Archive pour la catégorie 'Memento'

2023-14. Rétrospectives des publications de ce blogue relatives à Gustave Thibon : 2008-2023.

19 janvier 2023,
22ème anniversaire du rappel à Dieu de Gustave Thibon.

   Depuis la création de ce blogue, à l’automne 2007, nous avons souvent et abondamment cité Gustave Thibon. Il nous a paru au moins utile, sinon nécessaire, de rassembler en une seule page les liens vers tous les articles où nous avons parlé de lui ou bien où nous l’avons cité.

Gustave Thibon lisant

A – Publications biographiques, bibliographiques & souvenirs personnels :

- Résumé biographique > ici
- Parution du livre « Les hommes de l’éternel » (2012) > ici
- Parution du livre « La leçon du silence » (2014) > ici
- Parution du livre « Au secours des évidences » (2022) > ici
- De la discussion la lumière ??? [souvenir d’entretien privé - 1979] > ici
- Le témoignage de Gustave Thibon concernant Simone Weil > ici

B – Textes de Gustave Thibon :

- Analyses spirituelles :

- « Libertés » [extrait de « Diagnostics » – 1940] > ici
- « Dépendance et liberté »
[extrait de « Retour au réel » – 1943] > ici
- « Eloignement et connaissance »
 [extrait de "Retour au réel" - 1943] > ici 
- « Le message de N.D. de La Salette au monde paysan » [publication pour le centenaire de l'apparition - 1946] > ici
- Christianisme et liberté 1ère partie [article de 1952] > ici
- Christianisme et liberté 2ème et 3ème parties [article de 1952> ici
- Christianisme et liberté 4ème et 5ème parties [article de 1952] > ici
- Christianisme et liberté 6ème partie [article de 1952] > ici
- Christianisme et liberté 7ème partie [article de 1952> ici
- L’un et l’unique [in « Notre regard qui manque à la lumière » – 1955] > ici
- L’intemporalité [extrait d’une conférence de 1973] > ici
- Adaptation au monde moderne ? [extrait d’une conférence de 1973ici
- Saint Jean de la Croix [extrait d’une conférence] > ici

- Analyses politiques :

- La révolution une maladie infectieuse [extrait de « Diagnostics » – 1940] > ici
- La révolution essaimage du vice [extrait de « Diagnostics » – 1940] > ici
- La corruption des dirigeants suscite la haine des peuples [extrait de « Diagnostics » – 1940> ici
- La destruction révolutionnaire nie les besoins éternels de l’homme   > ici
- « Ce que je hais dans la démocratie… » [citations d’une conférence de 1971] > ici
- Une cinglante critique de la pseudo démocratie républicaine [in « Entretiens avec Christian Chabanis » – 1975] > ici
- L’essence de la révolution française est d’ordre métaphysique [préface pour un livre du Rd Père Salem-Carrière – 1989] > ici
- « Quel avenir pour l’occident ? »
[cité dans « La leçon du silence » – 2014] > ici

- Poésie :

- « Deus omnium » [in « Offrande du Soir » - 1946] > ici

- Religion :

- « Dieu aura le dernier mot, mais… » [extrait de « L’équilibre et l’harmonie » – 1976] > ici

- Royauté :
Voir ci-dessous dans les entretiens et ci-dessus dans les analyses politiques…

- Sport :

- « Le sport dans la société moderne » [extrait de « L’équilibre et l’harmonie » – 1976] > ici

C – Entretiens avec Gustave Thibon (ou extraits d’entretiens) :

-  Gustave Thibon interrogé sur sa foi [entretien à un hebdomadaire – 1962] > ici
- Eglise et politique [in « Entretiens avec Christian Chabanis » – 1975] > ici
- Réponses de Gustave Thibon aux questions de journalistes, en 1993 > ici
- A propos de ses racines paysannes [
retranscription d’un entretien radiophonique de 1993] > ici
- La monarchie se définit d’abord par sa référence au transcendant [extrait d’un entretien avec Philippe Barthelet] > ici

D – Chroniques du Mesnil-Marie contenant des citations de Gustave Thibon :

- A propos de l’inversion des valeurs dans le monde et dans l’Eglise > ici
- Dans un article d’octobre 2012 > ici
- Dans un florilège de citations en juillet 2013 > ici
- Dans des commentaires d’actualité en août 2013 > ici
- Dans une chronique d’octobre 2013 > ici
- Dans une chronique de la fin novembre 2013 > ici
- Dans un florilège de réflexions et citations de la fin février 2014 > ici
- Dans une chronique de juillet 2014 > ici
- Dans une chronique et un florilège de réflexions de la fin août 2014 > ici
- Dans un ensemble de réflexions incorrectes du début janvier 2016 > ici
- Dans un ensemble de commentaires d’actualité toujours très incorrectes en mars 2017 > ici

Gustave Thibon - une vue du mas de Libian

Une vue du Mas de Libian : propriété ancestrale de la famille Thibon

2023-13. Nous avons lu et nous avons aimé : Gustave Thibon « Au secours des évidences ».

19 janvier 2023,
22ème anniversaire du rappel à Dieu de Gustave Thibon.

Gustave Thibon

Gustave Thibon (1903-2001)

   Dire que Gustave Thibon est inépuisable est au moins une litote. 

   Il est inépuisable parce que ses lecteurs n’en finissent jamais de revenir à ses ouvrages pour les relire, les méditer, les relire encore et les méditer toujours plus profondément ; il est inépuisable parce que ceux qui l’ont lu continuent de se nourrir de sa pensée, de ses réflexions, de ses interrogations et de la fulgurance des éclairs de son esprit bien au-delà de la lecture à strictement parler, puisque Thibon va ensuite alimenter, soutenir et leur permettre de développer leur propre réflexion et servir de propulsion à leur cheminement spirituel ; il est inépuisable encore parce qu’il a laissé des milliers de pages inédites et que des personnes de confiance, des années après sa mort, continuent de trier, classer et enfin publier ces pépites d’intelligence et de foi ; il est inépuisable toujours parce qu’en sus des volumes qu’il a publiés lui-même, il a également rédigé des centaines d’articles pour des revues, des recueils d’études, des journaux… etc. Peu à peu, ceux-ci sont retrouvés et publiés à nouveau, comme c’est le cas avec « Au secours des évidences ».
C’est en effet de cette manière qu’au mois de janvier 2022 est paru, chez Mame, grâce au travail de Françoise Chauvin, un nouveau volume venant allonger la bibliographie du « paysan philosophe » de Saint-Marcel d’Ardèche. Il s’agit, si je ne me trompe pas, du sixième volume posthume de celui auquel, personnellement, je dois tant, et cela a été pour moi un énième enchantement et bonheur spirituel.

   Comme à chaque fois, les phrases du « cher Gustave » - ainsi que nous l’appelions entre nous de son vivant – ne se lisent pas : elles se goûtent et se savourent, de la même manière qu’un œnologue déguste un très grand cru.

   A consommer sans aucune modération et sans aucun risque de tomber dans les travers de l’intempérance !

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur       

Gustave Thibon au secours des évidences

Quatrième de couverture :

   « Les mots les plus simples suffisent à délivrer la vérité que tout homme porte en lui… Le philosophe devrait toujours garder les yeux fixés sur Socrate, fils de la sage-femme et accoucheur des esprits – de tous les esprits, y compris celui de l’esclave du Ménon », nous dit Gustave Thibon.
Dans ces pages, écrites à l’intention du grand public, une intelligence souveraine circule incognito, qui peut éclairer tout le monde sans éblouir personne. On la reconnaîtra pourtant à certains indices, en particulier celui-ci : Gustave Thibon ne se retranche jamais dans un parti pris, pas plus qu’il ne se laisse aller à la moindre concession. Unir tant de souplesse à tant de fermeté n’appartient qu’aux grads esprits, dont la marque infaillible est d’être parfaitement libres.

Citation :

   « Tout ce qu’on peut demander à l’Etat, c’est de ne pas prétendre faire notre bonheur à notre place. C’est-à-dire de se cantonner à sa tâche essentielle qui consiste à nous assurer la paix, la sécurité, la justice, tout en nous laissant la plus grande liberté possible de penser, d’aimer et d’entreprendre. Et pour cela, à l’inverse du courant centralisateur et bureaucratique qui submerge les nations modernes, il doit restreindre ses attributions au lieu de les étendre comme il le fait aujourd’hui. Le vampire a beau se déguiser en donneur de sang : par la force des choses, il retient à son profit la plus grande partie du liquide vital qu’il prélève… »

Gustave Thibon, in « Au secours des évidences », p.259.

2022-139. Du bienheureux trépas de Saint François de Sales.

