2015-108. De l’anniversaire de la canonisation de Saint Charlemagne et de la séquence « Urbs Aquensis » en son honneur.
- 29 décembre 1165 -
Trésor de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle : le Bienheureux Charlemagne
(détail de l’un des reliquaires – bronze doré 1215)
C’est aujourd’hui, 29 décembre, l’anniversaire de la cérémonie de canonisation du Bienheureux Charlemagne (rappelons qu’à cette époque on ne faisait pas encore de différence entre les « bienheureux » et les « saints »), qui fut célébrée à Aix-la-Chapelle le 29 décembre 1165.
Je n’ai aucune envie de redire ici ce que j’ai déjà eu l’occasion d’écrire à ce sujet le 28 janvier 2014 à l’occasion du douzième centenaire de la mort du grand Roi des Francs et Empereur (cf. > ici), même si quelques « catho-hyper-coincés » – qui s’estiment sans doute mieux inspirés que le pape Benoît XIV (1740-1758) qui trancha pourtant la question, au terme d’une polémique de plusieurs siècles – continuent à nous faire grief de conserver et de défendre le culte liturgique du Bienheureux Charlemagne.
Justement, dans un premier temps, la fête de la translation de Saint Charlemagne (on entend par « translation » l’acte de transporter des reliques d’un lieu à un autre, en l’occurrence il s’agissait ici de la cérémonie au cours de laquelle on retira ses restes du tombeau pour les déposer dans une chasse et les exposer à la vénération des fidèles, le 29 décembre 1165) fut célébrée avec plus d’éclat que son dies natalis (le jour anniversaire de sa mort, c’est-à-dire le 28 janvier).
Ce n’est qu’après 1215 que la fête de Saint Charlemagne au 28 janvier supplanta en solennité l’anniversaire du 29 décembre.
C’est du temps où la principale fête du saint roi et empereur était donc celle du 29 décembre que date la séquence « Urbs Aquensis », dont je publie aujourd’hui, à l’occasion de ce huit-cent-cinquantième anniversaire, le texte latin et la traduction ci-dessous.
Cette pièce constitue l’un des plus anciens témoins qui soient parvenus jusqu’à nous de la liturgie de Saint Charlemagne.
D’Aix-la-Chapelle pour laquelle elle avait été composée, cette prose se répandit assez rapidement dans tout l’empire (parfois avec des adaptations : des villes qui avaient été elles aussi des résidences impériales substituant leur nom à celui d’Aix à la première ligne).
Abandonné au XIXème siècle, l’usage de cette séquence a été rétabli à Aix-la-Chapelle en 1931 (on en trouvera la partition sur le site de la Schola Sainte-Cécile > ici), et on peut l’entendre jouer à l’orgue ci-dessous
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Au temps de la guerre de cent ans, Sainte Jeanne d’Arc voyait Saint Louis et Saint Charlemagne à genoux devant le trône de Dieu, Le suppliant pour la France et pour son Roi légitime.
Ainsi donc de même, en nos temps troublés et malheureux, recourrons avec ferveur à l’intercession du saint empereur pour que Dieu délivre la France et l’Europe des grands maux dont elles sont menacées…
Lully.
Urbs Aquensis, urbs regalis, Regni sedes principalis, Prima regni curia, |
Cité d’Aix, cité royale, Siège principal de la royauté, Palais préféré de nos princes, |
Regi regum pange laudes Quae de magni regis gaudes Caroli praesentia. |
du Roi des rois chante la louange, en ce jour où tu te réjouis de la fête du grand roi Charles. |
Iste coetus psallat laetus, Psallat chorus hic sonorus Vocali concordia. |
Que notre chœur chante dans l’allégresse, que le clergé fasse entendre le mélodieux accord des voix. |
At dum manus operatur Bonum, quod cor meditatur, Dulcis est psalmodia. |
Quand la main est occupée aux bonnes œuvres, ce que le cœur médite est une douce psalmodie. |
Hac in die duo festa Magni regis magna gesta Recolat Ecclesia. |
En ce double jour de fête, que l’Église honore la grande geste du grand roi. |
Reges terrae et omnes populi Omnes simul plaudant et singuli Celebri laetitia. |
Que les rois de la terre et tous les peuples applaudissent ensemble et fassent entendre un unique concert joyeux. |
Hic est Christi miles fortis Et invictae dux cohortis Decem sternit millia. |
C’est ici le fort soldat du Christ, et le chef de l’invincible cohorte qui en renverse dix mille. |
Terram purgat lolio Atque metis gladio Ex messe zizania. |
Il purge la terre de l’ivraie, et de son glaive il affranchit la moisson en extirpant l’ivraie. |
Hic est magnus imperator, Boni fructus bonus sator Et prudens agricola. |
C’est là le grand Empereur, bon semeur d’une bonne semence et prudent cultivateur. |
Infideles hic convertit Fana, deos, hic evertit Et confregit idola. |
Il convertit les infidèles, il renverse temples et dieux, et il brise les idoles. |
Hic superbos domat reges, Hic regnare santas leges Fecit cum justitia. |
Il dompte les rois superbes, il fait régner les saintes lois avec la justice. |
Quam tuetur sine fine Ut et justus, sed nec sine Sit misericordia. |
Les yeux sans cesse fixés sur elle, De sorte qu’en étant juste, il ne soit Cependant pas sans miséricorde. |
Oleo laetitiae unctus dono gratiae Ceteris prae regibus, cum corona gloriae Majestatis regiae, insignitur fascibus. |
Il est sacré de l’huile de liesse, par un don de grâce, plus que tous les autres rois. Avec la couronne de gloire, il reçoit les insignes de l’Impériale Majesté. |
O Rex mundi triumphator, Jesu Christi conregator, Sit pro nobis exorator, Sancte Pater Carole, |
Ô Roi triomphateur du monde, toi qui règnes avec Jésus-Christ, sois pour nous un intercesseur, ô Charles, notre père saint ! |
Emundati a peccatis, Ut in regno claritatis Nos, plebs tua, cum beatis Caeli simus incolae. |
Afin que, purs de tout péché, dans le royaume de la lumière, nous, ton peuple, avec les bienheureux Nous soyons habitants du Ciel. |
Stella maris, ô Maria, Mundi salus, vitae via, Vacillantum rege gressus Et ad Regem des accessus In perenni gloria. |
Étoile de la mer, ô Marie, salut du monde, voie de la vie, dirige nos pas vacillants et donne-nous accès auprès du Roi dans la gloire sans fin. |
Christe, splendor Dei Patris, Incorruptae Fili Matris, Per hunc sanctum, cujus festa Celebramus, nobis praesta Sempiterna gaudia. |
Ô Christ, splendeur de Dieu le Père, fils d’une Mère sans tache, par ce Saint dont nous célébrons la fête, daigne nous accorder l’éternelle joie. |
Amen. | Ainsi soit-il ! |
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Aix-la-Chapelle : la cathédrale