Archive pour la catégorie 'Memento'

2017-73. Les Saintes Epines de la cathédrale de Namur.

Vendredi après le dimanche de Quasimodo,
A Namur, fête des Saintes Epines.

couronne d'épines et croix - blogue

       Il y a déjà plusieurs années, chers Amis, nous vous avons parlé de la fête de la Susception de la Sainte Epine qui figure au propre du diocèse du Puy à la date du 26 août, et nous vous en avions expliqué l’origine (cf. > ici).

   Nous vous avons aussi retranscrit le témoignage de notre amie Marie-Christine Ceruti-Cendrier qui se trouvait à Andria le Vendredi Saint 25 mars 2016 lors du miracle de la Sainte Epine (cf. > ici). 

   La Sainte Epine d’Andria, comme celle du Puy, proviennent des dons de Saint Louis.
Toutefois, il faut signaler qu’il existe en Occident d’autres reliques de la Sainte Couronne d’Epines qui, elles, ne proviennent pas des dons accomplis par Saint Louis : tel est le cas de deux Epines de la Sainte Couronne de Notre-Seigneur, conservées à la cathédrale Saint-Aubin de Namur depuis les premières années du XIIIe siècle.

   Comme nous avons au Mesnil-Marie une très grande dévotion envers la Sainte Couronne d’Epines de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et que, de ce fait, nous nous intéressons à tout ce qui touche à sa vénération et à son culte, nous avons demandé à l’un de nos jeunes amis namurois, historien médiéviste, de nous rédiger une note historique à ce sujet : vous la trouverez ci-dessous, et vous pourrez aussi, grâce au lien qui se trouve à la fin de cette présentation historique, accéder aux textes liturgiques propres du diocèse de Namur pour la fête de la Sainte Couronne d’Epines.

   Que notre ami Patrick soit très chaleureusement remercié pour ce travail !

Lully.

* * *

Namur - cathédrale Saint-Aubin

Namur : la cathédrale Saint-Aubin
au sommet du dôme et du campanile de laquelle on remarque les croix à double traverse.

* * *

Les reliques de la Sainte Couronne d’Epines
de
Notre-Seigneur Jésus-Christ
à la
Cathédrale Saint-Aubain de Namur

       En 1559, le Pape Pie IV, à la demande du roi d’Espagne Philippe II, procède à la création de nouveaux diocèses dans les territoires des Pays-Bas espagnols. La restructuration de ces différentes provinces ecclésiastiques avait pour but de contrer l’influence des calvinistes de France et des Provinces-Unies ainsi que celle des luthériens allemands. Parmi les nouveaux diocèses, créés lors du Consistoire du 12 mai 1559, se trouve celui de Namur.
La création d’un nouveau diocèse signifiant également la recherche d’une cathédrale, on choisit la collégiale Saint-Aubain qui fut donc élevée au rang d’église cathédrale.

   Mais l’existence du chapitre Saint-Aubain de Namur est bien antérieure à ces changements.
C’est le Comte de Namur Albert II qui fait reconstruire l’église Saint-Aubain en 1047, elle fut ensuite érigée en collégiale et dotée d’un chapitre de chanoines.

   On possède peu d’informations sur l’ancienne église démolie par le Comte Albert II. Même l’identification du vocable est incertaine. Certains émirent l’hypothèse qu’il pouvait s’agir d’une église dédiée à la Sainte-Croix. On peut, néanmoins, affirmer avec certitude qu’un autel en l’honneur de la Sainte-Croix se dressait au milieu du chœur de l’église. La tradition veut même qu’il fût consacré par le Pape saint Corneille. La présence de cet autel permet de comprendre le lien existant entre le culte à la Passion du Seigneur Jésus et la future cathédrale namuroise.

Croix reliquaire - cathédrale de Namur

Cathédrale Saint-Aubin de Namur : croix reliquaire
(or, émaux, brillants et cristal, XVIe s. – pied du XVIIe s.)

   En 1205, l’Empereur latin de Constantinople Henri Ier envoya à son frère Philippe, Marquis et Comte de Namur, des reliques de la Passion du Seigneur qui furent remises à la collégiale Saint-Aubain.
Ces reliques se composaient d’un morceau de la Vraie Croix ainsi que de deux épines de la Sainte Couronne.

   La relique de la Croix fut enchâssée dans une croix en or sur le modèle des reliquaires provenant de Jérusalem, tandis que les reliques de la Couronne d’Epines furent placées dans une couronne sertie de pierres précieuses.
La présence de ces reliques insignes dans le Trésor de la Cathédrale namuroise explique la présence d’une croix à double traverse au sommet du Campanile et du Dôme de l’église.

Couronne reliquaire des saintes épines - cathédrale de Namur

Cathédrale Saint-Aubin de Namur : couronne reliquaire des Saintes Epines
(or, pierres et perles : art mosan, début du XIIIe siècle)

   Liturgiquement, le diocèse de Namur célèbre la Sainte Couronne d’Epines le vendredi après le dimanche in albis.
On trouvera les textes propres de la Messe et de l’office ici fichier pdf Office de la Sainte Couronne d’Epines de NS – propre de Namur

couronne reliquaire des saintes épines - cathédrale de Namur

2017-71. « Et d’abord, votre Prince, pourquoi n’habite-t-il pas en France ? »

24 août,
Fête de l’apôtre Saint Barthélémy ;
Anniversaire de la sainte mort de SM le Roi Henri V, dit « comte de Chambord ».

Henri V comte de Chambord

SMTC le Roi Henri V, dit « comte de Chambord »

       Aux célébrations liturgiques du 24 août, s’ajoute l’anniversaire de la sainte mort de Sa Majesté le Roi Henri V, couramment appelé par le titre de courtoisie qu’il prit en exil : « comte de Chambord ».

   A cette occasion, je souhaite attirer votre attention, chers Amis, sur un point particulier pour lequel la noble et exemplaire attitude de ce Prince, qui n’a jamais sacrifié les principes de la royauté capétienne traditionnelle, demeure une forte leçon en nos temps, et nous permet de répondre aujourd’hui de manière particulièrement claire et juste à la question qui nous est tant de fois opposée, à propos de Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté le Roi Louis XX, à la manière d’un reproche ou comme un pseudo argument contre la validité de son caractère dynaste  : « Et d’abord, votre Prince, pourquoi n’habite-t-il pas en France ? »

fleur de lys gif2

   Dans son journal, Monseigneur le comte de Chambord, à la date du 30 octobre 1849, note ceci : « Berryer, par un discours très adroit fait repousser à une g[ran]de majorité la proposition de rappel de nos familles ».

   De quoi s’agit-il ?
Tout simplement de ce que l’on appelle du terme générique « lois d’exil » ; et à ce propos, il n’est pas inutile de faire ici un petit rappel historique.

- Loi d’exil contre la branche aînée des Bourbons (1832) :
Le 10 avril 1832, la « monarchie de juillet » promulgua une loi condamnant à un bannissement perpétuel et à la déchéance de leurs droits civils, Sa Majesté le Roi Charles X et tous les membres de la branche aînée des Bourbons.

- Loi d’exil contre les Orléans (1848) :
Le 26 mai 1848, la deuxième république adopte une loi qui interdit à perpétuité au roi Louis-Philippe et à sa famille l’entrée sur le territoire français ; ce texte ne leur ôte cependant pas leurs droits civils, comme cela avait été fait en 1832 pour les Princes de la branche aînée.

   A la séance du 24 octobre 1849, le parlement de la deuxième république, où siégeaient de nombreux députés légitimistes et orléanistes, examina une proposition d’abrogation des lois d’exil de 1832 et 1848.
C’est à cette occasion que l’avocat et député légitimiste Pierre-Antoine Berryer (1790-1868) argumenta contre l’abrogation de ces lois d’exil en ces termes :

   « [...] Dans tout gouvernement un principe doit dominer : le principe électif ou le principe héréditaire. L’un exclut l’autre. Y a-t-il un membre de cette Assemblée qui puisse croire que, sous le principe qui régit la France, il y ait un seul membre de la famille des Bourbons qui consente à rentrer en France ! [...]
« Messieurs, vous républicains, vous pouvez bien regarder les princes de la Maison de Bourbon comme de simples citoyens, comme des hommes ordinaires ; mais vous ne pouvez pas faire qu’il restent eux-mêmes fidèles à leur principe.
« Les révolutions peuvent bien déshériter l’avenir, elles n’ont pas la puissance d’anéantir le passé. Vous ne pouvez pas faire que la Maison de Bourbon ne soit pas la plus ancienne et la plus illustre représentation du principe héréditaire, et qu’elle ne s’honore d’avoir régné tant de siècles sur cette grande nation qu’on appelle la France » (cité dans  « Henri, comte de Chambord – Journal (1846 – 1883)  Carnets inédits ». Ed. François-Xavier de Guibert 2009 p. 133 note 106).

   Dans son diaire, à la date du 30 octobre (puisque les journaux de France qu’il lit avec attention mettent quelques jours pour lui parvenir à Frosdhorf ou à Venise, ses principaux lieux de résidence à l’époque), Monseigneur le comte de Chambord montre donc qu’il est au courant du débat qui a eu lieu à la chambre des députés 6 jours plus tôt ; il note la teneur de l’intervention de Berryer, et… il ne la blame pas ni ne la regrette.
Au contraire.
En effet, sur le fond, Henri V est en plein accord avec l’argumentation de Berryer : puisque la France renie les principes incarnés par l’aîné des Capétiens, il est préférable que l’aîné des Capétiens soit officiellement exilé.
La cohabitation des principes de la révolution et des principes de la monarchie traditionnelle incarnés par le Prince est impossible.

   Pourtant, à première vue, beaucoup de royalistes seraient enclins à penser que l’abrogation de ces lois d’exil est une bonne chose, et qu’un prince français – surtout s’il veut reprendre la place qui est la sienne à la tête du Royaume – , se devrait de résider en France plutôt que de demeurer dans un exil qui le tient éloigné de ses fidèles sujets et de ceux qui, en France, se battent pour lui dans la sphère politique.
Or, vraiment, il n’en est rien !
Au contraire, une présence continue de l’aîné des Capétiens sur le territoire français dans le temps où les pseudo institutions qui régissent la France sont l’exacte négation des principes de la royauté traditionnelle qu’incarne le Prince, se révèlerait à la longue plus néfaste et plus destructrice que l’exil.

   En juin 1871, sur proposition de Monsieur Alfred Giraud, député de la Vendée, les deux lois d’exil de 1832 et 1848 furent abrogées.
Cela permit aux princes Henri d’Orléans, « duc d’Aumale », et François-Ferdinand d’Orléans, « prince de Joinville », tous deux fils de Louis-Philippe, de siéger à la chambre des députés.
Toutefois, Monseigneur le comte de Chambord, s’il fit un rapide et très discret voyage en France, ne revint pas s’y installer.
Pourquoi ?
Parce que l’aîné des Capétiens, successeur légitime de tous nos Rois, depuis Clovis jusqu’à Charles X, ne peut résider durablement en France qu’en étant officiellement le Roi de France, dans un Royaume de France pleinement restauré en toutes ses traditions.

