Archive pour la catégorie 'Memento'

2022-107. Message de Sa Majesté le Roi Louis XX à l’occasion de l’anniversaire de l’assassinat de Sa Majesté la Reine Marie-Antoinette.

- 16 octobre 2022 -

Armes de France pour le deuil

   A l’occasion de l’anniversaire de l’odieux assassinat de Sa Majesté la Reine Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine, ce dimanche 16 octobre, en début d’après-midi, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté le Roi Louis XX, a publié sur les réseaux sociaux le message suivant :

   N’oublions pas notre histoire de France !

En ce 16 octobre, nos pensées et nos prières vont à la Reine Marie-Antoinette, odieusement assassinée, après un procès inique.
Durant les derniers mois qu’elle a vécus, d’abord avec le Roi Louis XVI et leur famille, puis seule, séparée de ses proches et notamment de ses enfants, Marie-Antoinette a montré comment savait mourir une Reine de France.
Jusqu’au bout elle a tenu tête à ses ennemis.

   Plus de deux siècles après elle demeure un modèle pour les chefs d’état qui savent que le sacrifice fait partie de leur devoir et de la charge qu’ils ont reçue de Dieu pour gouverner les hommes.

SM la Reine Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine avec ses enfants - Elisabeth Vigée-Lebrun

Célèbre portrait de S.M. la Reine Marie-Antoinette avec ses enfants
par Elisabeth Vigée-Lebrun

2022-106. Du Requiem en ré mineur de Charles-Henri Plantade à la pieuse mémoire de Sa Majesté la Reine Marie-Antoinette.

16 octobre,
En France : fête de l’apparition de Saint Michel au Mont Tombe (cf. > ici) ;
Anniversaire de l’assassinat de S.M. la Reine Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine ;
Anniversaire de la fondation de la Milice de l’Immaculée (cf. > ici).

Reconstitution de la cellule de la Reine à la Conciergerie

Reconstitution de la cellule de la Reine à la Conciergerie

Charles-Henri Plantade (1764-1839) :

   Claveciniste et compositeur né à Paris le 19 octobre 1764, Charles-Henri Plantade entra à l’école des pages du Roi à Versailles : choisis pour leurs capacités musicales, ces jeunes gens se formaient sous la conduite d’un maître de musique et égayaient la cour par le chant et la pratique orchestrale.
Les aptitudes vocales du jeune Plantade le firent rapidement remarquer. Elles lui valurent d’interpréter plusieurs « soli » dans les grandes messes solennelles de Versailles. Plus encore, distingué par Gluck il fut choisi par lui pour chanter des duos avec la jeune Reine. Durant cette période, selon plusieurs biographes, Plantade apprit la composition et s’initia à la maîtrise instrumentale avec plusieurs grands maîtres de l’époque. Cette solide formation fit de lui un claveciniste de très bon niveau, capable d’accompagner de multiples ensembles à la partition, mérite encore rare à cette époque. Ces compétences lui ouvrirent les portes des salons aristocratiques, toujours à l’affut d’une musique de qualité pour agrémenter les bals et les réceptions. Mais ces premiers succès tournèrent à la coqueluche quand il s’attacha au genre musical qui devint à la mode dans les dernières années de l’Ancien Régime : la romance. Ces romances de Plantade se faisaient remarquer par la qualité des accompagnements qui tranchaient sur la foule des pièces médiocres qui fleurissaient un peu partout. Ces succès toutefois étant insuffisant pour lui assurer une vie décente, Plantade entra alors dans l’orchestre de l’Opéra Comique et se lança en même temps dans le professorat de chant.
En 1799 il est nommé professeur de chant au Conservatoire et enseigne aussi au pensionnat de jeunes filles fondé par Madame Campan à Saint-Germain-en-Laye. Il y rencontre alors Hortense de Beauharnais, belle-fille du Buonaparte, qui y est élève, à laquelle il s’attache de manière durable, et dont la protection va propulser sa carrière.
En 1806, Hortense de Beauharnais devenue Reine de Hollande, se l’attache en qualité de maître de chapelle et le fait nommer directeur de la musique du Roi. Quatre ans plus tard, quand l’éphémère royaume est annexé à l’empire français, Plantade revient à Paris avec sa protectrice qui lui conserve toutes ses fonctions auprès d’elle.
Après quelques incertitudes, Charles-Henri Plantade va survivre honorablement au changement de régime : d’abord réformé de sa chaire du conservatoire en 1816, il la retrouve deux ans plus tard lorsque l’institution devient l’Ecole royale de chant et de déclamation. Son retour en grâce avait déjà été marqué par sa nomination, à la maîtrise de la Chapelle Royale (1816-1830), dirigée par Cherubini. Dans ce poste, Plantade se consacre pleinement au genre religieux. Il écrit ainsi plusieurs messes de Requiem exécutées à la nécropole royale de Saint-Denys lors de cérémonies officielles. Il compose surtout le Te Deum et le Salve Regina joués à Reims à l’occasion du Sacre de Sa Majesté le Roi Charles X, le 29 mai 1825.

Avec la révolution de 1830, Plantade perd la plupart de ses charges, hors ses fonctions de chef de chant à l’opéra. Ressentant une grande amertume de cette mise à l’écart, il se retire aux Batignolles. Malade, il rejoint Paris en 1839 pour y mourir le 18 décembre à l’âge de soixante-quinze ans.

Le Requiem à la pieuse mémoire de Sa Majesté la Reine Marie-Antoinette :

   Les spécialistes ont du mal à dater précisément la composition de la Messe de Requiem à grand orchestre, « composée et dédiée à Mme la Baronne de La Bouillerie » d’après la page de titre. Cette œuvre semble préexister à l’événement qui l’a rendue célèbre : la commémoration, en 1823, du trentième anniversaire de la mort de Sa Majesté la Reine Marie-Antoinette.
Le répertoire de la Chapelle des Tuileries ne comportait pas alors beaucoup de messes funèbres, et on demanda à Charles-Henri Plantade – qui n’était pas du nombre des principaux maîtres de Chapelle (comme Le Sueur ou Cherubini) de retravailler une Messe en ré mineur inédite, bien que sans doute déjà jouée, qu’il avait en réserve. Une édition luxueuse, publiée par Frey à cette occasion, est due pour une bonne part à la générosité de la Baronne de La Bouillerie, et à une liste importante de souscripteurs sollicités par la baronne.
« La musique de ce Requiem offre un pont saisissant entre les modèles d’Ancien Régime et le premier romantisme. Le chœur est écrit avec trois parties d’hommes (les ténors étant toujours divisés) et une seule ligne de femmes. La sonorité, de ce fait, se rapproche des anciens motets hérités de l’esthétique lullyste puis ramiste. La découpe conserve le plan traditionnel Introït / Kyrie / Graduel / Prose / Offertoire / Sanctus / Pie Jesu / Agnus. Après une introduction dont le chromatisme représente l’affliction devant la mort, et dont les coups de tam-tam semblent rappeler l’implacable destin de l’homme, le Kyrie opte pour une fugue plus énergique, débutée en faux plain-chant, et dont les volutes ne sont pas sans imiter certains mélismes haendéliens. Le Graduel, intimiste, divise par moment la ligne de sopranos en deux parties et aspire à la plénitude de l’homorythmie, en opposition complète avec le Kyrie. La prose – par la longueur de son texte – est la section la plus développée de la messe des morts, et c’est aussi celle où Plantade fera montre de toute la richesse de son inventivité : on y sent passer les frémissements opératiques des ouvrages révolutionnaires de Méhul et Cherubini, et même la nervosité du style de Rossini, alors en pleine vogue. Le très beau Pie Jesu qui conclut cette section offre un magnifique exemple de style rétrospectif, où altos et violoncelles résonnent comme un consort de violes louis-quatorzien. Mais c’est précisément dans le « véritable » Pie Jesu – celui qui précède l’Agnus, plus loin dans la messe – que Plantade utilisera l’effet d’orchestration le plus moderne de sa partition : un gémissement plaintif du cor en note « ouverte » et chromatique, produisant un son inquiétant que Berlioz dut particulièrement apprécier » (livret du CD).

