle apostolique et la charité héroïque ont porté de magnifiques fruits de sainteté, spécialement dans ces provinces du Vivarais et du Velay aux confins desquelles est établi notre Mesnil-Marie. Nous avons d’ailleurs toutes les raisons de penser que, lors de ses missions de 1636-1637 dans les hautes Boutières, Saint Jean-François Régis est passé dans notre hameau puisque ses biographes, en sus 1) de la mention de villages très proches d’ici où sa prédication est attestée, 2) ou d’anecdotes le concernant qui ont pour cadre des hameaux distants de seulement quelques lieues, affirment qu’il n’y eut pas un hameau, aussi éloigné qu’il se trouvât, ni une seule ferme, aussi isolée qu’elle fût, où il n’alla prêcher. Nous avons donc une véritable certitude morale que notre hameau, qui comptait une dizaine de feux au début du XVIIe siècle, a reçu sa visite.

   Chaque année, nous nous rendons au moins une fois à La Louvesc, pour nous recueillir 1) à la fontaine qu’il a bénite lors de son arrivée dans cette minuscule paroisse de montagne au matin du 24 décembre 1640 (fontaine dont l’eau, depuis lors, a produit de très nombreux miracles) ; 2) dans la chapelle élevée à l’emplacement du presbytère dans lequel il rendit son âme à Dieu, au soir du 31 décembre 1640, voyant Notre-Seigneur et Notre-Dame venir à sa rencontre pour l’emmener au Paradis ; et 3) dans la basilique érigée au XIXe siècle où se trouve désormais la châsse contenant la majeure partie de ses précieuses reliques.

   Ce dernier dimanche, dans l’après-midi, nous sommes donc une nouvelle fois montés à La Louvesc, en préparation spirituelle à la fête de celui que l’on invoque comme « apôtre du Velay et du Vivarais » (notons d’ailleurs au passage que, jusqu’à la révolution française, cette paroisse appartenait à l’archidiocèse de Vienne, même si elle était intégrée au Vivarais royal, dont les contours n’étaient pas identiques à ceux du diocèse de Viviers).

Basilique de La Louvesc - façade principale

Basilique de La Louvesc, façade principale.

   De notre pèlerinage à La Louvesc, nous avons, comme à chaque fois, rapporté plusieurs photographies – beaucoup plus que je n’en puis publier ici ! – et nous nous proposons aujourd’hui – parce que cela était un dessein que feu Monseigneur le Maître-Chat Lully nous avait très explictement exprimé avant d’avoir été ravi à notre affection - de vous montrer, en comparant nos propres photographies récentes avec quelques clichés anciens soigneusement conservés dans nos archives, les changements que la pseudo réforme liturgique consécutive au concile vaticandeux a fait subir à cette basilique. Semblables comparaisons avaient déjà donné l’occasion de deux publications dans les pages de ce blogue 1) au sujet de la chapelle du Cénacle (cf. > ici), de laquelle a été retirée en septembre 2018 la châsse de Sainte Thérèse Couderc, et 2) au sujet de l’ancienne chapelle Sainte Agathe de cette basilique de Saint Régis, transformée à cette même époque pour l’accueillir (cf. > ici).

   Si les extérieurs de la basilique n’ont pas été atteints par le vandalisme ecclésiastique postconcilaire, vous imaginez sans peine qu’il n’en a pas été de même à l’intérieur.

   Entrons donc !
Voici ce que visiteurs et pèlerins découvrent en entrant, de nos jours, dans la basilique Saint Jean-François Régis de La Louvesc :

Basilique de La Louvesc - intérieur en 2021

   Et voici ce que l’on pouvait voir jusqu’aux « années 60 » du précédent siècle. La photographie est prise à peu près du même endroit que le cliché immédiatement ci-dessus, et il nous montre cet intérieur de la basilique tel qu’il avait été conçu par son architecte, Pierre-Marie Bossan (1814-1888) auquel nous devons aussi la basilique d’Ars, l’église Notre-Dame de Valence et la basilique Notre-Dame de Fourvière à Lyon avec lesquelles la basilique de La Louvesc a une vraie communauté de style.

Basilique de La Louvesc - intérieur antéconciliaire

   Malgré les défauts de cette vieille photographie en noir et blanc, on remarque tout de suite certains changements, que la suite va nous permettre de mieux visualiser.

