2015-104. Nous devons attendre le second avènement de Notre-Seigneur sans relâcher notre vigilance et sans cesser de nous purifier par les oeuvres de la pénitence.
Deuxième sermon de notre glorieux Père Saint Augustin
sur
l’avènement du Sauveur.
On ne le répètera jamais assez, le temps de l’Avent est d’abord et principalement un temps de préparation au second avènement de Notre-Seigneur Jésus-Christ, dont le premier avènement – Sa naissance à Bethléem – est le gage : la liturgie de l’Avent est très claire à ce sujet, et ce n’est qu’à partir du mercredi des Quatre-Temps, c’est à dire au milieu de la troisième semaine de l’Avent, que l’Eglise nous prépare à la célébration de l’anniversaire de la naissance du Sauveur sur la terre.
Voici donc, dans cet esprit de la liturgie de l’Avent ; un court sermon de notre glorieux Père Saint Augustin qui vient nous stimuler à la vigilance, à la pénitence et à la pratique des bonnes oeuvres.
Fairford (comté du Gloucercestershire – Angleterre), église Sainte-Marie (XV-XVI èmes siècles)
Partie centrale de la verrière ouest : le retour du Christ comme Juge à la fin des temps.
§ 1 – Entrée en matière : Saint Augustin veut seulement être l’interprête de ce que le Saint-Esprit a proclamé par Saint Paul.
« Nous attendons le Sauveur, Notre-Seigneur Jésus-Christ » (Philip. III, 20).
Bien-aimés frères, pour vous entretenir de la solennité qui est proche, je ne me servirai pas d’un exorde qui vienne de moi ; je n’emploierai point de paroles dictées par la sagesse humaine, mais je m’arrêterai aux paroles d’un célèbre prédicateur, m’efforçant de les faire bien comprendre à mes fidèles auditeurs et de leur montrer ce que le Docteur des nations prêche dans la foi et la vérité, ce qu’annonce cette trompette de Dieu, cette cymbale de Jésus-Christ.
§ 2 – Saint Augustin apporte le témoignage des Saintes Ecritures pour établir qu’il y a deux avènements de Notre-Seigneur Jésus-Christ.
« Nous attendons le Sauveur, Notre-Seigneur Jésus-Christ ».
Or, comme l’ont entendu les oreilles catholiques sur le giron de l’Eglise, le Sauveur, que nous croyons être déjà venu pour restaurer le monde, reviendra encore, un jour, pour nous juger tous, et nous L’attendons : la foi en ce qui est arrivé doit, par la charité, nous affermir dans la pratique du bien, comme l’attente de ce qui arrivera au moment de notre mort doit nous rendre vigilants et nous éloigner du mal.
Nous devons croire, en effet, sans ombre de doute, que le Christ est venu, puisque « nous avons reçu Sa miséricorde au milieu de son temple » (Ps. XLVI, 10) ». D’ailleurs, « le Verbe S’est fait chair, et Il a habité parmi nous » (Jean I, 14) ; « Il a abaissé les cieux, et Il est descendu » (Ps. XVII, 10) ; car « Celui qui est descendu est le même qui est monté au-dessus de tous les cieux » (Ephés. IV, 10), et qui, à la fin des temps, redescendra du ciel. Il en est descendu pour nous arracher à la malédiction de la loi, et faire de nous les enfants adoptifs de Dieu (Ephés. I, 5).
Oui, le Fils de Dieu est descendu, Il a pris notre nature, et Il est devenu le Fils de l’homme, afin de communiquer Sa gloire aux enfants des hommes et d’en faire les enfants de Dieu. Parce qu’Il S’est abaissé jusqu’à notre niveau, nous avons tous été élevés jusqu’à Lui. Il est aussi monté, afin d’envoyer du haut des cieux, à Ses fidèles, le don du Saint-Esprit, et d’inspirer aux coeurs de Ses disciples l’amour des choses célestes. Il est monté afin que le troupeau, qui se trouvait placé si bas, pût monter avec courage jusqu’au point culminant où l’a précédé le Pasteur. Enfin, Il descendra de nouveau, lorsqu’au dernier jour Il viendra rendre à chacun selon ses oeuvres : c’est ce que l’ange a dit aux disciples du Sauveur, lorsque, stupéfaits et étonnés, ils Le voyaient monter au ciel : « Hommes de Galilée, pourquoi demeurez-vous là regardant les cieux ? » (Act. I, 11).
