15 décembre,
Octave de l’Immaculée Conception (cf. > ici).
Le village de Coustouges, en Vallespir
Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,
A l’occasion des fêtes de la Très Sainte Vierge Marie, j’aime beaucoup, lorsque cela est possible, me rendre dans quelque sanctuaire ou chapelle qui lui est dédié ; et si ce n’est pas réalisable physiquement, je m’y « transporte » par l’esprit, pour saluer l’image de la Madone qui s’y trouve mise à l’honneur et lui réciter une prière…
En ce jour octave de l’Immaculée Conception de Notre-Dame, je vous propose de vous « emmener » avec moi, pour nous rendre ensemble dans cette magnifique province qu’est le Roussillon, que j’apprécie fort, pour de multiples raisons.
A l’occasion de la fête de Saint Damase (cf. > ici), j’ai évoqué le village de Coustouges, tout en haut du Vallespir, où une tradition locale rapporte que naquit Laurentia, la mère du saint pontife, ajoutant qu’il aurait lui-même ordonné, en 370, qu’une chapelle y fut édifiée.
Cette tradition est gravée dans le marbre à Coustouges : voici la plaque qu’on trouve scellée dans un mur, à proximité de l’église.
C’est cette église, dédiée à la Très Sainte Mère de Dieu, que je vous emmène donc visiter aujourd’hui.
Une petite église de village, qui n’est évidemment plus la chapelle qu’aurait voulue Saint Damase, mais une remarquable église romane du XIIème siècle, construite par les moines de l’abbaye Sainte-Marie d’Arles-sur-Tech (celle-là même où sont conservées les reliques des Saints Abdon et Sennen – cf. > ici), qui eurent ici un prieuré.
C’est une petite église à une seule nef, sans transept, relativement massive, flanquée d’un haut et fin clocher carré dont l’élégance opère un intéressant contraste avec le reste de l’édifice.
L’accès à l’église se fait par une porte sans ornementation pratiquée dans le mur sud. Comme la majorité des églises anciennes en Vallespir, les vantaux sont ornés de remarquables ferrures formant rinceaux. Le loquet est lui-même travaillé de manière à se terminer en tête d’animal.
Franchissons cette porte.
Elle ne donne pas accès directement à la nef, mais dans son grand « vestibule » : sorte de narthex, de « sas » entre le monde profane et la maison de Dieu, et de baptistère : remarquez l’impressionnante cuve baptismale de granit qui s’y trouve placée.
En voyant les espèces de banquettes de pierre, comme des degrés, qui courent le long de la muraille, on pense aussitôt que ce lieu pouvait aussi être l’endroit où se faisaient les assemblées paroissiales, au temps où – pendant des siècles, avant la révolution supposée avoir apporté la « démocratie » au peuple – les décisions concernant la communauté villageoise étaient prises sur place par cette communauté villageoise, après avoir invoqué le Saint-Esprit ou entendu la Sainte Messe pour avoir les bonnes inspirations, sans qu’il soit besoin d’avoir à consulter les règlements, avis, consignes et normes départementaux, régionaux, nationaux et européens…
On le comprend, en regardant à main droite sur le cliché ci-dessus, c’est là que se trouve la véritable porte d’entrée de l’église.
Flanquée de colonnes, surmontée d’un tympan sculpté de motifs géométriques élaborés, on est particulièrement émerveillé par le fin travail de sculpture de ses voussures : « Non est hic aliud nisi domus Dei, et porta cœli : ce n’est pas autre chose ici que la maison de Dieu, et la porte du ciel ! » (Gen. XXVIII, 17).
Le contraste entre cette nef romane très sobre et le sanctuaire est saisissant.
On comprend vite que, en réalité, ce grand retable de pierre, de style classique, auquel est adossé l’autel, est un aménagement du XVIIème ou XVIIIème siècle, et que le sanctuaire roman d’origine, semicirculaire et voûté en cul-de-four, se trouve au-delà.
