Archive pour la catégorie 'Textes spirituels'

2025-37. Nos devoirs envers les morts exposés par notre Bienheureux Père Saint Augustin.

14 février,
Au Mesnil-Marie : « La commémoraison des pères, mères, frères, sœurs, familles et proches de notre Ordre »
(Note : cette commémoraison est mentionnée à la date du 1er février dans le martyrologe propre des Ermites de Saint Augustin publié sous Léon XIII, mais ce jour étant déjà occupé chez nous par une autre célébration, conformément à l’usage nous reportons cette commémoraison à la première férie disponible).

Memento mori - blogue

croix celtique - vignette

Nos devoirs envers les morts

Sermon CLXXII de notre Bienheureux Père Saint Augustin

; et s’il est louable de leur faire de belles funérailles et d’élever des monuments pour perpétuer leur souvenir, il est mieux encore de les secourir par tous moyens.

§ 1 – La mort de nos proches nous fait verser des larmes, c’est la nature qui le veut ; mais la religion exige que nous versions ces larmes en conformité avec notre espérance chrétienne :

   En nous parlant de « ceux qui dorment », c’est-à-dire de nos bien chers défunts, le Bienheureux Apôtre nous recommande de « ne pas nous affliger comme ceux qui sont sans espoir » (1 Thess. IV, 12), c’est-à-dire qui ne comptent ni sur la résurrection ni sur l’incorruptibilité sans fin. Aussi quand ordinairement l’infaillible véracité de l’Ecriture compare la mort au sommeil, c’est pour qu’à l’idée de sommeil nous ne désespérions pas du réveil. Voilà pourquoi encore nous chantons dans un psaume : « Est-ce que celui qui dort ne s’éveillera point ? » (Ps. XL, 9).
La mort, quand on aime, cause donc une tristesse en quelque sorte naturelle ; car c’est la nature même et non l’imagination, qui a la mort en horreur ; et l’homme ne mourrait pas sans le châtiment mérité par son crime.
Si d’ailleurs les animaux, qui sont créés pour mourir chacun en son temps, fuient la mort et recherchent la vie ; comment l’homme ne s’éloignerait-il point du trépas, lui qui avait été formé pour vivre sans fin s’il avait voulu vivre sans péché ? De là vient que nous nous attristons nécessairement, lorsque la mort nous sépare de ceux que nous aimons.
Nous savons sans doute qu’ils ne nous laissent pas ici pour toujours et qu’ils ne font que nous devancer un peu ; néanmoins, en tombant sur l’objet de notre amour, la mort, qui fait horreur à la nature, attriste en nous l’amour même. Aussi l’Apôtre ne nous invite point à ne pas nous affliger, mais à ne pas nous désoler « comme ceux qui sont sans espoir ».
Nous sommes dans la douleur quand l’inévitable mort nous sépare des nôtres, mais nous avons l’espérance de nous réunir à eux. Voilà ce qui produit en nous, d’un côté 
le chagrin, de l’autre la consolation ; l’abattement qui vient de la faiblesse et la vigueur que rend la foi ; la douleur que ressent la nature et la guérison qu’assurent les divines promesses.

croix celtique - vignette

§ 2 - Il nous faut surtout soulager les âmes de nos défunts par des prières, en particulier l’offrande du Saint-Sacrifice, et par des aumônes : ce sont des suffrages qui aident puissamment nos défunts, à condition toutefois qu’ils soient morts avec des dispositions qui leur permettent de profiter de ces secours :

   Par conséquent les pompes funèbres, les convois immenses, les dépenses faites pour la sépulture, la construction de monuments splendides, sont pour les vivants une consolation telle quelle : ils ne servent de rien aux morts.
Mais les prières de la Sainte Eglise, le Sacrifice de notre salut et les aumônes distribuées dans l’intérêt de leurs âmes, obtiennent pour eux sans aucun doute que le Seigneur les traite avec plus de clémence que n’en ont mérité leurs péchés.
En effet la tradition de nos pères et la pratique universelle de l’Eglise veulent qu’en rappelant au moment prescrit, durant le sacrifice même, le souvenir des fidèles qui sont morts dans la communion du Corps et du Sang de Jésus-Christ, on prie pour eux et on proclame que pour eux on sacrifie.
Or, si pour les recommander à Dieu on fait des œuvres de charité, qui pourrait douter qu’ils n’en profitent, quand il est impossible qu’on prie en vain pour eux ? Il est incontestable que tout cela sert aux morts ; mais aux morts qui ont mérité avant leur trépas de pouvoir en tirer avantage après.

   Car il y a des défunts qui ont quitté leurs corps sans avoir la foi qui agit par la charité (Galat. V, 6), et sans s’être munis des sacrements de l’Eglise. C’est en vain que leurs amis leur rendent ces devoirs de piété, puisqu’ils n’ont pas possédé pendant leur vie le gage même de la piété ; soit qu’ils n’aient pas reçu, soit qu’ils aient reçu inutilement la grâce de Dieu, s’amassant ainsi, non pas des trésors de miséricorde, mais des trésors de colère.
Ne croyez donc pas que les morts acquièrent de nouveaux mérites quand on fait du bien pour eux ; ce bien est en quelque sorte la conséquence de leurs mérites antérieurs. Il n’y a pour en profiter que ceux qui ont mérité pendant leur vie d’y trouver un soulagement après leur mort. Tant il est vrai que nul ne pourra recevoir alors, que ce dont il se sera rendu digne auparavant !

croix celtique - vignette

§ 3 – Saint Augustin conclut son propos en insistant sur la vision surnaturelle de la mort qui doit animer les fidèles : ils doivent continuer à venir en aide à leurs défunts, non seulement en participant aux cérémonies de funérailles (c’est la septième œuvre de miséricorde corporelle) mais en en priant pour le repos de leurs âmes et en offrant pour cela des aumônes et en faisant célébrer le Saint-Sacrifice à leur intention.

   Laissons donc les cœurs pieux pleurer la mort de leurs proches, et verser sur eux les larmes que provoque la vue de ce qu’ils ont souffert : seulement que leur douleur ne soit pas inconsolable, et qu’à leurs douces larmes succède bientôt la joie que donne la religion en nous montrant que si les fidèles s’éloignent de nous tant soit peu au moment du trépas, c’est pour passer à un état meilleur.
Je veux aussi que nous leur portions des consolations fraternelles, soit en assistant aux funérailles, soit en nous adressant directement à leur douleur, et qu’ils n’aient pas sujet de se plaindre et de dire : « J’ai attendu qu’on compatit à ma peine, mais en vain ; qu’on me consolât, et je n’ai trouvé personne » (Ps. LXVIII, 21).
Chacun peut, selon ses moyens, faire des funérailles et construire des tombeaux : l’Ecriture met cela au nombre des bonnes œuvres ; elle loue, elle exalte non seulement ceux qui ont rendu ces devoirs aux patriarches, aux autres saints, et aux autres hommes indistinctement , mais encore ceux qui ont honoré de cette manière le Corps sacré du Seigneur : c’est pour les vivants un dernier devoir envers les morts et un allégement à leur propre douleur.
Quant à ce qui profite réellement aux âmes des morts, savoir les offrandes sacrées, les prières et les distributions d’aumônes, qu’ils s’y appliquent avec beaucoup plus de soin de persévérance et de générosité, s’ils ont pour leurs proches, dont le corps est mort et non pas l’âme, un amour vraiment spirituel et non seulement un amour charnel.

pleurants en procession - blogue

2025-36. La Bienheureuse Christine de Spolète, vierge et pénitente de l’Ordre de Saint Augustin.

13 février,
Dans le diocèse de Viviers, la fête de Saint Avit de Vienne, évêque et confesseur (cf. ici) ;
Dans l’Ordre de Saint Augustin, la fête de la Bienheureuse Christine de Spolète, vierge et pénitente de notre Ordre ;
Anniversaire de l’attentat mortel contre Monseigneur le duc de Berry (cf. ici).

Bienheureuse Christine de Spolète

       Dans le calendrier propre de l’Ordre des Ermites de Saint Augustin, les « Christine » se suivent et ne se ressemblent pas !
En effet, juste après la Bienheureuse Christine Ciccarelli de l’Aquila, fêtée le 12 février (cf. > ici), et lui étant antérieure de quelques dizaines d’années, nous commémorons le 13 la Bienheureuse Christine de Spolète, ainsi présentée par le martyrologe :

   « A Spolète dans l’Ombrie, la naissance au ciel de la Bienheureuse Christine, vierge, qui prit l’habit du tiers-ordre de Saint Augustin, adopta d’abord la vie érémitique, et après avoir ensuite servi les malades, se reposa dans une sainte mort ». 

   Pendant longtemps, les données absolument certaines sur sa vie étaient très incomplètes : Christine est arrivée à Spolète, très jeune femme revêtue de l’habit des tertiaires de Saint Augustin, un peu après 1450, alors qu’elle avait décidé de changer de vie et ayant abandonné sa famille et les lieux où elle avait vécu.
Lorsqu’elle est arrivée à Spolète, son itinérance n’était pas à son début : elle s’était déjà trouvée à proximité d’autres couvents augustiniens, avait visité plusieurs sanctuaires ou lieux de pèlerinage, priait beaucoup, se mortifiait tout autant : une sorte d’ermite en itinérance, puisqu’elle changeait de lieu dès qu’on faisait un peu trop attention à elle.

   Elle aurait désiré se rendre à Assise, à Rome puis en Terre Sainte, dit-on, mais, à Spolète, elle se mit au service des malades de l’hospice « della Stella » (de l’étoile).
La Providence qui avait disposé autrement qu’elle ne l’avait envisagé son pèlerinage terrestre, ne lui laissa pas le temps d’aller plus loin, puisque, sans maladie apparente, elle rendit son âme à Dieu le 13 février 1458, alors qu’elle n’était âgée que de 23 ans environ.

   Elle fut enterrée dans l’église Saint-Nicolas de Spolète, église du couvent des Ermites de Saint Augustin, où Dieu répondit par des miracles aux prières qu’on Lui adressait en se recommandant à son intercession.

   Mais son itinérance continua après sa mort : en 1803, dans le contexte des invasions des troupes napoléoniennes, le couvent fut fermé et son corps fut translaté dans l’église dédiée à Notre-Dame de Lorette, puis au début du XXème siècle dans la basilique de Saint-Grégoire le Grand.
Entre ces deux translations, le Pape Grégoire XVI, reconnaissant le culte immémorial dont elle bénéficiait et les miracles qu’elle accomplissait, procéda à sa béatification équipollente en 1834 ; puis le Bienheureux Pie IX approuva en 1869 l’extension de son culte en d’autres lieux, en particulier dans le diocèse de Brescia.

châsse de la Bienheureuse Christine de Spolète - blogue

Châsse de la Bienheureuse Christine dans l’église de Calvizano

   Comme nous l’avons vu, les origines de la Bienheureuse Christine de Spolète semblaient enveloppées d’obscurité et d’incertitudes. Diverses hypothèses circulaient quant à ses origines et son identité. Certains en faisaient même une jeune fille de la grande famille des Visconti, les célèbres ducs de Milan.