Voici les enregistrements de cette œuvre réalisés en 2016 par « Le Concert Spirituel » dirigé par Hervé Niquet, dans la collection « Château de Versailles » (Alpha-Classics).
Pour écouter, faire un clic droit sur l’image, puis « ouvrir dans un nouvel onglet ».

L’introït Requiem :

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Le Kyrie :

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Le graduel Requiem :

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La prose Dies Irae :

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L’offertoire Domine Iesu Christe :

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Le Sanctus :

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Le Pie Iesu :

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L’Agnus Dei :

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Armes de Sa Majesté la Reine Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine

 

2022-105. De Sainte Angadrême de Renty, vierge et abbesse, céleste protectrice de Beauvais, que l’on invoque pour être préservé de l’incendie et des méfaits du feu.

14 octobre,
Fête de Sainte Angadrême de Renty, vierge ;
Mémoire de Saint Calliste 1er, pape et martyr.

Statue de Sainte Angadrême dans l'église Notre-Dame du Marissel à Beauvais

Statue de Sainte Angadrême
église Notre-Dame du Marissel, à Beauvais

   La fête de Sainte Angadrême (en latin : Angadrisma, d’où Angadresme, puis aujourd’hui Angadrême) nous ramène au VIIème siècle et nous permet d’admirer l’un des magnifiques fleurons de la sainteté des temps mérovingiens.

   Angadrême était la fille unique de Robert (Chrodobertus dans les textes latins : d’où le fait qu’on le trouve aussi nommé Chrodobert ou Chrodebert) resté dans l’histoire sous le nom de Robert le Référendaire.
On ne connaît pas le nom de sa mère.
De même, on ne connaît pas la date de sa naissance, qui doit se situer au plus tard vers 615 selon l’âge qui lui est donné au moment de sa mort. Elle serait née à Thérouanne ou dans les environs : le village de Renty, en Artois, qui est associé au nom de Sainte Angadrême, est situé à un peu plus de quatre lieues à l’ouest de Thérouanne ; ce pourrait être le lieu de sa naissance, ou celui du domaine où elle a grandi.

   Par son père, elle appartient à la haute noblesse franque : il est hautement probable que c’est cette lignée de laquelle est issue la famille royale des Robertiens, à laquelle, après Hugues Capet, est attribué le nom de Capétiens.
Robert, dit le Référendaire, exerça cette fonction, qui cumule à peu près les charges de chancelier et de garde des sceaux, pour les Rois Dagobert 1er et Clotaire III (fils de Sainte Bathilde). Ami et disciple de Saint Ouen (v. 603 – 686), fonctionnaire royal puis archevêque de Rouen, Robert, comme lui, embrassera la carrière ecclésiastique et deviendra évêque de Tours et peut-être aussi de Paris.
Robert donna pour précepteur à sa fille Audemar de Thérouanne (600-667) (en latin : Audomarus, aujourd’hui connu comme Saint Omer) : auprès de lui, Angadrême acquit non seulement une vaste culture profane, mais aussi de solides connaissances religieuses et développa une profonde vie spirituelle et une grande piété.
C’est ainsi que, grandissant en âge, en sagesse et en grâce, Angadrême, éprise du Christ, lui voua sa virginité.

   Ignorant du vœu de sa fille, Robert avait résolu de la marier à Ansbert, fils du riche et noble Siwin (Silvinus), seigneur de Chaussy dans le Vexin français.
Il se trouve que le jeune homme, lui aussi, à l’insu de sa famille, avait fait vœu de virginité.
Les deux fiancés malgré eux, ayant de toute évidence compris quelle flamme intérieure les animait, s’ouvrirent l’un à l’autre de leur aspiration à la vie consacrée, mais l’un comme l’autre redoutaient de désobéir à leurs pères et de les contrister, en un temps où ces sortes d’engagement revêtaient des importances peu comprises aujourd’hui, et où leur rupture pouvaient avoir de redoutables conséquences.
Ansbert et Angadrême supplièrent Dieu de leur permettre de répondre à leur vocation, et Dieu les exauça d’une surprenante manière : Angadrême, qui était d’une grande beauté, avait demandé : « Que périssent ces charmes qui m’exposent à manquer à mes promesses ! qu’ils soient remplacés par des traits propres à éloigner de moi les vaines adulations des hommes » ; elle eut soudain le visage couvert d’une maladie de peau – qualifiée de lèpre – qui la rendit repoussante, et, les médecins jugeant qu’il n’y avait point de remède à ce mal, les parents durent naturellement convenir que les arrangements qu’ils avaient conclus étaient rendus caducs par cette maladie.
C’est ainsi qu’Ansbert, après avoir dû exercer un temps la charge de référendaire à la cour de Clotaire III, put finalement réaliser sa vocation et entrer à l’abbaye de Fontenelle (aujourd’hui Saint Wandrille). A la mort de Saint Wandrille (+ 668), Lambert, cousin germain d’Angadrême (il était fils d’Erlebert, frère de Robert), fut élu abbé, mais une dizaine d’années plus tard, Lambert fut choisi pour devenir archevêque de Lyon et Ansbert devint le troisième abbé de Fontenelle. A la mort de Saint Ouen (+ 684), à son corps défendant, il fut élu archevêque de Rouen.
Saint Ansbert est fêté le 9 février.
Saint Ouen, Saint Omer, Sainte Bathilde, Saint Lambert, Saint Ansbert… et quelques autres que les limites de cette publication ne me donnent pas le loisir de citer : on est frappé par cette « concentration » de sainteté dans la parenté et l’entourage de celle qui va devenir Sainte Angadrême !

Statue de Sainte Angadrême - cathédrale de Beauvais

Statue de Sainte Angadrême
cathédrale Saint-Pierre de Beauvais

Certaine qu’elle pourrait désormais accomplir sa vocation, Angadrême avoua à son père« J’ai pris Jésus-Christ pour époux. Il veut que je n’appartienne à nul autre qu’à Lui. C’est pour me protéger et me défendre qu’Il m’a envoyé cette difformité ». Robert la conduisit lui-même à Rouen devant Saint Ouen qui lui remit le voile des vierges consacrées. Angadrême ne trouva pas seulement la paix et la joie de l’âme dans la reconnaissance de sa vocation et son accomplissement, mais elle fut aussi guérie de sa maladie de peau et retrouva toute sa beauté.
Ce miracle rendit encore plus éclatant l’authenticité de l’appel exclusif de Dieu envers la noble jeune fille.

Vers 660, après avoir vécu de manière exemplaire les vertus religieuses et la discipline communautaire, elle est contrainte d’accepter la charge d’abbesse, dans le monastère de vierges et de veuves que son Père, Robert, avait fait construire à quelque deux lieues de Beauvais, sur la route d’Amiens, entre Guignecourt et Abbeville-Saint-Lucien, à côté de l’oratoire de Saint Evrou (ou Evroult), au lieu-dit Oroër (nom dérivé du verbe latin orare – qui signifie prier – en raison du fait qu’il y avait un grand nombre d’oratoires qui permettaient de faire monter vers le ciel une sorte de louange continue).
Un jour l’oratoire de Saint Evrou fut en proie aux flammes. Angadrême se précipita pour saisir la châsse des reliques de Saint Evrou qu’elle opposa à l’incendie, lequel céda aussitôt.
La tradition rapporte aussi qu’Angadrême, étant allée faire des dévotions dans l’église Saint-Michel de Beauvais (à cette époque la clôture monastique des femmes n’était pas aussi stricte qu’elle le devint par la suite, et les moniales pouvaient sortir pour visiter les pauvres, soigner les malades et accomplir des pèlerinages) et y trouvant la lampe du Saint Sacrement éteinte, alla demander du feu à un boulanger voisin. Celui-ci, importuné, lui jeta violemment des charbons ardents qu’elle reçut dans ses habits sans qu’ils brûlassent. Effrayé, le boulanger se prosterna à ses pieds.
C’est cet événement qui fit que lorsque le monastère d’Oroër fut détruit par les normands (en l’an 851), on choisit de transférer les reliques de Sainte Angadrême dans l’église Saint-Michel plutôt qu’à la cathédrale (malheureusement cette église Saint-Michel fut à son tout détruite en 1810).
Ces deux faits – l’incendie de l’oratoire de Saint Evrou et le miracle des charbons ardents lancés par le boulanger – font que Sainte Angadrême est très spécialement invoquée contre les incendies et les méfaits du feu.