En revanche, n’a pas bougée, l’extraordinaire grille de fer forgé, sans doute l’une des plus belles de la région, qui forme lâ clôture entre la nef et le sanctuaire.
Le contraste lumineux entre la nef sombre et la clarté dégagée par l’ouverture pratiquée dans le retable au-dessus du tabernacle ne permet pas tout de suite de voir ce qui y est exposé : nous le découvrirons en nous approchant.
Toutefois, avant que de nous avancer, profitons justement de ce que nous avons un peu de recul pour admirer spécialement le sommet de ce retable, qui culmine avec la représentation de la colombe du Saint-Esprit.
Cette représentation de la colombe du Saint-Esprit au sommet du retable n’est certainement pas un « hasard ».
Il serait en effet très étonnant que, même dans un petit village juché sur un col près des sommets pyrénéens, le curé-prieur de l’époque et les artisans, artistes ou imagiers locaux, n’eussent pas eu l’intention expresse de représenter au-dessus de celle qui nous est présentée au centre du retable, Celui qui l’a « couverte de Son ombre » et rendue féconde : la Très Sainte Vierge Marie Mère de Dieu, invoquée ici sous le vocable de Notre-Dame de l’Espinas (c’est-à-dire Notre-Dame de l’Aubépine).
Notre-Dame de l’Espinas est une Vierge à l’Enfant du XVIIIème siècle, debout, portant son Petit Jésus sur le bras gauche, tenant un petit rameau d’aubépine dans la main droite. L’Enfant et la Mère sont couronnés.
La particularité de cette statue, c’est que les robes de la Vierge (elle en a plusieurs) sont faites avec des robes de mariées, qui lui sont offertes après les cérémonies d’épousailles ; et les robes de l’Enfant Jésus sont faites avec des robes de baptême d’enfants baptisés ici.
J’ai visité l’église Sainte-Marie de Coustouges en février 2022, et je l’ai beaucoup aimée… J’y fusse demeuré bien davantage que l’emploi du temps ce jour-là ne l’eût permis !
J’y retourne aujourd’hui, avec vous, bien chers Amis, en ce jour octave de l’Immaculée Conception et alors que nous allons commencer demain la neuvaine préparatoire à la fête de la Nativité de notre divin Sauveur. Priez-la avec moi :
Vous êtes au-delà de toute beauté, ô Vierge marie, ô ma Reine, ô ma Mère,
Vous en laquelle la tache originelle n’a jamais été,
Vous en laquelle, toute pure et toute sainte,
ne fut jamais la souillure du péché !
Recouverte de la nuée divine,
comme il sied au Temple véritable et vivant
dédicacé par le vrai Salomon, Roi de paix,
pour qu’y réside la Présence cachée de l’Emmanuel ;
Vous êtes bénie, consacrée et sanctifiée à jamais,
Arche de l’Alliance nouvelle et éternelle,
renfermant la Loi vivante et la Manne éternelle !
Votre vêtement est blanc plus que la neige :
mais plus immaculée encore est la splendeur de votre âme,
rejaillissant sur votre visage en rayons d’immarcescible gloire,
Vous resplendissez comme le soleil,
ô Vous dont le Soleil de Justice a fait Son trône,
Vous choisissant entre toutes les femmes,
et Vous préparant de toute éternité pour être l’Eve nouvelle :
Vierge Mère portant Celui qui est la Vie,
Vierge Mère donnant la Vie au monde !
Née en cette Jérusalem de la terre
pour devenir la figure de la Jérusalem céleste,
Vous en êtes l’ornement et la gloire ;
Vous êtes la joie de l’Israël véritable,
qui est la Sainte Eglise et le peuple des vrais fidèles,
qui n’ont point trahi l’Alliance
conclue dans le Sang de l’Agneau mystique,
ce Sang qu’Il a reçu de Vous !
Entraînez-nous, ô Vierge immaculée :
nous mettrons dans les vôtres nos pas de pauvres pécheurs,
et nous remettant entre vos mains,
pour que Vous nous gardiez de tout égarement,
nous Vous suivrons, à l’odeur de vos parfums…
Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.