   Mais le 31 janvier 2015, le Saint-Siège a autorisé la translation du corps de la Bienheureuse Christine de Spolète à Calvizano, petite ville de la province de Brescia (Lombardie), ce qui fut une manière de trancher entre plusieurs hypothèses et de reconnaître que la tradition présentant le plus de caractères d’authenticité était celle de Calvizano, selon laquelle la Bienheureuse Christine (Cristina), née le 4 août 1435 de Giovanni et Margherita Semenzi, pauvres paysans.

   La jeune fille avait fait preuve d’une piété extraordinaire, alliée à un grand esprit de pénitence dès sa plus tendre enfance : à 14 ans, suivant l’inspiration divine, elle fit profession comme tertiaire augustinienne dans l’église Saint-Barnabé de Brescia, à la suite de quoi elle se consacra au service des plus nécessiteux ; mais à la mort de ses parents, fuyant d’une part les mauvaises manières de son frère Antonio à son endroit, et d’autre part les regards qu’attirait sur elle sa rayonnante beauté, c’est là qu’elle décida de vivre en pénitente et pèlerine, jusqu’à cette arrivée à Spolète, où Dieu l’appela à Lui après les mois où elle se mit au service des malades et des pèlerins de l’hospice.

Bienheureuse Christine de Spolète - broderie

2025-35. 13 février 1790 : un décret de l’Assemblée Constituante interdit les vœux monastiques.

13 février,
Dans le diocèse de Viviers, la fête de Saint Avit de Vienne, évêque et confesseur (cf. > ici) ;
Dans l’Ordre de Saint Augustin, la fête de la Bienheureuse Christine de Spolète, vierge et pénitente (cf. > ici) ;
Anniversaire de l’attentat mortel contre Monseigneur le duc de Berry (cf. > ici).

caricature antireligieuse février 1790

Caricature antireligieuse de février 1790 annonçant le décret
adopté le 13 par l’Assemblée Constituante
supprimant les Ordres monastiques

moine perplexe gif

Réflexions sur le sens profond de la lutte récurrente contre la vie religieuse :

       Le 13 février 1790, l’Assemblée Constituante décréta la dissolution des Ordres religieux contemplatifs, l’interdiction de la profession des vœux de religion et la fermeture des monastères. Dans un premier temps les congrégations exerçant des activités caritatives ou d’enseignement ne furent pas inquiétées.
Ce décret de 1790 fut complété par une loi du 6 avril 1792 interdisant le port du costume religieux et supprimant les confréries et les congrégations.

   Sitôt la Royauté abolie à la suite de la prise des Tuileries (10 août 1792), la persécution religieuse se déchaîna et les communautés monastiques, qui étaient encore tolérées, dont les membres n’avaient pas voulu « reprendre leur liberté »,  devinrent rapidement hors-la-loi : vouloir garder sa Règle monastique, ses vœux et la vie communautaire était du « fanatisme ».
Une quantité innombrable de moines et de moniales payèrent de leur vie leur fidélité à ce qu’ils avaient solennellement promis à Dieu et qu’ils ne voulaient pas renier. Certains ont déjà été élevés sur les autels et sont honorés d’un culte public comme martyrs par la Sainte Eglise (mais le plus grand nombre ne l’est pas – pas encore).

    Un petit nombre défroqua. Parmi ceux-là, il en est même qui devinrent de virulents révolutionnaires, voire des persécuteurs.
Une majorité de religieux et de religieuses resta fidèle : il y a ceux qui quittèrent la France individuellement et qui furent reçus dans des communautés monastiques d’autres royaumes ; il y a ceux qui, s’exilant en groupe, essayèrent de reconstituer hors frontières des communautés monastiques « françaises » (tel fut le cas de l’héroïque Dom Augustin de Lestrange que nous avons évoqué en parlant de la Valsainte,  > ici) ; il y a ceux qui furent contraints de rentrer dans leurs familles et qui tentèrent de « se faire oublier » mais demeurèrent fidèles à leurs vœux sous des dehors sécularisés, dans l’attente des jours meilleurs (ceux qui survécurent à la révolution participèrent souvent à la reconstitution des communautés soit pendant l’Empire soit pendant la Restauration) ; il y a ceux qui voulurent maintenir leur vie monastique en communauté sous des habits civils, telles les fameuses Carmélites de Compiègne ; il y a ceux qui rejoignirent les divers groupes contre-révolutionnaires et accompagnèrent la Chouannerie de leur ministère – lorsqu’ils étaient prêtres – ou bien s’occupant des blessés et des malades… etc.

Le martyre des Carmélites de Compiègne

   La résistance des religieux à la « régénération » voulue par les théoriciens de « l’humanité nouvelle » dépassa les prévisions des révolutionnaires, eux qui s’attendaient parfois à être accueillis comme des libérateurs dans les couvents, et qui s’imaginaient que moines et moniales seraient enthousiastes à la proposition d’apostasier leurs vœux et leurs Règles.

   Dans les caricatures de l’époque (celle publiée en tête de ce billet est l’une des plus convenables), on trouve fréquemment le thème du moine et de la moniale qui en profitent pour se marier, lorsqu’on ne nous montre pas une file de moines expulsés de leur couvent et une file de religieuses également chassées du leur qui se rejoignent en un point où un représentant du tiers-état les marie à la chaîne.
Le vœu de chasteté est, des trois, celui qui donne le plus à fantasmer aux impies et aux âmes vulgaires pour lesquels la sexualité est un droit absolu (et une obsession) et qui, évidemment, ont du mal à accepter le sixième commandement de Dieu : « œuvre de chair n’accomplira / qu’en mariage seulement ».
Un certain nombres de faits bien attestés, à Paris et en quelques autres grandes villes, confirment l’obscénité des révolutionnaires qui, justement pour se moquer du vœu de chasteté et blesser la pudeur des religieuses (pas uniquement d’ailleurs, car on a aussi le cas de prêtres ou de moines qui subirent le même sort), se saisiront d’eux et les fesseront en place publique.

La liberté ou la mort

   En amont de tout cela, il faut bien comprendre que chaque fois que Satan a suscité des persécutions contre la Sainte Eglise, il a commencé par s’attaquer à la vie monastique.
On attaque les religieux d’abord dans leur réputation et en ruinant leur image dans les mentalités : les contemplatifs sont des oisifs, des paresseux et des parasites ; les hauts murs de leurs couvents ne sont là que pour protéger des lieux de turpitudes ; leur pauvreté n’est qu’hypocrisie (et on ressort ces chimères qui ont pour noms « richesses de l’Eglise » et « milliard des congrégations » afin d’exciter la jalousie et l’envie des cupides)… etc.

   Les prétendus réformateurs du XVIème siècle agirent ainsi ; les pseudo philosophes des pseudo « Lumières » aussi ; les artisans des luttes anticléricales en France à la fin du XIXème et au début du XXème siècles suivirent le même procédé ; enfin les modernistes qui ont détruit l’Eglise de l’intérieur à partir du milieu du XXème siècle leur ont emboité le pas.

   C’est habituellement l’une des premières étapes. Une fois que le clergé régulier est affaibli, discrédité, déconsidéré, décimé, exilé, réduit à peau de chagrin, on a les coudées plus franches pour s’attaquer aux paroisses, au clergé séculier, à la hiérarchie ecclésiastique : après l’anéantissement des monastères et abbayes, l’Eglise ébranlée est une proie plus aisée. Après le décret proscrivant la vie monastique du Royaume suivra la « constitution civile du clergé », comme après l’expulsion des congrégations – entre 1880 et 1903 – suivra la « séparation de l’Eglise et de l’Etat » et la spoliation des lieux de culte, en 1905.

Expulsion de religieuses

   L’affaiblissement de la vie religieuse, la diminution du nombre des contemplatifs, la raréfaction des monastères et des abbayes, la désertion des moines et moniales eux-mêmes après s’être laissés tournebouler par les sirènes modernichones venues leur chanter des airs d’ « aggiornamento », d’ « ouverture au monde », de « renouveau adapté de la vie religieuse », et autres fariboles les incitant à réduire les jeûnes et les mortifications traditionnels, à assouplir leur clôture et à réviser leurs Règles, sont toujours des signes alarmants pour l’ensemble du Corps Mystique !

   La vie religieuse est un état de vie qui, tout en ne concernant pas la structure hiérarchique de la Sainte Eglise, est néanmoins d’institution divine (Notre-Seigneur Jésus-Christ a donné Lui-même l’exemple de la vie selon les trois vœux monastiques) et constitue un élément essentiel de sa vie et de sa sainteté, comparable, pour une part, au rôle d’un paratonnerre.

   Lorsque celui qui, dans l’ombre, prépare des orages dévastateurs et dramatiques, veut assurer une efficacité maximale à ses stratagèmes pyromanes visant à la destruction de l’Edifice, n’est-il pas rigoureusement logique qu’au préalable il en neutralise le paratonnerre ?

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur

Moine priant dans l'orage - blogue

2025-34. La Bienheureuse Christine Ciccarelli, vierge de l’Ordre de Saint Augustin, abbesse, visionnaire et prophétesse.

12 février,
Fête des Sept Saints Fondateurs des Servites de Marie (cf. > ici) ;
Dans l’Ordre de Saint Augustin, la Bienheureuse Christine Ciccarelli, vierge de notre Ordre.

Eglise de la Bienheureuse Christine à Lucoli

Eglise en l’honneur de la Bienheureuse Christine à Lucoli
village de sa naissance et de son baptême

Martyrologe propre de l’Ordre des Ermites de Saint Augustin pour le 12 février : 

   « A l’Aquila, dans l’Abruzze, la Bienheureuse Christine, vierge, religieuse de notre Ordre, illustre par l’innocence de ses mœurs et la mortification de son corps ».

vignette augustinienne

       Dans ce pèlerinage spirituel auquel nous entraîne l’année liturgique, en particulier auprès des saints de la famille augustinienne, nous rencontrons au 12 février la Bienheureuse Christine Ciccarelli (en italien Cristina), qui est aussi appelée Christine Ciccarelli de l’Aquila, parce que c’est dans cette importante cité, capitale des Abruzzes, qu’elle vécut sa vie religieuse et mourut, et où son corps est en grande vénération ; ou encore Christine de Lucoli, parce que c’est là qu’elle naquit.