La prière de Sainte Angadrême protégeant Beauvais de l'incendie - attribué à Claude François, dit Frère Luc (1614-1685) cathédrale de Beauvais

La prière de Sainte Angadrême préservant Beauvais de l’incendie
Tableau de la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais
attribué à Claude François, dit Frère Luc (1614-1685)

   Dans son monastère, Angadrême conduisit ses compagnes à la vertu bien plus par la force de ses exemples que par l’autorité de son commandement. En effet, ses compagnes, la voyant si assidue à la prière, si humble dans son gouvernement, si modeste dans sa tenue et sa vêture, ayant grand soin des pauvres et des nécessiteux, toujours attentive aux détresses spirituelles de ses sœurs, et utilisant un langage nourri par la méditation des saintes Ecritures pour les entraîner à l’amour de Dieu, voulurent la garder comme abbesse pendant plus de trente années !
Elle, toujours plus humble, leur tiendra ce langage au moment où elle allait recevoir les derniers sacrements : « Sur le point de recevoir mon Dieu et mon juge, moi, votre indigne abbesse, je vous demande pardon de tous les mauvais exemples que j’ai pu vous donner, et des peines dont j’ai été pour vous la cause. Je ne mérite pas ce pardon, je le sais ; mais vous aurez pitié de moi et de mes faiblesses ».

Elle rendit son âme à Dieu un 14 octobre, probablement en 695, âgée de plus de 80 ans.

Après sa mort, des miracles éclatants eurent lieu sur sa tombe, qui devint donc un lieu de pèlerinage, jusqu’à ce que les Normands détruisissent le monastère (il sera reconstruit ailleurs près de deux-cents ans plus tard), ce qui fut, comme nous l’avons dit plus haut, l’occasion du transfert de ses reliques dans l’église Saint-Michel de Beauvais.
La ville de Beauvais, en revanche, fut protégée du pillage et de la destruction des Normands, et depuis lors, Sainte Angadrême est la patronne principale de la ville (et la patronne secondaire du diocèse de Beauvais-Noyon-Senlis).

   Cette protection se fit sentir d’une manière toute particulière lors de la guerre de Cent-Ans. En 1472, Beauvais fut assiégée par plus de 80.000 Bourguignons (alliés des Anglais), conduits par Charles le Téméraire.
La ville est à toute extrémité, les assiégés sont épuisés. C’est alors que les jeunes filles de Beauvais courent à l’église Saint-Michel et se chargent de la châsse de Sainte Angadrême qu’elles portent en procession sur les remparts : à cette vue, le courage renaît et une force quasi surnaturelle saisit les défenseurs : une ardeur guerrière s’empare des femmes elles-mêmes et, au plus fort du combat, au moment où un soldat bourguignon va planter son étendard sur le sommet du rempart où il vient de parvenir, une jeune fille, Jeanne Laîné (ou Laisné), l’abat avec une hachette. L’étendard bourguignon tombe dans le fossé, les défenseurs sont galvanisés et reprennent l’avantage.
Repoussés de toutes parts, les Bourguignons s’enfuient, laissant plus de 3.000 cadavres ou blessés, tandis qu’on ne déplore la perte que de 80 combattants parmi les Beauvaisiens, convaincus que la protection de Sainte Angadrême a été leur salut.

Jeanne Laîné ne sera plus désormais appelée que Jeanne Hachette.
Louis XI ordonna que chaque année, le dimanche le plus proche du 27 juin (jour de cette victoire), fut célébrée une procession solennelle pour rappeler la protection de Sainte Angadrême et la mémoire de l’héroïque Jeanne Hachette.

Cette procession fut accomplie jusqu’à la révolution qui l’abolit. Rétablie en 1805, elle fut supprimée par la « monarchie de juillet », à nouveau rétablie après la révolution de 1848 jusqu’en 1885 où les lois anti-catholiques de la république vont d’abord entraîner la dissociation (un cortège laïc nommé « fête de Jeanne Hachette » d’une part, et la procession religieuse avec la châsse de Sainte Angadrême d’autre part) puis la disparition pure et simple de la procession religieuse après les lois dites de « séparation ».

La procession de la châsse de Sainte Angadrême le 27 juin 1472 et l'héroïsme de Jeanne Hachette

Les jeunes filles de Beauvais portant la châsse de Sainte Angadrême le 27 juin 1472
et l’héroïsme de Jeanne Hachette
(détail d’un tableau de la chapelle de Sainte Angadrême dans la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais)

frise fleurs de lys

Prière à Sainte Angadrême
pour lui demander
la fidélité dans notre quête de la perfection

   Nous recourrons à vous, puissante Sainte Angadrême, et nous vous supplions de nous assister de vos prières dans les nécessités de notre vie chrétienne :
- dès votre enfance, vous avez compris qu’il ne fallait rien préférer à l’amour de Jésus-Christ et vous êtes demeurée inébranlable dans votre résolution malgré les oppositions qu’elle rencontrait : aidez-nous à demeurer fidèles à nos devoirs de chrétiens, aux promesses de notre baptême, à nos engagements de piété et de charité, aux exigences de notre devoir d’état, et, ainsi, à croître chaque jour dans la pratique de l’amour de Dieu ;

- vous avez préféré sacrifier votre beauté et une situation enviée plutôt que de renier vos engagements : enseignez-nous à être généreux dans la pratique des renoncements qui s’imposent pour demeurer fidèles aux exigences de notre vocation chrétienne ;
- vous avez vécu humblement les vertus évangéliques dans l’obscur quotidien de la vie monastique : apprenez-nous à être fidèles dans les petites choses que nous imposent nos devoirs de chaque jour, en les accomplissant avec beaucoup d’exactitude et sans lassitude, avec l’esprit qui convient aux actions héroïques les plus éclatantes ;
- vous avez combattu les flammes de l’incendie par la prière et la foi dans l’intercession des saints : communiquez-nous votre ardeur pour nous opposer aux flammes des passions mauvaises et à la contagion du mal ;
- vous avez entendu les prières et les supplications de ceux qui criaient vers vous à l’heure du péril : soutenez notre espérance et fortifier notre confiance pour que nous ne nous découragions jamais, et puissions parvenir au bonheur éternel du ciel en votre compagnie et celle de tous les saints, dans la vision de Dieu Notre-Seigneur !

Ainsi soit-il.

(prière composée par Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur)

Tableau de la procession de la châsse de Sainte Angadrême - détail

2022-103. Où, à l’occasion du quinzième anniversaire de ce blogue, on voit y intervenir un nouveau contributeur.

Mardi 4 octobre 2022,
Fête de Saint François d’Assise, confesseur ;
Mémoire de Saint Ammon de Nitrie, abbé et confesseur ;
Mémoire de Sainte Aure de Paris, vierge et abbesse.

Tolbiac article 4 octobre - 1

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

    La fête de Saint François d’Assise a semblé à mon « papa-moine » une bonne date pour que je commence à mettre le pied à l’étrier, ou, pour être plus exact, la patte au clavier : car oui, c’est bien moi, Tolbiac, dont vous avez appris l’arrivée au Mesnil-Marie à la mi-mai (cf. > ici) et que vous avez vu grandir (cf. > ici), qui vous rejoins en ce jour à travers un premier article sur ce blogue.