   Le 26 juin 1886, la troisième république adopta une nouvelle loi d’exil à l’encontre de tous les chefs des familles royales et impériales ayant régné en France, et à l’encontre de leurs fils aînés. Cette même loi interdisait à tous les hommes de ces familles de servir dans l’armée française.
Cette loi du 26 juin 1886 fut abrogée par la loi du 24 juin 1950 sur proposition du député MRP du Morbihan Paul Hutin-Desgrées, fondateur de Ouest-France.

   Aux termes des lois républicaines actuelles, rien ne s’oppose donc à ce que Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, de jure Sa Majesté le Roi Louis XX, et sa famille s’installent en France, ainsi que l’ont d’ailleurs fait les princes de la maison d’Orléans depuis 1950.
Cependant, même s’il vient fréquemment en France, à l’occasion de commémorations ou de visites officielles, ou pour des réunions de travail avec ses collaborateurs français, Monseigneur le Prince Louis, tout comme feu son père Monseigneur le Prince Alphonse, et comme son grand’père avant eux, tout en affirmant de manière claire et ferme ses droits à la Couronne de France, s’en tient aussi fidèlement à la ligne directrice initiée par Monseigneur le comte de Chambord.

   De fait, si l’aîné des Capétiens, Roi de droit, choisissait de résider en permanence en France avec sa famille, cela signifierait par le fait même qu’il consentirait à devenir un « citoyen de la république » et à se soumettre dans la vie quotidienne à toutes les lois de la république.
Or, si le Prince Louis, son épouse et ses enfants, possèdent la nationalité française (quoi que prétendent un certain nombres d’ignorants), il leur est, par principe, impossible de vivre dans une sujétion continue au régime républicain.
Il est, au contraire, de leur devoir le plus strict de continuer à montrer que, même si l’exil ne leur est pas à proprement parler imposé par la loi, il leur est cependant imposé par les faits : il ne peut y avoir de cohabitation entre les principes de la royauté traditionnelle incarnés par le Prince, et les faux principes de la république maçonnique.

   Certains ne manqueront pas de nous faire remarquer : « Mais les princes de la maison d’Orléans vivent bien en France, eux ! »
Mais c’est que, justement, les princes de la maison d’Orléans n’incarnent en rien les principes de la royauté traditionnelle !
Les princes de la maison d’Orléans sont sans doute les successeurs de Louis-Philippe, ils ne sont cependant en aucune manière les successeurs légitimes de Charles X et de tous les Rois de France qui avaient précédé.
Les princes de la maison d’Orléans tiennent pour une forme de royauté qui n’est pas la monarchie traditionnelle, mais une royauté constitutionnelle qui a intégré une bonne partie des faux principes de la révolution. Il n’y a donc aucun antagonisme avec les pseudo principes de l’actuelle république et les idées des princes de la maison d’Orléans concernant le gouvernement. D’ailleurs on connaît leurs liens « traditionnels » avec la maçonnerie, depuis « Philippe Egalité » jusqu’à nos jours.

   Par ailleurs, les faits corroborent la justesse de l’attitude maintenue par Monseigneur le comte de Chambord et par tous les princes de la branche aînée jusqu’à nos jours.
En effet, lors de ses déplacements en France, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, lorsqu’il est reçu par les autorités républicaines, est malgré tout toujours reçu en tant qu’aîné des Capétiens, descendant direct de Hugues Capet, de Saint Louis, d’Henri IV et de Louis XIV ; et les représentants de la république eux-mêmes, quand ils s’adressent à lui, l’appellent : « Monseigneur ».
S’il vivait ordinairement en France et y exerçait sa profession, nous verrions bientôt ce « Monseigneur » remplacé par un ordinaire « Monsieur », utilisé dans la vie courante.
C’est ce qui est arrivé à Sa Majesté le Roi Siméon II des Bulgares : roi à 6 ans, en 1943, il fut exilé de son pays en 1946. Lorsque, au terme de 50 années d’exil, il revint dans son pays en 1996, il y fut accueilli et acclamé en souverain, bien que le pays soit officiellement une république : les hommes politiques et les membres du gouvernement le saluaient en l’appelant « Sire ». Mais à partir du moment où le Roi Siméon II décida de s’installer de manière stable en Bulgarie et de s’engager dans la vie politique de son pays, jusqu’à devenir premier ministre de la république bulgare (!), il fut dès lors officiellement appelé « Monsieur ».

   Nous ne pouvons souhaiter cela pour l’actuel aîné des Capétiens, de jure Sa Majesté le Roi Louis XX, et nous lui savons un gré infini de maintenir, envers et contre tout, et malgré les pressions de certains royalistes opportunistes qui tablent sur des combinaisons politiques très humaines et sur pas mal de compromissions avec les idées de la révolution, les principes pérennes qu’ont toujours incarnés les Princes de la branche aînée des Bourbons depuis Monseigneur le comte de Chambord, de jure Sa Majesté le Roi Henri V.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Coeur.

Grandes Armes de France

Dans ce blogue vous trouverez aussi :
- « Actualité du comte de Chambord » > ici
- Bref exposé des Lois Fondamentales du Royaume de France > ici
- Les petites phrases du successeur du Grand Roi > ici
- Discours de Monseigneur le duc d’Anjou au monastère de la Castagnavizza > ici
- Pourquoi le Roi de France légitime est le Prince Louis de Bourbon > ici

2017-68. De l’anniversaire de la naissance de Saint François de Sales.

1567 – 21 août – 2017
450e anniversaire de la naissance de
Saint François de Sales

Timbre édité pour le 4e centenaire de la naissance de St François de Sales 1567-1967

En 1967, la Poste française avait édité un timbre pour commémorer
le 4ème centenaire de la naissance de Saint François de Sales…

Lundi 21 août 2017,
Fête de Sainte Jeanne-Françoise de Chantal,
450ème anniversaire de la naissance de Saint François de Sales.

       Saint François de Sales est né le 21 août 1567, au château de Sales, près de Thorens, dans le duché de Savoie.
A l’occasion de la fête du Saint-Suaire, célébrée le vendredi de la deuxième semaine de Carême, nous avions rappelé de quelle manière la jeune Madame de Boisy, priant devant cette précieuse relique exposée à la vénération des fidèles le 21 juillet 1566 dans l’église Notre-Dame de Liesse d’Annecy, avait demandé au Ciel la grâce de donner le jour à un fils qui serait consacré au service des autels (voir > ici). Profitons aujourd’hui du 450ème anniversaire de la naissance du « Docteur de l’Amour divin » pour relire les pages que Monseigneur Francis Trochu a consacrées à cet événement.

Songes prémonitoires de Madame de Boisy :

   « Pendant le carême de 1567, Mme de Boisy connut qu’elle allait être mère. Dans l’attente de l’événement qui mettrait le comble à ses voeux, confiante que sa prière à Notre-Dame de Liesse était exaucée et qu’elle aurait un fils comme premier-né, elle se mit de nouveau à l’offrir au Seigneur.
Certains de ses rêves la confirmèrent d’ailleurs dans sa créance. « Janine Copier, qui fut femme de chambre de cette illustre dame, conte un chroniqueur du temps, a déposé que sa vertueuse maîtresse eut de merveilleuses visions dans son sommeil, qu’elle racontait fort innocemment tous les matins, mais son mari (qui lui en faisait une petite guerre) ne voulait point souffrir qu’elle s’y arrêtât. Un jour entre autres, il se fâcha deux fois contre cette naïve simplicité, parce qu’elle avait déclaré s’être aperçue qu’au lieu de voir naître un cavalier, elle n’avait simplement mis au monde qu’un petit berger qui courait çà et là après des troupeaux qu’on ne pouvait nombrer… Une autre fois, elle dit tout bonnement qu’elle avait songé qu’elle avait un fils, et que ce fils portait toutes sortes d’habits, qui sont d’usage dans tous les ordres de l’Eglise de Dieu » (in « La Maison naturelle, historique et chronologique de saint François de Sales », par Nicolas de Hauteville, Paris 1669, p. 193).
Ces songes berçaient doucement notre jeune châtelaine. Tout semblait devoir se passer normalement. Le vendredi 15 août, en la fête de l’Assomption de Notre-Dame, elle se rendit à pied, comme de coutume, jusqu’à l’église de Thorens distante seulement d’un quart de lieue, se confessa, entendit la messe et communia, puis, de retour au château, elle reprit ses oeuvres de dévotion et de charité. »

Francis Trochu : « Saint François de Sales », tome 1, ed. E.Vitte Lyon 1941, pp. 24-25

Chapelle de Sales extérieur

Chapelle de Sales, à environ 200 mètres du château de Thorens-Glières :
Cette chapelle a été édifiée en 1672 à l’emplacement de la chambre où naquit Saint François de Sales :
en effet, le château de Sales a été détruit par ordre de Louis XIII et de Richelieu en 1630
lors de l’invasion du duché de Savoie par les troupes françaises.

Naissance de Saint François de Sales :

   « La chambre de M. et de Mme de Boisy avait été remise à neuf au temps de leur mariage. Située sur la cour intérieure où il y avait un parterre de rosiers, elle était vaste, bien éclairée, ayant « trois fenêtres, l’une à l’orient, deux au midi, bien et gaiement vitrées, avec peinture sur le verre des armoiries de Sales et de Sionnaz ». Une tapisserie de Flandre tendait le long des murs ses pentes rigides ; au manteau de la cheminée, il y avait suspendu « un vieux tableau en détrempe de saint François d’Assise, prêchant aux oiseaux, aux quadrupèdes et aux poissons », et, « à cause de cette vieille image la chambre portait le nom de saint François » (in « Le Pourpris historique de la maison de Sales », par Charles-Auguste de Sales, Annecy 1659, p.100).
C’est là que, prématurément, treize mois jour pour jour après le voeu de Notre-Dame de Liesse, dans la soirée du jeudi 21 août, entre neuf et dix heures, vint au monde un petit garçon « de bonne complexion », mais « extrêmement délicat et tendre » (déposition de J.F. de Blonay pour le procès de béatification), si frêle, qu’on dut presque aussitôt le mettre dans le coton.
Tandis que le crépuscule de ce long soir d’été achevait de s’éteindre sur la vallée silencieuse, ce furent par tout le château des appels, un va-et-vient affolés. Toutefois, le seigneur de Boisy gardait son calme et donnait ses ordres : bien avant l’aurore, il envoyait un domestique, Thomas Puthod, quérir au village de Thorens sa femme née Pétremande Lombard, forte savoyarde de vingt-deux ans qui servirait au nouveau-né de nourrice. »

Francis Trochu : « Saint François de Sales », tome 1, ed. E.Vitte Lyon 1941, pp. 25-26

Fonts baptismaux de saint François de Sales

Fonts baptismaux de l’église Saint-Maurice de Thorens
où fut baptisé Saint François de Sales le 28 août 1567

Baptême de Saint François de Sales :