   Au saint baptême, elle reçut le prénom de Matthias (en italien Mattia, qui peut être porté aussi par des femmes) parce qu’elle était née et avait été baptisée le jour de la fête de Saint Matthias, le 24 février de l’année 1480, à Lucoli, village sis à moins de cinq lieues de l’Aquila.
Elle était la sixième et dernière enfant de Domenico Ciccarelli et Maria di Pericolo.

   Elle manifesta dès son enfance une piété peu commune et une dévotion très spéciale pour la Piéta, dont un tableau était accroché dans la demeure familiale, et, quoique belle, elle fut toujours ennemie de toute forme de coquetterie et de vanité, faisant tout pour s’enlaidir afin de de pas attirer les regards ni les compliments. Déjà dans son enfance elle aspirait à la virginité perpétuelle pour le Christ et en recommandait quotidiennement la préservation à la Très Sainte Vierge Douloureuse. Elle aspirait à vivre retirée et solitaire, et s’adonna à la mortification, aux veilles et aux jeûnes.

   Ses parents eux-mêmes, quoique déjà fervents chrétiens, se placèrent sous sa direction spirituelle et elle les amena à un grand esprit de détachement des biens terrestres, à pratiquer joyeusement le saint abandon à la Providence, et à être toujours plus généreux envers les pauvres et les religieux mendiants. On lit que que Domenico et Maria voyaient en leur fille leur mère spirituelle.
Elle devint aussi le guide spirituel de nombreuses personnes avant même d’entrer dans le cloître, et, étant encore dans le siècle, elle fut gratifiée du don de prophétie, en particulier lorsque, reprenant des pécheurs qui scandalisaient les fidèles par leurs blasphèmes ou leur mépris des préceptes divins, elle les avertissait des punitions divines dont ils étaient menacés s’ils ne s’amendaient pas : ce fut le cas en particulier pour un jeune homme qui blasphémait souvent contre Saint Antoine (d’Egypte) et qui tomba de sa monture et mourut la nuque brisée, ainsi qu’elle le lui avait prédit, au moment où il venait de récidiver ; ce fut le cas pour un de ses beaux-frères qui était « possédé par le démon de la chasse » et en négligeait ses devoirs religieux les jours de précepte : il fut frappé de mort subite après s’être moqué de ses avertissements.

Gravure XVIIe siècle de la Bienheureuse Christine

Gravure ancienne de la Bienheureuse Christine

   Les expériences mystiques, assorties du don de guérison et de la vision de réalités surnaturelles, se firent de plus en plus fréquentes aussi. Elle était dirigée par le Bienheureux Vincent de l’Aquila (1435-1504), un frère franciscain retiré dans un ermitage, lui aussi gratifié du don de prophétie et thaumaturge.
Après la mort de ce dernier, Notre-Seigneur Lui-même lui désigna le Père Girolamo de Tussia, un autre frère mineur du couvent de l’Aquila, pour qu’il soit son conseiller spirituel : c’est lui qui l’orienta vers les moniales Ermites de Saint Augustin du couvent Sainte Lucie à l’Aquila où elle entra à l’âge de 25 ans, en 1505.
Elle changea alors son nom de baptême pour prendre celui de Cristina, afin de bien marquer ses épousailles avec le Christ et manifester qu’elle Lui était totalement unie.
Elle sera élue abbesse de la communauté à plusieurs reprises, accomplissant cette mission en véritable mère de l’âme des religieuses, mais les aidant aussi dans les tâches les plus humbles de la vie commune.

   En l’honneur de la Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui lui fit le don des sacrés stigmates (un Vendredi-Saint), elle jeûnait au pain et à l’eau tous les vendredis, mais les vendredis de Carême elle restait totalement à jeun.

   Alors qu’elle nourrissait une dévotion particulière pour Saint Marc et récitait chaque jour le saint rosaire en son honneur, elle eut l’apparition de Saint Martin de Tours qui lui demanda : « Pourquoi honores-tu Saint Marc avec tant d’affection et ne me rends-tu pas la même chose ? ». A partir de ce moment-là, Mère Christine le pria comme l’un des Saints avec lesquels Dieu voulait la voir dans une communion particulière. 

   Un jour de Fête-Dieu, tandis qu’on portait le Très Saint Sacrement en procession, elle fut élevée dans les airs et tous les assistants virent apparaître sur sa poitrine un ciboire rayonnant, à l’intérieur duquel resplendissait la Sainte Hostie. Notre-Seigneur manifestait donc de la sorte aux yeux de tous que Mère Christine était elle-même un vivant réceptacle de Sa divine Présence. 

Statue de la Bienheureuse Christine de Lucoli

Statue de la Bienheureuse Christine à Lucoli

   Affaiblie par une longue maladie, elle rendit doucement son âme à Dieu, comme en entrant dans une ultime extase, le 18 janvier 1543, âgée de 63 ans.
Dès qu’elle eut rendu le dernier soupir, les enfants de l’Aquila, mus par une inspiration surnaturelle, sortirent des maisons pour annoncer son trépas en chantant « Alléluia ». Le préfet provincial demanda que son corps fut exposé dans l’église, et aussitôt commença une longue liste de miracles et de grâces post mortem : elle guérit la blessure d’un charpentier et les deux plaies mortelles d’un huissier, rendit la vue à un aveugle, redressa un infirme, guérit la jambe et l’humérus d’un dominicain, puis le fémur d’un franciscain, libéra une religieuse d’une terrible migraine… et son biographe écrit : je pourrais ajouter de nombreux autres cas, s’ils n’étaient pas de nature à ennuyer le lecteur, à cause de la similitude qu’ils ont entre eux.

   Elle fut ensevelie à droite du maître-autel de l’église conventuelle, et son culte commença aussitôt, avec la bénédiction de l’archevêque ; mais il fallut attendre le 15 janvier 1841 pour que le pape Grégoire XVI procédât à sa béatification équipollente et fît inscrire son nom dans le martyrologe romain à la date du 18 janvier, son dies natalis.
Néanmoins l’archidiocèse de l’Aquila et le martyrologe propre des Ermites de Saint Augustin célèbrent sa fête le 12 février.

    Dans un contexte de lutte contre l’Eglise mené par le gouvernement maçonnique du royaume d’Italie, en 1908, le monastère de Sainte Lucie fut fermé et le corps de la Bienheureuse Christine fut translaté dans l’église d’un autre monastère de moniales augustiniennes de l’Aquila, celui de Sant’Amico, qui existe toujours.

Eglise du monastère de Sant'Amico à l'Aquila

Intérieur de l’église du monastère Sant’Amico à l’Aquila

2025-33. Une relique de la grotte de Massabielle au Mesnil-Marie.

11 février,
Fête de l’apparition de la Vierge immaculée à Lourdes ;
Anniversaire de l’encyclique « Vehementer nos » (11 février 1906 – cf. > ici).

Grotte de Massabielle - statue de la Vierge à l'emplacement même de l'apparition

Lourdes, grotte de Massabielle :
la statue de la Madone à l’emplacement où se tint la Vierge Immaculée.

       Mon papa-moine a bien conscience que la publication suivante peut lui occasionner quelques « inconvénients », mais lorsque je lui ai demandé si je pouvais la faire il m’a répondu : « Si on se retient de faire quoi que ce soit par crainte des réactions de quelques mauvaises personnes, on ne fera plus jamais rien. Alors je t’en prie, mon Tolbiac, fais ce que tu as à faire : le Bon Dieu – qui sonde les reins et les cœurs – fera le tri et, un jour, rendra à chacun selon ce qu’il aura fait. En attendant, vis et agis selon ta souveraine liberté féline ! »

   En fait, comme je désirais vous parler de l’un des reliquaires qui se trouve dans notre Oratoire, je ne voulais néanmoins pas que cela lui occasionnât ensuite de nouvelles « embrouilles ».

   Pour que tout soit bien limpide pour vous, je dois vous raconter que, il y a quelques années de cela, une personne mal intentionnée a enregistré des photos de notre Oratoire qui avaient été publiées sur ce blogue, en a isolé les reliquaires que l’on y voyait ornant les gradins de l’autel, puis a envoyé ces photos à un antiquaire spécialisé dans les objets religieux en se faisant passer pour Frère Maximilien-Marie (lui communiquant d’ailleurs une authentique adresse électronique), et, en prétendant que le Refuge Notre-Dame de Compassion était dans une grande nécessité financière, sollicitait de lui une expertise, prétendument afin de les vendre au meilleur prix.
L’antiquaire contacta donc Frère Maximilien-Marie en lui faisant une offre… et notre Frère tomba des nues en recevant ce courriel : il y eut une explication – fort sereine et clarifiante au demeurant – avec ce Monsieur, dont la déposition et les documents qu’il put fournir allèrent étoffer un dossier déjà un peu épais rassemblant les documents relatifs aux malveillances dont Frère Maximilien-Marie est assez régulièrement la cible (et dont la justice est informée).

   Je ne m’étendrai pas davantage sur ce fait, mais il me semble que cette explication était nécessaire pour que vous comprissiez l’attitude prudentielle qui était la mienne avant d’écrire ce qui suit.

Buste reliquaire de la Grotte de Lourdes 1

Buste reliquaire de la Très Sainte Vierge Marie
dans le médaillon duquel se trouve un fragment du rocher de Massabielle
prélevé à l’endroit où reposaient les pieds de la Mère de Dieu lors des apparitions

   Ceci étant dit, je voulais donc vous parler du buste reliquaire de la Très Sainte Vierge Marie que nous avons le bonheur de posséder dans notre oratoire.

   A l’origine, il ne s’agissait d’ailleurs pas d’un buste reliquaire mais simplement d’un buste de la Madone faisant la paire avec un buste de Notre-Seigneur Jésus-Christ couronné d’épines.
Frère Maximilien-Marie les avait vus chez un brocanteur au cours de l’été 2020, mais alors ils n’étaient pas vraiment reluisants comme vous pouvez en juger par vous-mêmes avec le cliché suivant :

bustes de NSJC et de ND avant restauration septembre 2020

Bustes de Notre-Seigneur et de Notre-Dame en septembre 2020
lorsqu’ils furent offerts à Frère Maximilien-Marie
(le stylo blanc déposé entre les deux est là pour donner un ordre de grandeur)

   De fidèles et généreux amis, qui avaient appris qu’ils plaisaient à notre Frère, lui firent la surprise de les lui offrir à l’occasion de son quarantième anniversaire d’entrée en religion (8 septembre 1980 – 8 septembre 2020).

   Puis ce fut le nettoyage, suivi de la consultation d’un artisan bijoutier (il y en a d’excellents dans nos Hautes Boutières) et des propositions faites par celui-ci (de généreux bienfaiteurs s’offrant encore pour aider à leur restauration), puis il y eu la commande (en Italie) de médaillons reliquaires qui se puissent adapter aux socles de ces bustes…
Bref ! Ils revinrent au Mesnil-Marie véritablement transformés, et s’adaptant idéalement aux espaces entre les chandeliers du gradin de l’autel.
Ils furent alors dûment bénits.