Vous l’avez entendu, Celui que la foi catholique croit et confesse avoir déjà opéré un premier avènement, reviendra indubitablement à la fin des siècles. Il est venu, d’abord, dans un état d’humiliation, et pour être jugé : Il reviendra, en second lieu, dans un appareil terrible, et Il jugera les vivants et les morts. A son premier avènement, « Il est venu chez Lui, et les siens ne l’ont point connu » (Jean I, 11). A son second avènement, « tout genou fléchira devant Lui dans le ciel, sur la terre et dans les enfers » (Philip. II, 11), pour Lui rendre hommage. Voilà le redoutable et terrible Juge que nous attendons avec crainte et tremblement ; « Il changera notre misérable corps » (Philip. III, 21).
§ 3 – Rappel du péché originel.
Par un bienfait tout gratuit de son divin Auteur, le premier homme a été formé et créé à la ressemblance du Très-Haut. Le Fils de Dieu est l’image du Père, la splendeur et la figure de Sa substance (cf. Hébr. I, 3). Mais, préférablement à toutes les autres créatures, l’homme a été fait à l’image de Dieu, quant à son âme, pour qu’il fût capable de raisonner, charitable, juste, saint et innocent, pour qu’en lui, comme dans un miroir, se reflétassent les traits brillants de son Créateur. Il a conservé sa ressemblance avec Dieu tant que sa raison est restée dominante et que son coeur ne s’est laissé ni obscurcir ni aveugler par les ténèbres de l’iniquité ; mais, en cédant aux suggestions de son épouse, en mangeant du fruit défendu, il a affaibli et complètement effacé en lui les traits de l’image divine qui s’y trouvait empreinte ; alors la masse du genre humain a été viciée et corrompue en sa personne. En effet, le vice, dont la racine de l’arbre se trouvait infectée, s’est à tel point communiqué à la tige et aux branches, que tous les hommes, issus d’Adam par l’effet de la concupiscence charnelle, sont sujets à la loi du péché et à la mort. Paul l’affirme, car il dit : « En lui tous ont péché » (Rom. V, 12), et « par la désobéissance d’un seul, plusieurs sont devenus pécheurs » (Rom. V, 19).
§ 4 – Le Christ Sauveur est venu opérer la réparation de l’homme déchu : mystères de l’Incarnation et de la Rédemption.
Dans ces derniers temps est venu en ce monde le Fils du Dieu qui l’a tiré du néant ; descendant du trône de Son Père, sans Se dépouiller de Sa splendeur, prenant notre nature sans perdre la Sienne, Il a uni notre humanité à Sa divinité dans le sein d’une Vierge, sans que l’intégrité de cette Vierge ait souffert la moindre atteinte ; Il est né de la chair, mais non par l’effet de la concupiscence ; Il S’est fait homme, mais non par le concours de l’homme. Il était « saint, innocent, sans tache » (Hébr. VII, 26), et étranger à toute convoitise charnelle.
C’est ainsi que le Médiateur de Dieu et des hommes est devenu participant de notre nature, c’est ainsi qu’Il nous a conféré Sa grâce et a merveilleusement reformé en nous les traits de ressemblance avec Dieu, qu’y avait effacés la gourmandise de notre premier père ; c’est ainsi, enfin, qu’Il nous a ramenés à une condition singulièrement meilleure, puisqu’à la suite de la prévarication primitive, les hommes étaient forcément condamnés à mourir, et que par la résurrection finale ils deviendront immortels.
§ 5 – Nous devons attendre le second avènement de Notre-Seigneur sans relâcher notre vigilance et sans cesser de nous purifier par les oeuvres de la pénitence.
Mes très-chers frères, ce Juge si bon et si miséricordieux, qui « changera la misérable condition de notre corps » (Philip. III, 21), nous devons donc L’attendre dans les sentiments d’une inquiétude et d’une crainte extrêmes.
Changeons de vie, déplorons amèrement les péchés que nous avons commis, et puisque nous imprimons sans cesse à notre âme la tache de l’iniquité, purifions notre conscience par un nouveau baptême, celui de nos larmes. Comme nous le dit l’Apôtre : « Vivons avec sobriété, justice et piété en ce monde, en attendant le bonheur que nous espérons et l’avènement du grand Dieu » (Tit. II, 13).
Que l’apparence trompeuse des biens passagers d’ici-bas ne nous induise point en une fausse sécurité ; que les charmes de la terre ne nous arrêtent pas dans l’accomplissement de l’oeuvre de Dieu ; soupirons plutôt après les choses du ciel ; débarrassons-nous, par les gémissements de la pénitence, du fardeau de nos fautes ; puissent nos bonnes oeuvres nous donner l’espérance des joies de l’éternité !
Alors nous attendrons avec crainte et tremblement le Sauveur, Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartiennent la gloire et l’honneur, pour les siècles des siècles. Ainsi soit-il.
Le Christ Juge (détail de la verrière ouest de l’église Sainte-Marie de Fairford)