   « Le baptême eut lieu sept jours plus tard, le jeudi 28 août, dans l’église paroissiale Saint-Maurice de Thorens, « bâtie à la gothique de très solides et épaisses murailles »(in « Le Pourpris historique… » p. 108). Vint à cette cérémonie, conte un fermier, « grande quantité de personnes nobles et autres » (déposition de François Terrier au procès en vue de la béatification). Toute une escorte accompagna en effet à Saint-Maurice l’enfant que portait, dans son berceau même, Jacquine Ranyot, « mère-sage ».
En tête des parents, amis et métayers, marchaient, à côté de M. de Boisy, le parrain et la marraine. La volontaire jeune maman les avait choisis tous deux dans sa propre famille : c’était l’un de ses oncles maternels, dom François de la Fléchère, protonotaire apostolique, prieur du monastère bénédictin de Sillingy, proche de Thorens, et sa belle-mère, damoiselle Bonaventure de la Fléchère, qui, veuve en secondes noces de feu Melchior de Sionnaz, père de Françoise, avait épousé successivement depuis feu Pierre de Monthoux et Jacques de la Fléchère.
Le petit fut baptisé par le prêtre économe du Chapitre de l’église cathédrale, – la paroisse dépendait directement des chanoines de Saint-Pierre de Genève qui en étaient, à proprement parler, les curés et qui déléguaient à Thorens un ou même plusieurs vicaires. 
L’enfant hérita les prénoms de son parrain et de sa marraine : il fut appelé François-Bonaventure ; seulement, sur le registre on le nomma non pas de Boisy comme son père, mais de Sales comme ses ancêtres.
Toute une foule se tenait dans l’église ; il n’y eut, à ce qu’on assure, aucune dissipation, même dans les rangs les plus éloignés, parmi les gens de peine, fermiers, serviteurs et servantes. Tous étaient recueillis et priaient.
Sur le chemin du retour, dom de la Fléchère confia qu’ « en touchant son filleul sur les fonts, il avait eu une consolation si grande qu’il ne la pouvait exprimer, lui venant en la pensée que cet enfant conserverait toute sa vie la robe de l’innocence baptismale ». Sans doute pour remonter le robuste père inquiet malgré tout d’avoir un enfant si chétif, deux cousins du seigneur de Boisy, MM. de Beaumont et de Lucinge, émirent des réflexions analogues.
Puis, dans la chambre de la mère, tandis que la noble compagnie admirait le baptisé tranquille dans son berceau comme un petit ange, le même baron de Lucinge, qui avait la plaisanterie facile, dit au père, rasséréné, qu’il serait bien inspirer de demander à Dieu d’autres fils pour soutenir sa maison, car ce premier-né certainement serait d’Eglise.
En ce 28 août, « non seulement – tant cette naissance apportait de joie – on fit festin, dans la grand’salle du château tapissée de drap de Bergame, à toute la noblesse amie qui avait honoré le baptême, mais encore dès l’aube du jour jusqu’à la nuit ce fut l’aumône générale aux pauvres » (dépositions au procès de canonisation). »

Francis Trochu : « Saint François de Sales », tome 1, ed. E.Vitte Lyon 1941, pp. 26-28

Chapelle de Sales : le retable

Chapelle de Sales, à l’emplacement de la chambre où naquit Saint François de Sales :
le retable (1677)

Vous trouverez aussi dans les pages de ce blogue :
- Les liens qui unissent Saint François de Sales au Saint Suaire de NSJC > ici
– Les préludes à la fondation de la Visitation > ici
– 6 juin 1610 : la fondation de la Visitation > ici
– Lettre de Sainte Jeanne de Chantal après la mort de Saint François de Sales > ici
– 350ème anniversaire de la béatification de Saint François de Sales > ici
– Catéchèse de Benoît XVI sur Saint François de Sales > ici
– Livres pour mieux connaître Saint François de Sales > ici
–  Litanies de Saint François de Sales > ici

Armoiries de Saint François de Sales

Armoiries de Saint François de Sales

2017-65. « Cette Messe de Requiem nous rappelle que la société est bien en deuil de la paix, mais qu’elle attend sa résurrection avec une ferme confiance… »

Mercredi 19 juillet 2017,
Fête de Saint Vincent de Paul (cf. > ici).

       Il y a deux jours, je vous donnais un compte-rendu de la journée de mémoire et de pèlerinage organisée par le Cercle Légitimiste du Vivarais ce dernier 14 juillet, à l’occasion de l’anniversaire du massacre des prêtres et des fidèles serviteurs de Dieu et du Roi le 14 juillet 1792 et les jours alentour dans le sud du Vivarais (cf. > ici), et je vous promettais la publication de l’homélie prononcée lors de la Sainte Messe de Requiem qui fut célébrée par Monsieur le Grand Prieur de la Confrérie Royale.
Voici donc aujourd’hui ce texte qui mérite d’être lu avec attention et médité dans un profond recueillement.

Sermon 14 juillet 1

frise lys deuil

« Cette Messe de Requiem nous rappelle que la société est bien en deuil de la paix, mais qu’elle attend sa résurrection avec une ferme confiance… »

Chers Amis,

       L’occasion de notre pèlerinage en ce jour ne diffère pas fondamentalement de celle qui nous réunit chaque 21 janvier. Au dernier pèlerinage au Puy, à l’Ascension, nous vous avons expliqué pourquoi « Le Roi et la France, c’est tout un ». Aujourd’hui, nous célébrons le martyre des membres de ce Corps mystique du Royaume que furent les ecclésiastiques, les aristocrates et les bons Français assassinés par les terroristes de l’époque ; le 21 janvier, tout est réuni dans la commémoraison du sacrifice de celui qui en est la tête. Que l’on s’attaque à la tête ou aux membres, c’est la même personne mystique (la France catholique et royale) que l’on outrage.

   Me permettrez-vous de reprendre les paroles du pape Pie VI aux cardinaux réunis en consistoire à Rome, le 11 juin 1793, dix-huit ans jour pour jour après le sacre du roi Louis XVI ? En pleurant la mort du roi très-chrétien, et en s’élevant au-dessus des contingences dramatiques de cette seule année, le Souverain Pontife y inclut tous les autres martyrs dans une magnifique et courageuse analyse d’un mouvement né bien plus tôt. Ses paroles restent aujourd’hui d’une brûlante actualité.

   « Dès le commencement de Notre Pontificat, prévoyant les exécrables manœuvres d’un parti si perfide, Nous-même annoncions le péril imminent qui menaçait l’Europe. […] Si l’on avait écouté Nos représentations et Nos avis, Nous n’aurions pas à gémir maintenant de cette vaste conjuration tramée contre les rois et contre les empires », « une conjuration impie ».

   Car la mise à mort du roi et l’extermination en règle de ses loyaux sujets en pleine Révolution (appelée Perturbation par la sainte Liturgie) n’est pas « l’acte isolé d’un déséquilibré » selon l’expression aujourd’hui consacrée par la grosse presse, mais un attentat contre Dieu Lui-même, à chaque fois que la dignité d’un innocent est bafouée, et d’autant plus quand cet innocent défend l’économie divine et l’ordre chrétien, à la suite du premier contre-révolutionnaire : saint Michel.

   « Ces hommes dépravés », « la portion la plus féroce de ce peuple », « tant de juges pervers et tant de manœuvres employées » ont éliminé tous les piliers, aussi humbles soient-ils, de cette construction magnifique de la Chrétienté en France, qui alliait Dieu et la France, le Trône et l’Autel, la nature et le surnaturel. Le roi fut sacrifié « non pour avoir commis un crime, mais parce qu’il était Roi, ce que l’on regardait comme le plus grand de tous les crimes », et ses sujets fidèles, parce qu’ils étaient de fidèles sujets, dénonçant, activement ou passivement, la tyrannie des serviteurs du premier Révolutionnaire, du père du mensonge, « celui qui est homicide depuis le commencement ».

   « D’après cette suite ininterrompue d’impiétés qui ont pris leur origine en France, aux yeux de qui n’est-il pas démontré qu’il faut imputer à la haine de la religion les premières trames de ces complots qui troublent et ébranlent toute l’Europe ? Personne ne peut nier que la même cause n’ait amené la mort funeste de Louis XVI. […] Tout cela ne suffit-il pas pour qu’on puisse croire et soutenir, sans témérité, que Louis fut un martyr ? », et les héros que nous commémorons aujourd’hui, ses compagnons ?

   « Tous les Français qui se montraient encore fidèles dans les différents ordres de l’État […] étaient aussitôt accablés de revers et voués à la mort. On s’est hâté de les massacrer indistinctement ; on a fait subir les traitements les plus barbares à un grand nombre d’ecclésiastiques, sous les bannières tricolores et au chant de La Marseillaise, que l’on veut nous vendre aujourd’hui pour drapeau et hymne nationaux ! On a égorgé des Évêques… Ceux que l’on persécutait avec moins de rigueur se voyaient arrachés de leurs foyers et relégués dans des pays étrangers, sans aucune distinction d’âge, de sexe, de condition par les ancêtres spirituels des prétendus antiracistes… On avait décrété que chacun était libre d’exercer la religion qu’il choisirait, comme si toutes les religions conduisaient au salut éternel ! Et cependant la seule religion catholique était proscrite, comme dans l’empire romain païen depuis Néron.

   Or, l’Église enseigne que « la religion est la gardienne la plus sûre et le plus solide fondement des empires, puisqu’elle réprime également les abus d’autorité dans les puissances qui gouvernent, et les écarts de la licence dans les sujets qui obéissent. Et c’est pour cela que les factieux adversaires des prérogatives royales cherchent à les anéantir et s’efforcent d’amener d’abord le renoncement à la foi catholique ».

   « Seule, elle voyait couler le sang de ses disciples dans les places publiques, sur les grands chemins et dans leurs propres maisons. On eût dit qu’elle était devenue un crime capital. Ils ne pouvaient trouver aucune sûreté dans les États voisins où ils étaient venus chercher asile … Tel est le caractère constant des hérésies. Tel a toujours été, dès les premiers siècles de l’Église, l’esprit des hérétiques ». C’est hélas ce que, peu à peu, est en train de redécouvrir l’Europe.

   Alors que, souvent sans connaître les horreurs qui en sont l’acte de naissance et – il faut bien l’avouer – la marque de fabrique, beaucoup de Français se réunissent aujourd’hui pour fêter la Révolution et le régime qui en est la fille aînée, il nous faut entendre résonner encore à nos oreilles, à deux cents ans de distance : « Vénérables Frères, comment Notre voix n’est-elle point étouffée dans ce moment par Nos larmes et par Nos sanglots ? » ; « N’est-ce pas plutôt par Nos gémissements que par Nos paroles, qu’il convient d’exprimer cette douleur […] devant […] le spectacle que l’on vit », entre autres, beaucoup d’autres, aux Vans en juillet 1792 ? 