   Frère Maximilien-Marie avait, dans les réserves de l’Oratoire, d’une part une enveloppe contenant un linge qu’un digne ecclésiastique de nos connaissances avait pu mettre en contact direct avec la Sainte Tunique d’Argenteuil à l’occasion de son ostension d’avril 2016 ; et d’autre part, héritage d’un vieux chanoine ami qui lui a légué quelques précieux « souvenirs » lorsqu’il a rejoint le Royaume des Cieux, l’une des parcelles du rocher de Massabielle prélevées en 1958 et offertes alors à certains dignitaires ecclésiastiques, à l’occasion des fêtes du centenaire des apparitions de Lourdes que l’on célébrait cette année-là.

   Une parcelle du linge qui a touché à la Sainte Tunique a donc été placée dans le médaillon désormais fixé au pied du buste reliquaire de Notre-Seigneur Jésus-Christ ; tandis que le médaillon assujetti au socle du buste reliquaire de Notre-Dame recevait le fragment du rocher sur lequel la Reine du Ciel a laissé reposer son pied virginal

   Voilà donc pourquoi nous avons cette immense joie de posséder, dans l’Oratoire du Mesnil-Marie, une petite relique de la grotte de Massabielle sanctifiée par l’apparition de la Très Sainte Mère de Dieu.

Tolbiac.

Buste reliquaire de la Grotte de Lourdes 2

2025-32. 11 février 1906 : Saint Pie X condamne sans appel la pernicieuse doctrine de la séparation de l’Eglise et de l’Etat.

11 février,
Fête de l’apparition de la Vierge immaculée à Lourdes ;
Anniversaire de l’encyclique « Vehementer nos » (11 février 1906).

armoiries Saint Pie X

       Comme je l’écrivais déjà en publiant le texte de l’allocution consistoriale « Gravissimum » prononcée par le pape Saint Pie X le 21 février 1906 (cf. > ici) qui résume la doctrine sûre et pérenne de l’encyclique « Vehementer nos »,

   « (…) en France, les catholiques sont désormais tellement habitués à la loi du 9 décembre 1905, dite loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, qu’ils n’en voient plus du tout la malice, ni la grave offense à Dieu et à Ses droits qu’elle représente.
De nos jours, il y a même des prêtres, des évêques et des cardinaux, qui invoquent cette loi inique, conçue dans les loges maçonniques en vue d’affaiblir l’Eglise, dans le but de revendiquer « une saine laïcité » ! Ils me font penser à des dindes qui manifesteraient contre toute modification du menu traditionnel de Noël. »

   Voilà pourquoi, il me semble qu’il faut impérativement, à temps et à contre temps, rappeler les sains principes qui doivent régir les relations de la Sainte Eglise catholique avec les autorités civiles ; qu’il faut impérativement, à temps et à contre temps, marteler que le régime dit de « séparation » est contraire à la loi naturelle autant qu’à la loi divine ; qu’il faut impérativement, à temps et à contre temps, insister pour que les catholiques qui veulent être authentiquement fidèles aux enseignements de la Tradition, lisent et relisent, de manière à s’en imprégner jusqu’à la moëlle, les enseignements de Saint Pie X à ce sujet.
Voilà pourquoi, je crois nécessaire de publier ci-dessous le texte intégral de l’encyclique « Vehementer nos » afin de permettre à nos amis et lecteurs de ne pas se contenter d’approximations et de résumés, mais de recourir directement à ses enseignements salutaires.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

carte de 1906 illustrant la séparation de l'Eglise et de l'Etat

Lettre encyclique « Vehementer nos »

de Sa Sainteté le Pape Pie X

au peuple français 

       Aux archevêques, évêques, au clergé et au peuple français, à nos bien aimés fils : François-Marie Richard, cardinal prêtre de la Sainte Eglise romaine, archevêque de Paris ; Victor-Lucien Lecot, cardinal prêtre de la Sainte Eglise romaine, archevêque de Bordeaux ; Pierre-Hector Coullié, cardinal prêtre de la Sainte Eglise romaine, archevêque de Lyon ; Joseph-Guillaume Labouré, cardinal prêtre de la Sainte Eglise romaine, archevêque de Rennes, et à tous nos vénérables frères, les archevêques et évêques et à tout le clergé et le peuple français, Pie X, Pape :

Vénérables frères, bien aimés fils, salut et bénédiction apostolique.

   Notre âme est pleine d’une douloureuse sollicitude et notre coeur se remplit d’angoisse quand notre pensée s’arrête sur vous. Et comment en pourrait-il être autrement, en vérité, au lendemain de la promulgation de la loi qui, en brisant violemment les liens séculaires par lesquels votre nation était unie au siège apostolique, crée à l’Eglise catholique, en France, une situation indigne d’elle et lamentable à jamais.

   Evénement des plus graves sans doute que celui-là ; événement que tous les bons esprits doivent déplorer, car il est aussi funeste à la société civile qu’à la religion ; mais événement qui n’a pu surprendre personne pourvu que l’on ait prêté quelque attention à la politique religieuse suivie en France dans ces dernières années.

   Pour vous, vénérables frères, elle n’aura été bien certainement ni une nouveauté, ni une surprise, témoins que vous avez été des coups si nombreux et si redoutables tour à tour portés par l’autorité publique à la religion.

Les attentats passés

   Vous avez vu violer la sainteté et l’inviolabilité du mariage chrétien par des dispositions législatives en contradiction formelle avec elles, laïciser les écoles et les hôpitaux, arracher les clercs à leurs études et à la discipline ecclésiastique pour les astreindre au service militaire, disperser et dépouiller les congrégations religieuses et réduire la plupart du temps leurs membres au dernier dénuement. D’autres mesures légales ont suivi, que vous connaissez tous. On a abrogé la loi qui ordonnait des prières publiques au début de chaque session parlementaire et à la rentrée des tribunaux, supprimé les signes traditionnels à bord des navires le Vendredi Saint, effacé du serment judiciaire ce qui en faisait le caractère religieux, banni des tribunaux, des écoles, de l’armée, de la marine, de tous les établissements publics enfin, tout acte ou tout emblème qui pouvait, d’une façon quelconque, rappeler la religion.

   Ces mesures et d’autres encore qui peu à peu séparaient de fait l’Eglise de l’Etat n’étaient rien autre chose que des jalons placés dans le but d’arriver à la séparation complète et officielle.

   Leurs promoteurs eux-mêmes n’ont pas hésité à le reconnaître hautement, et maintes fois, pour écarter une, calamité si grande, le Siège apostolique, au contraire, n’a absolument rien épargné. Pendant que, d’un côté, il ne se lassait pas d’avertir ceux qui étaient à la tête des affaires françaises et qu’il les conjurait à plusieurs reprises de bien peser l’immensité des maux qu’amènerait infailliblement leur politique séparatiste, de l’autre, il multipliait vis-à-vis de la France les témoignages éclatants de sa condescendante affection.

   Il avait le droit d’espérer ainsi, grâce aux liens de la reconnaissance, de pouvoir retenir ces politiques sur la pente et de les amener enfin à renoncer à leurs projets; mais, attentions, bons offices, efforts tant de la part de notre Prédécesseur que de la nôtre, tout est resté sans effet, et la violence des ennemis de la religion a fini par emporter de vive force ce à quoi pendant longtemps ils avaient prétendu à l’encontre de vos droits de nation catholique et de tout ce que pouvaient souhaiter les esprits qui pensent sagement.

   C’est pourquoi, dans une heure aussi grave pour l’Eglise, conscient de notre charge apostolique, nous avons considéré comme un devoir d’élever notre voix et de vous ouvrir notre âme, à vous, vénérables Frères, à votre clergé et à votre peuple, à vous tous que nous avons toujours entourés d’une tendresse particulière, mais qu’en ce moment, comme c’est bien juste, nous aimons plus tendrement que jamais.

Fausseté du principe de la Séparation

   Qu’il faille séparer l’Etat de l’Eglise, c’est une thèse absolument fausse, une très pernicieuse erreur. Basée, en effet, sur ce principe que l’Etat ne doit reconnaître aucun culte religieux, elle est tout d’abord très gravement injurieuse pour Dieu, car le créateur de l’homme est aussi le fondateur des sociétés humaines et il les conserve dans l’existence comme il nous soutient.

   Nous lui devons donc, non seulement un culte privé, mais un culte public et social, pour l’honorer.

   En outre, cette thèse est la négation très claire de l’ordre surnaturel ; elle limite, en effet, l’action de l’Etat à la seule poursuite de la prospérité publique durant cette vie, qui n’est que la raison prochaine des sociétés politiques, et elle ne s’occupe en aucune façon, comme lui étant étrangère, de leur raison dernière qui est la béatitude éternelle proposée à l’homme quand cette vie si courte aura pris fin.

   Et pourtant, l’ordre présent des choses qui se déroulent dans le temps se trouvant subordonné à la conquête de ce bien suprême et absolu, non seulement le pouvoir civil ne doit pas faire obstacle à cette conquête, mais il doit encore nous y aider.

   Cette thèse bouleverse également l’ordre très sagement établi par Dieu dans le monde, ordre qui exige une harmonieuse concorde entre les deux sociétés.

   Ces deux sociétés, la société religieuse, et la société civile, ont, en effet, les mêmes sujets, quoique chacune d’elles exerce dans sa sphère propre son autorité sur eux.

   Il en résulte forcément qu’il y aura bien des matières dont elles devront connaître l’une et l’autre, comme étant de leur ressort à toutes deux.

   Or, qu’entre l’Etat et l’Eglise l’accord vienne à disparaître, et de ces matières communes pulluleront facilement les germes de différends qui deviendront très aigus des deux côtés.

   La notion du vrai en sera troublée et les âmes remplies d’une grande anxiété.

   Enfin, cette thèse inflige de graves dommages à la société civile elle-même, car elle ne peut pas prospérer ni durer longtemps lorsqu’on n’y fait point sa place à la religion, règle suprême et souveraine maîtresse quand il s’agit des droits de l’homme et de ses devoirs. Aussi, les pontifes romains n’ont-ils pas cessé, suivant les circonstances et selon les temps, de réfuter et de condamner la doctrine de la séparation de l’Eglise et de l’Etat.