   On constate d’abord la destruction de la chaire, qui était en pierre sculptée et en marbre :

Basilique de La Louvesc - chaire de vérité

   Et puisque, derrière la chaire, on peut apercevoir la chapelle de la Très Sainte Vierge, avec son autel surmonté d’une grande statue de Notre-Dame et sa table de communion de marbre, c’est le moment de vous montrer ce que cette chapelle est devenue aujourd’hui : 1) l’autel a été détruit. Il n’en subsiste qu’une partie du devant, représentant le couronnement de la Très Sainte Vierge, exposée comme une simple curiosité sous le porche :

Basilique de La Louvesc - vestige de l'autel de la Vierge

   2) la table de communion aussi – évidemment ! – a disparu.
En lieu et place on a déménagé ici les fonts baptismaux (ce qui va à l’encontre de toute la Tradition liturgique ancienne). La grande statue de la Madone (dont nous croyons savoir qu’elle a été sauvée de la destruction par Madame Louise André-Delastre, auteur bien connu des milieux traditionnels pour les hagiographies et pieuses publications qu’elle a données à la jeunesse catholique) a été remplacée par une représentation de la Mère de Dieu « d’inspiration mexicaine » nous a-t-on un jour affirmé (peut-être s’agissait-il d’une préparation au culte des autorités romaines qui viendraient plus tard pour les « déesses-mères » d’Amérique du Sud ?) :

Basilique de La Louvesc - chapelle de la Vierge

   Nous vous avouons n’être pas très porté à la ferveur en face de cette espèce de « totem », caractéristique d’une foi « revisitée » et « conceptualisée » qui n’est plus génératrice de piété.

   Mais le pire est encore à venir ! Voici une vue d’ensemble du sanctuaire avant la sinistre réforme liturgique postconcilaire :

Basilique de la Louvesc - le maître-autel et la table de communion

   Sur le cliché ci-dessus, on distingue parfaitement que le sanctuaire est circulaire : son espace est délimité par les quatre grandes colonnes de marbre qui soutiennent la coupole. Le maître autel se trouve au centre du sanctuaire et, en retrait des gradins qui entourent le saint tabernacle et portent les chandeliers, l’architecte a prévu une élévation surmontée d’un grand ciborium sous lequel sont disposées la châsse de Saint Jean-François Régis (celle-là même dont la photographie figure en tête de cette publication) et sa statue de bronze.

   Il faut en particulier dire un mot de la table de communion, qui était absolument remarquable.
Circulaire (c’est elle qui délimite le sanctuaire), au moment des grands pèlerinages, elle permettait à quatre prêtres de donner en même temps la sainte communion, sans avoir à faire des allers et retours, comme c’est habituellement le cas ; ils n’avaient qu’à avancer seulement toujours vers la droite. Cette disposition permettait que la sainte communion se passât de manière toujours très digne et fluide !

   Mais voici une autre prise de vue du sanctuaire avant les destructions dont la liturgie réformée a été le prétexte :

Basilique de La Louvesc - le Maître-autel avant la réforme liturgique

   Cette vue en couleur du maître-autel permet d’apprécier la richesse des marbres de diverses couleurs et des ornements de bronze qui les complètent.

   Enfin, cette autre photographie permet de voir plus en détail le grand reliquaire de Saint Régis dominé par sa statue de bronze.
Ainsi que vous le voyez, cette châsse a été conçue de telle façon qu’on peut en abaisser la paroi antérieure, pour laisser apercevoir les ossements du saint, derrière une vitre :

Basilique de La Louvesc - ciborium du maître-autel et chasse de Saint Régis ouverte

   Voyons maintenant ce que la réforme liturgique a fait de ce splendide maître-autel :

Basilique de La Louvesc - autel moderne

   Avant même l’entrée en vigueur de la « messe de Paul VI », imposée à partir du 1er dimanche de l’Avent 1969, le maître-autel conçu par Bossan avait été démonté (à la vérité, nous ignorons si le véritable maître-autel, démonté, est entreposé en quelque endroit ou s’il est à jamais perdu), et des travaux entrepris pour le remplacer par un fut de granit sur lequel a été posée une grande pierre carrée ; il fut consacré le 7 décembre 1969. Ainsi toute la remarquable unité de style de la basilique a été irrémédiablement saccagée…

   Le Très Saint Sacrement a été relégué dans la minuscule chapelle axiale, dans un tabernacle, qui n’apparaît plus vraiment comme le point de convergence des regards et des cœurs, et ni son style ni le matériau en lequel il a été réalisé n’expriment aussi bien que l’ancien, bien en vu sur le majestueux maître-autel, la vénération traditionnelle de l’Eglise pour la Très Sainte Eucharistie.

Basilique de La Louvesc - sanctuaire état actuel

   Les vitraux de ce petit « espace eucharistique » ont été remplacés par des compositions plus ou moins géométriques au sens abscons, si bien que la suite logique du récit imagé de la vie de Saint Jean-François Régis racontée par les vitraux tout au tour de la basilique, se trouve interrompue.