28 décembre,
Fête des Saints Innocents (cf. > ici) ;
Anniversaire de la mort de Saint François de Sales (cf. > ici).

Apothéose de Saint François de Sales

28 décembre 1622
à Lyon
Saint François de Sales rend son âme à Dieu

       1622 : Sa Grandeur Monseigneur François-Bonaventure de Sales, Prince-évêque de Genève, en exil à Annecy, bien qu’il ne soit âgé que de 55 ans, est un homme fatigué, usé. Depuis longtemps, il « souffre de douleurs d’estomac, de fièvres et autres incommodités ». De plus, ces derniers temps ses douleurs aux jambes se sont accentuées, des plaies s’y sont ouvertes, si bien que les déplacements à cheval, surtout en ces pays de montagne aux sentiers accidentés, sont devenus dangereux. Cependant, selon le témoignage de ses familiers, « il gardait toujours son visage serein et ne se plaignait aucunement ».
Au printemps, il a dû, mandaté par Sa Sainteté le Pape Grégoire XV, présider le chapitre général des Feuillants (Ordre de Citeaux réformé) à Pignerol, puis séjourner quelque temps à Turin, où réside la cour du Duc-souverain de Savoie. De retour à Annecy, les chaleurs de l’été n’ont pas permis de soulagement à son état, d’autant que Monseigneur ne se ménage en rien…

   Et voilà qu’à la fin du mois d’octobre, Monseigneur de Sales reçoit de Son Altesse le Duc Charles-Emmanuel 1er « commandement exprès » d’accompagner son fils, le Cardinal Maurice de Savoie, en Avignon. En effet, après la signature du traité de paix de Montpellier (18 octobre 1622) avec le Duc de Rohan, chef des protestants du Midi, Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XIII a décidé de remonter à Paris par la vallée du Rhône.
Afin de renforcer les liens d’amitié entre le Duché souverain de Savoie et le Royaume de France, une rencontre a donc été programmée en terre pontificale, où seront réunis les Souverains de ces deux puissants Etats catholiques, puisque le Duc de Savoie lui-même viendra aussi rencontrer Sa Majesté le Roi Louis XIII. N’oublions d’ailleurs pas que la propre sœur de Louis XIII, Chrestienne [Christine] de France (1606-1663), a épousé en 1619 le Prince de Piémont, futur Duc souverain Victor-Amédée 1er.

   A cette nouvelle, il se fait grand émoi autour de François ! Tout le monde le supplie d’informer Son Altesse « du misérable état dans lequel il se trouve ». Mais lui répond sereinement : « Que voulez-vous, il faut aller où Dieu nous appelle ».
Il ne cache toutefois pas son pressentiment de la mort. Devant son frère Jean-François, qui est son coadjuteur, son cousin Louis et quelques amis rassemblés il annonce paisiblement : « L’heure du départ approche… Il sera suivi d’un autre et j’ai désiré faire mon testament ». Il leur en fait lecture dans l’émotion générale. Le lendemain, il se confesse et l’après-midi confère avec son successeur de toutes choses encore nécessaires. A la fin, il s’écrie joyeusement : « Ah, vraiment ! Il me semble par la grâce de Dieu que je ne tiens plus à la terre que du bout du pied seulement, car l’autre est déjà levé en l’air pour partir ! » Puis viennent les adieux à son cher clergé d’Annecy, au chapitre de la Cathédrale.
Il fait aussi appeler la petite fille du boulanger de l’évêché : « Adieu, ma fille, nous ne nous reverrons qu’au Paradis ». Elle mourra bientôt en effet.
Au matin du 8 novembre, il se rend à « la sainte Source » (c’est ainsi qu’on nomme le premier monastère de la Visitation à Annecy), où après avoir célébré la Sainte Messe, il fait ses adieux à ses filles : « Mes chères filles, que votre seul désir soit Dieu ; votre crainte, de Le perdre ; votre ambition, de Le posséder à jamais ». Puis, très vite : « Adieu, adieu, mes filles, jusqu’à l’éternité !»

Saint François de Sales en prière

   Le 9 novembre au matin, une foule s’est groupée autour des chevaux. Il y a aussi les pauvres d’Annecy, touchés par la misère. François donne ordre de distribuer généreusement des boisseaux de grains ; puis la petite troupe se met en marche et gagne le Rhône qu’il va falloir descendre. Il neige : « Il monte alors dans une nacelle et, en une bise très violente, se met à la merci du Rhône presque tout gelé par l’extrême rigueur du froid ». Il débarque pour aller souper et coucher à Belley.
Le jeudi 10 novembre, il atteint Lyon. La Révérende Mère de Chantal, qu’il n’a pas vue depuis trois ans, l’y attend : elle désire si ardemment s’entretenir avec lui, non seulement des affaires de l’Ordre, mais aussi de son âme. Cependant, on presse Monseigneur de reprendre le bateau, et lui donne mission à la fondatrice d’aller visiter deux monastères.
Le 11, il est à Vienne, puis ce sera Valence où un monastère de la Visitation vient d’être fondé. Ici, les biographes notent l’histoire de la bienfaitrice grâce à laquelle le monastère a été fondé : c’est une dame de 84 ans que la supérieure hésite à accepter, ce qui lui vaut cette réponse de Monseigneur : « La Visitation est fondée pour les jeunes, pour les vieilles, pour les saines, pour les maladives et les infirmes ». Et il promet qu’à son retour il donnera lui même le voile à la dame.
Le 14, à Bourg-Saint-Andéol, il est reçu « comme un saint tombé du ciel » : les consuls, le clergé, la foule en liesse l’arrachent presque à sa suite pour le conduire à l’église où est chanté un solennel Te Deum.
Enfin le 15, le peuple d’Avignon, enthousiaste, le reçoit avec la même exultation. Maisons, fenêtres et rues sont pavoisées, les oriflammes flottent et les tapisseries pendent. Surpris, dérouté, François de Sales voudrait échapper aux acclamations et tente de se dissimuler dans une boutique. En vain.
Il loge dans une modeste auberge, et aussitôt installé dans sa petite chambre il se met au travail.

Le lendemain, 16 novembre, les trompettes annoncent l’arrivée du Roi de France et du Duc de Savoie dans la Cité des Papes. Tout le monde se précipite aux fenêtres pour voir passer les somptueux cortèges des souverains et de leurs suites, mais François refuse : « Je vous laisse la place…Pour moi, je ne suis plus du monde, je m’en vais à mon Père qui est aux Cieux. Il faut que je travaille à son œuvre, pour lui rendre bon compte ».
Les fêtes succèdent aux cérémonies. François n’y assiste que lorsqu’il y est obligé. Il s’entretient de certains intérêts savoisiens, visite les Jésuites, célèbre la Sainte Messe en public et prêche.
Lui qui a toujours eu une très grande dévotion pour les deux sœurs, hôtesses de Notre-Seigneur à Béthanie, voudrait se rendre en pèlerinage à la Sainte Baume, mais le Prince-cardinal Maurice de Savoie ne veut pas qu’il s’absente : 
« Monseigneur, votre cœur est à la Sainte Baume, où vous êtes toujours solitaire !» Et il lui propose plutôt d’aller à Tarascon, rendre visite à Sainte Marthe : pèlerinage qu’il accomplit le 22 novembre.

   Enfin, le 25, tous s’embarquent pour remonter le Rhône jusqu’à Lyon où le Roi doit arriver le 29 novembre. Les deux Reines, Marie de Médicis et Anne d’Autriche les y attendent. Encore une fois ce sont les inconforts du voyage : une nuit, l’auberge où ils font étape n’a pour leur permettre de se reposer qu’un grenier garni de paille, pourtant Monseigneur, au matin, se montre jovial : « Je n’ai jamais si bien dormi !»
A Valence, il tient promesse et remet le voile à la postulante de 84 ans qui lui demande si elle ne peut pas en même temps faire sa profession. Il lui répond doucement qu’elle la fera au bout de son année de noviciat, conformément à la Règle à laquelle il ne faut point déroger sans raison. Cette religieuse, non seulement fera sa profession à la fin de son noviciat, mais servira Notre-Seigneur pendant plus de vingt années, mourant plus que centenaire !

Saint François de Sales remettant les Constitutions aux premières Visitandines

   A Lyon, refusant toutes propositions de logement, François va demander asile à ses filles de la Visitation Sainte-Marie de Bellecour, insistant pour s’installer dans la cahute du jardinier : « Je ne suis jamais mieux que quand je ne suis guère bien !» Il y sera plus libre, dit-il, pour accueillir sans déranger ceux qui viendraient le visiter, tout en restant proche de la Visitation, « comme un père avec ses filles ».
De fait, ce sera alors un flot continu de personnes sollicitant ses avis, ses conseils, sa direction dans cette chambrette sans confort. A celà s’ajoutent évidemment les cérémonies officielles et les prédications. Tout le monde veut le voir, tout le monde veut l’entendre : « Mon Dieu, que bienheureux sont ceux qui, dégagés des Cours et des compliments qui y règnent, vivent paisiblement dans la sainte solitude au pied du crucifix !»