   Notre illustre prédécesseur Léon XIII, notamment, a, plusieurs fois et magnifiquement, exposé ce que devraient être, suivant la doctrine catholique, les rapports entre les deux sociétés. « Entre elles, a-t-il dit, il faut nécessairement qu’une sage union intervienne, union qu’on peut non sans justesse ; comparer à celle, qui réunit dans l’homme, l’âme et le corps » : « Quaedam intercedat necesse est ordinata colligatio inter illas quae quidem coniuntioni non immerito comparatur per quam anima et corpus in homine copulantur« . Il ajoute encore : « Les sociétés humaines ne peuvent pas, sans devenir criminelles, se conduire comme si Dieu n’existait pas ou refuser de se préoccuper de la religion comme si elle leur était chose étrangère ou qui ne pût leur servir de rien. Quant à l’Eglise, qui a Dieu lui-même pour auteur, l’exclure de la vie active de la nation, des lois, de l’éducation de la jeunesse, de la société domestique, c’est commettre une grande et pernicieuse erreur! » : « Civitates non possunt, citra seclus, genere se, tanquam si Deus omnino non esset, aut curam religionis velut alienam nihil que profituram ablicere. Ecclesiam vero quam Deus ipse constituit ab actione vitae excludere, a legibus, ab institutione adolescentium, a societate domestica, magnus et perniciosus est error » (Lettre encyclique Immortale Dei, 1er nov. 1885).

La Séparation est particulièrement funeste et injuste en France

   Que si en se séparant de l’Eglise, un Etat chrétien, quel qu’il soit, commet un acte éminemment funeste et blâmable, combien n’est-il pas à déplorer que la France se soit engagée dans cette voie, alors que, moins encore que toutes les autres nations, elle n’eût dû y entrer, la France, disons-nous, qui, dans le cours des siècles, a été, de la part de ce siège apostolique, l’objet d’une si grande et si singulière prédilection, la France, dont la fortune et la gloire ont toujours été intimement unies à la pratique des mœurs chrétiennes et au respect de la religion.

   Le même pontife Léon XIII avait donc bien raison de dire : « La France ne saurait oublier que sa providentielle destinée l’a unie au Saint-Siège par des liens trop étroits et trop anciens pour qu’elle veuille jamais les briser. De cette union, en effet, sont sorties ses vraies grandeurs et sa gloire la plus pure. Troubler cette union traditionnelle, serait enlever à la nation elle-même une partie de sa force morale et de sa haute influence dans le monde » (Allocution aux pèlerins français, 13 avril 1888).

   Les liens qui consacraient cette union devaient être d’autant plus inviolables qu’ainsi l’exigeait la foi jurée des traités. Le Concordat passé entre le Souverain Pontife et le gouvernement français, comme du reste tous les traités du même genre, que les Etats concluent entre eux, était un contrat bilatéral, qui obligeait des deux côtés : le Pontife romain d’une part, le chef de la nation française de l’autre, s’engagèrent donc solennellement, tant pour eux que pour leurs successeurs, à maintenir inviolablement le pacte qu’ils signaient.

   Il en résultait que le Concordat avait pour règle la règle de tous les traités internationaux, c’est-à-dire le droit des gens, et qu’il ne pouvait, en aucune manière, être annulé par le fait de l’une seule des deux parties ayant contracté. Le Saint-Siège a toujours observé avec une fidélité scrupuleuse les engagements qu’il avait souscrits et, de tout temps, il a réclamé que l’Etat fit preuve de la même fidélité. C’est là une vérité qu’aucun juge impartial ne peut nier. Or, aujourd’hui, l’Etat abroge de sa seule autorité le pacte solennel qu’il avait signé.

   Il transgresse ainsi la foi jurée et, pour rompre avec l’Eglise, pour s’affranchir de son amitié, ne reculant devant rien, il n’hésite pas plus à infliger au Siège apostolique l’outrage qui résulte de cette violation du droit des gens qu’à ébranler l’ordre social et politique lui-même, puisque, pour la sécurité réciproque de leurs rapports mutuels, rien n’intéresse autant les nations qu’une fidélité irrévocable dans le respect sacré des traités.

Aggravation de l’injure

   La grandeur de l’injure infligée au Siège apostolique par l’abrogation unilatérale du Concordat s’augmente encore et d’une façon singulière quand on se prend à considérer la forme dans laquelle l’Etat a effectué cette abrogation. C’est un principe admis sans discussion dans le droit des gens et universellement observé par toutes les nations que la rupture d’un traité doit être préventivement et régulièrement notifiée d’une manière claire et explicite à l’autre partie contractante par celle qui a l’intention de dénoncer le traité. Or, non seulement aucune dénonciation de ce genre n’a été faite au Saint-Siège, mais aucune indication quelconque ne lui a même été donnée à ce sujet ; en sorte que le gouvernement français n’a pas hésité à manquer vis-à-vis du siège apostolique aux égards ordinaires et à la courtoisie dont on ne se dispense même pas vis-à-vis des Etats les plus petits, et ses mandataires, qui étaient pourtant les représentants d’une nation catholique, n’ont pas craint de traiter avec mépris la dignité et le pouvoir du Pontife, chef suprême de l’Eglise, alors qu’ils auraient dû avoir pour cette puissance un respect supérieur à celui qu’inspirent toutes les autres puissances politiques et d’autant plus grand que, d’une part, cette puissance a trait au lien éternel des âmes et que, sans limites, de l’autre, elle s’étend partout.

Injustice et périls des dispositions de la loi examinée en détail : Associations cultuelles

   Si nous examinons maintenant en elle-même la loi qui vient d’être promulguée, nous y trouvons une raison nouvelle de nous plaindre encore plus énergiquement.

   Puisque l’Etat, rompant les liens du Concordat, se séparait de l’Eglise, il eût dû comme conséquence naturelle lui laisser son indépendance et lui permettre de jouir en paix du droit commun dans la liberté qu’il prétendait lui concéder. Or, rien n’a été moins fait en vérité. Nous relevons, en effet, dans la loi, plusieurs mesures d’exception, qui, odieusement restrictives, mettent l’Eglise sous la domination du pouvoir civil. Quant à nous, ce nous a été une douleur bien amère que de voir l’Etat faire ainsi invasion dans des matières qui sont du ressort exclusif de la puissance ecclésiastique, et nous en gémissons d’autant plus qu’oublieux de l’équité et de la justice, il a créé par là à l’Eglise de France une situation dure, accablante et oppressive de ses droits les plus sacrés.

   Les dispositions de la nouvelle loi sont, en effet, contraires à la Constitution suivant laquelle l’Eglise a été fondée par Jésus-Christ.

   L’Ecriture nous enseigne, et la tradition des Pères nous le confirme, que l’Eglise est le corps mystique du Christ, corps régi par des pasteurs et des docteurs (Ephes., IV, 11), société d’hommes, dès lors, au sein de laquelle des chefs se trouvent qui ont de pleins et parfaits pouvoirs pour gouverner, pour enseigner et pour juger (Matthieu, XXVIII, 18-20 ; XVI, 18-19 ; XVIII, 17 ; Tite II, 15 ; II Cor. X, 6 ; XIII, 10, etc.).

   Il en résulte que cette Eglise est par essence une société inégale, c’est-à-dire une société comprenant deux catégories de personnes : les pasteurs et le troupeau, ceux qui occupent un rang dans les différents degrés de la hiérarchie et la multitude des fidèles; et ces catégories sont tellement distinctes entre elles, que, dans le corps pastoral seul, résident le droit et l’autorité nécessaires pour promouvoir et diriger tous les membres vers la fin de la société.

   Quant à la multitude, elle n’a pas d’autre devoir que celui de se laisser conduire et, troupeau docile, de suivre ses pasteurs.

   Saint Cyprien, martyr, exprime cette vérité d’une façon admirable, quand il écrit : Notre Seigneur dont nous devons révérer et observer les préceptes réglant la dignité épiscopale et le mode d’être de son Eglise, dit dans l’Evangile, en s’adressant à Pierre : « Ego dico tibi quia tu es Petrus », etc.

   Aussi, « à travers les vicissitudes des âges et des événements, l’économie de l’épiscopat et la constitution de l’Eglise se déroulent de telle sorte que l’Eglise repose sur les évêques et que toute sa vie active est gouvernée par eux » : « Dominus noster cujus praecepta metuere et servare debemus episcopi honorem et ecclesiae suae rationem disponens in evangolio loquitur et dixit Petro: ego dico tibi quia tu es Petrus, etc. Inde per temporum et successionum vices episcoporum ordinatio et ecclesiae ratio decurbit ut Ecclesia super episcopas constituatur et omnis actus ecclesiae per eosdem praepositos gubernetur » (St Cypr., epist., XXVII ; Al., XXVIII, ad Lapsos, 11.).

   Saint Cyprien affirme que tout cela est fondé sur une loi divine : « Divina lege fundatum ».

   Contrairement à ces principes, la loi de séparation attribue l’administration et la tutelle du culte public, non pas au corps hiérarchique divinement institué par le Sauveur, mais à une association de personnes laïques.

   A cette association elle impose une forme, une personnalité juridique et pour tout ce qui touche au culte religieux, elle la considère comme ayant seule des droits civils et des responsabilités à ses yeux. Aussi est-ce à cette association que reviendra l’usage des temples et des édifices sacrés. C’est elle qui possédera tous les biens ecclésiastiques, meubles et immeubles ; c’est elle qui disposera, quoique d’une manière temporaire seulement, des évêchés, des presbytères et des séminaires ! C’est elle, enfin, qui administrera les biens, réglera les quêtes et recevra les aumônes et les legs destinés au culte religieux. Quant au corps hiérarchique des pasteurs, on fait sur lui un silence absolu ! Et si la loi prescrit que les associations cultuelles doivent être constituées conformément aux règles d’organisation générale du culte, dont elles se proposent d’assurer l’exercice, d’autre part, on a bien soin de déclarer que, dans tous les différends qui pourront naître relativement à leurs biens, seul le Conseil d’État sera compétent. Ces associations cultuelles elles-mêmes seront donc, vis-à-vis de l’autorité civile dans une dépendance telle, que l’autorité ecclésiastique, et c’est manifeste, n’aura plus sur elles aucun pouvoir. Combien toutes ces dispositions seront blessantes pour l’Eglise et contraires à ses droits et à sa constitution divine ! Il n’est personne qui ne l’aperçoive au premier coup d’œil, sans compter que la loi n’est pas conçue, sur ce point, en des termes nets et précis, qu’elle s’exprime d’une façon très vague et se prêtant largement à l’arbitraire et qu’on peut, dès lors, redouter de voir surgir de son interprétation même de plus grands maux !

