Archive pour la catégorie 'Chronique de Lully'

2015-72. « …pleine de paix à la volonté de mon Dieu, à laquelle je ne voudrais pas contredire d’un seul clin d’oeil. »

21 août,
fête de Sainte Jeanne-Françoise Frémiot de Chantal.

Vray portrait de la Rde Mère de Chantal

« Vray portrait de la Révérende Mère de Chantal »
(gravure publiée dans l’ouvrage intitulé : « Les Epistres spirituelles de la Mère Jeanne-Françoise Frémiot, baronne de Chantal, fondatrice et première supérieure de l’Ordre de la Visitation Saincte-Marie » – 1644)

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Vous connaissez les liens spirituels qui nous unissent à l’Ordre de la Visitation (cf. ici) : vous concevez donc sans peine combien aujourd’hui cette fête de Sainte Jeanne-Françoise de Chantal nous est chère.
Dans le même temps, nous nous souvenons que le 21 août est le jour anniversaire de la naissance de Saint François de Sales, en l’an 1567.
Aussi, à l’occasion de cette fête et de cet anniversaire, permettez-moi de vous donner à méditer une très belle lettre de Sainte Jeanne de Chantal que nous avons lue ce matin, Frère Maximilien-Marie et moi, dans un gros volume publié en 1644 que nous avons le bonheur de posséder dans la bibliothèque du Mesnil-Marie.
Cette lettre émouvante est la réponse que, au début de l’année 1623, la sainte fondatrice adressa à son frère puiné, Monseigneur André Frémiot (1573-1641), archevêque de Bourges, qui lui avait écrit une lettre de condoléances à l’annonce de la mort de Saint François de Sales (survenue à Lyon le 28 décembre 1622).
Je la retranscris en la mettant en conformité avec les usages de l’orthographe et de la ponctuation actuels, pour une plus grande commodité de lecture, mais je ne résiste toutefois pas à la tentation de vous en montrer la graphie originelle par le cliché ci-dessous.
On remarquera que, quoique s’adressant à son frère, plus jeune qu’elle, Sainte Jeanne de Chantal ne se permet néanmoins aucune familiarité, et que la confiance et l’affection fraternelles qu’elle éprouve pour lui ne constituent cependant pas à ses yeux un motif d’oubli que ce frère est revêtu de la dignité épiscopale : quel bel exemple pour nos temps de confusion et de laisser-aller général…

Je vous souhaite une bonne lecture, et – plus encore – d’entrer dans les admirables sentiments dont cette lettre témoigne.

Lully.

Ste Jeanne de Chantal lettre sur la mort de St François de Sales

à Monseigneur
l’Archevêque de Bourges,
son frère.

Elle lui répond dans la douleur où elle était, à l’occasion du trépas du Bienheureux François de Sales.

            Monseigneur,
vous voulez savoir que fait mon coeur en cette occasion, hélas ! il a, ce me semble, adoré Dieu, au profond silence de la très dure angoisse. Certes il n’avait jamais ressenti amertume si grande, ni mon pauvre esprit reçu une secousse si pesante ; ma douleur est plus grande que je saurais jamais dire, et (il) me semble que toutes choses se ruent pour accroître mes ennuis et me porter au regret.
Il me reste pour toute consolation de savoir que c’est mon Dieu qui a fait, ou permis, que ce coup ait été fait ; mais, hélas ! que mon coeur est faible pour supporter ce pesant fardeau ; et qu’il a bien besoin de force.

Oui, mon Dieu ! Vous aviez prêté cette belle âme au monde, maintenant Vous l’avez retirée : Votre Saint Nom soit béni ! Je ne sais point d’autre cantique que celui-là : le Nom de mon Seigneur soit béni !
Mon très cher Père, et mon très cher frère, mon âme est pleine d’amertume, mais aussi pleine de paix à la volonté de mon Dieu, à laquelle je ne voudrais pas contredire d’un seul clin d’oeil ; non, je vous assure, mon très cher Père !
Donc, il Lui a plu de nous ôter ce grand flambeau de ce misérable monde pour le faire luire en Son Royaume (comme nous croyons assurément) : Son Saint Nom soit béni !
Il m’a châtiée comme je méritais : car vraiment je suis trop misérable pour jouir d’un si grand bien, et d’un contentement tel qu’était celui que j’avais de voir mon âme entre les mains d’un si grand homme, vraiment homme de Dieu. Je pense que cette Bonté suprême ne veut plus que j’aie de plaisir sur la terre, et je n’y en veux plus avoir aussi que celui d’aspirer après le bonheur de voir mon très cher Père dans le sein de Son éternelle bonté.
Je veux bien pourtant demeurer dans cet exil, oui, mon très cher frère ! oui, véritablement, ce m’est un exil bien dur, l’exil de cette misérable vie, mais j’y veux demeurer, dis-je, autant que la souveraine Providence le voudra, Lui remettant le soin de disposer de moi selon Son bon plaisir.
Je me recommande à vos saints sacrifices, et cette petite famille (note 1) qui est toute en douleur, laquelle fait son petit gémissement avec tant de douceur et de résignation que j’en suis toute consolée. Nous en partirons bientôt pour retourner en notre pauvre petite demeure d’Annecy, là où ma douleur se renouvellera en voyant nos très chères soeurs.
Dieu soit béni de tout ! Vive Sa volonté ! Vive Son bon plaisir ! Je soulage bien mon pauvre coeur de vous parler de la sorte, et béni soit mon Dieu qui me donne encore cette consolation.
Je vous remercie de votre charitable lettre ; croyez que vous avez bien gagné les oeuvres de miséricorde, car elle m’a fait grand bien, et à vos chères filles (note 2) de recevoir vos nouvelles. Continuez-nous cette sainte affection, s’il vous plaît, et vous assurez, mon très cher Père, que nous vous porterons toujours en notre souvenir devant Dieu : car c’est de coeur que nous sommes vos petites filles, et moi spécialement, qui, comme la plus nécessiteuse de toutes, me confie en votre paternelle affection.