   On ne peut tout détailler dans le cadre d’un article de blogue : ceux qui veulent connaître tous les détails de ces journées de Monsieur de Genève à Lyon en ce mois de décembre 1622 les trouveront aisément dans le remarquable ouvrage de Monseigneur Francis Trochu.
L’entrée solennelle de Louis XIII a lieu le 8 décembre, mais François n’y assiste pas : il préfère passer cette journée, mariale entre toutes, dans la cité qui honore depuis déjà des siècles la Conception immaculée de la Mère de Dieu, auprès de ses filles. En outre, la Révérende Mère de Chantal vient d’arriver ! Ce sera la dernière rencontre du Fondateur de la Visitation Sainte-Marie avec celle qui en est la Pierre fondamentale.
Ardente comme toujours, Mère Jeanne-Françoise désire « revoir toute son âme avec lui », moment qu’elle attend depuis trois ans ! De plus, elle a également des questions importantes à soumettre pour le bien de l’Ordre. Mais il faut compter avec le très grand nombre des ecclésiastiques, des princes, princesses, grands Seigneurs et grandes dames, rassemblés pour l’occasion, qui veulent s’entretenir avec Monseigneur… Attendant cette rencontre depuis trois longues années, voilà qu’« il n’a pas un quart d’heure à lui » pour rencontrer Mère de Chantal. Le 12 décembre pourtant, il vient au parloir : « Nous aurons quelques heures libres. Qui commencera de nous deux à dire ce qu’il a à dire ? » - « Moi, s’il vous plait, mon Père, mon cœur a grand besoin d’être revu de vous ». Suave mais grave, il la reprend : « Eh quoi ! Ma Mère, avez-vous encore des désirs empressés et du choix ? Je vous croyais trouver toute angélique ! » Il se moque gentiment mais en fait, il sait qu’elle n’a plus besoin de son enseignement : « Ma Mère, nous parlerons de nous-même à Annecy ; maintenant achevons les affaires de notre congrégation… » Elle obéit aussitôt. Puis, après quatre heures de travail sur des sujets d’importance pour l’Ordre, il lui demande de rentrer à Annecy en passant par Grenoble, Valence, Chambéry, Belley… Une fois de plus, elle prend la route, et le chemin du saint abandon à la divine Providence.

Mort de Saint François de Sales - vitrail de l'église Saint-François de Sales Paris 17e

   La santé de l’évêque aurait besoin de ménagement et de beaucoup de repos, mais la volonté des Princes lui impose de rester davantage à Lyon. Sa chambrette et le parloir de la Visitation continuent à être un vrai « carrefour spirituel ». Confessions, prédications, visites continuent jusqu’à la veille de Noël !
Le 24 décembre, le froid est très rigoureux et la ville est enveloppée d’un épais brouillard. Malgré cela, sur la demande de la Reine-mère, il monte à la Croix-Rousse pour bénir la première pierre de la nouvelle église des Récollets : la cérémonie dure près de trois heures, 
il prend froid et revient avec un fort mal de tête. Il célèbre la Sainte Messe de Minuit chez ses « chère filles » de la Visitation. La Supérieure, Mère de Blonay, a remarqué le visage rayonnant de Monseigneur au Gloria et lui demandera ce qui s’est passé : « Que voulez-vous ! Quand l’ouïe du cœur est un peu dure, il est besoin que les Anges me parlent à l’oreille du cœur… » Il prêche pontificalement après la Messe de la Nuit, puis se rend chez les Dominicains où il confesse les Princes de Piémont, célèbre la Messe de l’Aurore et les communie.
De retour à la Visitation, il doit attendre jusqu’à midi pour célébrer la troisième Messe, celle du Saint Jour de Noël, car il a voulu attendre que l’aumônier de la Visitation, ait célébré ses trois Messes.
Après un très léger repas, il doit, entre autres, remettre l’habit à deux postulantes (et prêcher encore), puis aller faire ses adieux à la Reine-mère qui s’en va le lendemain et cela le mènera jusque tard dans la nuit !
Le lendemain, fête de Saint Etienne, il fait à ses filles le dernier entretien spirituel de sa vie : « Mes chères filles, il faut s’en aller, j’arrive à ma fin…» Après de nombreuses questions et réponses, il donne des enseignements admirables sur le saint abandon : « La vertu et l’amour de Dieu exceptés, la perfection consiste à ne rien demander et à ne rien refuser, mais se tenir prêt à faire l’obéissance ». A la fin, Mère de Blonay insiste : « Qu’est-ce que vous désirez qu’il nous reste le plus engravé dans l’esprit ?» - « Je vous l’ai déjà tant dit ! Ne demandez rien, ne refusez rien ».
Lors d’une visite au noviciat, Mère de Blonay lui demande d’écrire une pensée « pour nous avancer en la vertu ». Il prend la feuille de papier qu’elle lui tend et écrit, en haut : Humilité, puis au milieu et en bas, le même et unique mot : Humilité.
Puis en sortant du parloir de la Visitation, dans la cour, il rencontre les gouverneurs de Bourgogne et de Lyon et doit rester nue tête dans un froid glacial. Lorsqu’il pourra partir prendre congé du Prince de Piémont, il était frigorifié : « Je sens ma vue diminuer, il s’en faut aller et bénir Dieu ».

Annecy - gisant de cire de Saint François de Sales

   Le jour de Saint Jean l’Evangéliste, il se confesse et dit sa Messe « avec une dévotion extraordinaire ».
Puis il est encore accablé de visites. Il écrit deux lettres, les dernières. A 14 h, « s’étant soulevé de son siège, il est soudainement saisi de l’apoplexie dont il meurt le lendemain ». « Il fait sa profession de foi et s’offre en holocauste, consacre sa mémoire au Père, son entendement au Fils, sa volonté au Saint Esprit, son corps, sa langue et ses souffrances à la sainte humanité de Jésus Christ ». Il réclame l’extrême-onction qu’il recevra à minuit.

   Le 28 décembre, ce ne furent pourtant encore que visites. Après l’avoir saigné le matin, sur les cinq heures du soir, « les médecins jugèrent et résolurent de se servir de moyens extrêmes ». Des « moyens » vraiment extrêmes ! Cataplasmes sur le front : en les lui ôtant, on lui arrache la peau. Après lui avoir demandé son accord, les chirurgiens plongent trois fois les « bottons ardents » (tiges de fer rougies au feu) dans la nuque « d’où il sortit une grosse fumée ». On l’entendait gémir doucement « jetant toutefois forces larmes et ne proférant autre chose que les sacrés noms de Jésus et de Marie ». Un vrai martyre ! Le malade s’affaiblit de plus en plus, on le remet au lit. Il dit alors ces dernières paroles : « Le jour baisse, il se fait tard… Jésus, Maria !»
Son agonie dure deux heures. Il fait signe qu’il entend et comprend. Comme il l’avait demandé, on lui répète souvent ce verset : « Mon cœur et ma chair sont un cri vers le Dieu vivant ».
« Son âme, dit un témoin, était tellement avant aux doux ravissements de l’Eternité, qu’elle lui faisait tressaillir le cœur et le corps ensemble, bondissant de joie par l’espérance qu’ils avaient de se réunir en la résurrection générale, pour louer éternellement le Dieu vivant ».
On récitait les prières des agonisants à son chevet, avec les litanies des Saints, et c’est au moment même où on invoquait les Saints Innocents que Monseigneur François de Sales rendit son dernier soupir, ce jour des Saints Innocents, vers huit heures du soir, comme un dernier signe de la pureté de sa vie et de l’innocence de ses mœurs.
Il avait exactement 55 ans, quatre mois et sept jours, et avait dirigé son évêché de Genève pendant 20 ans et 20 jours.

Lyon - rue Saint François de Sales - plaque commémorative du lieu de la mort du saint

Plaque commémorative posée à l’angle de la rue Sainte-Hélène et de la rue Saint-François de Sales, à Lyon,
où se trouvait la « cahutte » du jardinier dans laquelle Saint François de Sales rendit son âme à Dieu

Lire aussi :
Béatification et canonisation de Saint François de Sales > ici

Armoiries de Saint François de Sales

2022-136. De notre saint Roi Clovis 1er le Grand.