   Frère Maximilien-Marie m’y prépare depuis déjà plusieurs jours, et, même si je suis particulièrement intrépide et audacieux pour escalader les arbres et les rayonnages des bibliothèques, pour aller me promener sur le toit ou pour étendre autour du Mesnil-Marie le périmètre de mes explorations, la perspective de cette première publication ici m’a fait éprouver un peu de crainte. Je sais, en effet, que les lecteurs du Blogue du Mesnil-Marie sont, pour beaucoup, de fins lettrés, des personnes savantes et sages, cultivées et intelligentes, et je me demande ce que vous allez penser de mes pauvres balbutiements de chroniqueur…

   Ma formation n’est pas achevée : j’ai encore beaucoup à apprendre, et je ne prétends pas égaler un jour la maestria, la verve et la grande science de feu Monseigneur le Maître-Chat Lully. Ce blogue restera d’ailleurs toujours son blogue : je ne le remplace pas, je lui succède.
Humblement.

   J’implore d’ailleurs votre indulgence, et je sollicite autant votre charitable patience que votre bienveillante aménité envers mes éventuelles maladresses et mes imperfections. 

Tolbiac article 4 octobre - 2

   Ces derniers temps, j’ai voulu me pénétrer de l’esprit le plus authentique que le Maître-Chat Lully a donné à ce blogue. Je me suis donc attaché à en lire, chronologiquement, un à un, chacun des articles.
Savez-vous que, lors de ce mois de septembre 2022, le « Blogue du Maître-Chat Lully » a accompli quinze années d’existence ?
Au cours de ces quinze années ce sont 1655 articles qui ont été publiés et un peu plus de 4.069.000 visites qui ont été comptabilisées.
J’en suis tout impressionné, et ce vertige que je n’éprouve pas le moins du monde en escaladant les grands noyers qui poussent autour du Mesnil-Marie, il vient me saisir à la pensée de la responsabilité que Frère Maximilien-Marie fait peser sur mes épaules !

Tolbiac article 4 octobre - 3

    Je viendrai ici de temps en temps, pour commencer en douceur, vous raconter la vie au Mesnil-Marie.
Puis, au fur et à mesure de mes études et approfondissements, j’essaierai d’avoir les mots justes pour vous faire part de mes réflexions sur la société des hommes et sur ce qui se passe dans la Sainte Eglise, pour laquelle, avec le talent que le Bon Dieu a donné aux chats et toute l’ardeur de ma jeunesse, je veux ronronner en parlant de ses incroyables trésors de sainteté et de beauté, mais aussi sortir des griffes acérées pour en défendre la Sainte Tradition, la doctrine authentique et la liturgie multiséculaire.

   Je vous parlerai aussi de politique, bien évidemment puisque, je suis un légitimiste convaincu et militant, qui n’aspire qu’à faire davantage connaître et aimer la royauté capétienne traditionnelle – monarchie de droit divin – et ses principes, incarnés aujourd’hui en un Prince qui est l’aîné des descendants de Hugues Capet, de Saint Louis, d’Henri IV et de Louis XIV : Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XX.

Tolbiac article 4 octobre - 4

    Voici donc mon programme, mes bien chers Amis.
Cela n’a rien à voir avec un « programme électoral », puisque je ne cherche en aucune manière l’obtention de suffrages ni l’approbation des foules. J’agirai selon ce que j’ai dit, sans me préoccuper de plaire ou non à une « majorité », mais uniquement soucieux d’être en conformité avec ce que notre divin Créateur a révélé, félinement et souverainement libre dans la cohérence de l’obéissance à la Tradition catholique et royale, dans la pleine adhésion aux desseins de Dieu sur Son Eglise et sur Sa France !

Que Notre-Seigneur Jésus-Christ et Sa Très Sainte Mère, Notre-Dame de Compassion, vous bénissent et vous gardent.

pattes de chatTolbiac.

Tolbiac article 4 octobre - 5

2022-92. Soyons des Mousquetaires spirituels !

Mercredi 24 août 2022,
139ème anniversaire de la sainte mort de Henri V, « Comte de Chambord ».

Domine salvum fac Regem - fresque au dessus de l'orgue de la chapelle royale à Versailles

« Domine, salvum fac Regem ! »
au-dessus de l’orgue à la voûte de l’abside de la Chapelle Royale de Versailles

Blason de la Confrérie Royale

2015 – 25 août – 2022

septième anniversaire de la fondation
de la
Confrérie Royale

Bien chers membres et amis de la Confrérie Royale,

   Ce 25 août 2022 marque donc le septième anniversaire de la fondation de notre si chère Confrérie Royale : l’usage associe au septième anniversaire des personnes l’expression d’ « âge de raison », et j’espère qu’il en est bien ainsi pour cette Confrérie dont les membres s’engagent solennellement, et certains par un vœu – ce qui est loin d’être anodin – à prier quotidiennement, et plusieurs fois par jour, pour notre Roi légitime, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XX.

   Qu’il me soit permis, en ma qualité de cofondateur de la Confrérie (mais ce titre de « cofondateur » n’est pas un motif d’orgueil, car nous avons bien conscience que nous avons été mus et poussés par une inspiration et une détermination qui ne sont pas de notre fait, mais nous poussent à n’être toujours davantage que d’humbles et dociles instruments entre les mains de la divine Providence), de vous renvoyer à l’annonce que j’en avais faite dans le modeste « Blogue du Mesnil-Marie » le 25 août 2015, et de vous inviter avec une certaine insistance à relire la présentation de Monsieur l’Abbé Louis de Saint-Taurin qui y était publiée et qui a marqué le commencement de cette aventure (voir > ici).
   Il est important que nous revenions souvent aux fondamentaux de ce qui nous anime et que nous en ravivions la ferveur et l’enthousiasme des débuts !
   Il est important que nous nous efforcions de lutter, de toutes les manières possibles, contre les habitudes qui ont tendance à se transformer en ronronnements affadis et en routines mortifères !
   Il ne serait pas superflu qu’à l’occasion de ce septième anniversaire de notre fondation, chacun des membres de la Confrérie, dans son cœur, en présence de Dieu Trois Fois Saint, en présence de notre très douce Mère et Reine – Notre-Dame de l’Assomption -, et en présence des Saints protecteurs de la France, renouvelle son engagement, et prie pour qu’en lui le sel ne s’affadisse pas, afin de ne pas mériter d’être jeté dehors et foulé aux pieds par les passants (cf. Matth. V, 13).

   Je reviens maintenant sur le mot principal qui se trouve dans l’expressions « âge de raison » : notre attachement à la Monarchie capétienne traditionnelle de droit divin, et à Celui qui aujourd’hui en incarne les Principes, c’est-à-dire l’Aîné des Capétiens, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, n’est pas un attachement de sensiblerie ni de sentiment ; il est fondé dans des faits solides, attestés par l’histoire la plus certaine, et dans une logique rationnelle imparable qui découle de ces événements, qui ne sont pas de fumeuses légendes.

   Quels sont ces événements ?
-         C’est la fondation de la Royauté franque indissociablement unie à la foi catholique romaine, en la personne de Clovis, entouré de saints et de circonstances où il est impossible de ne pas voir le doigt de Dieu : Sainte Geneviève et Sainte Clotilde, Saint Remi et Saint Vaast, la miraculeuse victoire de Tolbiac et le don surnaturel du Chrême céleste apporté par une colombe qui n’était pas de la terre, pour ne citer que les principaux.
-         C’est la manière dont Dieu a suscité tout au long de l’histoire des deux premières races de nos Rois, des nuées de saints, dont la prière et les sacrifices ont, malgré les infidélités et les péchés malheureusement liés à nos vies humaines grevées par l’héritage d’Adam, enraciné en profondeur la foi chrétienne et sa pratique assidue dans ce Royaume des Lys.
-         C’est enfin l’aboutissement et la plénitude apportées par les Capétiens qui ont fait de la Royauté franque la plus achevée, la plus équilibrée, la plus sage et la plus rayonnante de toutes les monarchies, montrée en exemple et soutenue par les exhortations des plus grands hommes de Dieu.
-         C’est la geste johannique qui vint, en un temps de crise et de désarroi profond, faire briller au sommet du firmament les principes de la Légitimité, leur conférant un éclat incomparable pour la suite des siècles !
-         C’est aussi, a contrario, l’acharnement de tout ce qu’il y a d’impie et de révolté contre l’ordre divin pour détruire cette Monarchie capétienne de droit divin dont la fondation n’appartient pas aux hommes mais à Dieu : la révolution, par ses principes, par ses hommes, par ses actes, et par ce qu’elle a mis en œuvre depuis la fin du XVIIIème siècle et jusqu’à ces jours que nous vivons, prouve de manière évidente combien cette Royauté qu’elle abhorre est de Dieu ! Car ce que la révolution a combattu, en 1789 et en 1830, et depuis à travers toutes les institutions républicaines, ce ne sont pas les imperfections inhérentes à toute société terrestre, mais bien ce que la Monarchie traditionnelle de droit divin avait de plus pur et de plus saint, pour y substituer les faux principes de l’ange révolté et de ses suppôts !