   Quand la Royauté très-chrétienne se fondait sous l’infusion baptismale de saint Remi aux fonts baptismaux de Reims, la Révolution commence, elle, dès le début par les assassinats : lorsque le gouverneur de la Bastille est décapité le 14 juillet 1789 avec ses soldats, il illustre malgré lui à merveille la coupable bêtise de tous les Chrétiens qui capitulent devant le mal au nom de prétendus bons sentiments : « Ne voyons pas le mal partout, faisons confiance aux ennemis de l’Église ! » et à ces patriotes qu’on a vu à la Messe… constitutionnelle, c’est-à-dire du culte schismatique d’État. Regardez donc ces loups, ils ont de si beaux pelages d’agneaux ! Cette attitude se renouvelle hélas face à tous les adversaires du nom chrétien : athéisme, laïcisme, islamisme. Et nos nouveaux Marquis de Launais finiront comme lui, après avoir par leur faute laissé ruiner toute la société, tout le bien commun…

   « Il est impossible de ne pas être pénétré d’horreur quand on n’a point abjuré tout sentiment d’humanité ». Nous le savons, beaucoup, même chez les pieux Catholiques, ne sont aucunement « pénétrés d’horreur », justement parce qu’ils ont « abjuré tout sentiment d’humanité », de même pour les Français qui ne sont pas scandalisés par le « crime abominable » de l’avortement (selon les paroles du concile Vatican II lui-même, pourtant généralement abondamment cité), crime qui est, selon le pape François, « le mal absolu », affirmation elle aussi bien peu reprise par ses thuriféraires.

   Après la récente mort de l’initiatrice officielle du massacre légal de masse des enfants dans le ventre de leur mère, plus petits sujets de l’ordre naturel divin, ne peut-on voir dans nos prétendues élites – il y a quarante ans comme lors de la dernière campagne électorale – les dignes successeurs de ces « ci-devant Chrétiens constitutionnels », qui pour ne pas paraître s’opposer à la Révolution en marche, donnent des gages à ses partisans les plus enragés en les dépassant dans l’horreur ? En allant jusqu’à s’indigner d’avoir pu être ne serait-ce que soupçonnés d’avoir été défenseurs de la vie ? En exhibant leur participation positive à chacun des votes étendant, législature après législature, le massacre ?

   Alors que sous la Révolution, tout le monde avait peur, les Révolutionnaires les premiers, au sein d’un courant qu’ils ne maîtrisaient pas vraiment, de nos jours : combien se soucient vraiment des nouvelles victimes de la fille de la Révolution, toujours aussi avide de sang ? Combien de temps notre société endormie s’habituera-t-elle à certains massacres, par un silence criant, tandis que d’autres sont quant à eux très régulièrement sur les lèvres des journalistes et hommes de pouvoir ?

   N’attirent-ils pas à chaque instant la colère du Ciel, tel le sang d’Abel ? Plus d’un avortement par seconde dans le monde ; un toutes les 11 secondes en France, soit 327 avortements depuis une heure, et 7800 ce soir. Lorsque Mère Teresa lançait au monde : « Le plus grand destructeur de la paix, aujourd’hui, est le crime commis contre l’innocent enfant à naître », ne s’agit-il pas encore une fois d’« instaurer et restaurer sans cesse », selon le mot de saint Pie X aux évêques français, « la cité catholique, la civilisation chrétienne » qui seule promeut le vrai respect de la vie humaine, consacrée par l’Incarnation du Fils de Dieu ? La Sainte Église n’est-elle pas aujourd’hui (pas par tous ses membres, hélas) presque l’unique défenseur du caractère sacré de la vie humaine innocente ? Le seul obstacle aux actuelles politiques mondiales ?

   « Quoique les prières funèbres puissent paraître superflues quand il s’agit [de] Chrétien[s] qu’on croit avoir mérité la palme du martyre, puisque saint Augustin dit que l’Église ne prie pas pour les martyrs, mais qu’elle se recommande plutôt à leurs prières », cette Messe de Requiem nous rappelle que la société est bien en deuil de la paix, à savoir la tranquillité de l’ordre, de l’ordre voulu par Dieu, mais qu’elle attend sa résurrection avec une ferme confiance, ce qui sera bientôt manifesté, nous l’espérons, par le passage de la couleur noire des ornements à la couleur rouge, le jour où Rome aura le courage d’appeler « saints » ceux que Pie VI appelait déjà « martyr[s] pour la foi ». La plus belle et importante sentence de l’allocution pontificale est celle-ci : « Qui pourra jamais douter que ce monarque (et j’ajoute : et tous ses compagnons, ainsi que leurs successeurs) n’ait été principalement immolé en haine de la Foi et par un esprit de fureur contre les dogmes catholiques ? », notamment aujourd’hui celui du respect de la vie de la conception à la mort naturelle.

   Face aux paroles racistes d’un hymne célèbre, le pape Pie VI parle bien lui-même de (je cite) « l’effusion d’un sang si pur ». Et souvenons-nous que le roi-martyr s’était exclamé, et nos héros avec lui : « Je meurs innocent des crimes que l’on m’impute, et je prie afin que mon sang ne retombe pas sur la France ». Ses sujets ne disaient pas autre chose. Et nos petits martyrs de chaque seconde, ne les entendez-vous pas s’écrier la même chose, nouveaux fils de Rachel et saints Innocents de Bethléem, le crime invoqué étant pour eux la maladie ou la simple gêne d’un confort hédoniste et égoïste !

   Ces paroles que je vous ai livrées, et qui en scandalisent sans doute plus d’un aujourd’hui, sont les paroles-mêmes du Souverain Pontife ayant affronté la Révolution. Quand bien même les lâches deviendraient majoritaires parmi les Catholiques, « serions-Nous obligés pour cela de changer de sentiment au sujet de [leur] martyre ? », demandait ce pape. « Non, sans doute, répondrons-nous avec lui, car si Nous avions eu pareil dessein, Nous en serions détournés […] par [leur] mort-même[…] en haine de la religion catholique ; de sorte qu’il paraît difficile que l’on puisse rien contester de la gloire de [leur] martyre ».

   Pour terminer, voici l’inégalable conclusion du discours papal aux princes de l’Église : « Ah ! France ! Ah ! France ! toi que nos prédécesseurs appelaient le miroir de la Chrétienté et l’inébranlable appui de la foi ; toi qui, par ton zèle pour la croyance chrétienne et par ta piété filiale envers le Siège Apostolique, ne marches pas à la suite des autres nations, mais les précèdes toutes : que tu Nous es contraire aujourd’hui ! De quel esprit d’hostilité tu parais animée contre la véritable religion !

   Combien la fureur que tu lui témoignes surpasse déjà les excès de tous ceux qui se sont montrés jusqu’à présent ses persécuteurs les plus implacables ! […]

   Ah ! encore une fois, France ! Tu demandais même auparavant un Roi catholique. Tu disais que les lois fondamentales du Royaume ne permettaient point de reconnaître un Roi qui ne fût pas catholique, et c’est précisément parce qu’il était catholique que tu viens de l’assassiner ! Ta rage contre ce monarque s’est montrée telle que son supplice même n’a pu ni l’assouvir, ni l’apaiser. […]

   Ô jour de triomphe pour Louis XVI [et tous ses compagnons], à qui Dieu a donné et la patience dans les tribulations, et la victoire au milieu de [leur] supplice ! Nous avons la confiance qu’il[s ont] heureusement échangé une couronne royale toujours fragile, et des lys qui se seraient flétris bientôt, contre cet autre diadème impérissable que les Anges ont tissé de lys immortels. […]

   « Laissons donc, écrit avec douleur le Père commun, ce peuple révolté s’endurcir dans sa dépravation puisqu’elle a pour lui tant d’attraits, et espérons que le sang innocent de Louis crie en quelque sorte et intercède pour que la France reconnaisse et déteste son obstination à accumuler sur elle tant de crimes, et qu’elle se souvienne des châtiments effroyables qu’un Dieu juste, Vengeur des forfaits, a souvent infligés à des Peuples qui avaient commis des attentats beaucoup moins énormes.

   Telles sont les réflexions que Nous avons jugées les plus propres à vous offrir quelques consolations dans un si horrible désastre ». Fin de citation.

   Face en effet à tous les attentats contre la vie humaine innocente et tous les martyres niés, méprisés et oubliés, les Légitimistes seront toujours là pour entretenir la fidèle mémoire, honorant le sacrifice des uns, publiant le crime des autres, expiant pour ceux-là en vue de la restauration de l’ordre et du bien outragés, et de la conversion des bourreaux et de leurs complices en vue de leur éviter des peines éternelles. Comment ne pas penser aux paroles de N.S. : « Je vous le dis, s’ils se taisent, les pierres crieront ! » (Luc. XIX, 40) ?

   Les fidèles Catholiques français attachés à l’ordre très-chrétien de leur Patrie terrestre sont de ces pierres qui crient, et font honneur au nom français au milieu de notre époque bien trouble. Comme le rappelle souvent S.M. le Roi, il ne s’agit pas de nostalgie, mais de fidélité à Dieu en trois Personnes, à Son lieutenant sur terre, à ses fervents et bons sujets s’étant conduits en héros, en un mot à ces principes qui continuent d’inspirer toute notre conduite et chacune de nos actions.

   Avec le premier pape, sur les écrits duquel je tombais hier, écrions-nous : « Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui, selon Sa grande miséricorde, nous a régénérés, pour une espérance vivante, par la résurrection de Jésus-Christ d’entre les morts, pour un héritage qui ne se peut ni corrompre, ni souiller, ni flétrir, lequel vous est réservé dans les cieux, vous qui, par la puissance de Dieu, êtes gardés par la foi pour le salut prêt à être révélé dans les derniers temps! C’est là ce qui fait votre joie, quoique maintenant, puisqu’il le faut, vous soyez attristés pour un peu de temps par diverses épreuves, afin que l’épreuve de votre foi, plus précieuse que l’or périssable qui cependant est éprouvé par le feu, ait pour résultat la louange, la gloire et l’honneur, lorsque Jésus-Christ apparaîtra, Lui Que vous aimez sans L’avoir vu, en Qui vous croyez sans Le voir encore, vous réjouissant d’une joie ineffable et glorieuse, parce que vous obtiendrez le salut de vos âmes pour prix de votre foi.

   Les prophètes, qui ont prophétisé touchant la grâce qui vous était réservée, ont fait de ce salut l’objet de leurs recherches et de leurs investigations […]. Il leur fut révélé que ce n’était pas pour eux-mêmes, mais pour vous, qu’ils étaient les dispensateurs de ces choses, que vous ont annoncées maintenant ceux qui vous ont prêché l’Evangile par le Saint-Esprit envoyé du ciel, et dans lesquelles les anges désirent plonger leurs regards » (I Petr. I, 3).

Ainsi soit-il.

Sermon 14 juillet 2

frise lys deuil

2017-62. D’un fervent pèlerinage sur les pas de nos héros et de nos martyrs.

12, 13 et 14 juillet.

Massacre des prêtres aux Vans 12-14 juillet 1792

Gravure de la fin de l’année1792 illustrant le massacre des prêtres aux Vans le 14 juillet précédent
ainsi que l’exécution du comte François-Louis de Saillans le 12 juillet.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

   C’est devenu une tradition : chaque 14 juillet, Frère Maximilien-Marie et les membres du Cercle Légitimiste du Vivarais, ainsi que quelques autres personnes sympathisantes, commémorent les terribles événements du mois de juillet 1792 dans le sud du Vivarais.

   J’ai déjà eu l’occasion de publier (par exemple > ici) quelques textes relatifs aux Camps de Jalès, dont le dénouement tragique, à peine un mois avant l’attaque des Tuileries et l’emprisonnement de la Famille Royale (cf. > ici ou ici), fut l’occasion d’épouvantables massacres, en particulier ceux du comte François-Louis de Saillans et de plusieurs ecclésiastiques, fidèles et courageux serviteurs de Dieu et du Roi.