Lettre mensuelle
aux membres et amis de la
Confrérie Royale
à l’occasion de la fête de la Nativité de NSJC
25 décembre 2022

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Jean Hélart vers 1670 Baptême de Clovis

Jean Hélart (1618-1685) : Le Baptême de Clovis (peint vers 1670)

Fleur de Lys

Clovis 1er le Grand

   Le dimanche 25 décembre 496, au cours de la nuit de Noël, le Saint Roi Clovis 1er le Grand reçut quatre sacrements et un sacramental.

I – Le Baptême

   Le premier sacrement, pour lequel il était venu, fut le baptême.

   Le Roi, nouveau Constantin, prêché depuis son avènement en 481 par l’archevêque de Rheims Saint Remy et depuis son mariage en 493 par son épouse Sainte Clothilde de Bourgogne, muni des trois fleurs de lys célestes par l’ermite de Joyenval (cf. > ici) et converti par le miracle divin de la victoire inespérée à Tolbiac peut-être le 14 février 496, catéchisé par Saint Waast, qu’il nomma ensuite évêque d’Arras, confirmé dans sa résolution au tombeau tourangeau de Saint Martin le 11 novembre 496, conforté, dans ses craintes de n’être pas suivi par son peuple, par la résolution de ses guerriers de « croire dans le vrai Dieu immortel que prêche Remy », s’avança résolument dans la future primatiale Notre-Dame de l’Assomption de Rheims pour être baptisé par Saint Remy. « Est-ce là le Royaume de Dieu que vous m’avez promis ? » – « Non, c’est le début du chemin par lequel on y va ».

   Le baptême donne un caractère indélébile dans l’âme du baptisé. Saint Clovis y fut fidèle, consacra la France à Saint Michel à Tolbiac, à Saint Martin à Tours, à Notre-Dame à Rheims, prit conseil des évêques (comme il avait à son avènement déjà accepté ceux de Saint Remy), convoqua en 511 le concile d’Orléans qui scella l’union du Trône et de l’Episcopat, construisit la basilique Saint-Pierre et Saint-Paul pour y inhumer Sainte Geneviève dont il avait accepté aussi les conseils et à qui il consacra lors la France, commença la reconstruction des cathédrales Notre-Dame de l’Assomption de Paris et Notre-Dame de l’Assomption de Strasbourg, fut fidèle dans son ménage, s’efforça d’adoucir ses mœurs dans une époque encore rude (il suffit de comparer avec les rois voisins païens ou ariens), et fut pour ce motif considéré comme saint à l’abbaye Sainte-Geneviève de Paris, à l’abbaye Saint-Pierre de Moissac et à la collégiale Sainte-Marthe de Tarascon, et invoqué notamment par le Roi Louis XI.

   Le Roi, qui n’était pas plus que ses contemporains un libéral adepte de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, avait bien l’intention d’engager ainsi son Royaume, et fut conforté par la résolution de ses trois mille guerriers. Il n’y a certes pas dans ce baptême moral d’un pays un caractère proprement physique, mais certainement moral : il engageait la France pour toujours.

   Tous les Rois y furent fidèles ; même Henri IV, entraîné enfant dans l’hérésie par ses parents, resté presque catholique dans sa croyance, et toujours modéré dans ses guerres, prit dès le lendemain de son avènement l’engagement de se convertir.

   Ce sont les révolutions de 1792 et de 1830 (sans compter l’intermède de Cent Jours en 1815) qui abolirent la religion catholique de l’Etat, et l’on a entendu naguère des chefs de la République « le refus de la loi morale primant sur la loi civile », « la nocivité de l’hypothèse de Dieu », et « le droit au blasphème ».

   A nous de rester fidèles au baptême que nous avons reçu (au besoin prenons la résolution de le recevoir avec la grâce de Dieu) et à celui de notre pays. La catholicité de l’Etat ne sera pas restaurée sans notre conversion personnelle, comme le disait Henri V.

Fleur de Lys

II – La Confirmation

   Le deuxième sacrement, qui suivit le baptême, fut la confirmation, complément du baptême.

   Le Roi, nouveau Théodose, homme politique résolu (on l’avait vu avec les derniers faibles représentants de l’autorité romaine en 486), homme droit (on l’avait vu à propos du vase de Soissons qu’il voulait rendre à l’Eglise de Rheims en 486), convaincu par la victoire de Tolbiac que la seule force véritable était celle du vrai Dieu, vint résolument recevoir du Saint-Esprit la confirmation de sa foi par les mains de Saint Remy. « Ah ! si j’avais été là avec mes Francs ! », avait-il dit au récit de la Passion du Sauveur.

   La confirmation donne un caractère indélébile dans l’âme du confirmé. Saint Clovis y fut fidèle, prit la protection des catholiques maltraités par les ariens, et, avec l’aide de Saint Martin (qu’il vint prier à son tombeau) et de Saint Hilaire (qui de son tombeau fit s’élever une colonne de lumière), vainquit le Roi arien wisigoth Alaric II à Vouillé peut-être le 20 juillet 507, envoya en hommage au Pape la couronne reçue alors de l’Empereur byzantin Anastase 1er, et fut considéré comme le véritable fondateur de la Royauté catholique française : son nom, modernisé en Louis, passa ainsi de règne en règne jusqu’à nos jours et sans doute au-delà.

   Le Roi savait que le nouveau Fils Aîné de l’Eglise était devenu le protecteur du Saint-Siège et de la Sainte Eglise et l’artisan de la dilatation du Règne de Dieu sur la terre. Il n’y a certes pas dans cette confirmation morale d’un pays un caractère proprement physique, mais certainement moral : il engageait la France pour toujours dans cette tâche.

   Tous les Rois y furent fidèles. De Saint Childebert 1er et Thibert 1er en 539 à Arnoul de Carinthie en 896, huit Rois de France allèrent en Italie défendre le Saint-Siège. Et à partir de Saint Etienne IV en 754, innombrables furent les Souverains Pontifes qui vinrent chercher refuge auprès du Roi de France. Par les mariages nos Rois convertirent les Wisigoths d’Espagne et les Anglo-Saxons, par les prédications les derniers païens de France, la Germanie, la Scandinavie et les Normands de France, par les missions de nombreux peuples des deux Indes Occidentales et Orientales. Ils défendirent par les croisades la Chrétienté attaquée : de louis VII en 1145 à Charles X en 1830 vingt-trois Rois furent croisés ou organisèrent des croisades.

   En notre époque révolutionnaire, même l’aide traditionnelle aux chrétiens d’Orient est à peine visible, et l’on a entendu naguère un chef de la République ne pas oser qualifier de chrétiens ceux qui venaient d’être assassinés pour leur foi par des musulmans.

   A nous de rester apostoliques, appuyés sur notre confirmation et sur celle de notre pays. La France ne redeviendra apostolique et forte que par ses membres.

Grandes armes de France

III – Le Sacre Royal

   Le sacramental qui suivit la confirmation fut le sacre royal, complément de la confirmation pour un Roi.

   Le Roi, nouveau David, déjà religieux d’une religion naturelle comme sont tous les païens (à la différence des Etats modernes), persuadé de la souveraine Majesté du vrai Dieu lors de la bataille de Tolbiac, fut par l’initiative de Saint Remy sacré Roi, à l’imitation de Saint David dans l’Ancien Testament, par l’onction de l’onguent de la sainte Ampoule apportée, comme le dit un répons du sacre, par le Saint-Esprit (et qui venait de servir exceptionnellement au baptême et à la confirmation, le saint-chrême manquant). A Tolbiac il avait invoqué celui que son conseiller Aurélien lui avait dit être « le Roi des rois et le Dieu du ciel et de la terre ».

   La marque de la fidélité au Roi des rois et à son Royaume est l’anneau : il est difficile de savoir si Clovis l’a reçu, mais il fut donné au moins très rapidement à ses successeurs. Saint Clovis fut fidèle à cette union à son Royaume : il assura la protection de l’Eglise, fut soucieux de la justice, première vertu royale, qui fut l’une des raisons de la convocation du concile d’Orléans, et apprit à y joindre la miséricorde, nouveauté chrétienne (il reconnut notamment le droit d’asile des églises). Ces vertus valaient pour tous ses sujets, même non catholiques, car tous étaient ses enfants, et son exemple royal en convertit beaucoup. Ce fut le même onguent de la sainte Ampoule qui sacra tous ses successeurs jusqu’à Charles X, en attendant le sacre suivant, car « nous l’avons encore », comme a dit l’archevêque de Rheims Saint Hincmar.

   Le Roi savait qu’il était devenu l’Oint du Seigneur et qu’« évêque du dehors », il se devait à son Royaume et à la protection de l’Eglise. Le pacte de Rheims engageait pour toujours la France dans l’union à Dieu et au Roi, lequel ne pouvait renoncer à cet engagement, comme disait Jacques 1er.