   Descendues de leur ciborium, la châsse et la statue de bronze de Saint Jean-François Régis, ont été placée dans la chapelle qui termine le bas-côté droit de la basilique, symétrique de la chapelle de la Sainte Vierge. Comme cette dernière, la chapelle qui est maintenant celle des reliques, a été elle aussi dépouillée de son décor d’origine, de son autel et de sa table de communion :

Basilique de La Louvesc - chapelle des reliques

   Quand au système d’ouverture de la châsse qui permettait très facilement l’ostension du chef et des principaux ossements du saint missionnaire, il a été rendu inopérant par un vulgaire fil de fer entortillé : il y a donc plusieurs dizaines d’années maintenant que les fidèles ne peuvent plus voir, comme cela se faisait autrefois, ces précieuses reliques.

Basilique de La Louvesc - reliquaire et statue état actuel

   Voilà ce que nous souhaitions vous montrer, chers Amis, à l’occasion de la fête de notre grand et bien-aimé Saint Régis : il nous semble que cette « visite comparée », à travers ces seules photographies commentées, est une illustration plus qu’éloquente – au milieu de centaines de milliers de saccages comparables à travers toute la Chrétienté – de la misère de la liturgie réformée à la suite de ce concile vaticandeux, porteur d’une idéologie mortifère, générateur de vandalisme, de désolation, de perte de la foi et de destruction de la piété, même si ses thuriféraires, après s’être crevé les yeux, persistent à nier la réalité et à chanter « le printemps de l’Eglise » que le dit concile est supposé avoir engendré.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

Basilique de La Louvesc - vitrail de la mort de Saint Régis

La mort de Saint Jean-François Régis le 31 décembre 1640 (vitrail de la basilique de La Louvesc)

2021-29. Le 15 juin, nous fêtons Saint Guy, Saint Modeste et Sainte Crescence.

15 juin,
Fête des Saints Guy, Modeste et Crescence, martyrs ;
Fête de Saint Bernard de Menthon, confesseur ;
Mémoire de Sainte Germaine de Pibrac.

palmes et glaive des martyrs - vignette

       Le martyrologe romain fait mention de plusieurs saints qui portent le prénom latin de Vitus, qui est traduit en français par Guy.
Au mois de juin, on en trouve deux à trois jours d’intervalle : le plus ancien, fêté le 15 juin, en même temps que le couple qui l’a élevé et qui subit avec lui le martyre, est un jeune martyr de 12 ou 13 ans, très populaire aux âges de foi, dont le culte s’est répandu dans toute l’Europe et qui figure au nombre des Quatorze Saints Auxiliateurs (ou Auxiliaires) ; le second, fêté le 12 juin, est le Bienheureux Guy de Cortone (1185-1245), prêtre franciscain qui passa la plus grande partie de sa vie dans une grotte proche de Cortone.

   Par un de ces « curieux » tours de passe-passe tels que les modernistes en commirent un grand nombre à l’occasion des réformes liturgiques successives du XXème siècle, le très célèbre et vénéré Saint Guy du 15 juin, dont la vie et le martyre, remplis de miracles éclatants, contrariaient les préjugés rationalistes des pseudo réformateurs, fut éliminé des calendriers français modernes (ce n’est pas le cas en Sicile par exemple ou dans les Pouilles où sa fête donne toujours lieu à de grandes festivités) ; toutefois, comme le prénom Guy était populaire et très répandu, on fit sortir de la pénombre du culte très local où il était confiné, le Bienheureux Guy de Cortone du 12 juin, afin de le substituer au jeune martyr que nombre de prêtres progressistes reléguèrent parmi les « saints légendaires » sans authenticité historique.

   Or il me semble que l’acharnement des modernistes à « faire passer à la trappe » les saints thaumaturges populaires, est une raison plus qu’amplement suffisante pour que nous nous intéressions à eux, et pour que nous nous attachions à entretenir leur culte et la ferveur envers eux !

Saint Guy Saint Modeste et Sainte Crescence - tableau de Mattia de Mare 1753 à Ostuno

Saint Guy entre Saint Modeste et Sainte Crescence
(tableau de Mattia de Mare – 1753 – dans l’église San Vito à Ostuni dans les Pouilles)

   Nous ne pouvons pas, dans le format réduit des publications de ce blogue, donner ici toute la vie de Saint Guy en détail ; ceux que cela intéresserait la trouveront par exemple > ici (Vie écrite par le Rd Père Samuel de Chiaramonte, capucin, en italien, mais que ceux qui ne lisent pas l’italien pourront néanmoins aisément lire avec l’aide d’un traducteur automatique, malgré les imperfections dont ces logiciels sont coutumiers).

   Né en Sicile vers 290, dans la ville qui se nomme aujourd’hui Mazara del Vallo, Vitus (Guy) était issu d’une famille noble et riche. Son prénom est dérivé de « vita », la vie.
Son père était païen, mais sa mère chrétienne ; elle mourut cependant peu de temps après la naissance de Vitus et son père confia l’enfant à une nourrice et gouvernante nommée Crescence dont l’époux, Modeste, allait faire office de précepteur.