L’Eglise ne sera pas libre

   En outre, rien n’est plus contraire à la liberté de l’Eglise que cette loi. En effet, quand, par suite de l’existence des associations cultuelles, la loi de séparation empêche les pasteurs d’exercer la plénitude de leur autorité et de leur charge sur le peuple des fidèles; quand elle attribue la juridiction suprême sur ces associations cultuelles au Conseil d’Etat et qu’elle les soumet à toute une série de prescriptions en dehors du droit commun qui rendent leur formation difficile, et plus difficile encore leur maintien, quand, après avoir proclamé la liberté du culte, elle en restreint l’exercice par de multiples exceptions, quand elle dépouille l’Église de la police intérieure des temples pour en investir l’Etat, quand elle entrave la prédication de la foi et de la morale catholiques et édicte contre les clercs un régime pénal sévère et d’exception, quand elle sanctionne ces dispositions et plusieurs autres dispositions semblables où l’arbitraire peut aisément s’exercer, que fait-elle donc sinon placer l’Église dans une sujétion humiliante et, sous le prétexte de protéger l’ordre public, ravir à des citoyens paisibles, qui forment encore l’immense majorité en France, le droit sacré de pratiquer leur propre religion ? Aussi. n’est-ce pas seulement en restreignant l’exercice de son culte auquel la loi de séparation réduit faussement toute l’essence de la religion, que l’Etat blesse l’Eglise, c’est encore en faisant obstacle à son influence toujours si bienfaisante sur le peuple et en paralysant de mille manières différentes son action.

   C’est ainsi, entre autres choses, qu’il ne lui a pas suffi d’arracher à cette Eglise les ordres religieux, ses précieux auxiliaires dans le sacré ministère, dans l’enseignement, dans l’éducation, dans les œuvres de charité chrétienne ; mais qu’il la prive encore des ressources qui constituent les moyens humains nécessaires à son existence et à l’accomplissement de sa mission.

Droit de propriété violé

   Outre les préjudices et les injures que nous avons relevés jusqu’ici, la loi de séparation viole encore le droit de propriété de l’Eglise et elle le foule aux pieds ! Contrairement à toute justice, elle dépouille cette Eglise d’une grande partie d’un patrimoine, qui lui appartient pourtant à des titres aussi multiples que sacrés. Elle supprime et annule toutes les fondations pieuses très légalement consacrées au culte divin ou à la prière pour les trépassés. Quant aux ressources que la libéralité catholique avait constituées pour le maintien des écoles chrétiennes, ou pour le fonctionnement des différentes œuvres de bienfaisance cultuelles, elle les transfère à des établissements laïques où l’on chercherait vainement le moindre vestige de religion ! En quoi elle ne viole pas seulement les droits de l’Eglise, mais encore la volonté formelle et explicite des donateurs et des testateurs !

   Il nous est extrêmement douloureux aussi qu’au mépris de tous les droits, la loi déclare propriété de l’Etat, des départements ou des communes, tous les édifices ecclésiastiques antérieurs au Concordat. Et si la loi en concède l’usage indéfini et gratuit aux associations cultuelles, elle entoure cette concession de tant et de telles réserves qu’en réalité elle laisse aux pouvoirs publics la liberté d’en disposer.

   Nous avons de plus les craintes les plus véhémentes en ce qui concerne la sainteté de ces temples, asiles augustes de la Majesté Divine et lieux mille fois chers, à cause de leurs souvenirs, à la piété du peuple français ! Car ils sont certainement en danger, s’ils tombent entre des mains laïques, d’être profanés ! Quand la loi supprimant le budget des cultes exonère ensuite l’Etat de l’obligation de pourvoir aux dépenses cultuelles, en même temps elle viole un engagement contracté dans une convention diplomatique et elle blesse très gravement la justice. Sur ce point, en effet, aucun doute n’est possible et les documents historiques eux-mêmes en témoignent de la façon la plus claire. Si le gouvernement français assuma, dans le Concordat, la charge d’assurer aux membres du clergé un traitement qui leur permit de pourvoir, d’une façon convenable, à leur entretien et à celui du culte religieux, il ne fit point cela à titre de concession gratuite, il s’y obligea à titre de dédommagement partiel, au moins vis-à-vis de l’Eglise, dont l’Etat s’était approprié tes biens pendant la première Révolution.

   D’autre part aussi, quand, dans ce même Concordat et par amour de la paix, le Pontife romain s’engagea, en son nom et au nom de ses successeurs à ne pas inquiéter les détenteurs des biens qui avaient été ainsi ravis à l’Eglise, il est certain qu’il ne fit cette promesse qu’à une condition : c’est que le gouvernement français s’engagerait à perpétuité à doter le clergé d’une façon convenable et à pourvoir aux frais du culte divin.

Principe de discorde

   Enfin et comment, pourrions-nous bien nous taire sur ce point ? En dehors des intérêts de l’Eglise qu’elle blesse, la nouvelle loi sera aussi des plus funestes à votre pays ! Pas de doute, en effet, qu’elle ne ruine lamentablement l’union et la concorde des âmes. Et cependant, sans cette union et sans cette concorde, aucune nation ne peut vivre ou prospérer. Voilà pourquoi, dans la situation présente de l’Europe surtout, cette harmonie parfaite forme le vœu le plus ardent de tous ceux, en France, qui, aimant vraiment, leur pays, ont encore à coeur le salut de la patrie.

   Quant à Nous, à l’exemple de notre prédécesseur et héritier de sa prédilection toute particulière pour votre nation, nous nous sommes efforcé sans doute de maintenir la religion de vos aïeux dans l’intégrale possession de tous ses droits parmi vous, mais, en même temps, et toujours ayant devant les yeux cette paix fraternelle, dont le lien le plus étroit est certainement la religion, nous avons travaillé à vous raffermir tous dans l’union. Aussi, nous ne pouvons pas voir, sans la plus vive angoisse, que le gouvernement français vient d’accomplir un acte qui, en attisant, sur le terrain religieux, des passions excitées déjà d’une façon trop funeste, semble de nature à bouleverser de fond en comble tout votre pays.

La condamnation

   C’est pourquoi, Nous souvenant de notre charge apostolique et conscient de l’impérieux devoir qui nous incombe de défendre contre toute attaque- et de maintenir dans leur intégrité absolue les droits inviolables et sacrés de l’Eglise, en vertu de l’autorité suprême que Dieu nous a conférée, Nous, pour les motifs exposés ci-dessus, nous réprouvons et nous condamnons la loi votée en France sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat comme profondément injurieuse vis-à-vis de Dieu, qu’elle renie officiellement, en posant en principe que la République ne reconnaît aucun culte.

   Nous la réprouvons et condamnons comme violant le droit naturel, le droit des gens et la fidélité due aux traités, comme contraire à la constitution divine de l’Eglise, à ses droits essentiels, à sa liberté, comme renversant la justice et foulant aux pieds les droits de propriété que l’Eglise a acquis à des titres multiples et, en outre, en vertu du Concordat.

   Nous la réprouvons et condamnons comme gravement offensante pour la dignité de ce Siège apostolique, pour notre personne, pour l’épiscopat, pour le clergé et pour tous les catholiques français.

   En conséquence, nous protestons solennellement de toutes nos forces contre la proposition, contre le vote et contre la promulgation de cette loi, déclarant qu’elle ne pourra jamais être alléguée contre les droits imprescriptibles et immuables de l’Eglise pour les infirmer.

Aux Evêques et au Clergé : Instructions Pratiques

   Nous devions faire entendre ces graves paroles et vous les adresser à vous, vénérables Frères, au peuple de France et au monde chrétien tout entier, pour dénoncer le fait qui vient de se produire.

   Assurément, profonde est notre tristesse, comme nous l’avons déjà dit, quand, par avance, nous mesurions du regard les maux que cette loi va déchaîner sur un peuple si tendrement aimé par nous, et elle nous émeut plus profondément encore à la pensée des peines, des souffrances, des tribulations de tout genre qui vont vous incomber à vous aussi vénérables Frères, et à votre clergé tout entier.

   Mais, pour nous garder au milieu des sollicitudes si accablantes contre toute affliction excessive et contre tous les découragements, nous avons le ressouvenir de la Providence divine toujours si miséricordieuse et l’espérance mille fois vérifiée que jamais Jésus-Christ n’abandonnera son Eglise, que jamais, il ne la privera de son indéfectible appui. Aussi, sommes-nous bien loin d’éprouver la moindre crainte pour cette Eglise. Sa force est divine comme son immuable stabilité. L’expérience des siècles le démontre victorieusement. Personne n’ignore, en effet, les calamités innombrables et plus terribles les unes que les autres qui ont fondu sur elle pendant cette longue durée et là où toute institution purement humaine eût dû nécessairement s’écrouler, l’Eglise a toujours puisé dans ses épreuves une force plus rigoureuse et une plus opulente fécondité.

   Quant aux lois de persécution dirigées contre elle, l’histoire nous l’enseigne, et dans des temps assez rapprochés la France elle-même nous le prouve, forgées par la haine, elles finissent toujours par être abrogées avec sagesse, quand devient manifeste le préjudice qui en découle pour les Etats. Plaise à Dieu que ceux qui en ce moment sont au pouvoir en France suivent bientôt sur ce point l’exemple de ceux qui les y précédèrent. Plaise à Dieu qu’aux applaudissements de tous les gens de bien, ils ne tardent pas à rendre à la religion, source de civilisation et de prospérité pour les peuples, avec l’honneur qui lui est dû, la liberté ! En attendant, et aussi longtemps que durera une persécution oppressive, revêtus des armes de lumière (Rom. XIII, 12), les enfants de l’Eglise doivent agir de toutes leurs forces pour la vérité et pour la justice. C’est leur devoir toujours ! C’est leur devoir aujourd’hui plus que jamais ! Dans ces saintes luttes, vénérables Frères, vous qui devez être les maîtres et les guides de tous les autres, vous apporterez toute l’ardeur de ce zèle vigilant et infatigable, dont de tout temps l’Episcopat français a fourni à sa louange des preuves si connues de tous; mais par dessus tout, nous voulons, car c’est une chose d’une importance extrême, que, dans tous les projets que vous entreprendrez pour la défense de l’Eglise, vous vous efforciez de réaliser la plus parfaite union de coeur et de volonté !

   Nous sommes fermement résolu à vous adresser, en temps opportun, des instructions pratiques pour qu’elles vous soient une règle de conduite sûre au milieu des grandes difficultés de l’heure présente. Et nous sommes certain d’avance que vous vous y conformerez très fidèlement.

   Poursuivez cependant l’œuvre salutaire que vous faites, ravivez le plus possible la piété parmi les fidèles, promouvez et vulgarisez de plus en plus l’enseignement de la doctrine chrétienne, préservez toutes les âmes qui vous sont confiées des erreurs et des séductions qu’aujourd’hui elles rencontrent de tant de côtés ; instruisez, prévenez, encouragez, consolez votre troupeau ; acquittez-vous enfin vis-à-vis de lui de tous les devoirs que vous impose votre charge pastorale.