   Tous les Rois y furent fidèles, même ceux qui ne purent, par l’âge, la prison ou l’exil, être sacrés. Le vénérable Louis XVI préféra le martyre à l’infidélité au serment de son sacre. Louis XIV, Louis XV et Louis XVIII rappelaient encore qu’ils étaient les pères de leurs sujets. Et les Français savaient qu’ils avaient un père aimant en leur Roi donné par Dieu (même avant le sacre).

   En notre époque de laïcisme triomphant, nul homme politique français n’ose prononcer le nom de Dieu, ce qui pourtant changerait la conception de la vie politique, même pas le mot du bien commun. Comme l’a reconnu un récent chef de la république, au nom du laïcisme l’on a fait et fait encore la guerre à l’Eglise.

   A nous de n’avoir pas honte de notre foi religieuse et royale et de garder notre fidélité filiale à Louis XX. A force de prononcer le nom du Roi, dit-on, le Roi reviendra.

Fleur de Lys

IV – La Communion

   Le troisième sacrement, qui suivit le sacre royal au cours de la messe, fut la communion, qui scella les sacrements et le sacramental précédents.

   Le Roi, nouveau Salomon, jouissant déjà dès sa jeunesse d’une sagesse naturelle à laquelle s’adressa Saint Remy lors de son avènement, ayant apprécié la sagesse et la charité surnaturelles de son épouse Sainte Clothilde même quand il ne suivait pas ses conseils de se faire baptiser, subjugué par la sagesse et la charité divines de Saint Remy lors de ses dernières instructions, assista religieusement en la future primatiale de Rheims au saint-sacrifice de Jésus-Christ qui offrit sa Vie pour l’amour de nous et la rédemption de nos péchés, et y reçut la communion eucharistique des mains du saint archevêque pour s’unir en son âme à son divin Sauveur. Union indicible du nouveau     Roi Très-Chrétien néophyte à son divin Roi, qu’aucun chroniqueur ne put en effet exprimer.

   La fidélité de l’âme par la communion souvent renouvelée est tout intérieure. Saint Clovis fut fidèle à cette communion à son Dieu, s’efforça d’éviter le péché et de bannir peu à peu celui-ci de ses terres par son exemple et ses décrets, devenu naturellement le phare des rois terrestres, comme le reconnurent pour lui et ses successeurs le Pape Saint Grégoire 1er le Grand et la plupart des rois étrangers au cours des âges.

   Le Roi savait qu’en s’unissant à son Dieu, il unissait son Royaume à Jésus-Christ pour toujours dans la foi, l’espérance et la charité, et lui procurait les grâces divines, par la médiation de celui qui était devenu « un autre Christ ».

   Tous les Rois y furent fidèles, malgré leurs faiblesses humaines : amour de Dieu, de l’Eglise, du prochain, de leurs sujets. Dieu rappela cette union intime qu’il avait avec le Fils Aîné de son Sacré-Cœur lors des sacres de Charles VII et d’Henri IV et sous Louis XIV. Encore le 6 juin 1830 Sainte Catherine Labouré vit Jésus-Christ dépouillé de ses ornements royaux et il lui fut signifié que c’était le Roi de la terre, Charles X, qui allait en être dépouillé : Notre-Seigneur s’est donc identifié au Roi Très-Chrétien jusque dans sa déposition, car, en chassant Charles X, c’est bien Dieu que l’on voulait chasser, comme on le vit par la suppression de la religion catholique de l’Etat et les lois contre la religion et la morale qui suivirent.

   En notre époque de subjectivisme et d’égoïsme généralisés jusque dans la vie politique, la désunion des citoyens rejetant leur Père céleste a remplacé l’union commune autour de Dieu, les opinions diverses et opposés ont pris la place du bien commun qui unit, la loi implacable a chassé la miséricorde (ce fut un des arguments en faveur de la république dans les années 1870).

   A nous de garder la charité et l’union entre Français. La charité attire souvent là où la raison échoue.

Retable de l'autel de Sainte Clotilde - Paris basilique Sainte Clotilde

Paris, basilique Sainte-Clotilde : retable de l’autel de Sainte Clotilde
représentant du côté de l’Evangile le mariage de Clovis et Sainte Clotilde, et du côté de l’épître le baptême de Clovis

V – Le Mariage

   Un autre sacrement fut reçu discrètement ce jour-là : le mariage, en conséquence du baptême.

   Le Roi, nouveau Josias, ayant certes été légitimement marié avec Sainte Clothilde, toutefois d’un mariage naturel puisque l’un des époux n’était pas baptisé, ayant admiré pendant toutes ces années l’amour, les vertus et la foi de son épouse, était ainsi prêt à recevoir le sacrement du mariage. Il n’y eut probablement pas de cérémonie explicite, mais c’était implicite dans le sacrement du baptême de l’époux jusque-là non-baptisé.

   La marque de la fidélité des époux est l’anneau : il est néanmoins difficile de savoir s’il y en eut alors. Saint Clovis fut fidèle à cette union, eut les mœurs pures, et demanda au concile d’Orléans de porter des canons pour la sanctification du mariage.

   Le Roi entendait, ce faisant, engager ses sujets dans la soumission aux lois de Dieu et de l’Eglise. Il savait que de bonnes familles forment un bon Royaume, comme le dira plus tard le serviteur de Dieu Louis XIII.

   Tous les Rois furent fidèles à sanctifier paternellement leurs peuples. Leur législation fut continue pour sanctifier les individus, les familles et toute la société.

   Mais dès la chute du Roi-Martyr en 1792, la Révolution instaura le mariage civil et le divorce, qui est la ruine des familles. Et la Vème République s’est faite la spécialiste des lois immorales de tout genre, jusqu’à l’avortement des petits sans défense.  La société moderne laïcisée conduit ses chefs et ses sujets à oublier, bon gré mal gré, la Loi de Dieu. Henri VI, Alphonse II et Louis XX ont particulièrement attiré l’attention sur les nombreux crimes divers commis contre les enfants de nos jours.

   A nous de garder la fidélité aux commandements de Dieu et de l’Eglise, ainsi qu’au Lieutenant du Christ, comme celui-ci est toujours fidèle à Dieu, à l’Eglise et à ses sujets. Sanctifions-nous et par notre exemple sanctifions le prochain.

Fleur de Lys

Conclusion :

   A défaut de pouvoir nous recueillir devant le tombeau de Saint Clovis le Grand, actuellement sous « la rue Clovis » percée par la Révolution à la place de l’ancienne abbatiale Sainte-Geneviève (quelle ingratitude envers la Patronne de la capitale et le Fondateur de la France !), sachons l’invoquer chaque 27 novembre (son jour natal au ciel) pour le remercier des sacrements reçus le 25 décembre 496 et des grâces ainsi reçues par la France depuis plus de quinze siècles, et pour notre conversion et celle de notre pays, dans la foi catholique, dans la force apostolique, dans la fidélité royale, dans la charité française et dans la sanctification familiale. Mère de la sainte Espérance, convertissez-nous. Reine de France qui trônez au Puy, priez pour la France, priez pour le Roi, priez pour nous.

Abbé Gabriel Equin +

Clovis couronné par la victoire - Charles-Joseph Natoire

Charles-Joseph Natoire (1700-1777) : Clovis couronné par la Victoire fait refleurir la Religion (1736)
[Troyes, musée des Beaux-Arts]

2022-134. Nous avons lu et nous avons aimé : « Les Français de Philippe V : un modèle nouveau pour gouverner l’Espagne », de Catherine Désos.

19 décembre,
Fête du Bienheureux Urbain V (cf. > ici) ;
« O Radix Iesse » (cf. > ici) ;
Anniversaire de la naissance de SMC le Roi Philippe V d’Espagne ;
Anniversaire de la naissance de SM la Reine Marie-Thérèse de France (cf. > ici).

Philippe V d'Espagne à l'âge de 18 ans - Hyacinthe Rigault - détail

Philippe V d’Espagne à l’âge de 18 ans
par Hyacinthe Rigaud, détail (1701)

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    A la vérité, il y a fort longtemps que nous eussions dû vous parler de cet ouvrage, publié en 2009, et qui se trouve déjà depuis de nombreuses années en très bonne place dans la bibliothèque historique de notre Mesnil-Marie.
Mieux vaut tard que jamais ! L’anniversaire de la naissance, le 19 décembre 1683, de ce Enfant de France, petit-fils du Grand Roi, titré Philippe duc d’Anjou, qui, à la fin de l’année 1700 fut appelé à ceindre la Couronne d’Espagne, nous fournit donc l’opportunité de réparer cette lacune dans nos publications, en espérant que, comme nous, ceux qui s’intéresseront à cet ouvrage, trouveront, comme nous, autant d’intérêt que d’enrichissement à sa lecture.
A l’heure où nous écrivons ces lignes, une simple vérification nous a permis de nous assurer que ce livre est toujours disponible en librairie, ou peut aussi être acquis en format électronique.