   Je suis en l’amour du Sauveur, Monseigneur, votre très humble, très obéissante, et indigne fille et servante en Notre-Seigneur,

Sœur Jeanne-Françoise Frémiot.

Note 1 : Sainte Jeanne de Chantal se trouvait à Lyon. La « petite famille » dont elle parle est la communauté de la Visitation Sainte-Marie de Bellecour.
Note 2 : « vos chères filles » et, à la phrase suivante, « vos petites filles » : Sainte Chantal désigne ainsi les religieuses de la Visitation qui ont des sentiments d’humble révérence filiale envers le prélat qui est leur père dans la foi.

Les Epistres de la Mère de Chantal

2015-71. Compte-rendu photographique des cérémonies du 15 août 2015 à l’église de Ceyssac.

Lundi soir 17 août 2015,
dans l’Ordre de Saint Augustin la fête de Sainte Claire de la Croix.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

Nous avons reçu aujourd’hui une assez grande quantité de photographies qui ont été prises ce 15 août dernier à l’occasion de la Sainte Messe de l’Assomption et de la procession du Voeu de Louis XIII, dans notre petite paroisse de rite latin traditionnel qui se réunit dans l’église du village de Ceyssac, à côté du Puy-en-Velay.

Beaucoup d’entre vous le savent déjà – mais comme j’ai toujours de nouveaux lecteurs je me dois de le préciser à leur intention – , le Refuge Notre-Dame de Compassion est implanté dans le diocèse de Viviers où les dispositions des papes Jean-Paul II et Benoît XVI en faveur des fidèles attachés à la Messe latine traditionnelle ne reçoivent pas d’application régulière (cf. > ici) : nous rejoignons donc de manière habituelle la communauté traditionnelle à laquelle feu Monseigneur Henri Brincard, évêque du Puy, avait attribué cette église du village de Ceyssac.

Frère Maximilien-Marie apporte tout le concours qu’il lui est possible de donner à la vie paroissiale, et, lorsque cela est possible, nous sommes heureux de faire profiter à la liturgie et à la ferveur de toute notre communauté les reliques ou ornements que nous conservons au Mesnil-Marie.
Ainsi, traditionnellement, pour la Sainte Messe du 15 août, notre Frère emporte-t-il à Ceyssac notre précieux ornement de l’Assomption :

Ornement de l'Assomption 1 détail

Broderie centrale sur le dos de la chasuble du Mesnil-Marie pour la fête de l’Assomption.

Le 14 août, vigile de l’Assomption (et mémoire de Saint Maximilien-Marie Kolbe, cf. > ici), le grand ménage de l’église avait été mené à bien et tout avait été soigneusement préparé.

En ce matin du 15 août, le sanctuaire de notre modeste église était donc resplendissant : nous en avons d’autant plus conscience que lorsque notre communauté a pris possession de cette église, elle était très loin d’être aussi belle !
C’est là que nous pouvons apprécier le chemin parcouru en nous souvenant du temps qu’il a fallu pour nettoyer, décaper, remettre en ordre, réparer ce qui était détérioré (par les outrages du temps ou par ceux des sinistres années post-concilaires), retrouver ce qui avait été mis aux oubliettes, remplacer ce qui avait disparu. Une paroissienne habile et dévouée a confectionné les conopées et les parements du sanctuaire, taillé les nappes qui manquaient ; nous avons « recollé » le maître-autel qui avait été stupidement coupé en deux ; nous avons replacé dans le ciborium la reproduction de la fameuse Vierge Noire du Puy avec laquelle le village de Ceyssac a un lien privilégié (cf. note en bas de page) et nous lui avons remis sa couronne sur la tête ; nous avons décollé une moquette infame et misérable qui recouvrait les dalles du sanctuaire… etc.