   Modeste et Crescence étaient de fervents chrétiens et, tout en prenant soin de Vitus, ils lui enseignèrent aussi la foi chrétienne que l’enfant embrassa avec  enthousiasme si bien que, à sa demande, ils le firent baptiser.
Lorsque son père apprit qu’il avait été baptisé à son insu, il entra dans une violente colère et, sur les conseils d’un juge nommé Valérien, il fit battre Vitus de coups de verges. Non seulement le supplice n’entama pas la résolution du jeune adolescent, mais il n’en proclama sa foi qu’avec davantage de détermination, et Dieu fit à cette occasion quelques miracles éclatants.
Cependant, comme son père réfléchissait à des moyens plus radicaux pour le faire apostasier, averti par un ange, Vitus rejoignit le couple qui le considérait comme un fils adoptif : ils s’enfuient alors de la ville, prirent le bateau et gagnèrent la Lucanie (aujourd’hui la Basilicate, province d’Italie méridionale).

palmes et glaive des martyrs - vignette

   Le jeune Vitus accomplissait toute sorte de miracles, et sa renommée se répandit de plus en plus, si bien qu’elle parvint jusqu’aux oreilles de l’empereur Dioclétien, qui le fit venir à Rome – avec Crescence et Modeste - pour guérir son fils possédé par un mauvais esprit. Vitus expulsa le démon, et Dioclétien – qui avait déclenché la plus sanglante des persécutions contre les chrétiens – fit pression sur eux pour qu’ils abandonnassent la vraie foi et sacrifiassent aux idoles.

   Vitus, Modeste et Crescence résistèrent à toutes ses sollicitations, promesses et menaces, si bien que Dioclétien, ulcéré, les fit emprisonner, puis soumettre à divers supplices pour les faire apostasier.

   Ainsi furent-ils placés dans une chaudière de poix brûlante, mais eux – tels les trois jeunes hébreux dans la fournaise de Nabuchodonosor – ne furent point indisposés et chantaient des hymnes de louange ; ils furent alors présentés à un lion affamé, mais celui-ci se coucha devant eux et leur lécha les pieds. Et comme ce prodige enthousiasmait les assistants et risquait de les gagner à la foi chrétienne, Dioclétien ordonna de les suspendre à un chevalet, instrument de torture sur lequel les corps étaient étirés jusqu’à entraîner la rupture des jointures et des os. Libérés par de nouveaux prodiges, et bien qu’ils fussent très affaiblis par les derniers supplices subis, Vitus, Modeste et Crescence furent conduits par des anges jusqu’au bord du fleuve Sélé, où ils rendirent leurs âmes à leur Créateur : c’était le 15 juin probablement de l’an 303.

Saint Guy Saint Modeste et Sainte Crescence dans la chadière de poix brûlante

Les Saints Guy, Modeste et Crescence dans la chaudière de poix
(on aperçoit Dioclétien, vêtu comme un grand seigneur du XVe siècle, assistant au supplice depuis une espèce de loggia)

   Les corps des martyrs furent discrètement ensevelis sur ces rives du Sélé où ils étaient trépassés. Mais au VIIe siècle Vitus apparut à une pieuse femme de Salerne prénommée Florence (Fiorenza) qui, navigant sur le Sélé, s’y trouva en grand danger de sombrer. Sauvée du naufrage, elle décida d’offrir une sépulture plus importante à l’adolescent martyr et à ses compagnons. C’est ainsi que les trois saints corps furent transportés à Polignano a Mare, près de Bari, dans les Pouilles. L’église qui fut édifiée en 672 en l’honneur des trois martyrs fut par la suite confiée aux bénédictins : ce n’est plus une abbaye de nos jours, mais des parties importantes des reliques de Saint Vitus s’y trouvent toujours.
En effet, au cours des siècles, en raison même des grands miracles accomplis par l’intercession de Saint Vitus, et de la diffusion très large de son culte, des reliques furent distribuées dans toute la Chrétienté : l’abbaye royale de Saint-Denys en reçut sous Pépin le Bref, par exemple, et à partir de Saint-Denys, il y eut encore des transferts de parcelles de ses ossements vers des sanctuaires de Germanie ou d’Europe du nord.
Le chef (c’est-à-dire le crâne) de Saint Guy fut transféré à Prague où la cathédrale lui est dédiée : c’est ainsi que Saint Vitus (Guy) est devenu l’un des célestes protecteurs du royaume de Bohème.

   L’intercession de Saint Vitus fut particulièrement efficace contre cette maladie infectieuse du système nerveux que l’on appelle chorée et qui, dans le langage populaire, a été appelée « danse de Saint Guy ».
Saint Guy est également invoqué contre l’épilepsie, la léthargie, les crampes, la rage et les morsures de chiens ou de serpents, l’énurésie, les convulsions et les troubles nerveux en général, ainsi que pour obtenir la grâce de faire une bonne confession.