   Il ne faut évidemment pas chercher dans cet ouvrage de 540 pages une espèce de « roman historique », puisqu’il s’agit d’une thèse de doctorat soutenue avec brio à l’Université de Strasbourg : c’est un véritable ouvrage scientifique qui est venu apporter un excellent éclairage sur cette « familia francesa » – environ 260 personnes – qui a accompagné le jeune Philippe V et l’a secondé dans sa délicate vocation à régner sur l’Espagne.
Tous les amateurs de science historique y trouveront leur compte avec un véritable bonheur.

Catherine Désos - les Français de Philippe V

Quatrième de couverture :

   Coup de tonnerre dans le ciel de la diplomatie européenne ! En novembre 1700, le jeune duc d’Anjou, petit-fils de Louis XIV, hérite de la couronne d’Espagne sous le nom de Philippe V. Une ère nouvelle s’ouvre pour un royaume gouverné, jusque là, par les Habsbourg, si différent, si contraire, si évidemment ennemi de la France depuis près de deux siècles.

   A la fois précautionneux envers les puissances étrangères, mais aussi désirant ménager l’orgueil castillan, Louis XIV ne souhaite pas s’ingérer dans les affaires intérieures de Philippe :  » Laissons les Espagnols se gouverner eux-mêmes « . C’est la guerre qui, révélant les faiblesses internes de l’Espagne, nécessitera une union étroite entre les deux royaumes, avec pour conséquence un accroissement du nombre des Français au service du nouveau roi. 

   Peu nombreux, bien placés, actifs jusqu’en 1724, prenant appui sur les novatores, ils influencent l’ensemble des rouages de la monarchie. La vie de cour et artistique, la pratique du gouvernement, l’administration des finances, le système commercial, l’organisation militaire, la politique étrangère, rien ne leur échappe. Mais ce processus réformateur, accéléré dans le contexte guerrier d’alors, ne va pas sans susciter des oppositions internes et des atermoiements, même de la part de Versailles, autant d’obstacles à surmonter. 

   L’ouvrage offre pour la première fois au lecteur une synthèse toute en nuances des innovations introduites par cet entourage français, qui a su conserver l’équilibre délicat entre le modèle offert par le puissant voisin et le caractère propre de la nation espagnole. On comprend mieux, désormais, les conditions dans lesquelles la Péninsule a pu s’ouvrir, avec succès, à la modernité du 18e siècle.

Catherine Désos : « Les Français de Philippe V : un modèle nouveau pour gouverner l’Espagne (1700-1724) » – aux Presses universitaires de Strasbourg – 2009

Armoiries de Philippe V

2022-122. Une question qui touche au fond des choses.

19 novembre 2022,
Fête de Saint Elisabeth de Hongrie, reine et veuve ;
Mémoire de Saint Pontien, pape et martyr ;
Trentième anniversaire du rappel à Dieu de Monsieur l’Abbé Bryan Houghton.

Eglise catholique de Bury St Edmund

Eglise catholique de Bury St Edmund (état actuel)
dont l’abbé Bryan Houghton fut curé de 1954 à 1969

       « J’ai été ordonné prêtre le 30 mars 1940 et, en juin de la même année, nommé à Slough, banlieue ouvrière de Londres. Ainsi naquit la paroisse Saint-Antoine dans une cité dortoir londonienne. En septembre 1954, je fus envoyé à Bury St Edmund où je me suis occupé de la paroisse St Edmund jusqu’au 29 novembre 1969. J’ai en effet démissionné de ma charge ce jour-là et, à minuit, j’ai quitté les lieux. Pourquoi ? Parce que le lendemain matin, premier dimanche de l’Avent, le nouvel Ordo Missae entrait en vigueur.
C’est, dira-t-on, beaucoup d’intrinsigeance et même d’extravagance. Peut-être. Mais il s’agissait d’une question qui touchait au fond des choses. Le fond des choses, c’est-à-dire la conduite des réformes en général et de la réforme liturgique en particulier…»
     
(Abbé Bryan Houghton, premières lignes de la « Dédicace » qui sert de préface à son livre « Le Mariage de Judith »).

   Nous avons déjà publié une brève notice biographique de Monsieur l’Abbé Bryan Houghton à l’occasion du centenaire de sa naissance (cf. > ici), et nous avons aussi cité le passage de son autobiographie dans lequel il raconte son arrivée à Viviers au mois de décembre 1969 (cf. > ici).
Ce samedi 19 novembre 2022, à l’occasion du trentième anniversaire de sa mort, les fidèles de la chapelle Notre-Dame de la Rose, à Montélimar, se recueilleront d’une manière particulière à sa pieuse mémoire, puisque c’est l’abbé Houghton qui a rendu cette chapelle au culte, et qu’il y a officié jusqu’à ce que Dieu le rappelât à Lui.

   Celui qui, enfant, avait reçu de son camarade cette magistrale leçon : « La Messe EST Jésus » (cf. > ici), avait bien compris, dès son instauration, que la réforme liturgique postconciliaire aboutissait à une protestantisation de la Messe catholique multiséculaire, et que, dans ces nouvelles liturgies de « l’Eglise du bavardage » (cf. > ici), tout comme dans les cultes issus de la prétendue Réforme, on y parlerait de Jésus, mais que ce ne serait plus exactement Jésus ! « Il s’agissait d’une question qui touchait au fond des choses » (cf. supra) : et le fond des choses, ce n’est rien moins que la doctrine catholique dans son intégralité.

abbé Bryan Houghton

   Si nous sommes attachés à la Sainte Messe latine traditionnelle, il faut le dire et le répéter à temps et à contretemps, c’est parce qu’elle est l’expression non équivoque de la foi traditionnelle de la Sainte Eglise : la foi reçue des Apôtres. Ce n’est pas une question de goûts personnels et de sensibilité, c’est une question de salut puisque « Quiconque veut être sauvé doit, avant tout, tenir la foi catholique : s’il ne la garde pas entière et pure, il périra sans aucun doute pour l’éternité » (Saint Athanase – cf. > ici).
Et si nous ne voulons pas de la messe promulguée par Paul VI, c’est parce que cette liturgie protestantisée ne nous nourrit pas de la foi catholique, ne permet plus la transmission non équivoque de la foi traditionnelle (la preuve en est par le fait que, partout, elle a eu pour conséquence un affaiblissement de la foi, et des remises en question de l’enseignement traditionnel), ne nous greffe plus sur la Tradition vivante (et la preuve s’en trouve dans l’effondrement catastrophique de la pratique religieuse, et la débâcle des noviciats et des séminaires) : la liturgie postconcilaire n’est en définitive rien moins que mortifère ; depuis un demi-siècle elle engendre et accroît le déclin de la Chrétienté.
Notre-Seigneur nous a donné un critère infaillible de discernement : « A fructibus eorum cognoscetis eos : vous les reconnaîtrez à leurs fruits » (Matth. VII, 16).

   Il y a, certes, dans les diocèses, quelques bons prêtres qui, quoique célébrant le Novus Ordo, ont la foi, sont pieux et zélés, et maintiennent encore vivants certains îlots de catholicité.
Outre le fait qu’ils sont d’une manière générale aux prises avec les méthodes terroristes des « laïcs engagés » modernistes, et qu’ils sont rarement soutenus par leurs confrères et par leur hiérarchie, on peut affirmer qu’ils sont catholiques malgré le nouvel Ordo Missae bien plus que grâce à lui, et parce qu’ils ont, par ailleurs, la volonté et prennent des moyens pour rester greffés sur la Tradition vivante de l’Eglise par une spiritualité forte, nourrie des écrits des Pères et des Docteurs, nourrie des exemples des saints, nourrie du Magistère authentique.