   Monsieur de Saillans fut assassiné aux Vans, petite ville de l’ancien diocèse et duché d’Uzès aujourd’hui rattachée au Vivarais, au soir du 12 juillet 1792 avec Messieurs les abbés Pradons et Boissin, ainsi que le vétéran Nadal et un domestique du comte.

   Deux jours plus tard, au même lieu, furent sauvagement exécutés neuf prêtres dont le seul crime était d’avoir refusé le serment schismatique : ils s’étaient retirés dans une grotte isolée sur le territoire de la paroisse de Naves – village voisin des Vans -, et y menaient une vie de prière et de pénitence dans l’espérance de jours meilleurs pour l’Eglise de France…

   Le 14 juillet 2017, plus de vingt-cinq personnes venues de l’Uzège, de la vicomté de Nîmes, du Dauphiné, du Velay et du Vivarais, se sont retrouvées dès 9 h du matin aux Vans et ont accompli un pèlerinage sur les pas de nos héros et martyrs, en voici un petit compte-rendu illustré.

   Ainsi, après avoir bénéficié des explications et commentaires de l’historienne locale sur la vieille ville, son histoire, ses maisons remarquables et son église, nos pèlerins se sont rendus sur la place qui porte aujourd’hui le nom de Léopold Ollier, au pied de la grande croix, dite Croix de la Grave, érigée en l’honneur des victimes de la révolution massacrées en ce lieu.

Les Vans - croix de la Grave

Les Vans : la « Croix de la Grave » marque le lieu du martyre du comte de Saillans
et des onze prêtres fidèles qui furent horriblement massacrés par les révolutionnaires.

   Comme il n’existe plus aucune inscription lisible qui explique la raison de l’implantation de cette croix et que la liste des victimes n’y figure pas non plus, il n’est pas inutile de la donner ici :

Massacrés le 12 juillet 1792 :
- François-Louis, comte de Saillans.
- son domestique.
- Nadal, soldat vétéran.
- Abbé Joseph Boissin.
- Abbé Pradons, curé de Bannes.

Massacrés le 14 juillet 1792 :
- Abbé Henri-Claude Clémenceau de La Bouillerie, natif de Rennes, curé de la cathédrale Saint-Castor à Nîmes (il est le grand oncle du fameux Georges Clémenceau).
- Abbé Michel Faure, natif de Chamaury à Saint-Martial (hameau voisin du Mesnil-Marie), curé de Mons (diocèse d’Alais).
- Messieurs Claude Bravard, natif d’Arlanc, et Victor-Pierre Lejeune, natif d’Orléans, tous deux prêtres de Saint-Sulpice et directeurs au séminaire Saint-Charles d’Avignon.
- Abbé Jean-Laurent Drome, natif de Vers (diocèse d’Uzès), vicaire de St-Victor-la-Coste.
- Abbé Jean Bonijol, natif de Nîmes, chanoine de la cathédrale d’Uzès.
- Abbé Jacques Montagnon, natif de Genolhac, curé de Valabri près de Bagnols.
- Abbé Victor Nadal, natif de Bannes, curé d’Apailhargues (diocèse d’Uzès).
- Abbé Jean-Matthieu Novi, jeune prêtre natif des Vans, vicaire d’Auzac, exécuté sous les yeux de son propre père.

Chambonas

Chambonas : vue générale
Sur l’avant du château on distingue l’église romane dédiée à Saint Martin
et le prieuré qu’avait reconstruire l’abbé Claude Allier

   Après s’être recueilli au pied de cette croix, le groupe s’est rendu à Chambonas, paroisse dont l’abbé Claude Allier, instigateur et âme des Camps de Jalès (cf. > ici), fut le curé-prieur.

Eglise de Chambonas extérieur

Chambonas : l’église Saint-Martin
Le chevet, le côté nord et la façade « côté cour » du presbytère de l’abbé Claude Allier

Eglise et presbytère de Chambonas

Chambonas : le presbytère reconstruit par l’abbé Claude Allier « côté jardin »
le clocher et la toiture de l’église Saint-Martin au sud. 

Eglise de Chambonas intérieur

Chambonas : intérieur de l’église Saint-Martin

   Avec l’aimable autorisation du prêtre desservant, Monsieur le Grand Prieur de la Confrérie Royale, présent à cette journée, chanta une Sainte Messe de Requiem à la mémoire des victimes de la révolution. Vous pouvez retrouver le texte de sa prédication > ici.
Ce fut un moment d’une grande ferveur.

Messe de Requiem pour les victimes de la révolution 1

Sainte Messe de Requiem à la pieuse mémoire des victimes de la révolution,
célébrée par Monsieur le Grand Prieur de la Confrérie Royale ce 14 juillet 2017.

Sainte Messe de Requiem pour les victimes de la révolution 2

L’élévation de la Sainte Hostie.

Messe de Requiem l'absoute

L’absoute à la fin de la Sainte Messe de Requiem

Monogramme de l'abbé Claude Allier à la porte du presbytère de Chambonas

Monogramme de l’abbé Claude Allier au dessus de la porte d’entrée du presbytère de Chambonas

   Après le temps des nourritures spirituelles, vint celui des nourritures terrestres : nos pèlerins se rendirent en convoi jusqu’à la Commanderie de Jalès et pique-niquèrent sous les tilleuls de l’allée nord, avant de parcourir les vestiges de ce haut-lieu dont le nom résume trois années d’épisodes contre-révolutionnaires dans le sud du Vivarais.

Jalès vestiges du porche fortifié

Commanderie de Jalès : les vestiges du porche fortifié.

Jalès la cour d'honneur

Commanderie de Jalès : ce qui fut jadis la cour d’honneur.

Jalès porte de la chapelle

Commanderie de Jalès : l’ancienne porte d’entrée de la chapelle du XIIe siècle
depuis la cour d’honneur.

   Le convoi se reforma et nos pèlerins prirent la route de Joyeuse, l’ancienne cité ducale dont la légende rapporte qu’elle doit son nom à l’épée de Charlemagne.

   Ici, il s’agissait de vénérer le lieu où fut exécuté le chanoine Clément de La Bastide de La Molette, ancien officier entré dans les ordres, chanoine de la cathédrale d’Uzès, qui s’était engagé aux côtés du comte de Saillans à la fois comme prêtre et comme ancien militaire, puisqu’il aidait à former au maniement des armes les paysans cévenols qui voulaient se battre pour Dieu et pour le Roi.

   Après l’incendie du château de Bannes et de la Commanderie de Jalès, le chanoine de La Bastide de La Molette parvint à s’enfuir en direction du Gévaudan, en compagnie du chevalier d’Entremeaux, mais ils furent pris en chasse et capturés le 12 juillet dans l’après-midi.  
Ils furent emmenés sous escorte jusqu’à Joyeuse, où se trouvait François-Antoine de Boissy d’Anglas, alors procureur général du département de l’Ardèche.
Ils y arrivèrent le dimanche 13 juillet à  l’heure où les patriotes sortaient de la messe du curé jureur : pris de rage, ceux-ci se jetèrent sur les prisonniers et les massacrèrent sans pitié sur le parvis même de l’église Saint-Pierre, tandis que Boissy d’Anglas, depuis la fenêtre du premier étage de l’ancien collège des Oratoriens, assistait à la scène sans faire le moindre geste ni prononcer la moindre parole pour faire respecter un semblant de justice…

Joyeuse parvis de l'église Saint-Pierre

Joyeuse :  parvis de l’église Saint-Pierre
La croix marque le lieu où fut sauvagement assassiné le chanoine Clément de La Bastide de La Molette ;
sur la gauche, la fenêtre du 1er étage de l’ancien collège des Oratoriens où se tenait Boissy d’Anglas.

Joyeuse croix du parvis

Joyeuse : vue depuis l’intérieur de l’église Saint-Pierre, la croix du parvis qui marque le lieu où fut massacré le chanoine Clément de La Bastide de La Molette.

   Nos pèlerins se mirent ensuite en route pour la dernière étape de cette journée de mémoire : Largentière, où ils se rendirent à l’église Notre-Dame des Pommiers, au sommet de la petite cité médiévale.

Largentière chevet de l'église ND des Pommiers

Largentière : chevet de l’église Notre-Dame des Pommiers

   En effet, après l’exécution du comte de Saillans, sa tête fut promenée dans plusieurs villages du sud du Vivarais, afin d’inspirer la terreur à tous les fidèles sujets du Roi et les dissuader de s’opposer à la révolution.
Elle parvint à Largentière, où un enragé, un cabaretier surnommé « La Paille », la suspendit à sa devanture.

   Au bout de quelque temps cependant, le crâne de Monsieur de Saillans fut inhumé dans un jardin, où il fut retrouvé vers le milieu du XIXème siècle.
Mais alors, au lieu de rendre cette vénérable relique à la famille du comte, elle fut placée sur la corniche d’un chapiteau au sommet d’un pilier, dans le fond de l’église Notre-Dame des Pommiers… et elle s’y trouve toujours, aussi incroyable et scandaleux que cela paraisse.

Crâne de Monsieur de Saillans - église de Largentière

Largentière, église Notre-Dame des Pommiers : le crâne de Monsieur de Saillans.

   Ici s’acheva ce périple de mémoire et de fidélité accompli en ce 14 juillet par ceux qui ont aujourd’hui pour ambition et pour gloire de servir eux aussi Dieu et le Roi, ainsi que l’ont fait, jusqu’au don suprême, ces vaillants héros et martyrs.

Vive Dieu ! Vive le Roi !

Lully.

Croix du clocher de Chambonas

Croix fleurdelysée au faîte du clocher de Chambonas

2017-60. La « nouvelle messe » n’est pas un rempart pour la foi catholique mais, dans les faits, elle a favorisé la perte de la foi et la diffusion de l’hérésie.

Jeudi 6 juillet 2017.

La Sainte Messe

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

Demain, vendredi 7 juillet 2017, nous célèbrerons le dixième anniversaire de la publication du motu proprio « Summorum Pontificum » par lequel Sa Sainteté le Pape Benoît XVI fit sauter – autant que cela lui était alors possible sans accentuer les divisions et les déchirures dans l’Eglise romaine – quelques verrouillages totalement injustes (c’est-à-dire totalement contraires à la justice) qui empêchaient la célébration de la Sainte Messe latine traditionnelle.

Nous avons bien conscience que ce texte
1) d’une part demeurait – et demeure – une sorte de pis-aller qui ne rend pas pleinement à la liturgie traditionnelle la place qui lui est due dans l’Eglise latine,
2) d’autre part (bien qu’il ait permis une réelle augmentation de la célébration des Saintes Messes selon l’usus antiquior et de leur fréquentation), présente des ambiguïtés qu’il faudra bien lever un jour,
3) reste encore, dans la pratique, étrangement ignoré de nombre de prêtres diocésains, voire d’évêques, et donc aussi de la très grande majorité des fidèles qui ne sont pas informés de leurs droits.