Statue de Saint Guy portée en procession à Mazara

Statue reliquaire de Saint Guy portée en procession le jour de sa fête à Mazara, sa ville natale.

Prière en l’honneur de Saint Guy :

   O glorieux martyr, Saint Guy, par votre héroïque fidélité et votre brûlant amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ, obtenez-nous, nous vous en supplions, toutes les vertus nécessaires pour rester nous aussi inébranlablement fidèles à la vraie foi en face des dangers du monde, de ses attraits et de ses menaces.

   Vous qui avez guéri d’innombrables malades, montrez-vous encore aujourd’hui compatissant envers ceux qui souffrent, tout spécialement ceux qui sont atteints par des maladies des nerfs et ceux qui sont tourmentés par des convulsions.

   Enseignez-nous la grâce d’être attentifs aux inspirations de nos anges gardiens, et de marcher sans découragement, malgré toutes les épreuves, dans les voies de la perfection évangélique.

Ainsi soit-il.

palmes

2021-28. Deux catéchèses de Sa Sainteté le pape Benoît XVI consacrées à la figure de Saint Basile le Grand.

14 juin,
Fête de Saint Basile le Grand, évêque et docteur de l’Eglise ;
Mémoire de Saint Elisée, prophète ;
Anniversaire du massacre des Capucins de Nîmes, le 14 juin 1790 (cf. > ici).

       Pour faire mieux connaître aux fidèles les Pères et Docteurs de l’Eglise, Sa Sainteté le pape Benoît XVI, dans les premières années de son pontificat, leur a consacré un ensemble de catéchèses qui résument leurs vies, leurs enseignements principaux et les exemples particulièrement importants qu’ils donnent à nos temps où la doctrine et la spiritualité authentiques sont si souvent malmenées, méconnues, voire ignorées.

   En ce 14 juin, où le calendrier latin traditionnel célèbre la fête de Saint Basile de Césarée, appelé aussi Saint Basile le Grand, il est bon de lire ou de relire les deux catéchèses que le pape Benoît XVI a consacrées à ce très grand saint, qui a exercé une si grande importance sur la théologie et la liturgie, qui demeure l’un des grands patriarches de la vie monastique, et qui est également un des premiers théoriciens de ce que nous appelons aujourd’hui « la doctrine sociale de l’Eglise ». 

Saint Basile le Grand - gravure du XVIIe siècle

Saint Basile le Grand (gravure du XVIIe siècle)

1 – Catéchèse du mercredi 4 juillet 2007
à l’occasion de l’audience pontificale générale

Chers frères et sœurs !

   Aujourd’hui, nous voulons rappeler l’un des grands Pères de l’Eglise, saint Basile, défini par les textes liturgiques byzantins comme une « lumière de l’Eglise ». Il fut un grand Evêque du IV siècle, que l’Eglise d’Orient tout comme celle d’Occident considère avec admiration, en raison de sa sainteté de vie, de l’excellence de sa doctrine et de la synthèse harmonieuse entre ses qualités spéculatives et pratiques.
Il naquit autour de 330 dans une famille de saints, « authentique Eglise domestique », qui vivait dans un climat de foi profonde. Il accomplit ses études auprès des meilleurs maîtres d’Athènes et de Constantinople. Insatisfait de ses succès dans le monde, et s’étant rendu compte qu’il avait perdu beaucoup de temps en vanités, il confesse lui-même : « Un jour, comme me réveillant d’un sommeil profond, je me tournai vers l’admirable lumière de la vérité de l’Evangile…, et je pleurai sur ma vie misérable » (cf. Ep. 223 – PG 32, 824a). Attiré par le Christ, il commença à regarder vers Lui et à n’écouter que Lui (cf. Moralia 80, 1:  PG 31, 860bc.). Il se consacra avec détermination à la vie monastique dans la prière, dans la méditation des Saintes Ecritures et des écrits des Pères de l’Eglise, et dans l’exercice de la charité (cf. Epp. 2 et 22), suivant également l’exemple de sa sœur, sainte Macrine, qui vivait déjà dans l’ascétisme monacal. Il fut ensuite ordonné prêtre et, enfin, en 370, Evêque de Césarée de Cappadoce, dans l’actuelle Turquie.