   La réforme liturgique postconciliaire a touché au fond des choses : elle a fragilisé les fondations, ébranlé le fondement, et, depuis, l’édifice a perdu sa stabilité, se lézarde, menace ruine.
L’actuel occupant du trône pontifical, dans son motu sordido intitulé « Les geoliers de la Tradition » ou « les gardiens de la trahison » (puisque ce sont des traductions également valables des mots latin Traditionis custodes) argumente en faveur de l’extermination de la célébration de la Messe latine traditionnelle en tentant de récupérer en sa faveur l’antique adage « Lex orandi, lex credendi » (La loi de la prière, c’est la loi de ce que l’on croit) et en prétextant qu’il ne peut donc, en raison de l’unité de la foi, y avoir deux missels. Cette argumentation de sophiste constitue en réalité un aveu : l’aveu que ce n’est pas la même foi qui est exprimée dans le missel latin traditionnel et dans le missel réformé après le concile vaticandeux, l’aveu que le changement de liturgie avait bien pour finalité de changer le fond des choses, l’aveu que si le Novus Ordo doit être hégémonique c’est afin de faire disparaître la foi traditionnelle et en imposer une nouvelle

    La fidélité à la foi reçue des Apôtres, la fidélité à la Tradition bimillénaire, la fidélité aux Pères et Docteurs de l’Eglise, la fidélité au Magistère authentique, la fidélité aux exemples des saints nous impose, au contraire, de conserver la Messe latine traditionnelle afin de rester pleinement catholiques nonobstant les menaces et objurgations des hiérarques qui ne remplissent plus leur mission d’authentiques gardiens de la Tradition et qui collaborent au travail de sape de la Chrétienté.

   Gratitude éternelle envers Monsieur l’Abbé Bryan Houghton, dont la vie et les exemples sont là pour nous rappeler que toucher au fond des choses c’est trahir la vérité, et qu’il vaut mieux être rejeté, calomnié, marginalisé, tenu pour rien et persécuté plutôt que d’abandonner notre sublime liturgie latine traditionnelle, vecteur et gardienne de la foi.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur

Cimetière de Viviers - tombe abbé Bryan Houghton

Tombe de Monsieur l’Abbé Houghton au cimetière de Viviers
(lui-même a insisté pour qu’on n’en retirât pas la mousse)

2022-113. Message de Sa Majesté le Roi Louis XX à l’occasion du troisième centenaire du Sacre de son prédécesseur le Roi Louis XV.

1722 – 25 octobre – 2022

Troisième centenaire du Sacre
de
Sa Majesté le Roi Louis XV

     Au matin de ce 25 octobre 2022, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XX, a publié sur les réseaux sociaux le message suivant, afin non seulement de commémorer le troisième centenaire du Sacre de son prédécesseur, Sa Majesté le Roi Louis XV (dimanche 25 octobre 1722), mais aussi pour donner une fois encore une brève mais magnifique leçon politique à notre temps.
Nous nous permettons de reproduire en caractères gras les parties les plus « percutantes » de ce texte magistral.

Sacre de Louis XV

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       Nous commémorons aujourd’hui le tricentenaire du Sacre du Roi Louis XV à Reims, le 25 octobre 1722. J’aurais dû assister aux cérémonies qui s’y sont déroulées les 22 et 23 octobre, en présence des autorités religieuses, culturelles et politiques, mais des contraintes de dernière minute m’ont, hélas !, empêché de m’y rendre.

   Cette commémoration est l’occasion de rappeler ce que représente le Sacre, un événement parmi les plus éminents de la Royauté. A ce titre, le Sacre compte encore de nos jours parmi les cérémonies les plus connues de l’ancienne France, et ce alors même qu’il était assez rare : il y en eut seulement deux au XVIIIème siècle, deux au XVIIème.
C’est que le Sacre revêt une dimension politique de tout premier plan. Il permet en effet de réaffirmer, roi après roi, la transcendance sans laquelle il n’est pas de vrai pouvoir, à la fois fort et équilibré. Mettre le divin au cœur du pouvoir permet d’abord au Souverain d’avoir toujours présent à l’esprit qu’il n’est pas un maître absolu, parce qu’il n’est pas lui-même à l’origine de son propre pouvoir, et qu’il devra par suite rendre des comptes de l’exercice de ce pouvoir devant Dieu. Cela permet aussi à ses sujets de se souvenir qu’il y a un ordre des choses, qui dépasse la volonté et les désirs des hommes, et qui ne saurait être enfreint sans péril.

   Comment ne pas y être tout particulièrement sensibles en des jours où les événements tragiques se multiplient dans notre pays, jusqu’à parfois atteindre des sommets d’horreur, comme tout dernièrement avec le meurtre barbare de cette jeune enfant à Paris ?

   L’onction du Roi consacrait ainsi le bien commun comme principe qui légitime le pouvoir, celui du plus grand et du plus puissant comme celui du plus humble. Le Sacre rappelait que, tous, nous sommes responsables de nos actes. Les Rois, mes ancêtres, le savaient et le serment qu’ils prononçaient au jour du sacre demeurait pour toujours leur principale loi. C’est ce qui fit la grandeur de leur office pouvant aller jusqu’au sacrifice, comme pour Louis XVI.

   Puisse ce tricentenaire nous donner l’occasion de redécouvrir le sens du pouvoir comme service de la communauté, d’un pouvoir qui revêt de ce fait par nature une dimension transcendante. Ainsi une nouvelle fois la commémoration servira l’action ; la mémoire servira au présent.

Grandes Armes de France

2022-109. Hommage à la Révérende Mère Geneviève Gallois qui, par une « Simple Question », m’a ouvert des perspectives spirituelles infinies…

19 octobre,
Fête de Saint Théofrède de Carméri (cf. > ici) ;
Mémoire de la Bienheureuse Agnès de Jésus (cf. > ici et > ici) ;
Mémoire de Saint Pierre d’Alcantara ;
Anniversaire du rappel à Dieu de S.M. la Reine Marie-Thérèse de France (cf. > ici) ;
Anniversaire du rappel à Dieu de la Révérende Mère Geneviève Gallois, osb.

Bédoin - chapelle de la Madelène

Bédoin (Comtat Venaissin) : chapelle de la Madeleine

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Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

      A l’heure où je vous écris – l’heure où « le soir étend sur la terre son grand manteau de velours » -, en ce 18 octobre 2022, cela fait exactement quarante-cinq ans un mois et onze jours, que, en conclusion de la fête de la Nativité de Notre-Dame, le jeudi 8 septembre 1977, je descendais de voiture sur l’aire de stationnement aménagée au chevet d’une toute petite chapelle romane du XIème siècle édifiée sur l’un des contreforts méridionaux du Mont Ventoux, au débouché de la « Combe obscure », en contrebas de la route départementale qui vient de Malaucène et se dirige vers le village de Bédoin (nota bene : nous avons déjà évoqué ce village dans les pages de ce blogue, à propos du massacre des catholiques auquel les révolutionnaires se livrèrent le 28 mai 1794 – cf. > ici).
Cette chapelle, dite de la Madeleine (ou de la Madelène selon la graphie héritée du provençal), était alors le siège du « Prieuré Sainte Madeleine » fondé par Dom Gérard Calvet (1927-2008), et j’y venais assister à la prise d’habit d’un ami, condisciple de lycée pendant l’année scolaire précédente, qui, sitôt l’obtention du baccalauréat, avait rejoint la jeune et dynamique communauté bénédictine traditionnelle, dont les moines, en raison de l’exigüité des lieux, vivaient dans des caravanes devenues légendaires !

   L’ami à la prise d’habit duquel je venais assister était plus âgé que moi. En cette fin d’été 1977 je venais juste d’avoir 15 ans, j’entrais en classe de première, et, depuis une année (il y avait eu « l’été chaud » 1976 où avait éclaté « l’affaire Lefebvre », puis, en février 1977, la libération de Saint-Nicolas du Chardonnet… etc) la découverte de l’existence et de la vitalité du mouvement traditionnel avait provoqué en moi un sursaut salutaire : feu le Maître-Chat Lully a déjà eu l’occasion d’en parler dans les pages de ce blogue (cf. > ici), et il avait justement cité cette soirée au Prieuré Sainte Madeleine et l’électrochoc spirituel que j’y ai reçu…

Bédoin Sainte-Madeleine

carte postale datant de l’époque où la communauté fondée par Dom Gérard Calvet occupait l’ancien Prieuré de la Madeleine à Bédoin,
avant la construction de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux 

   Mais il y a un détail que je n’avais pas mentionné dans l’interrogatoire que Monseigneur le Maître-Chat Lully m’avait alors fait subir et dont je veux parler ce soir : ce soir spécialement parce que ce 19 octobre 2022 marque le soixantième anniversaire du rappel à Dieu d’une moniale bénédictine qui, sans l’avoir jamais rencontrée (puisqu’elle est morte le 19 octobre 1962, je n’avais que trois mois et demi à cette date !), a exercé sur moi une influence durable : Mère Geneviève Gallois.

   En effet, aux murs de la pièce d’accueil où nous avions pu rencontrer les moines, se trouvaient accrochés quelques cadres : je suis bien incapable de dire ce qu’ils représentaient, sauf pour l’un d’eux qui m’a marqué pour la vie et qui montrait exactement ceci :

Simple question - Mère Geneviève Gallois - Vie du Petit Saint Placide

   Le trait, caricatural mais tellement éloquent, et surtout la légende de la scène, eurent sur mon âme un effet percutant.