   Les légitimistes d’aujourd’hui ne sont pas des irréalistes perdus dans d’évanescentes rêveries, ne sont pas d’inconsistants nostalgiques des perruques poudrées et des chaises à porteurs, ne sont pas d’inconséquents déconnectés du monde où la Providence a permis qu’ils naquissent : leurs convictions sont enracinées dans ce qu’il y a de plus raisonnable au regard de l’histoire et du plan de Dieu, leur action est ce qui est aujourd’hui de plus conforme à la raison quand on veut bien se donner la peine d’être pleinement cohérent.

   Puisse la lumière immarcescible de cette raison divine et royale non seulement habiter en nous, mais rayonner à travers nous, par notre vie de cohérence totale avec les principes de la Royauté traditionnelle auxquels nous adhérons de tout notre cœur, de toute notre âme et de tout notre esprit !

   Nous sommes indubitablement à une heure grave, très grave, pour la France, pour l’Eglise, pour l’humanité tout entière.
C’est l’heure de la puissance des ténèbres.
C’est l’heure où les forces du mal sont coalisées dans un assaut peut-être jamais vu encore dans l’histoire humaine pour achever le triomphe de la révolution.
C’est l’heure où ceux qui veulent être du côté de Dieu et de Sa loi, du côté de Ses desseins de salut, du côté de Ses projets miséricordieusement grandioses sur la France à travers l’institution et la conservation de sa Royauté sacrée, ne doivent pas s’assoupir, mais redoubler de générosité et de zèle, redoubler de ferveur et de don d’eux-mêmes, redoubler de vigilance et d’ardeur au combat !

   Il se trouve que cette année 2022 est aussi celle du quatrième centenaire de la création, par SM le Roi Louis XIII, de la Compagnie des Mousquetaires du Roi.
Je ne vais pas entreprendre ici une histoire, même résumée, de ce que fut ce corps d’élite. Nous essaierons toutefois de nous extraire des fantaisies romanesques par lesquelles le génial Alexandre Dumas a conféré une aura légendaire à ces soldats, en prenant malheureusement des libertés coupables avec l’histoire, pour nous attacher à la réalité :

-         Les Mousquetaires étaient un corps d’élite : nous devons aspirer à l’être nous aussi !
-         Les Mousquetaires étaient prioritairement au service de la Personne auguste du Souverain : nous devons l’être aussi !
-         Les Mousquetaires étaient réputés pour leur intrépidité, leur vaillance, leur courage : nous devons l’être aussi !
-         Les Mousquetaires ne se ménageaient pas : nous ne le devons pas non plus !
-         Les Mousquetaires se sont distingués en de nombreuses batailles : distinguons-nous aujourd’hui dans les batailles qu’il faut soutenir pour Dieu et pour le Roi !
-         Les Mousquetaires étaient des hommes au mérite reconnu : que nos exemples de fidélité et d’exactitude dans l’accomplissement de nos devoirs de bons et authentiques catholiques, et de loyaux sujets de Sa Majesté soient notre meilleure recommandation !

   Oui, chers membres de la Confrérie Royale, soyons aujourd’hui, et chaque jour, ces Mousquetaires spirituels qui luttent par la prière, la pratique fervente des sacrements et l’usage assidu des sacramentaux que la Sainte Eglise met à notre disposition, et qui tiennent à distance de la Personne aimée de notre Souverain légitime, tout ce qui cherche à Lui nuire et à entraver Son action.

Domine, salvum fac Regem nostrum Ludovicum !
Domine, salvum fac Regem,
et exaudi nos in die qua invocaverimus Te !

   Je vous souhaite à tous un joyeux et saint anniversaire, puisque nous sommes les membres du corps spirituel de la Confrérie Royale,

Vôtre, in Corde Iesu & Mariae.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

Mousquetaires du Roi

2022-91. « Pour moi, héritier de la longue lignée des Rois de France c’est un devoir d’encourager ceux qui défendent l’histoire, la tradition, la vérité et les valeurs qui sont les leurs… »

Dimanche 21 août 2022,
Onzième dimanche après la Pentecôte ;
Mémoire de Sainte Jeanne-Françoise de Chantal.

frise lys

   Depuis 2019 (cf. > ici et > ici) s’est formé un Comité du souvenir des victimes de la révolution en Midi toulousain qui organise désormais tous les ans une journée commémorative, à Montréjeau, lieu d’une bataille qui marqua la fin de l’insurrection royaliste dans le sud-ouest et fut l’occasion du massacre de plusieurs milliers de royalistes et catholiques.
A l’occasion de cette quatrième journée commémorative, qui a eu lieu hier, samedi 20 août 2022, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté le Roi Louis XX, a adressé un message aux participants dont la teneur, au-delà des organisateurs de la journée commémor
ative de Montréjeau, constitue un chaleureux encouragement à tous ceux qui œuvrent pour rétablir la vérité historique sur la grande révolution, à tous ceux qui résistent à l’esprit de la révolution toujours à l’œuvre de nos jours dans l’institution républicaine, à tous les défenseurs de la tradition catholique et française…

Louis XX

Chers Amis,

   1799-2022, les années n’estompent pas le souvenir du massacre de Montréjeau qui a vu l’assassinat de milliers de braves animés par leur volonté de préserver leur terre et au-delà de sauver leur pays de la folie révolutionnaire. Vos aïeux avaient vu juste. Ils avaient compris que si la France rompait avec sa tradition, rompait avec ses institutions, rompait avec sa foi, une période de troubles et de malheurs pour tous s’en suivrait. 

   Plus de deux siècles après, force est de constater que les ravages causés par la Révolution française sont immenses. La société est ébranlée au plus profond d’elle-même puisque nombre de ses repères ont été peu à peu remis en cause. La France a souvent du mal à se reconnaître dans l’image que certains véhiculent d’elle, car, et peut-être est-ce là le plus grand crime de la Révolution, elle a été forcée de rompre avec son histoire et sa mémoire ; forcée d’oublier se grandeur et sa gloire au risque d’être fragilisée face à ses ennemis ! Les évènements de Montréjeau, en 1799, en sont la preuve puisque durant des dizaines d’années ce massacre a été occulté. Sans doute, pour une part, parce que la France officielle d’alors en avait honte, mais encore plus parce qu’il y avait une volonté de réécrire l’histoire, pour donner raison aux vainqueurs. Travestir l’histoire et la vérité à des fins de propagande !

   Mais la mémoire conservée dans les familles, a fini par ressurgir permettant des journées telles que celle d’aujourd’hui. Des historiens honnêtes avaient dans les dernières décennies, ouvert le chemin à une relecture scientifique et non plus seulement idéologique de la Révolution n’hésitant plus à mentionner aussi ses crimes. Pourtant ce salutaire mouvement n’a pas duré. Au contraire, nous assistons à d’autres travestissements de l’histoire. Depuis quelques années, venu des Etats-Unis, un nouveau danger est apparu, visant toujours à trahir la vérité historique, mais cette fois avec, en plus, la volonté clairement exprimée de gommer l’héritage des siècles. Cela prend des formes diverses mais repose sur le mensonge et l’objectif de taire l’identité de notre pays en le coupant de ses racines. Cette culture de l’oubli est grave puisqu’elle ampute notre pays de la compréhension de sa longue destinée commencée il y a quinze siècles avec le baptême de Clovis.
 