   A travers sa prédication et ses écrits, il accomplit une intense activité pastorale, théologique et littéraire. Avec un sage équilibre, il sut concilier le service des âmes et le dévouement à la prière et à la méditation dans la solitude. Fort de son expérience personnelle, il encouragea la fondation de nombreuses « fraternités » ou communautés de chrétiens consacrés à Dieu, auxquelles il rendait fréquemment visite (cf. Grégoire de Nazianze, Oratio 43, 29 in laudem Basilii – PG 36, 536b). A travers la parole et les écrits, dont un grand nombre sont parvenus jusqu’à nous (cf. Regulae brevius tractatae, Préambule – PG 31, 1080ab), il les exhortait à vivre et à progresser dans la perfection. Divers législateurs du monachisme antique ont puisé à ses œuvres, dont saint Benoît, qui considérait Basile comme son maître (cf. Regula 73, 5). En réalité, il a créé un monachisme très particulier : non pas fermé à l’Eglise locale, mais ouvert à elle. Ses moines faisaient partie de l’Eglise particulière, ils en étaient le centre vivant qui, précédant les autres fidèles à la suite du Christ, et non seulement dans la foi, montrait la ferme adhésion au Christ – l’amour pour Lui – surtout dans les œuvres de charité. Ces moines, qui avaient des écoles et des hôpitaux, étaient  au service des pauvres et ont ainsi montré l’intégrité de la vie chrétienne. Ainsi, écrivait le Serviteur de Dieu Jean-Paul II : « Beaucoup pensent que cette institution importante qu’est la vie monastique dans la structure de toute l’Eglise, a été établie au cours des siècles surtout par saint Basile ou au moins qu’elle n’a pas été définie selon sa nature propre sans sa participation décisive »  (Lettre  apostolique  Patres Ecclesiae, n. 2).

   En tant qu’évêque et pasteur de son vaste diocèse, Basile se soucia constamment des conditions matérielles difficiles dans lesquelles vivaient les fidèles; il dénonça avec fermeté les maux ; il s’engagea en faveur des plus pauvres et des laissés-pour-compte ; il intervint également auprès des gouvernants pour soulager les souffrances de la population, en particulier dans les périodes de catastrophes ; il se préoccupa de la liberté de l’Eglise, s’opposant également aux puissants pour défendre le droit de professer la vraie foi (cf. Grégoire de Nazianze, Oratio 43, 48-51 in Laudem Basilii – PG 36, 557c-561c). A Dieu, qui est amour et charité, Basile rendit un précieux témoignage, en construisant plusieurs hospices pour les plus démunis (cf. Basile, Ep. 94 – PG 32, 488bc), une sorte de ville de la miséricorde, qui prit de lui son nom de Basiliade (cf. Sozomène, Historia Eccl. 6, 34:  PG 67, 1397a). Celle-ci se trouve à l’origine des institutions hospitalières modernes d’accueil et de soin des malades.

   Conscient que « la liturgie est le sommet vers lequel tend l’action de l’Eglise, et en même temps la source dont émane toute sa vertu », Basile, bien que toujours soucieux de réaliser la charité qui est la caractéristique de la foi, fut également un sage « réformateur liturgique » (cf. Grégoire de Nazianze, Oratio 43, 34 in laudem Basilii – PG 36, 541c). En effet, il nous a laissé une grande prière eucharistique [ou anaphore] qui tire son nom de lui, et il a donné une organisation fondamentale à la prière et à la psalmodie : sur son impulsion, le peuple aima et connut les Psaumes, et il se rendait en prière également la nuit (cf. Basile, In Psalmum 1, 1-2 – PG 29, 212a-213c). Et ainsi, nous voyons que liturgie, adoration, prière avec l’Eglise et charité vont de pair et se conditionnent réciproquement.

   Basile sut s’opposer avec zèle et courage aux hérétiques, qui niaient que Jésus Christ soit Dieu comme le Père (cf. Basile, Ep. 9, 3 – PG 32, 272a ; Ep. 52, 1-3 – PG 32, 392b-396a ; Adv. Eunomium 1, 20 – PG 29, 556c). De même, contre ceux qui n’acceptaient pas la divinité de l’Esprit Saint, il soutint que l’Esprit est Dieu lui aussi, et « doit être compté et glorifié avec le Père et le Fils » (cf. De Spiritu Sancto : SC 17bis, 348). C’est pourquoi Basile est l’un des grands Pères qui ont formulé la doctrine sur la Trinité :  l’unique Dieu, précisément parce qu’il est amour, est un Dieu en trois Personnes, qui forment l’unité la plus profonde qui existe : l’unité divine.

   Dans son amour pour le Christ et pour son Evangile, le grand Cappadocien s’engagea également à recomposer les divisions au sein de l’Eglise (cf. Epp. 70 et 243), se prodiguant afin que tous se convertissent au Christ et à sa Parole (cf. De iudicio 4 – PG 31, 660b-661a), force unificatrice, à laquelle tous les croyants doivent obéir (cf. ibid. 1-3 – PG 31, 653a-656c).