   Dans cette œuvre, vous aurez sans doute, comme collaborateur infatigable, votre clergé. Il est riche en hommes remarquables par leur piété, leur science, leur attachement au Siège apostolique, et nous savons qu’il est toujours prêt à se dévouer sans compter sous votre direction pour le triomphe de l’Eglise et pour le salut éternel du prochain.

   Bien certainement, aussi les membres de ce clergé comprendront que dans cette tourmente ils doivent avoir au coeur les sentiments qui furent jadis ceux des apôtres et ils se réjouiront d’avoir été jugés dignes de souffrir des opprobres pour le nom de Jésus. Gaudeates quoniam digni habili sunt pro nomine Jesu contumeliam pari (Act. V, 41).

   Ils revendiqueront donc vaillamment les droits et la liberté de l’Eglise, mais sans offenser personne. Bien plus soucieux de garder la charité comme le doivent surtout des ministres de Jésus-Christ, ils répondront à l’iniquité par la justice, aux outrages par la douceur, et aux mauvais traitements par des bienfaits.

Au peuple catholique : Appel à l’union

   Et maintenant, c’est à vous que nous nous adressons, catholiques de France ; que notre parole vous parvienne à tous comme un témoignage de la très tendre bienveillance avec laquelle nous ne cessons pas d’aimer votre pays et comme un réconfort au milieu des calamités redoutables qu’il va vous falloir traverser.

   Vous savez le but que se sont assigné les sectes impies qui courbent vos têtes sous leur joug, car elles l’ont elles-mêmes proclamé avec une cynique audace : « Décatholiciser la France ».

   Elles veulent arracher de vos coeurs, jusqu’à la dernière racine, la foi qui a comblé vos pères de gloire, la foi qui a rendu votre patrie prospère et grande parmi les nations, la foi qui vous soutient dans l’épreuve qui maintient la tranquillité et la paix à votre foyer et qui vous ouvre la voie vers l’éternelle félicité.

   C’est de toute votre âme, vous le sentez bien, qu’il vous faut défendre cette foi ; mais ne vous y méprenez pas, travail et efforts seraient inutiles si vous tentiez de repousser les assauts qu’on vous livrera sans être fortement unis. Abdiquez donc tous les germes de désunion s’il en existait parmi vous et faites le nécessaire pour que, dans la pensée comme dans l’action, votre union soit aussi ferme qu’elle doit l’être parmi des hommes qui combattent pour la même cause, surtout quand cette cause est de celles au triomphe de qui chacun doit volontiers sacrifier quelque chose de ses propres opinions.

   Si vous voulez dans la limite de vos forces, et comme c’est votre devoir impérieux, sauver la religion de vos ancêtres des dangers qu’elle court, il est de toute nécessité que vous déployiez dans une large mesure vaillance et générosité. Cette générosité vous l’aurez, nous en sommes sûr et, en vous montrant ainsi charitables vis-à-vis de ses ministres, vous inclinerez Dieu à se montrer de plus en plus charitable vis-à-vis de vous. Quant à la défense de la religion, si vous voulez l’entreprendre d’une manière digne d’elle, la poursuivre sans écart et avec efficacité, deux choses importent avant tout : vous devez d’abord vous modeler si fidèlement sur les préceptes de la loi chrétienne que vos actes et votre vie tout entière honorent la foi dont vous faites profession; vous devez ensuite demeurer très étroitement unis avec ceux à qui il appartient en propre de veiller ici-bas sur la religion, avec vos prêtres, avec vos évêques et surtout avec ce siège apostolique, qui est le pivot de la foi catholique et de tout ce qu’on peut faire en son nom. Ainsi armés pour la lutte, marchez sans crainte à la défense de l’Eglise, mais ayez bien soin que votre confiance se fonde tout entière sur le Dieu dont vous soutiendrez la cause et, pour qu’il vous secoure, implorez-le sans vous lasser.

   Pour nous, aussi longtemps que vous aurez à lutter contre le danger, nous serons de cœur et d’âme au milieu de vous. Labeurs, peines, souffrances, nous partagerons tout avec vous et, adressant en même temps au Dieu qui a fondé l’Eglise et qui la conserve, nos prières les plus humbles et les plus instantes, nous le supplierons d’abaisser sur la France un regard de miséricorde, de l’arracher aux flots déchaînés autour d’elle et de lui rendre bientôt, par l’intercession de Marie Immaculée, le calme et la paix. Comme présage de ces bienfaits célestes et pour vous témoigner notre prédilection toute particulière, c’est de tout coeur que nous vous donnons notre bénédiction apostolique, à vous, vénérables Frères, à votre clergé et au peuple français tout entier.

Donné à Rome, auprès de Saint-Pierre, le 11 février de l’année 1906, de notre pontificat la troisième.

Pie X pp.

Expulsion des séminaristes de Saint-Sulpice

Note : l’ancien séminaire Saint-Sulpice, place Saint-Sulpice à Paris, volé à la Compagnie des
Prêtres de Saint-Sulpice, 
est, depuis 1922, occupé par des services du Ministère des Finances…

Litanies de Notre-Dame de Lourdes :

Notre-Dame de Lourdes aux bougies - blogue

Seigneur, ayez pitié de nous.
Jésus-Christ, ayez pitié de nous.
Seigneur, ayez pitié de nous.

Jésus-Christ, écoutez-nous.
Jésus-Christ, exaucez-nous.

Père céleste qui êtes Dieu, ayez pitié de nous.
Fils Rédempteur du monde qui êtes Dieu, ayez pitié de nous.
Esprit Saint qui êtes Dieu, ayez pitié de nous.
Trinité sainte qui êtes un seul Dieu, ayez pitié de nous.

Notre-Dame de Lourdes, Vierge Immaculée, priez pour nous. 
Notre-Dame de Lourdes, Mère du divin Sauveur, priez pour nous. 
Notre-Dame de Lourdes, qui avez choisi pour interprète une enfant faible et pauvre, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, dix-huit fois bénie dans vos apparitions, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, qui avez fait couler sur la terre la source qui guérit tous les maux, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, dispensatrice des Dons du Ciel, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, à qui Jésus ne peut rien refuser, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, que nul n’a jamais invoquée en vain, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, consolatrice des affligés, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, qui guérissez les malades, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, espoir des pèlerins, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, qui priez pour les pécheurs, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, qui nous engagez à la pénitence, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, soutien de la Sainte Eglise, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, avocate des âmes du purgatoire, priez pour nous.
Notre-Dame de Lourdes, Vierge du Très Saint Rosaire, priez pour nous.

Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, pardonnez-nous, Seigneur. 
Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, exaucez-nous, Seigneur. 
Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, ayez pitié de nous.

Jésus-Christ, écoutez-nous. 
Jésus-Christ, exaucez-nous.

V./ : Priez pour nous, Notre- Dame de Lourdes,
R./ : afin que nous soyons dignes des promesses de Jésus-Christ.

Prions :

   O Dieu, qui, par l’Immaculée Conception de la Vierge, avez préparé à Votre Fils une habitation digne de Lui : accordez-nous, s’il Vous plaît, en célébrant l’Apparition de la même Vierge, d’obtenir le salut de l’âme et du corps. Nous Vous le demandons par ce même Jésus-Christ Notre-Seigneur.

Ainsi soit-il !

couronne de Notre-Dame de Lourdes

2025-31. La « Grotte de Lourdes » érigée dans les jardins du Vatican, et ses liens avec la France.

11 février,
Fête de l’apparition de la Vierge Immaculée à Lourdes (double majeur).

Etat originel de la grotte de Massabielle et paroles de la Vierge - blogue

Carte postale reproduisant une photographie de la grotte de Massabielle, à Lourdes, en 1858,
et paroles de la Très Sainte Mère de Dieu prononcées lors des apparitions.

       J’espère que vous connaissez tous, chers Amis, le récit des apparitions de la Très Sainte Vierge Marie à Lourdes, du 11 février au 16 juillet 1858, et peut-être vous êtes-vous déjà rendus en pèlerinage à Lourdes.
Mon papa-moine s’y est rendu à plusieurs reprises. La dernière fois, ce fut dans les derniers jours de janvier et les premiers de février, en 2008 (année jubilaire du cent-cinquantième anniversaire des apparitions) : il y allait spécialement pour demander à Notre-Dame un lieu pour y implanter le Refuge Notre-Dame de Compassion, et exactement trois semaines plus tard (trois fois sept : c’est important en numérologie sacrée) il visitait ce lieu qui est devenu aujourd’hui le Mesnil-Marie, ainsi que mon illustre prédécesseur feu le Maître-Chat Lully, vous l’a déjà raconté (cf. > ici).

   Mais il me faut revenir au propos qui est annoncé par le titre de la chronique de ce jour…

Grotte de Massabielle aménagée - fin XIXe siècle - blogue

Carte postale montrant l’état des aménagements de la grotte de Massabielle,
au début du XXème siècle : le premier autel fixe – que l’on voit ici – y fut placé en 1908.

   Le Bienheureux Pie IX (+ 7 février 1878), dont la définition dogmatique de la Conception sans tache de de la Mère de Dieu, en 1854, avait été confirmée quatre ans plus tard par l’apparition de Lourdes, eut bien sûr une profonde dévotion envers Notre-Dame de Lourdes.

   Son successeur, Léon XIII (pape de 1878 à 1903), avait lui aussi une dévotion spéciale pour la Madone pyrénéenne, au point qu’il exprima le désir d’avoir, dans les jardins du Vatican, une reproduction de la grotte de Lourdes.

   Insistons au passage sur le fait que, depuis le sinistre 20 septembre 1870 (cf. >ici), les papes se trouvaient spoliés de leurs Etats légitimes et qu’ils étaient, de fait, comme prisonniers dans la Cité vaticane, seule partie du Patrimoine de Saint-Pierre sur laquelle les francs-maçons qui avaient été à la manœuvre dans la création du royaume d’Italie n’avaient pas porté la main. Dans ce contexte, où les Souverains Pontifes ne paraissaient même plus à la loggia de la façade extérieure de la basilique Saint-Pierre pour donner leur bénédiction, il était évidemment inimaginable qu’un pape voyageât et pût se rendre en pèlerinage à Lourdes, comme certains de leurs successeurs le purent faire après les Accords du Latran (11 février 1929) qui réglèrent la Question romaine.

La Cité Vaticane - emplacement de la grotte de Lourdes

détail de la carte de la Cité vaticane

   Informé du désir de Léon XIII, l’évêque de Tarbes d’alors, Son Excellence Monseigneur François-Xavier Schœpfer, fit en sorte que cette reproduction de la grotte de Massabielle fût offerte au pape à l’initiative des catholiques de France, qui la financèrent en grande partie, mais pas uniquement : lorsque le projet fut connu, des fidèles de toute la catholicité tinrent à offrir leur obole pour la construction de cet édifice.