Mais je ne veux ni épiloguer ni polémiquer au sujet de ce motu proprio ; à l’occasion de son dixième anniversaire, je veux simplement vous livrer quelques réflexions relatives à la réforme liturgique issue du second concile du Vatican.

ouverture vatican II

Concile Vatican II

Je ne crains pas de le dire et de le répéter avec insistance : depuis la fin de l’année 1969 (date de son entrée en vigueur), dans les faits et malgré les annonces d’une tapageuse outrecuidance qui promettaient qu’à travers elle s’accompliraient un renouveau et un développement de la vie chrétienne, ce que – par facilité de langage – nous appelons « la nouvelle liturgie » n’a pas contribué à la vitalité de l’Eglise.
Tout au contraire, presque cinquante ans après sa mise en application, tout observateur objectif et lucide peut affirmer que cette liturgie réformée a plutôt contribué à la diminution de la pratique religieuse, qu’elle a joué un rôle considérable dans la désaffection des fidèles, et qu’elle a concouru à la perte de la foi.

Attention !
Je ne suis pas manichéen (ce serait un comble pour un disciple de Saint Augustin) : je ne dis pas que la « nouvelle messe » est la cause, et encore moins la cause unique, des malheurs énumérés ci-dessus : j’ai parfaitement conscience qu’il faut en même temps, pour être juste,
1) tenir compte de l’évolution de la société et des mentalités au tournant des années 60 du précédent siècle,
2) faire la part à l’action larvée du modernisme qui avait miné le terrain bien avant « le » concile dans les séminaires, les maisons religieuses, les presbytères et les évêchés,
3) mentionner une catéchèse et une prédication qui, dans l’ensemble, se sont révélées d’une indigence et d’une inconsistance affligeantissimes,
4) et rappeler que, bien souvent – malheureusement ! – , ni la solidité d’une authentique vie spirituelle ni la fermeté de saines bases intellectuelles ne se trouvaient alors au-rendez-vous pour opposer un rempart inexpugnable aux assauts de la décadence généralisée et galopante.

Plutôt que de cause première ou de racine de la crise de l’Eglise, nous pouvons dire en toute exactitude, je crois, que l’instauration de la « nouvelle liturgie », tout comme le second concile du Vatican lui-même, ont été les occasions, ou encore les causes déclenchantes, d’un mouvement convulsionnaire dévastateur qui parut alors au grand jour mais qui leur préexistait depuis de nombreuses décennies.

Toutefois, il faut aussi affirmer que la liturgie, qui est le signe le plus visible de la vie ecclésiale, a été, en quelque sorte, le point de cristallisation de la crise ainsi que le nœud stratégique dont dépendit alors la vitalité et le développement de la Chrétienté.

Attention encore !
Je ne veux pas dire que tous ceux qui assistent à la « nouvelle messe » ont perdu la foi catholique : nous savons qu’il y a (heureusement !) des évêques, des prêtres, des religieux et des fidèles du rang qui la pratiquent quotidiennement, et dont la vie spirituelle et la foi catholiques subsistent véritablement.
Sans nul doute est-ce parce qu’ils ont en même temps gardé un lien authentique avec la Tradition doctrinale et spirituelle : ici, je serais presque tenté d’écrire que s’ils gardent la foi ce n’est pas grâce à la « nouvelle liturgie » mais malgré elle, et parce qu’ils demeurent – oui malgré elle – entés sur la Tradition vivante et séculaire de l’Eglise.

Messe latine traditionnelle dans la chapelle de l'ancienne Visitation du Puy en Velay

L‘attachement à la liturgie latine traditionnelle n’est pas une question de « sensibilité », ni une question de préférence d’un type particulier de célébration pour des raisons de « goûts personnels », mais il se fonde sur un problème doctrinal.
Il s’agit d’une question de fond plus que de forme.

Jean Guitton, ami de Paul VI, a rapporté dans ses souvenirs que le pape Montini lui avait explicitement affirmé qu’il avait voulu cette réforme de la liturgie afin que désormais la « nouvelle version » de la messe puisse être acceptée – et célébrée – par les protestants.
Il ressort de cela avec évidence que si l’on fabrique une liturgie afin qu’elle soit acceptée par les protestants lors même que ceux-ci ne renoncent pas à leurs erreurs doctrinales graves au sujet du Saint-Sacrifice, du Sacerdoce et de l’Eucharistie, cela signifie donc immanquablement que cette « nouvelle liturgie » est moins catholique, qu’elle atténue et minimise la doctrine catholique, qu’elle édulcore les dogmes catholiques sur le Saint-Sacrifice, le Sacerdoce et l’Eucharistie, qu’elle protestantise le culte catholique…

De fait, que constatons-nous chez beaucoup de « catholiques pratiquants » qui assistent à la « nouvelle messe » ?
La plupart – et je n’écris pas cela à la légère mais parce que je l’ai pu constater des centaines de fois en parlant avec eux – ne savent pas faire la différence entre les catholiques et les protestants, entre la foi catholique et les doctrines protestantes, entre l’assistance à la messe et celle au culte protestant, et ne voient que des différences mineures (considérées même comme insignifiantes) entre le catholicisme et le protestantisme.

Car force est de constater que non seulement l’instauration et la mise en pratique de « la nouvelle liturgie » n’a pas contribué à la vitalité de l’Eglise, mais qu’en outre elle a favorisé l’ignorance religieuse, le relativisme, le syncrétisme et quelques autres erreurs anciennes qui ont repris du poil de la bête.
Beaucoup de « catholiques pratiquants » des paroisses ordinaires se fabriquent leur « petite-foi-perso » avec laquelle « on en prend et on en laisse » dans l’enseignement authentique hérité de deux mille ans de Magistère. Ils n’ont plus à proprement parler la Foi, mais ils se sont fabriqué une croyance subjective – aux contours imprécis et mouvants – comparable à un plateau repas de self-service : chacun fait son choix selon ses goûts ou réflexions du moment, et chacun ne conserve du véritable catholicisme que ce dont il a envie ou qui l’arrange hic et nunc.

Rappelons au passage que pour NN.SS. les évêques de France aujourd’hui un « catholique pratiquant » n’est pas quelqu’un qui va à la messe tous les dimanches, mais quelqu’un qui y va une fois par mois (question subsidiaire : qu’en est-il pour eux du troisième commandement de Dieu et du deuxième commandement de l’Eglise ?).
Or ces « catholiques pratiquants » ne représentent plus qu’environ 3% de la population française.
Eh bien, des sondages réguliers publiés dans ce qui fut jadis « la Bonne Presse » (mais ne l’est plus depuis belle lurette : « la Croix », « la Vie », « le Pèlerin »… etc.), nous apprennent – je ne l’invente pas – que des pourcentages énormes de ces « catholiques pratiquants » ne croient pas à la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, ni à Sa résurrection selon la chair (ou bien confondent résurrection et réincarnation), ni à la Présence Réelle du Christ dans l’Eucharistie, ni au caractère sacrificiel de la messe, ni à l’existence de l’enfer, ni au péché originel, ni même parfois à la Sainte Trinité (excusez du peu) : cette liste est loin d’être exhaustive, hélas !
Et on appelle cela des « catholiques pratiquants » !!!

Si donc ces « pratiquants » de la messe de Paul VI n’adhèrent plus à la doctrine catholique reçue des Apôtres, ou bien « en prennent et en laissent » dans cette doctrine catholique, n’est ce pas la démonstration que la « nouvelle messe » n’est pas le rempart de la foi catholique, comme peut l’être la sainte messe latine traditionnelle, mais que, dans les faits, elle a favorisé la perte de cette foi, l’apostasie et l’hérésie ?
Contra factum non fit argumentum : en face des faits, il n’y a pas à discutailler.

Lully.

pleurant

2017-59. Pourquoi le Roi de France légitime est le Prince Louis de Bourbon : Louis XX.

3 juillet,
Au Mesnil-Marie, nous célébrons une fête en l’honneur des Saints Anges gardiens de Sa Majesté le Roi, de la Maison de France et du Royaume de France ;
Mémoire de Saint Léon II, pape et confesseur ;
Mémoire du 5ème jour dans l’octave des Saints Pierre et Paul ;
Mémoire du 4ème jour dans l’octave de Saint Martial ;
Anniversaire du couronnement de S.M. le Roi Hugues 1er dit Capet (3 juillet 987) ;
Anniversaire du décret « Lamentabili » (3 juillet 1907 – cf. ici).

Signature Hugues Capet

Signature du Roi Hugues Capet

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Outre l’anniversaire de la naissance de Frère Maximilien-Marie, chaque 3 juillet, d’une manière bien plus importante, ramène aussi l’anniversaire du sacre du Roi Hugues 1er, surnommé Capet, fondateur de la dynastie capétienne, qui fut sacré le 3 juillet 987 dans la cathédrale de Noyon.

   En cet anniversaire de l’accession de Hugues Capet au trône de France, et nous nous souvenons avec une certaine émotion du « millénaire capétien », célébré en 1987, qui fut alors si important pour faire connaître plus largement en France la personne de Monseigneur le Prince Alphonse de Bourbon, duc d’Anjou et de Cadix, de jure Sa Majesté le Roi Alphonse II de France, puisqu’il était alors l’aîné de tous les Capétiens.
Mais plus encore que la personne du Prince Alphonse de Bourbon, le « millénaire capétien » fut pour beaucoup l’occasion de la révélation du courant légitimiste et des principes de la royauté capétienne traditionnelle qu’il est le seul à défendre et promouvoir.

   Cet anniversaire du sacre de Hugues Capet me fournit l’occasion de vous proposer d’entendre un exposé du professeur Franck Bouscau, historien des Institutions et des Idées politiques, qui enseigne à l’université de Rennes I, et membre de la Société d’Histoire du Droit.

   Dans l’enseignement enregistré que vous pouvez entendre ci-dessous, le professeur Bouscau revient sur la « controverse dynastique » qui oppose les légitimistes et les orléanistes.
Partant de l’état de la question à la mort du comte de Chambord (+ 24 août 1883), de jure Henri V, et à la lumière des principes pérennes du droit royal traditionnel, le professeur Bouscau fait revivre l’histoire du mouvement légitimiste : son effacement apparent jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale, puis son renouveau à partir de 1946.

   C’est en historien du Droit et des idées politiques, que le professeur Franck Bouscau démontre que le Prince Louis de Bourbon est bien aujourd’hui le Roi de France légitime : Louis XX.

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grandes armes de France

2017-55. La messe en la majeur de Cherubini pour le sacre de Charles X.

Lundi 29 mai 2017.
Fête de Sainte Marie-Madeleine de’ Pazzi ;
Douloureux anniversaire de la chute de Constantinople (cf. § E > ici) ;
Joyeux anniversaire du Sacre de Charles X.