   Je n’eus pas alors le loisir de poser des questions au sujet de ce cadre, mais à quelque temps de là, écrivant à mon ami novice, je lui demandais s’il pouvait m’en recopier le texte et surtout s’il pouvait me dire d’où provenait cette image.
Il me répondit que c’était la reproduction d’une page d’un ouvrage un peu inclassable d’une bénédictine, Mère Geneviève Gallois, qui s’intitulait « La vie du Petit Saint Placide » et que, bien que sa première publication datât de 1953, on pouvait encore le trouver en librairie.
Je fonçai aussitôt chez un libraire et commandai l’ouvrage…

  Je ne le lus pas : je le dévorai !
Pas une fois, mais plusieurs à la suite.
Inlassablement, je reprenais ma lecture au début dès que j’arrivais à la fin !
Avec une avidité spirituelle qui croissait à chaque relecture, je réfléchissais à ces leçons que je découvrais à travers ces dessins tellement improbables et expressifs : j’interrogeais ce prêtre érudit – mon professeur de grec – dont j’ai parlé dans le récit des souvenirs sus mentionné (cf. > ici), et je réfléchissais encore, et encore, et encore…
En fait, je disais que je « réfléchissais » mais je crois que c’est par cet ouvrage que je suis alors entré, sans le savoir, dans les voies de la méditation.

   Ce que Marcelle Auclair a écrit dans la préface se vérifiait : « La Vie du Petit Saint Placide est un exquis traité d’oraison par l’image (…) Les images de Mère Geneviève tendent à notre futilité un piège subtil. On feuillette, et on est pris ; l’œil est distrait, mais l’esprit, de traits de plume en traits de lumière, se recueille. Et le divin tour est joué, ou plutôt ce que Mère Geneviève appelle : « ce drame poignant qui se joue entre l’âme et Dieu ». Notre cœur est tout entier « aspiré comme par un siphon » : c’est ainsi que le petit saint Placide fut aspiré par Dieu ».

moine perplexe gif

   « La Vie du Petit Saint Placide » ne me quitta pas de toute l’année de première ; elle était toujours dans la sacoche qui me tenait lieu de cartable, afin de l’avoir partout avec moi et de pouvoir m’y replonger à tout moment : pendant les études où je m’ennuyais, et pendant les cours qui m’ennuyaient (et dont, en définitive, les professeurs, résignés, préféraient que je fusse absorbé par un livre – alors pourquoi pas un livre avec des caricatures de moines réalisées par une bonne sœur ! – plutôt que je dissipasse tout le reste de la classe).
J’étais totalement « accro ».

   Et je le suis resté.
« La Vie du Petit Saint Placide » est un ouvrage qui m’accompagne depuis quarante-cinq ans. Dans mon bureau, toujours à portée de main, à côté des ouvrages de Gustave Thibon. Dans tous mes déménagements, toujours dans un carton spécial : celui dont on sort le contenu en priorité.

   Bien sûr, j’ai voulu savoir qui était cette Mère Geneviève Gallois, qui avait quitté cette terre alors que je venais d’y entrer. J’ai été étonné du « parcours » de cette jeune artiste inclassable qui, convertie par la liturgie grégorienne des Bénédictines de la Rue Monsieur, entra chez elles en 1917, mais dut attendre vingt-deux ans pour être admise à la profession solennelle, tant son tempérament original et fort déroutaient ses supérieures !
J’ai été émerveillé du travail de la grâce dans cette âme dont les dessins, franchement moches – osons le mot -, sont porteurs d’une telle force et fécondité spirituelles !

   Je me suis souvent posé cette question : si Mère Geneviève Gallois, au lieu de s’éteindre à 74 ans le 19 octobre 1962, avait connu les soubresauts du concile vaticandeux et la période de folie qui l’a suivi, n’aurait-elle pas eu quelques coups de crayons bien sentis, pour traduire en images suréloquentes la vérité pérenne et paisible découlant du bon sens spirituel et de l’authentique vie intérieure en des temps qui, dans la Sainte Eglise, en ont cruellement manqué ?  

   Quoi qu’il en soit, à titre personnel, au jour anniversaire de sa mort, je ne peux que rendre à Dieu de très ferventes actions de grâces pour tout ce qu’elle a fait pour moi à travers son Petit Saint Placide !

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur

« Mais, mon cher Père, la leçon de la guerre n’a pas porté !
Le monde ne se convertit pas ! etc. etc… »
Petit Placide réfléchissait :
Et les Bons Pères, est-ce qu’ils se convertissent ?
Et Moi ? Ce Moi qui est le seul pays de Mission sur lequel j’ai pouvoir,
et dont j’aurai à rendre compte.

moine perplexe gif

2022-108. Nous avons lu et nous avons aimé : « Pour Dieu et le Roi… avec Bonchamps ».

18 octobre,
Fête de Saint Luc, évangéliste ;
Anniversaire de l’Edit de Fontainebleau (cf. > ici et > ici) ;
Anniversaire de la mort du marquis de Bonchamps (cf. > ici) ;
Anniversaire de l’exécution du marquis de Surville (cf. > ici).

      En 2013, Brigitte Lundi commençait la collection « Pour Dieu et le Roi… », aux éditions Les Petits Chouans, avec un premier volume intitulé « Pour Dieu et le Roi… en Vendée ».

Brigitte Lundi - Pour Dieu et le Roi en Vendée

   Cette série s’adresse prioritairement aux enfants… mais de très très grands enfants – tel que mon papa-moine aujourd’hui sexagénaire – trouvent eux aussi un très très grand plaisir à la lecture de ces ouvrages, puisque cette collection compte aujourd’hui quatre volumes : après « Pour Dieu et le Roi… en Vendée » (2014) sont venus « Pour Dieu et le Roi… avec Cathelineau » (2014), « Pour Dieu et le Roi… avec Stofflet » (2015) et « Pour Dieu et le Roi… avec Bonchamps » (2018). Et maintenant, j’attends la suite avec impatience !

   Pour moi, qui suis en pleine période d’éducation, c’est une manière tout-à-fait passionnante d’aborder l’histoire de ces héros dont Frère Maximilien-Marie me parle avec enthousiasme et ferveur.
C’est également parfait pour des parents ou des grands parents désireux de transmettre à leur descendance la flamme sacrée qui anima ces grandes figures de notre histoire catholique et royale !

pattes de chatTolbiac.

L’auteur :

   Tombée dans la marmite de la contre révolution quand elle était petite, Brigitte Lundi a pris sa plume pour transmettre l’amour de la France et de la civilisation européenne et chrétienne. Petite fille de réfractaires vendéens et d’officiers, elle a raconté les guerres de Vendée pour les enfants. Elle fait partie du comité de lecture de Livres en Famille (où l’on peut trouver tous ses ouvrages), et contribue à la collection jeunesse Bulle d’Or. Devant la décrépitude du pays, elle a écrit un récit de politique fiction L’Aube de Jéricho, un « 25 ans après » La Nuit de Jéricho, co-écrit par Alain Sanders et Serge de Beketch. Elle collabore occasionnellement à TV Libertés et Boulevard Voltaire pour la défense de la culture française et européenne. Son dernier ouvrage, Les Derniers Croisés, préfacé par Alain Sanders, est paru au printemps 2022, inspiré par une idée de Jean Raspail.

Brigitte Lundi - Pour Dieu et le roi avec Bonchamps

Pour Dieu et le Roi… avec Bonchamps :

   Ce quatrième volume, comme les précédents, se présente sous la forme du récit d’un adulte à des enfants avides d’apprendre. Cette fois, c’est leur oncle, religieux montfortain à Saint-Laurent-sur-Sèvre, qui – à travers huit lettres – raconte à ses neveux la geste de Monsieur de Bonchamps, sans oublier son voyage aux Indes, avant le déclenchement de la grande révolution, épisode que beaucoup ne connaissent que d’une manière indicative et très superficielle. Il se lit avec plaisir et facilité, et cependant on n’y trouve aucune superficialité : le sujet ne saurait le permettre. On suit donc Charles-Melchior de Bonchamps à Paris, dans la défense de la personne sacrée du Roi aux Tuileries, jusqu’au sinistre 10 août 1792, puis dans son retour en Anjou et dans les péripéties de la guerre de Vendée, jusqu’à sa mort en héros et en héros chrétien, pour lequel le pardon n’est pas un vain mot ! Quant au dernier chapitre de l’ouvrage, il constitue une belle et émouvante surprise, que je vous laisserai découvrir par vous-mêmes…

Tombeau de Bonchamps à St-Florent-le-Vieil

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