   En conclusion, Basile se dévoua totalement au service fidèle de l’Eglise et à l’exercice du ministère épiscopal aux multiples aspects. Selon le programme qu’il traça lui-même, il devint « apôtre et ministre du Christ, dispensateur des mystères de Dieu, héraut du royaume, modèle et règle de piété, œil du corps de l’Eglise, pasteur des brebis du Christ, pieux médecin, père et nourricier, coopérateur de Dieu, vigneron de Dieu, bâtisseur du temple de Dieu » (cf. Moralia 80, 11-20 – PG 31, 864b-868b).

   C’est ce programme que le saint évêque remet aux annonciateurs de la Parole – hier comme aujourd’hui -, un programme qu’il s’engagea lui-même généreusement à mettre en pratique. En 379, Basile, qui n’avait pas encore cinquante ans, consumé par les peines et par l’ascèse, retourna à Dieu, « dans l’espérance de la vie éternelle, à travers Jésus Christ Notre Seigneur » (De Baptismo 1, 2, 9). C’était un homme qui a véritablement vécu avec le regard fixé sur le Christ. C’était un homme d’amour envers son prochain. Empli de l’espérance et de la joie de la foi, Basile nous montre comment être réellement chrétiens.

Saint Basile célébrant la divine liturgie - fresque de la cathédrale d'Ohrid en Macédoine

Saint Basile le Grand célébrant la divine liturgie
(fresque de la cathédrale d’Ohrid – Macédoine)

 2 - Catéchèse du mercredi 1er août 2007
à l’occasion de l’audience pontificale générale

Chers frères et sœurs !

   Après ces trois semaines de pause, nous reprenons nos rencontres habituelles du mercredi. Aujourd’hui, je voudrais simplement reprendre la dernière catéchèse, dont le thème était la vie et les écrits de saint Basile, Evêque dans l’actuelle Turquie, en Asie mineure, au IV siècle. La vie de ce grand Saint et ses œuvres sont riches d’éléments de réflexion et d’enseignements précieux pour nous aussi aujourd’hui.

   Avant tout, le rappel au mystère de Dieu, qui demeure la référence la plus significative et vitale pour l’homme. Le Père est « le principe de tout et la cause de l’existence de ce qui existe, la racine des vivants » (Hom 15, 2 de fide – PG 31, 465c) et surtout il est « le Père de Notre Seigneur Jésus Christ » (Anaphora sancti Basilii). En remontant à Dieu à travers les créatures, nous « prenons conscience de sa bonté et de sa sagesse » (Basile, Contra Eunomium 1, 14 – PG 29, 544b). Le Fils est l’« image de la bonté du Père et le sceau de forme égale à lui » (cf. Anaphora sancti Basilii). A travers son obéissance et sa passion, le Verbe incarné a réalisé la mission de Rédempteur de l’homme (cf. Basile, In Psalmum 48, 8 – PG 29, 452ab ; cf. également De Baptismo 1, 2 -  SC 357, 158).

   Enfin, il parle largement de l’Esprit Saint, auquel il a consacré tout un livre. Il nous révèle que l’Esprit anime l’Eglise, la remplit de ses dons, la rend sainte. La lumière splendide du mystère divin se reflète sur l’homme, image de Dieu, et en rehausse la dignité. En contemplant le Christ, on comprend pleinement  la dignité de l’homme. Basile s’exclame : « [Homme], rends-toi compte de ta grandeur en considérant le prix versé pour toi:  vois le prix de ton rachat, et comprends ta dignité! » (In Psalmum 48, 8 – PG 29, 452b). En particulier le chrétien, vivant conformément à l’Evangile, reconnaît que les hommes sont tous frères entre eux, que la vie est une administration des biens reçus de Dieu, en vertu de laquelle chacun est responsable devant les autres et celui qui est riche doit être comme un « exécuteur des ordres de Dieu bienfaiteur » (Hom. 6 de avaritia - PG 32, 1181-1196). Nous devons tous nous aider, et coopérer comme les membres d’un seul corps (Ep. 203, 3).

   Et, dans ses homélies, il a également utilisé des paroles courageuses, fortes sur ce point. Celui qui, en effet, selon le commandement de Dieu, veut aimer son prochain comme lui-même, « ne doit posséder rien de plus que ce que possède son prochain » (Hom. in divites - PG 31, 281b).

   En période de famine et de catastrophe, à travers des paroles passionnées, le saint Evêque exhortait les fidèles à « ne pas se révéler plus cruels que les animaux sauvages…, s’appropriant le bien commun, et possédant seul ce qui appartient à tous » (Hom. tempore famis - PG 31, 325a). La pensée profonde de Basile apparaît bien dans cette phrase suggestive : « Tous les indigents regardent nos mains, comme nous-mêmes regardons celles de Dieu, lorsque nous sommes dans le besoin ». Il mérite donc pleinement l’éloge qu’a fait de lui Grégoire de Nazianze, qui a dit après la mort de Basile : « Basile nous persuade que nous, étant hommes, ne devons pas mépriser les hommes, ni offenser le Christ, chef commun de tous, par notre inhumanité envers les hommes; au contraire, face aux malheurs des autres, nous devons nous-mêmes faire le bien, et prêter à Dieu notre miséricorde car nous avons besoin de miséricorde » (Grégoire de Nazianze, Oratio 43, 63 – PG 36, 580b). Des paroles très actuelles. Nous voyons que saint Basile est réellement l’un des Pères de la Doctrine sociale de l’Eglise.