Sacre de Charles X 29 mai 1825

Sacre de SMTC le Roi Charles X (Reims, dimanche 29 mai 1825) :
le Roi donne l’accolade au Dauphin
(tableau de François Gérard)

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

Outre la date anniversaire terrible et douloureuse de la chute de Constantinople (29 mai 1453), évoquée ci-dessus, ce 29 mai est aussi l’anniversaire du Sacre de Charles X (29 mai 1825).
J’ai déjà eu l’occasion de vous écrire quelques réflexions à ce sujet (voir > ici) et je m’autorise à vous y renvoyer, pour le cas où vous ne vous en souviendriez pas bien. Au § A de ce texte, écrit il y a deux ans – à l’occasion du 190ème anniversaire de ce sacre – , j’évoquais, entre autres, la Messe en la majeur pour choeur et orchestre composée à cette occasion par Luigi Cherubini :  en cette année du 175ème anniversaire de la mort (15 mars 1842) de Luigi Cherubini, déjà évoqué > ici, et au jour anniversaire de ce sacre, je ne peux que vous inviter chaleureusement à l’écouter ou la ré-écouter >>> 

Messe en la majeur pour le Sacre de Charles X
Philarmonia Chorus / maître de choeur : Roberto Benaglio
Philarmonia Orchestra / direction : Riccardo Muti

(faire un clc droit sur l’image ci-dessous, puis « ouvrir dans un nouvel onglet »)

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Je profite également de cette circonstance pour vous inviter à lire le récit complet (il n’avait encore jamais été publié dans son intégralité) du compte-rendu du toucher des écrouelles par Sa Majesté le Roi Charles X après son Sacre, le 31 mai 1825.
En effet, jusqu’à ce que « La Gazette Royale » le fasse paraître dans les colonnes de son numéro 148 il y a quelques mois, seules des relations incomplètes de cette cérémonie étaient disponibles : Dom Thierry Barbeau osb en a gracieusement communiqué le texte complet, dont le manuscrit se trouve à l’abbaye Saint-Pierre de Solesmes, à l’Union des Cercles Légitimistes de France (UCLF) pour qu’elle en assure la publication et la diffusion. Une reproduction en ligne se trouve sur le site « L’Ami de la Religion et du Roi » > ici. Ne la manquez donc pas !

Charles X en costume de sacre par Alexandre-François Caminade

SMTC le Roi Charles X en costume de sacre
(tableau d’Alexandre-François Caminade)

Publié dans:De liturgia, Memento, Vexilla Regis |on 29 mai, 2017 |5 Commentaires »

2017-53. Du sanctuaire de Notre-Dame de Bon-Secours et de Consolation à Fresneau.

Profitons du début du mois de Marie pour nous rendre en pèlerinage auprès de

Notre-Dame de Fresneau

Ave pretiosa - Fresneau détail du vitrail d'Adhémar de Monteil

« Ave Pretiosa »
Armoiries du village de Marsanne sur le territoire duquel se trouve le sanctuaire de Fresneau :
« D’azur à une croix de légat pommelée d’argent »
La devise – qui est celle qu’Adhémar de Monteil choisit lors de son élévation à l’épiscopat (en 1077),
constitue une invocation à la Madone : à la fois Notre-Dame de Fresneau, si proche des fiefs des Adhémar, et Notre-Dame du Puy, siège de son évêché – est aussi devenue celle du sanctuaire.

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       Le lundi 1er mai 2017, qui était donc le premier jour du mois de Marie, des membres ou amis de la Confrérie Royale, du Cercle légitimiste Crillon le Brave (Dauphiné), du Cercle légitimiste Saint Louis Roi de France (vicomté de Nîmes) et du Cercle légitimiste abbé Claude Allier (Vivarais), s’étaient retrouvés pour une journée de prière, d’amitié et de découverte patrimoniale, à l’invitation du Cercle légitimiste Crillon le Brave du Dauphiné, au sanctuaire de Notre-Dame de Fresneau, proche de Montélimar.

   Puisque le mois de mai est particulièrement propice à une meilleure compréhension des trésors déposés par Dieu en Notre-Dame, non seulement par la prière et la méditation, mais également par la connaissance de ses miracles, de ses sanctuaires et des interventions qu’elle a multipliées en notre histoire, à l’aide des photographies prises lors de ce pèlerinage du 1er mai 2017, je souhaite vous présenter cet antique sanctuaire de Notre-Dame de Fresneau

Lully.

Fresneau : le sanctuaire originel

Fresneau : la chapelle « originelle »
plusieurs fois reconstruite au même lieu depuis le XIème siècle.

       A un peu moins de neuf lieues au sud de Valence et à quelque quatre lieues au nord-est de Montélimar, se trouve le très ancien village de Marsanne.
Un peu à l’extérieur du village, dans le vallon boisé appelé la Combe de Fresneau, se trouve un sanctuaire millénaire en l’honneur de la Madone, toujours bien fréquenté par les pèlerins.
La statue de la Très Sainte Vierge Marie, Notre-Dame de Fresneau, y a été solennellement couronnée au nom du Bienheureux pape Pie IX, le 8 septembre 1855.

   C’est probablement dans la deuxième moitié du Xème siècle ou la première moitié du XIème siècle qu’il faut placer les origines du sanctuaire.
Là, à l’entrée de la Combe de Fresneau, près d’une source fraîche et abondante, un berger avait placé une rustique statue de la Vierge Marie qu’il avait lui-même sculptée.

   Un maçon, tailleur de pierre de Marsanne, qui avait une fille aveugle de naissance et dont l’épouse était morte en mettant cette enfant au monde, remontait souvent ce vallon de Fresneau jusqu’à une petite carrière en amont de la source.
La jeune fille, qui restait près de la source et du modeste oratoire à y prier la Sainte Mère de Dieu, entendit un jour cette dernière lui demander de faire construire une chapelle en ce lieu, lui promettant en retour de lui accorder la vue.

Fresneau vitrail représentant l'apparition

Fresneau : vitrail représentant l’apparition…
(à la vérité, la représentation est assez fantaisiste, bien dans le style « troubadour » du XIXème siècle où ce vitrail fut réalisé ; en effet une jeune fille du XIème siècle dont le père était maçon n’était certainement pas vêtue de la sorte).

   La jeune fille révéla à son père la demande de la Madone, demande qu’il accueillit d’abord fort mal ; sans doute pensait-il qu’il s’agissait d’une pure imagination de sa fille. Mais la Vierge insista auprès de la jeune fille, et la jeune fille auprès de son père, lequel s’entêta dans son refus jusqu’à ce que…

   Le curé de Marsanne avait commandé un bénitier pour son église. Une fois le travail accompli, le tailleur de pierre le scella dans l’église à l’endroit désigné par le prêtre, mais à trois reprises, au matin des jours suivants, le bénitier fut retrouvé à l’entrée du vallon de Fresneau, à proximité de la source.

Fresneau vitrail illustrant le bénitier miraculeux

   Cet événement insolite ne put rester caché et les curieux commencèrent à affluer.
Le père, ébranlé, finit par dire : « Eh bien ! Tu l’auras ta chapelle, à condition que la vue te soit donnée… »
La jeune fille passa sur ses yeux de l’eau de la source et s’écria : « Je vois ! »

   Une petite chapelle fut donc construite, en l’honneur de Notre-Dame des Bois : le bénitier miraculeux y prit tout naturellement sa place… et s’y trouve toujours car il n’a plus été pris par l’envie de déménager depuis lors !

Fresneau le bénitier miraculeux

Fresneau : le bénitier miraculeux dans la chapelle originelle.

   A côté de la chapelle, souvent appelée aujourd’hui « petit sanctuaire », la source dont l’eau avait guéri la jeune fille de sa cécité, sourd toujours, abondante et fraîche, et de très nombreuses personnes viennent s’y approvisionner.

   Depuis le premier miracle, c’est une succession innombrable de grâces et de prodiges – physiques et spirituels – dont cette eau a été la cause.

Fresneau la source miraculeuse

   Surplombant la vasque dans laquelle s’écoule la source miraculeuse, une croix de pierre porte en son centre l’inscription : « Si scires donum Dei : si vous connaissiez le don de Dieu ». C’est l’une des paroles dites par Notre-Seigneur Jésus-Christ à la Samaritaine, au puits de Jacob, et il convient de penser à ce qui suit immédiatement : « Si vous connaissiez le don de Dieu et qui est Celui qui vous dit : Donnez-moi à boire, peut-être Lui en eussiez-vous demandé vous-même et Il vous eût donné d’une eau vive » (Johan. IV, 10) et « (…) Celui qui boira de l’eau que Je lui donnerai n’aura jamais soif ; mais l’eau que Je lui donnerai deviendra une fontaine d’eau jaillissante jusque dans la vie éternelle » (Johan. IV, 13).
Une autre inscription latine, non tirée des Saintes Ecritures, est gravée au pied de la cette croix : « Ad fontem fidei veniat languidus : que le languide vienne à la source de la foi ».

Fresneau croix de la source

La croix au-dessus de la source miraculeuse.

   La chapelle originelle, qui n’était guère plus qu’un oratoire, fut visitée en 1449 par le Dauphin de France, futur Louis XI.
Elle fut malheureusement entièrement dévastée et rasée par les fanatiques huguenots en 1589.

   En 1605, les habitants de Marsanne relevèrent l’abside et la dédièrent à Notre-Dame de Bon-Secours, puis, dans les années qui suivirent, ils y adjoignirent une petite nef, laquelle fut prolongée vers 1682.
Au XVIIIème siècle, la chapelle fut ornée de peintures murales à la gloire de la Très Sainte Vierge et reçut un campanile ; en action de grâces pour sa conversion, un gentilhomme heureux d’avoir recouvré la foi de ses aïeux obtint que l’on adjoignît au vocable de Notre-Dame de Bon-Secours celui de Notre-Dame de Consolation.

   Aux jours de la satanique révolution, le sanctuaire fut à nouveau pillé et saccagé : tout ce qu’il contenait fut brûlé par les « patriotes », y compris la statue en bois de la Madone. Le bâtiment dévasté fut vendu comme « bien national » en 1796.
L’acquéreur la restitua en 1803 et le mouvement de dévotion reprit tandis que les villageois s’employaient à réparer, consolider et réapproprier les lieux.
C’est alors que fut sculptée une nouvelle statue de la Très Sainte Vierge Marie, pour remplacer celle qui avait été livrée aux flammes par les doux et pacifiques disciples des « lumières »

   La construction d’un sanctuaire plus vaste, plus apte à accueillir des foules et à la célébration de cérémonies solennelles (comme nous le verrons plus loin), entraîna malheureusement un nouveau déclin de la petite chapelle, au point qu’à la veille de la première guerre mondiale elle menaçait ruine. 

   Une nouvelle restauration eut lieu de 1925 à 1928, et encore une autre en 2005 , très peu de temps après laquelle la chapelle fut odieusement profanée et dut être réconciliée une nouvelle fois : l’autel « face au peuple » qui y fut édifié et consacré en 2007 reçut alors des reliques des Bienheureux Jacinthe et François, les deux plus jeunes voyants de Fatima.

Fresneau intérieur de la chapelle originelle

L’intérieur de la chapelle originelle, appelée aussi « petit sanctuaire » dans son état actuel.

   Mais avant d’aller plus loin il nous faut revenir au XIème siècle.