   La Grotta della Madonna di Lourdes des jardins du Vatican fut réalisée par l’architecte du Palais Apostolique, Constantin Sneider, à une échelle réduite, mais rendant bien les proportions initiales, adossée perpendiculairement à une partie de l’antique muraille léonine.

   Originellement, on y voyait non seulement la grotte mais, légèrement en retrait, une copie du clocher de la basilique de l’Immaculée Conception auquel on accédait par un double escalier construit de chaque côté, clocher et escaliers qui, depuis, ont dû être démolis pour des raisons de sécurité (le clocher sous le pontificat de Pie XI et les escaliers sous celui de Jean XXIII).

   Les travaux d’aménagement n’étaient pas achevés à la mort de Léon XIII (+ 20 juillet 1903), ils ne le furent que sous le pontificat de son successeur, Saint Pie X, qui procéda lui-même à la bénédiction solennelle du lieu, le 28 mars 1905.

Reproduction de la grotte de Lourdes dans les jardins du Vatican

Reproduction de la grotte de Lourdes dans les jardins du Vatican,
pendant les travaux de construction et d’aménagement.

Reproduction de la grotte de Lourdes dans les jardins du Vatican - la grotte elle-même état originel

Reproduction de la grotte de Lourdes dans les jardins du Vatican,
dans son état originel : on remarque, sur la gauche une grande inscription latine
gravée dans le marbre résumant l’histoire de cette grotte,
et, juste en avant de la grille mais légèrement excentrée, une reproduction
de la fontaine telle qu’elle existait alors à Lourdes.
Les médaillons en mosaïque sur la façade représentent, à gauche Léon XIII,
et à droite l’évêque de Tarbes, Monseigneur Schœpfer.

Reproduction de la grotte de Lourdes dans les jardins du Vatican - état actuel

Reproduction de la grotte de Lourdes dans les jardins du Vatican, état actuel,
après la démolition du clocher et des escaliers,
l’arasement des créneaux au sommet de la façade, la disparition de la « source »,
l’installation de l’autel et l’avancement de la grille.

    Originellement, ainsi qu’on peut le voir sur la photographie qui se trouve au milieu des trois ci-dessus, la grotte ne comportait pas d’autel : c’était un lieu de recueillement et de prière, pas de la célébration de la Sainte Messe.

   A Lourdes même, l’installation d’un autel fixe dans la grotte ne se fit que cinquante ans après les apparitions : il était en effet absolument contraire aux plus anciennes traditions de célébrer la Sainte Messe en plein air, sauf circonstances exceptionnelles qui requéraient des autorisations et des dispenses, lorsqu’il n’y avait vraiment pas de lieu de célébration qui convînt ou fût disponible (comme par exemple pendant la grande révolution ou sur les champs de bataille).
Pendant les cinquante années qui suivirent les apparitions donc, la Sainte Messe n’était célébrée occasionnellement à la grotte de Massabielle que sur un autel amovible. Nous avons le témoignage de l’abominable Zola qui dans « Trois villes » (1893-1898) décrit :

« (…) un très bel autel roulant, recouvert de plaques d’argent gravé, don d’une grande dame, que l’on ne risquait d’ailleurs que pendant les pèlerinages riches, de crainte que l’humidité ne l’abîmât… »

   Je vous avoue, chers Amis, que la mention par cet impie de Zola d’un « autel roulant » m’a néanmoins bien amusé parce que Frère Maximilien-Marie m’a raconté que beaucoup de « tradis » des années soixante et septante du précédent siècle surnommaient par dérision « autels à roulettes », les autels de fortune – et souvent aisément déplaçables – que le clergé installait dans le sanctuaire en avant du maître-autel afin de célébrer la Messe « face-au-peuple ».

Grotte de Massabielle - l'autel d'argent de 1908

l'autel d'argent de 1908 - blogue

   En 1908, le premier autel fixe fut placé dans la grotte.
Surnommé « l’autel d’argent », c’est une pièce majeure de l’orfèvrerie religieuse, ciselé par l’orfèvre lyonnais Armand-Calliat fils (1862-1939).

   Mais en 1956, alors que le « renouveau liturgique » (sic) commençait déjà à sévir, Monseigneur Pierre-Marie Théas, évêque de Tarbes, fit procéder à d’importants changements dans la grotte des apparitions : la grille fut enlevée, l’autel d’argent fut retiré, et on le remplaça par un autel de marbre de « style contemporain » dont on vanta la couleur « plus accordée au rocher de la grotte » (sic) : si, en pratique, on y célébrait alors majoritairement « dos au peuple » selon la tradition multiséculaire, il était néanmoins conçu pour pouvoir aussi célébrer « face au peuple ».
La prétendue réforme post-conciliaire était déjà dans les dossiers !

aménagements de la grotte de Massabielle en 1956

Grotte de Massabielle : l’autel en marbre de 1956.
(nota bene : depuis on a fait encore pire, puisque le marchepied a été détruit et que
l’autel ci-dessus 
a été remplacé par une espèce de rocher vaguement cubique mal dégrossi)

    Ayant donc « sur les bras » l’ancien autel d’argent d’Armand-Calliat dont on ne pouvait toute de même pas se débarrasser aussi facilement que ne le faisaient les curés de paroisses qui détruisaient à la masse les antiques maitres-autels de leurs églises, le progressiste Pierre-Marie Théas, suggéra qu’on pourrait l’offrir au non moins progressiste Jean XXIII, ancien nonce apostolique en France (décembre 1944 – janvier 1953) qui, ès qualité de Patriarche de Venise, était revenu à Lourdes pour procéder à la dédicace de la basilique souterraine Saint-Pie X, en mars 1958, c’est-à-dire quelques mois avant son accession au Souverain Pontificat.

   Et c’est ainsi que non seulement la grotte de Lourdes des jardins du Vatican a été érigée en grande partie par les offrandes des catholiques de France, mais qu’elle y conserve aussi l’autel ciselé dans l’une des plus illustres parmi les entreprises d’orfèvrerie religieuse française (sur lequel la Messe n’est plus dite non plus depuis l’actuel occupant du trône pontifical, qui y fait transporter un « autel-face-au-peuple » placé en avant de la grille lorsqu’une célébration y est organisée).

pattes de chat Tolbiac.

Ancien autel de la grotte de Lourdes dans la copie des jardins du Vatican

L’autel d’argent de la grotte de Massabielle (1908-1956)
dans la reproduction de la grotte de Lourdes des jardins du Vatican.

2025-30. Premier vendredi du mois de février : « Donnez-Moi ce plaisir de suppléer à leurs ingratitudes… »

Premier vendredi du mois de février.

Statue du Sacré-Cœur aux bras étendus

« Donnez-Moi ce plaisir de suppléer à leurs ingratitudes… »

       Ecoutez, Mes enfants ; laissez-Moi vous parler au cœur.
Je vous aime. Je vous aime infiniment plus que vous ne pourrez jamais le comprendre.
Et je désire votre bonheur : un bonheur infini et éternel.

   Je suis venu dans ce monde, et ce monde ne M’a point connu.
Je suis venu au milieu des Miens, et les Miens ne M’ont pas accueilli.
Aujourd’hui, Je réside au milieu des hommes dans ce Sacrement où l’Amour M’a fait leur captif, et les hommes Me méconnaissent et M’oublient.
Ils Me laissent seul dans leurs églises désertes.
Ils Me traitent avec tant de légèreté et de désinvolture dans leurs cérémonies.
Ils Me reçoivent routinièrement dans la sainte communion, sans vrai recueillement, sans préparation suffisante, sans ferveur…
Et que de communions sacrilèges !

   Les hommes pensent à beaucoup de choses : à leurs familles et à leurs amis ; à ceux qui leur apportent une satisfaction affective, sentimentale, psychologique, matérielle, physique ; à leur travail et à leur loisirs ; à leurs intérêts, légitimes ou illicites ; à leur jouissance et à leurs passions les plus superficielles ou les plus viles…
Mais ils ne pensent point à Moi, leur Dieu, leur Créateur, leur Sauveur ; à Moi qui Me suis fait pour eux victime d’expiation, et qui Me suis offert en sacrifice afin de leur obtenir le salut.

   Ils Me délaissent comme un étranger isolé au milieu d’un peuple auquel il est inconnu.
Ils ne Me visitent point.
Ou quand 
ils entrent dans Mes églises, ils trouvent que le temps qu’ils y passent est toujours trop long.
Ils se trouvent généreux à Me faire l’aumône de quelques minutes le matin et le soir, quand ils font encore leur prière, ou d’une heure le dimanche matin en regrettant intérieurement de ne pas pouvoir rester au lit plus longtemps… et c’est de Ma faute !

   J’ai versé jusqu’à la dernière goutte de Mon Sang pour les laver de leurs fautes, et ils considèrent que le péché est une chose bien peu grave.
Ils M’offensent, et n’en réalisent pas toute la gravité.
Ils M’offensent et ne pensent qu’avec désinvolture aux conséquences de leurs outrages.
Ils M’offensent, et ils dédaignent le ciel que Je leur offre.
Ils M’offensent, et ils flirtent avec les flammes de l’enfer que leur méritent leurs péchés.

   La pensée de Ma Passion, le souvenir que doit susciter en leurs cœurs la présence de Ma croix, dans leurs maisons, aux carrefours ou au bord des chemins, voire suspendue à une chaîne autour de leurs cous, ne suscite pas en leurs âmes les élans de reconnaissance et d’amour qu’ils devraient ressentir à l’évocation de Mon grand Sacrifice rédempteur.
Ils détournent d’ailleurs les regards de leurs âmes de l’idée de sacrifice !

   Etes-vous, vous aussi du nombre de ceux qui abandonnent Mon Sacré-Cœur aux seuls hommages, adorations et actes d’amour des Anges qui M’environnent invisiblement dans Mes sanctuaires désertés ?
Ou serez-vous du petit nombre de Mes amis fidèles qui, se détournant de l’indifférence et de l’égoïsme, se plaisent à M’adorer, à Me louer et à M’aimer  ?

   Serai-Je pour vous ce que sont à ces cœurs mondains, aveugles et insensibles, les misérables intérêts de cette courte vie ?
Dédommagez-Moi des ingratitudes, des indifférences, des froideurs, des sacrilèges, de ceux qui préfèrent les eaux bourbeuses de l’iniquité à ce fleuve d’eau vive dont Je suis la Source, les grossières voluptés du monde aux chastes délices de Mon Amour, et qui courent à leur perdition éternelle.

   Offrez-vous à Mon Divin Cœur en réparation de l’oubli et des outrages que Mes autres enfants Me prodiguent chaque jour, à chaque instant du jour… Vous, du moins, donnez-Moi ce plaisir de suppléer à leurs ingratitudes autant que vous en pourrez être capables ! (cf. > ici).

Sacré-Coeur

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