   Heureusement la résistance s’organise. Il y a un peu partout en France de salutaires sursauts et des Français qui continuent à exalter le souvenir des générations qui les ont précédés C’est la société civile qui œuvre en ce sens devant les carences de l’état. L’exemple de la réunion de Montréjeau s’inscrit dans cette volonté. J’en félicite les organisateurs. Les manifestations mémorielles prennent une importance accrue. Il ne s’agit plus seulement d’honorer des morts qui n’ont pas hésité à aller jusqu’au sacrifice pour défendre leurs convictions, mais il s’agit de rappeler ce qu’est la France, son identité, son destin fruit du travail des générations passées qui toutes ont apporté leur pierre à l’édifice.
 
   Pour moi, héritier de la longue lignée des Rois de France c’est un devoir d’encourager ceux qui défendent l’histoire, la tradition, la vérité et les valeurs qui sont les leurs. C’est ainsi, sur des fondements solides, que la France pourra écrire, demain, de nouvelles pages de son histoire.
Ainsi d’ores et déjà, c’est à l’an prochain que je vous donne rendez-vous. Les martyrs de Montréjeau ne sont pas morts en vain. Leur sacrifice nous montre la voie de l’espérance. Continuez ! 

Louis,
Duc d’Anjou

montrejeau affiche 2022

2022-89. Prédication de Monsieur l’Abbé Christian-Philippe Chanut à l’occasion de la fête de l’archange Saint Michel.

17 août,
Dans l’Ordre de Saint-Augustin, la fête de Sainte Claire de Montefalco, vierge ;
Mémoire de Saint Carloman, fils aîné de Charles Martel et frère de Pépin le Bref, confesseur ;
Mémoire de Saint Hyacinthe, confesseur ;
Mémoire de Sainte Jeanne de la Croix, vierge ;
Mémoire du 3ème jour dans l’octave de l’Assomption ;
Anniversaire du rappel à Dieu de Monsieur l’Abbé Christian-Philippe Chanut (+ 17 août 2013).

Abbé Chanut et Duchesse d'Anjou et de Ségovie

Madame la Duchesse d’Anjou et de Ségovie accompagnée de Monsieur l’Abbé Chanut
en 1995 à l’occasion d’une cérémonie royale commémorative

frise lys

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

   A l’occasion de l’anniversaire du rappel à Dieu de Monsieur l’Abbé Christian-Philippe Chanut, notre ami regretté (cf. > ici), Grand Aumônier de France et fondateur des Compagnons de Saint Michel archange, nous avons la joie de vous proposer l’enregistrement de l’une de ses prédications, dans laquelle il commente la péricope évangélique Jean I, 45-51.
C’est le passage où l’apôtre Philippe vient trouver Nathanaël pour lui dire « nous avons trouvé le Messie » : Monsieur l’Abbé développe donc plusieurs points de réflexion au sujet de Nathanaël, futur apôtre Saint Barthélémy, avant d’arriver à l’archange Saint Michel, puisque la conclusion de la présentation de Nathanaël à Jésus se termine sur cette sentence de Notre-Seigneur : « En vérité, en vérité, Je vous le dis : vous verrez le ciel ouvert, et les anges de Dieu monter et descendre au-dessus du Fils de l’homme ».
En effet, ce qui nous est donné d’entendre ici avec bonheur est une homélie prononcée à l’occasion de la fête de Saint Michel archange, en 2002. 

   Il est émouvant de retrouver la voix de notre ami dans cet enregistrement, et nous sommes plein de reconnaissance envers les éditions Exaltare de l’avoir mis en ligne il y a tout juste une semaine.

(faire un clic droit sur l’image ci-dessous, puis : ouvrir dans un nouvel onglet)

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Saint Michel gif

2022-82. Nous avons lu et nous avons aimé : « Elévations sur Sainte Magdeleine », par Pierre cardinal de Bérulle.

22 juillet,
Fête de Sainte Marie-Magdeleine, pénitente (cf. > ici).

Pierre de Bérulle par Philippe de Champaigne

Pierre, cardinal de Bérulle (1575-1629)
par Philippe de Champaigne

        Le XVIIème siècle en France, ce « grand siècle des âmes » comme l’a si pertinemment nommé l’abbé Brémond, a nourri une extraordinaire dévotion envers Sainte Marie-Magdeleine« la Magdeleine » comme on l’appelait souvent -, au point que certains auteurs estiment qu’elle constitue la figure spirituelle qui, après la Très Sainte Mère de Dieu, a inspiré le plus de panégyriques, ouvrages de piété et tableaux de dévotion en France au XVIIème siècle.
A cela, le Cardinal de Bérulle n’est pas étranger : il nourrissait une profonde dévotion envers la célèbre pénitente et il sut la communiquer à ses disciples, à ses contemporains et aux ecclésiastiques et fidèles des décennies qui suivront sa mort, à toute l’Ecole française de spiritualité. L’un des derniers ouvrages qu’il publia, en 1627, l’année même où il fut créé cardinal par le pape Urbain VIII, est un ouvrage petit par la taille mais immense par la profondeur spirituelle et le retentissement qu’il aura (cet ouvrage a été très régulièrement réédité jusqu’à nos jours) intitulé « Elévations sur Sainte Magdeleine – Elévation à Jésus-Christ, Notre-Seigneur, sur la conduite de Son Esprit et de Sa grâce envers Sainte Magdeleine, l’une des principales de Sa suite, et l’une des plus signalées en Sa faveur et en Son Evangile ». A peine deux ans plus tard, le 2 octobre 1629, Pierre de Bérulle mourra subitement en célébrant la Sainte Messe, âgé de seulement 54 ans. Il n’y a rien d’exagéré à voir dans les « Elévations sur Sainte Magdeleine », une sorte de testament mystique du grand cardinal français.

   Un érudit a présenté cet opuscule en ces termes : « Ces pages sont moins d’un théologien féru d’exégèse que d’un croyant ramassé dans la solitude de son âme et transporté par la contemplation de cet amour inouï qui lie la pécheresse Madeleine au Fils de Dieu. Bérulle scrute l’abîme de ce mystère non pour le réduire au fil de l’analyse des textes, mais pour s’en emplir jusqu’à la saturation extatique. Cette Élévation est peut-être ce qui fut écrit de plus transcendant sur la relation d’amour entre la femme et Dieu. Elle reste, dans les lettres françaises, un exemple sublime de prose poétique et mystique, sur le mode fusionnel de l’identification amoureuse. Madeleine n’est pas un personnage anecdotique, elle a la grandeur d’un symbole de l’âme, incarné dans une figure dont la nécessité ne s’épuisera jamais. (…)  Comme le titre d ‘élévation le présuppose, une grande partie de ce texte s’adresse au Christ dans la louange pour ce que sa grâce a réalisé en cette femme par son amour. C’est aussi une sorte de cantique ou de poème, la forme y joue le plus grand rôle. Bérulle suit la tradition qui ne voit qu’une seule femme dans la pécheresse du repas chez le pharisien (mais il croit pouvoir affirmer que si elle était pécheresse, elle n’était pas une prostituée), dans celle dont le Christ avait fait sortir sept démons, dans la sœur de Lazare, dans l’une des femmes qui se tenaient au pied de la croix et naturellement dans celle qui revoit la première le Christ après sa résurrection. Il fait sienne la légende qu’elle ait vécu encore trente ans dans un désert, à la Sainte Beaume, pour connaître à son tour dans sa communion le temps de l’incarnation du Christ : «trente ans d’une vie où vous ne faites que vivre et mourir par amour ». Quoiqu’il ne s’agisse jamais chez Bérulle de « mystique nuptiale », il admire sans réserve et élève cette femme pour l’absolu don de soi où elle répond à l’amour infini du Christ par son amour pur, un amour d’abnégation, sans aucune trace d’amour-propre. N’est-elle pas l’exemple même du mystique, l’objet le plus éminent d’une grâce ineffable ? C’est pourquoi elle est sainte, modèle et intercesseur. La dernière phrase de l’œuvre témoigne et de l’argument et de la beauté un peu maniérée du style : « Celui qui l’a comblée de tant de merveilles, daigne nous rendre dignes de le reconnaître et révérer en elle et de la reconnaître et trouver en lui ; car c’est honorer Jésus que de connaître ses œuvres en cette âme, et la bien connaître que de reconnaître ce qu’elle est à Jésus et ce que Jésus a voulu être en elle. Soyons à elle par nos devoirs, et par ses prières soyons à Jésus pour jamais » (M. Chevallier, cf. « Persée » > ici).