   En outre, Basile nous rappelle qu’afin de garder vivant en nous l’amour  envers  Dieu, et envers les hommes, nous avons besoin de l’Eucharistie, nourriture adaptée pour les baptisés, capable d’alimenter les énergies nouvelles dérivant du Baptême (cf. De Baptismo 1, 3 – SC 357, 192). C’est un motif de grande joie de pouvoir participer à l’Eucharistie (Moralia 21, 3 – PG 31, 741a), instituée « pour conserver sans cesse le souvenir de celui qui est mort et ressuscité pour nous » (Moralia 80, 22 – PG 31, 869b). L’Eucharistie, immense don de Dieu, préserve en chacun de nous le souvenir du sceau baptismal, et permet de vivre en plénitude et dans la fidélité la grâce du Baptême. Pour cela, le saint Evêque recommande la communion fréquente, et même quotidienne :  « Communier même chaque jour, en recevant le saint corps et sang du Christ, est chose bonne et utile; car lui-même dit clairement : « Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle » (Jn 6, 54). Qui doutera donc que communier continuellement à la vie ne soit pas vivre en plénitude ? » (Ep. 93 – PG 32, 484b). L’Eucharistie, en un mot, nous est nécessaire pour accueillir en nous la vraie vie, la vie éternelle (cf. Moralia 21, 1 – PG 31, 737c).

   Enfin, Basile s’intéressa naturellement également à la portion élue du peuple de Dieu, que sont les jeunes, l’avenir de la société. Il leur adressa un Discours sur la façon de tirer profit de la  culture  païenne de l’époque. Avec beaucoup d’équilibre et d’ouverture, il reconnaît que dans la littérature classique, grecque et latine, se trouvent des exemples de vertu. Ces exemples de vie droite peuvent être utiles pour le jeune chrétien à la recherche de la vérité et d’une façon de vivre droite (cf. Ad Adolescentes 3). C’est pourquoi, il faut emprunter aux textes des auteurs classiques ce qui est adapté et conforme à la vérité : ainsi, à travers une attitude critique et ouverte – il s’agit précisément d’un véritable « discernement » – les jeunes grandissent dans la liberté. A travers la célèbre image des abeilles, qui ne prennent des fleurs que ce dont elles ont besoin pour le miel, Basile recommande : « Comme les abeilles savent extraire le miel des fleurs, à la différence des autres animaux qui se limitent à jouir du parfum et de la couleur des fleurs, de même, de ces écrits également… on peut recueillir un bénéfice pour l’esprit. Nous devons utiliser ces livres en suivant en tout l’exemple des abeilles. Celles-ci ne vont pas indistinctement sur toutes les fleurs, et ne cherchent pas non plus à tout emporter de celles sur lesquelles elles se posent, mais elles en extraient uniquement ce qui sert à la fabrication du miel et laissent le reste. Et nous, si nous sommes sages, nous prendrons de ces écrits uniquement ce qui est adapté à nous, et conforme à la vérité, et nous laisserons de côté le reste » (Ad Adolescentes 4). Basile, surtout, recommande aux jeunes de croître dans les vertus, dans la façon droite de vivre : « Tandis que les autres biens… passent d’une main à l’autre, comme dans un jeu de dés, seule la vertu est un bien inaliénable, et demeure toute la vie et après la mort » (Ad Adolescentes 5).

   Chers frères et sœurs, il me semble que l’on peut dire que ce Père d’une époque lointaine nous parle encore et nous dit des choses importantes. Avant tout, cette participation attentive, critique et créatrice à la culture d’aujourd’hui. Puis, la responsabilité sociale : c’est une époque à laquelle, dans un univers mondialisé, même les peuples géographiquement éloignés sont réellement notre prochain. Nous avons ensuite l’amitié avec le Christ, le Dieu au visage humain. Et, enfin, la connaissance et la reconnaissance envers le Dieu créateur, notre Père à tous : ce n’est qu’ouverts à ce Dieu, le Père commun, que nous pouvons construire un monde juste et un monde fraternel.

Saint Basile le Grand célébrant la divine liturgie - Pierre Subleyras

Saint Basile le Grand célébrant la divine liturgie
(Pierre Subleyras [1699-1749] – musée de l’Ermitage à Saint-Petersbourg)

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