Né en 1055, Adhémar de Monteil, issu de la Maison des Adhémar, branche de la lignée des comtes de Valence, bien qu’aîné de sa fratrie et destiné par ses parents à la carrière des armes, embrassa l’état ecclésiastique.
Prévôt de la cathédrale de Valence, Adhémar de Monteil fut choisit en 1077 par le pape Saint Grégoire VII pour devenir évêque du Puy en remplacement du simoniaque Etienne de Polignac, excommunié et déposé. Le nouvel évêque, acteur de la réforme grégorienne, devra lutter contre les abus et s’opposer avec énergie aux empiètements et exactions des puissants féodaux du Velay.
En 1086, il se rendit en pèlerinage à Jérusalem. A cette époque la route de Jérusalem passait par Marsanne : la tradition rapporte qu’il serait revenu s’agenouiller dans l’humble sanctuaire de Fresneau, qui devait déjà être bien cher au cœur d’Adhémar de Monteil.
Selon la tradition encore, sa devise épiscopale « Ave Pretiosa : je vous salue, ô Précieuse ! » est une invocation mariale adressée en même temps à la Madone de Fresneau dont il s’éloignait en partant pour le Velay, et à la Vierge du Puy dans la cathédrale de laquelle il allait prendre possession de son siège épiscopal. Ainsi Adhémar de Monteil est-il un vivant trait d’union entre le petit sanctuaire de Fresneau et la très fameuse « chambre angélique » du Puy.

Fresneau vitrail d'Adhémar de Monteil

Adhémar de Monteil (1055-1098)
vitrail du « grand sanctuaire » de Notre-Dame de Fresneau

   Chacun se souvient qu’Adhémar de Monteil est particulièrement lié à l’histoire de la première croisade. Il accueillit le Bienheureux Urbain II au Puy vers la fin de l’été 1095, alors que ce Pontife se dirigeait vers Clermont où il réunit le concile qui, après avoir pris un certain nombre de mesures disciplinaires relatives au contexte ecclésial de l’époque, se termina par l’appel du pape à prendre la croix pour aller délivrer les Lieux Saints tombés au pouvoir des sectateurs de Mahomet.

   Adhémar de Monteil, enthousiasmé, fut le premier à s’engager pour la croisade. Urbain II le nomma son légat pontifical au milieu des troupes croisées.

   Le 1er août 1098, à Antioche de Syrie, Adhémar de Monteil, victime d’une épidémie, rendit son âme à Dieu. Avant de mourir, il exprima le désir que soient donnés au prieuré Saint-Félix de Marsanne, dont les religieux étaient en charge du culte dans la petite chapelle de Fresneau,  tous les objets de sa chapelle pontificale.
C’est ce qui explique la croix de légat qui figure depuis lors dans les armoiries de Marsanne, et qui explique aussi que la devise épiscopale de l’illustre évêque du Puy - « Ave Pretiosa » - soit devenue celle du sanctuaire de Fresneau.
Quant aux objets que Marsanne hérita d’Adhémar de Monteil, ils furent bien évidemment les malheureuses victimes de la liberté, de l’égalité et de la fraternité révolutionnaires…

Fresneau mort d'Adhémar de Monteil

Vitrail du « grand sanctuaire » de Fresneau représentant la mort d’Adhémar de Monteil,
à Antioche le 1er août 1098,
et le leg des objets de sa chapelle pontificale au prieuré de Marsanne
dont les religieux étaient en charge du culte dans la chapelle de Fresneau.

   Dans le grand mouvement de reconquête catholique qui anime le XIXème siècle français, la dévotion mariale occupe une place de choix : les apparitions ou manifestations de la Sainte Mère de Dieu sur le sol de France y contribuent puissamment (1830 rue du Bac et 1836 Notre-Dame des Victoires, à Paris ; 1846 à La Salette ; 1858 à Lourdes ; 1871 à Pontmain ; 1875 à Pellevoisin), et les anciens lieux de pèlerinage qui renaissent après les dévastations révolutionnaires sont des lieux privilégiés de ré-évangélisation.

   En 1854, l’année où fut proclamé le dogme de la Conception immaculée de la Bienheureuse Vierge Marie, le Bienheureux pape Pie IX fut directement sollicité de divers côtés (le colonel de Baillencourt, qui était à la tête du 40ème Régiment d’Infanterie en garnison à Rome, et qui était soutenu par Monseigneur de Ségur ; S.Exc.Mgr Chatrousse, évêque de Valence, présent à Rome pour les cérémonies du 8 décembre 1854… etc.) en faveur du petit sanctuaire de Fresneau, si bien que, par des brefs apostoliques en date du 15 janvier 1855, le Bienheureux Pie IX accorda de précieuses indulgences aux pèlerins de Notre-Dame de Bon-Secours et de Consolation ainsi que les honneurs du couronnement à sa statue : le Souverain Pontife bénit d’ailleurs lui-même à Rome la couronne de vermeil qui serait bientôt solennellement placée sur la tête de la Madone.

   Le couronnement de Notre-Dame de Fresneau fut célébré solennellement le 8 septembre 1855 au milieu d’un grand concours de peuple.

Fresneau vitrail du Bx Pie IX

Le Bienheureux Pie IX bénissant la couronne de vermeil destinée à Notre-Dame de Fresneau
(détail d’un vitrail du « grand sanctuaire »)

   Ce renouveau du pèlerinage, en particulier au moment des cérémonies du couronnement, fit vivement ressentir la nécessité d’un lieu de culte plus vaste.
Le curé de Marsanne et quelques autres zélés dévots de Notre-Dame, encouragés par l’évêque de Valence, se dépensaient sans compter pour la construction d’une grande chapelle, mais les difficultés surgissaient à chaque pas, toujours plus nombreuses, toujours plus décourageantes.

   Les promoteurs du projet, décontenancés, se rendirent à Ars afin d’y requérir l’avis du saint curé. La réponse de Saint Jean-Marie Vianney fut sans ambiguïté : « La Sainte Vierge veut à Fresneau un sanctuaire. Les difficultés disparaîtront. Il s’y fera beaucoup de bien ! »

   Effectivement, la prophétie du saint curé ne tarda pas à se réaliser : les difficultés disparurent bientôt. La première pierre du « grand sanctuaire » fut bénite le 8 septembre 1857, et trois ans plus tard, le 8 septembre 1860, la Sainte Messe put être célébrée dans cette nouvelle chapelle.

Le Saint Curé d'Ars encourage les promotteurs de la construction du sanctuaire

Le saint curé d’Ars encourage l’édification du grand sanctuaire de Notre-Dame de Fresneau
(détail du vitrail de Saint Jean-Marie Vianney dans le « grand sanctuaire »)

   Le lien du sanctuaire de Fresneau avec le saint curé d’Ars est aujourd’hui signifié par un important reliquaire de Saint Jean-Marie Vianney accroché au mur de la grande chapelle, juste au-dessous du vitrail représentant le saint et son intervention si encourageante.

Fresneau reliques du Saint Curé d'Ars

Reliquaire de Saint Jean-Marie Vianney dans le « grand sanctuaire » de Fresneau.

   Ce sanctuaire plus vaste achevé en 1860 a été édifié dans le style néo gothique que l’on affectionnait à l’époque.
A l’extérieur, il possède la particularité d’avoir, sur les deux contreforts qui encadrent le grand porche d’entrée, deux canons portant les aigles impériales russes.
Ces deux canons ont été offerts par Napoléon III (c’était le temps où cet homme au « cœur double » – ainsi que l’avait décrit Notre-Dame de La Salette – cherchait hypocritement à s’assurer le soutien des catholiques) ; ils ont été pris aux Russes lors de la bataille de Malakoff, le 8 septembre 1855, c’est-à-dire le jour même où fut couronnée Notre-Dame de Fresneau.

Fresneau le sanctuaire du XIXe siècle

Façade du « grand sanctuaire » de Fresneau

   L’intérieur de la grande chapelle est une seule large nef, lumineuse et bien équilibrée. Il n’a fort heureusement pas été massacré par les aménagements post-conciliaires : mis à part l’installation d’un autel « face au peuple », aisément escamotable, dans l’avant-chœur, on apprécie que le maître-autel (dans les gradins duquel sont disposés de nombreux reliquaires), les stalles, la table de communion, la chaire de vérité, les confessionnaux, les statues et les bannières soient restés à leur place.

Fresneau intérieur du grand sanctuaire

Intérieur du « grand sanctuaire » de Fresneau

   Dès que l’on entre, le regard est attiré par la Vierge couronnée qui trône, entourée de deux anges musiciens agenouillés, dans une espèce de grand ciborium néo-gothique édifié à l’arrière du maître-autel.

Fresneau la Vierge couronnée

Le ciborium dans lequel trône la statue couronnée de Notre-Dame de Fresneau ;
on remarque du côté de l’Evangile le vitrail représentant l’apparition, la guérison de la jeune aveugle
et le miracle du bénitier,
et du côté de l’épître le Bienheureux Pie IX bénissant la couronne destinée à la statue de Notre-Dame de Fresneau.

   C’est dans ce sanctuaire que nos pèlerins de la Confrérie Royale, des Cercles Légitimistes du Dauphiné, de la Vicomté de Nîmes, et du Vivarais, auxquels s’étaient joints quelques amis et pèlerins de passage, ont eu la joie, ce lundi 1er mai 2017, d’assister à la Sainte Messe célébrée – dans le rite latin traditionnel bien sûr – par Monsieur l’Abbé Louis de Saint-Taurin, Prieur de la Confrérie Royale.

Fresneau le maître-autel prêt pour la Sainte Messe tridentine

Le maître-autel du sanctuaire de Fresneau apprêtée pour la célébration de la Sainte Messe traditionnelle,
ce lundi 1er mai 2017

   Depuis combien d’années (voire de décennies) la Sainte Messe latine traditionnelle n’avait-elle pas été célébrée sur ce maître-autel du sanctuaire de Notre-Dame de Fresneau ?
Depuis combien de temps l’introït « Salve Sancta Parens » et la sublime Messe IX « cum jubilo » n’avaient-ils pas résonné sous cette voûte ?
Quant au « Domine, salvum fac Regem », étant donné que le sanctuaire fut édifié sous le second empire (en pire), il est vraisemblable qu’il n’y avait jamais été chanté…

Fresneau Sainte Messe tridentine le 1er mai 2017

L’élévation du calice lors de la Sainte Messe célébrée par le Prieur de la Confrérie Royale
en présence de membres et d’amis des Cercles Légitimistes du Dauphiné, du Vivarais et de la Vicomté de Nîmes,
le 1er mai 2017

Très touchant humble et sublime sanctuaire de Notre-Dame de Bon-Secours et de Consolation de Fresneau !
Il nous rappelle, par ses liens avec la grande histoire de notre patrie pendant près d’un millénaire, que le Royaume de France est le Royaume de Marieregnum Galliae, regnum Mariae – ; et nous y trouvons une nouvelle et urgente invitation à prier avec toujours plus d’intensité et de ferveur, à offrir toujours davantage de pénitences et de sacrifices, à oeuvrer avec toujours plus d’ardeur à notre propre conversion et à celle de ceux qui nous entourent, pour que notre France, pénitente et dévouée – Gallia pœnitens et devota – revienne aux Cœurs de Jésus et Marie, afin de renouer avec la vocation qui lui a été donnée dans les fonts baptismaux de Reims, et pour redevenir le beau Royaume des Lys !

Notre-Dame de Fresneau

Notre-Dame de Bon-Secours et de Consolation,
priez pour nous,
priez pour la France égarée,
priez pour que le lieu-tenant sacré du Roi des Cieux puisse bientôt rétablir
le règne du divin Cœur de Jésus

en ce doux Royaume de France qui gémit sous un pouvoir oppresseur !

lys.gif

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