   Le cardinal de Bérulle a voulu dédicacer cet opuscule à S.M. la Reine Henriette-Marie de France, épouse de S.M. le Roi Charles 1er d’Angleterre, dont il avait été l’aumônier pendant la première année qui suivi son mariage (13 juin 1625). L’ouvrage est, de fait, la mise par écrit d’un discours qu’il lui avait tenu.

   On ne résume pas cet ouvrage qui se savoure à la fois dans la magnificence de la forme et l’extraordinaire richesse spirituelle du fond.

Charles Le Brun - Madeleine renonçant aux vanités du monde

Magdeleine se dépouillant de ses richesses
par Charles le Brun

   En 1650, l’abbé Edouard Le Camus, dont la conversion et la vocation avaient été provoquées par les écrits de Bérulle, obtint des Carmélites de la rue d’Enfert (aujourd’hui rue Saint Jacques) la concession d’une chapelle dans leur église conventuelle. Il destinait cette chapelle au cénotaphe du cœur du Cardinal de Bérulle dont il passa commande au sculpteur Jacques Sarazin. Au-dessus de l’autel de cette chapelle fut placé un tableau commandé à Charles Le Brun (réalisé entre 1654 et 1657), dont on voit ci-dessus une photographie.
Toute le décor peint de la chapelle était aussi confié à Le Brun et à ses collaborateurs : il représentait les principaux épisodes de la vie de la sainte. Un vitrail montrait la mort de la Magdeleine, et le décor du plafond comprenait des anges, et peut-être une apothéose de la sainte. 

   Le sujet de la Magdeleine se dépouillant de ses richesses était plus commun pour les tableaux de dévotion, dans des lieux privés, que pour des tableaux d’autel. Le Brun a donné au sujet une véritable monumentalité et une grande intensité d’expression, avec un coloris tricolore déroutant.
Face à l’autel se dressait le cénotaphe renfermant le cœur de Bérulle, volumineux monument en marbre blanc représentant le cardinal à genoux légèrement penché vers l’avant, et tenant dans une main la barrette qu’il venait respectueusement d’ôter de sa tête. Il semble en mouvement, le visage tendu vers la représentation de la conversion de Marie-Magdeleine figurée sur l’autel :  le peintre et le sculpteur ont donc conjugué leurs talents et leurs arts respectifs pour instaurer une espèce de dialogue entre sculpture et peinture, qui matérialise en quelque manière les « Elévations sur Sainte Magdeleine ».
La dédicace du monument, gravée sur le socle, peut se traduire ainsi : « Pierre de Bérulle, prêtre, cardinal, fondateur de la congrégation de l’Oratoire de Jésus en France, et modérateur dans le même pays des Carmélites déchaussées, homme de très noble naissance, de génie élevé, de très haute piété, dont la vie et la mort furent illustres par l’abondance et la plénitude de la sainteté, ne repose pas ici. Mais ici, tant qu’il vécut, en priant, il se prosterna très souvent, fervent dévot de Sainte Marie-Magdeleine, et Dieu miséricordieux devant le placer au ciel, a confié son corps à sa congrégation, son cœur aux vierges de cette maison, et son esprit aux ordres des chérubins et des séraphins qui sont glorifiés en cette assemblée. Ce monument à un si grand homme de si sainte mémoire a été posé par son fils très affectionné dans le Christ, le prêtre Édouard Le Camus, 1657″.

   En 1792, tableaux et cénotaphes furent ôtés de la chapelle et, après diverses péripéties, ont fini par être déposés au Louvre. De nos jours, le tableau de Le Brun qui ornait l’autel et le cénotaphe sont tous deux exposés au Louvre-Lens dans une scénographie qui essaie de restituer leur disposition de 1657, mais sans les autres œuvres qui ornaient la chapelle des Carmélites et surtout – hélas ! – sans l’atmosphère sacrée qui les entourait…

Cénotaphe du cœur du cardinal de Bérulle par Jacques Sarazin - Louvre-Lens

Cénotaphe du cœur du cardinal de Bérulle (partie supérieure)
par Jacques Sarazin (Louvre-Lens)

2022-72. « La charité ne pourrait-elle inspirer la restauration de l’unité dans la vérité unique ? »

- 19 juin -

Anniversaire du rappel à Dieu
de

Michel de Grosourdy, marquis de Saint-Pierre
dit
Michel de Saint Pierre
(1916 – 1987)

Michel de Grosourdy de Saint-Pierre dit Michel de Saint Pierre

Michel de Grosourdy marquis de Saint-Pierre, dit Michel de Saint Pierre (1916-1987)

frise

   Ceux qui, comme moi, ont connu la période de « l’après concile » et ont été les témoins consternés de l’espèce de tourbillon qui a tout emporté sous l’effet du vent de folie qui souffla dans les presbytères, sacristies, séminaires, maisons religieuses et évêchés, se souviennent nécessairement aussi de la noble figure de Michel de Saint Pierre, écrivain de renom, qui plaça justement sa renommée au service de la foi catholique dans cette crise sans précédent, et qui, avec autant de fermeté que de pondération, engagea sa plume alerte dans la défense de la Tradition de l’Eglise.
Pour tous les humbles fidèles du rang, et en particulier pour les jeunes gens que nous étions alors, les textes et les prises de paroles de l’écrivain furent tout à la fois un réconfort et un stimulant.

   Lorsque, le 22 juillet 1976, fut rendue publique la sanction décidée par Paul VI contre Son Excellence Monseigneur Marcel Lefebvre pour avoir procédé à des ordinations sacerdotales dans et pour le rite latin traditionnel malgré l’opposition romaine, il se produisit alors une sorte d’onde de choc qui permit à de nombreux fidèles de commencer à prendre conscience du drame de l’autodémolition de l’Eglise, à laquelle ils assistaient, avec douleur, depuis une quinzaine d’années déjà.
   Certains d’entre eux s’étaient déjà posé beaucoup de questions et avaient commencé à réagir ; des prêtres continuaient à célébrer la Sainte Messe latine traditionnelle de manière plus ou moins confidentielle – dans des lieux improbables parfois puisque leurs églises ou chapelles leur étaient interdites -; des mouvements s’organisaient de manière plus ou moins structurée ; et les langues se déliaient…
   Nous n’avions évidemment pas alors le recul qui est aujourd’hui le nôtre, et, dans l’ensemble, nous espérions que le Souverain Pontife et les autorités romaines, animés d’une véritable « bonne volonté » et d’une « sincère bienveillance » envers la liturgie traditionnelle et les fidèles qui lui étaient attachés, voudraient ouvrir les yeux et mettre fin au flot destructeur. A la vérité, nous n’imaginions pas, nous ne pouvions pas imaginer – c’était naïveté sans doute -, que ceux qui se présentaient comme nos pères dans la foi donneraient des pierres aux enfants qui leur demandaient du pain… Voilà pourquoi, lorsque le 9 août 1976, des intellectuels français entrainés par Michel de Saint Pierre publièrent une lettre ouverte au pape Paul VI en faveur de Monseigneur Lefebvre et de la Messe traditionnelle, dans l’ensemble, nous espérions un apaisement, dans la charité et la vérité.
Las ! Nous avons bien vu depuis combien cette espérance filiale était illusoire.

   Il reste que cette lettre des intellectuels français à l’adresse de Paul VI reste un document historique important pour l’histoire des combats de la Tradition catholique, et que, même si aujourd’hui nous ne pouvons plus souscrire entièrement à certaines de ses affirmations, il nous semble important de la relire : l’anniversaire de la mort de Michel de Saint Pierre nous en fournit une juste occasion.
Et pourquoi cet anniversaire ne nous redonnerait-il pas le goût de nous replonger dans l’œuvre engagée, et par certains côtés prophétiques, de cet écrivain à la foi exemplaire ?

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur 

frise

Très Saint-Père,

   Les sanctions qui viennent d’être prises contre Mgr Lefebvre et son séminaire d’Ecône ont créé une grande émotion en France. Bien au-delà des traditionalistes proprement dits, c’est la foule immense des catholiques français qui se sont sentis touchés.
Depuis des années, ils s’inquiètent de l’évolution de leur religion. Ils ne disent rien, n’ayant aucune qualité pour parler. Simplement, ils s’éloignent. C’est le cardinal Marty lui-même qui nous a récemment révélé que, de 1962 à 1975, la pratique dominicale avait baissé de 54 % dans les paroisses parisiennes. Pourquoi ? Parce que les fidèles ne reconnaissaient plus leur religion dans certaine liturgie et certaine pastorale nouvelles.
Ils ne la reconnaissent pas davantage dans le catéchisme qu’on enseigne maintenant à leurs enfants, dans le mépris de la morale élémentaire, dans les hérésies professées par des théologiens écoutés, dans la politisation de l’Evangile.

   Ils avaient accueilli le Concile avec joie parce qu’ils y avaient vu l’annonce d’un rajeunissement, une certaine souplesse apportée à des structures et à des règles que le temps avait peu à peu durcies, un accueil plus fraternel à tous ceux qui cherchent la vérité et la justice sans avoir encore le bénéfice du grand héritage de l’Eglise. Mais ce qui est advenu n’a pas répondu à leur attente. Ils ont l’impression désormais d’assister au sac de Rome. N’est-ce pas vous-même, très Saint-Père, qui avez parlé de l’autodémolition de l’Eglise? Le fait est qu’en France cette autodestruction bat son plein — et nous en sommes les témoins.

   De Mgr Lefebvre et du séminaire d’Ecône, ces catholiques du rang connaissaient fort peu de chose. Mais ce qu’ils en apprenaient peu à peu par les journaux, la radio et la télévision leur était plutôt sympathique. Mgr Lefebvre avait passé le plus clair de sa vie dans une activité de missionnaire, il avait été délégué apostolique en Afrique. Votre prédécesseur, le Pape Jean XXIII, qui l’estimait beaucoup et l’aimait bien, l’avait nommé membre de la Commission centrale de préparation du Concile. Il avait formé des générations de séminaristes ; parmi les prêtres issus de ses séminaires, quatre sont devenus évêques et c’est vous-même qui aviez fait cardinal l’un d’entre eux, Mgr Thiandoum. Comment un tel évêque qui, toute sa vie, a servi l’Eglise de manière insigne pourrait-il y être soudainement un étranger ? N’est-il pas plutôt l’évêque dont Vatican II semble avoir tracé le portrait : un évêque fort dans la foi, orienté vers la mission, ouvert au monde à évangéliser ? Désolé de la ruine des séminaires français et convaincu que les vocations ne manquaient pas chez les jeunes, il a ouvert un séminaire qui, strictement fidèle aux normes mêmes de Vatican II et de la Congrégation de l’éducation catholique, proposait à ceux qui voulaient y entrer une vie de prière, d’étude et de discipline. Aussitôt les candidatures ont afflué et le séminaire s’est rempli. La très grande majorité de ces catholiques du rang dont nous parlons savent aujourd’hui tout cela.

   L’unité de l’Eglise est l’argument que nous voyons partout mis en avant pour justifier les mesures sévères prises contre Ecône. Mais, très Saint-Père, que le petit noyau d’Ecône soit écrasé, et la division s’aggrave encore ! Car la division n’est pas entre Mgr Lefebvre et les autres évêques français. Elle est au sein même de l’Eglise hiérarchique. Il existe actuellement autant de rites, autant de pratiques, autant d’opinions qu’il y a d’églises, de prêtres, de communautés, de groupes et de groupuscules. C’est le pullulement de ces petits schismes intérieurs, c’est cette prolifération de religions particulières qui est la marque de l’Eglise de France car nous ne parlons que pour la France. Et la désobéissance à Rome, au Pape, au Concile éclate dans tout ce qui concerne la liturgie, le sacerdoce, la formation des séminaristes et la foi elle-même. D’étranges messes — parfois œcuméniques —, et qui n’ont rien à voir avec la messe de Paul VI, sont célébrées un peu partout dans la plus parfaite impunité. Toute « célébration eucharistique » serait-elle permise sauf la messe traditionnelle ? Toute église pourrait-elle être ouverte aux musulmans, aux israélites, aux bouddhistes et fermée aux seuls prêtres en soutane ? Tout dialogue serait-il bienvenu avec les francs-maçons, les communistes, les athées et condamnable avec les traditionalistes ? La hiérarchie, en France, tiendrait-elle davantage à imposer un certain esprit nouveau qu’à annoncer et à défendre les vérités de la foi ?

   Voilà, très Saint-Père, ce que finit par se demander le peuple chrétien de la base, que nous évoquons ici. Chaque jour nous apporte les échos — de plus en plus forts, de plus en plus nombreux — de sa stupeur et de son angoisse. C’est pourquoi nous nous tournons vers vous, car vers qui un catholique se tournerait-il, sinon vers le Pape, successeur de Pierre, Vicaire de Jésus-Christ ? Nous déposons à vos pieds notre supplique. Quelle supplique ? Celle de l’amour et du pardon. C’est plutôt une plainte, un gémissement que nous espérons faire monter jusqu’à vous. Nous ne sommes pas versés dans le Droit canonique et nous ne doutons pas que des condamnations romaines aient des assises juridiques. Mais justement le juridique, le légalisme, le formalisme nous semblaient avoir été bannis, dans ce qu’ils peuvent avoir d’excessif, par Vatican II. Ce très grave procès fait à Mgr Lefebvre et à son séminaire ne pourrait-il être reconsidéré ? L’amour que vous éprouvez pour le peuple chrétien de France ne pourrait-il l’emporter sur une rigueur qui, frappant le plus notoire de nos défenseurs de la Tradition, achèverait de traumatiser irrémédiablement ce peuple ? La charité ne pourrait-elle inspirer la restauration de l’unité dans la vérité unique ? Il nous semble même que la messe traditionnelle et le sacerdoce de toujours seraient susceptibles de trouver leur place dans la consolidation et l’extension d’une Eglise qui n’a jamais cessé de garder ses dogmes et ses formes essentielles, à travers ses adaptations successives aux vicissitudes de l’Histoire. Que deviendrait une Eglise sans prêtres et sans messe ?

   C’est par cet acte de confiance, très Saint-Père, que nous voulons témoigner de notre fidélité au Pontife romain, sûrs que nous sommes d’être entendus par le Père de tous les catholiques, détenteur des pouvoirs qui lui ont été remis dès l’origine par le Fondateur pour conduire l’Eglise jusqu’à la fin des siècles.

Michel de Saint Pierre, président du Mouvement « Credo »
Michel Droit,
Louis Salleron,
Jean Dutourd,
Henri Sauguet, 
Colonel Remy, 
Michel Siry, 
Gustave Thibon.

Salle Wagram - haut lieu du combat pour la Messe traditionnelle

La Salle Wagram, un haut lieu emblématique de la résistance à la destruction de la Messe latine traditionnelle,
puisque celle-ci y fut célébrée régulièrement les dimanches, avant la restitution au culte de l’église Saint Nicolas du Chardonnet.

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