Ceyssac 15 août 2015 1 - le sanctuaire

Comme je vous l’écrivais en commençant, nous avons donc reçu ce jour d’hui une abondante série de photographies prises à l’occasion de ce 15 août.
Je ne peux pas toutes les publier et j’ai dû opérer une sélection (cela fait parfois un peu mal au coeur de devoir choisir !). Celles qui suivent, me semble-t-il, vous donneront un aperçu de l’ensemble de la cérémonie : Messe et procession.
Vous comprendrez aussi que, pour des raisons de discrétion, j’ai parfois dû flouter des visages…

Voici par exemple une photographie prise pendant le chant de la préface :

Ceyssac 15 août 2015 2 - à la préface

Puis deux beaux clichés réalisés lors de l’élévation du Corps adorable de Notre-Seigneur et de Son Très Précieux Sang :

Ceyssac 15 août 2015 3 - à l'élévation du Corps du Christ

Ceyssac 15 août 2015 4 - à l'élévation du Précieux Sang

Ci-dessous, une vue générale de la nombreuse assistance. Photographie réalisée lors des purifications, alors que les fidèles sont en action de grâces silencieuse :

Ceyssac 15 août 2015 5 - l'assistance vue du fond de l'église

Certains fidèles d’ailleurs n’avaient pas trouvé place dans l’église et ont suivi la Sainte Messe depuis le parvis avec une édifiante ferveur :

Ceyssac 15 août 2015 6 - des fidèles qui ont suivi la Messe sur le parvis

Afin de permettre aux fidèles qui le souhaitent de participer à la procession de la Vierge Noire, qui se déroule dans les rues du Puy l’après-midi, nous accomplissons la procession du Voeu de Louis XIII immédiatement après la Messe.
Lors de cette procession, la statue de la Madone est portée sur un brancard fleuri, sur lequel est également placé un reliquaire – apporté du Mesnil-Marie - dans lequel est renfermé un fragment du Voile de la Très Sainte Vierge Marie (Voile que portait Notre-Dame lors de l’Annonciation, offert par l’impératrice Irène de Constantinople au Bienheureux Charlemagne, puis donné par Charles le Chauve à la cathédrale de Chartes).
Au chant des litanies de la Sainte Vierge, les fidèles, suivant la croix de procession, sortent de l’église, puis viennent le brancard et enfin Monsieur l’Abbé.

Ceyssac 15 août 2015 7 - procession sortie de la Vierge

La procession descend vers la place du village dont elle fera le tour.

Après le chant des litanies, ce sont des cantiques populaires en français qui sont repris avec flamme.

Ceyssac 15 août 2015 8 - procession dans le village

La statue de la Madone et le reliquaire pendant la procession :

Ceyssac 15 août 2015 9 - le brancard avec la Vierge et le reliquaire

Détail du reliquaire :

Ceyssac 15 août 2015 10 - le reliquaire du Voile de la Vierge

Au retour dans l’église, le brancard de procession est déposé dans le sanctuaire.
C’est alors qu’est lu le texte complet de l’Edit de Saint-Germain, publié le 10 février 1638, par lequel Sa Majesté le Roi Louis XIII a consacré sa personne, sa couronne et le royaume de France tout entier à la Très Sainte Vierge Marie, ordonnant que désormais cette consécration soit renouvelée tous les ans, à l’occasion de la fête de l’Assomption.

Ornement de l'Assomption 2 détail

Chasuble de l’Assomption du Mesnil-Marie (détail de la Madone)

Après le chant du « Sub tuum praesidium » et les oraisons d’usage renouvelant cette consécration, la cérémonie s’est achevée sur un vibrant « Salve Regina », la très populaire antienne du Puy - antiphona de Podio - que, ce soir,  je me permets de paraphraser ainsi :

« Nous vous saluons, ô Reine de la France,
Mère de miséricorde, qui êtes la vie, et la douce espérance de ce Royaume à la dérive !
Vers vous, le peuple français dans la détresse crie,
vous suppliant de faire cesser son errance pécheresse :

Vers vous, les Français, gémissant et pleurant sur l’apostasie officielle de ce pays,
élèvent les soupirs de leurs âmes endolories !
O v
ous à qui ce Royaume a été solennellement consacré,
soyez son inlassable avocate auprès du divin Juge :
Fléchissez Son Coeur et obtenez de Lui les grâces d’une conversion profonde et générale,
afin que cette France, pénitente et reconnaissante,
retrouvant la fidélité aux grâces de sa vocation,

chante à la face de toutes les nations la gloire du Christ-Roi,
et votre toute puissante intercession :
ô clémente, ô toute bonne, ô douce Vierge Marie ! »

Lully.

Ornement de l'Assomption 3 détail

Chasuble de l’Assomption du Mesnil-Marie (détail d’une broderie).

Note : Selon la tradition, c’est à « la dame de Ceyssac » que la Très Sainte Vierge Marie est apparue, lorsque, pour la seconde fois, elle s’est manifestée au Puy, enjoignant de lui dédier un sanctuaire sur le Mont Anis et opérant, pour preuve de son intervention céleste, des guérisons miraculeuses.

2015-70. « Un squelette de messe pour une Eglise squelettique ».

       Nous sommes extrêmement reconnaissants à notre amie Béatrice (qui accomplit depuis 2006 un remarque travail d’information et de publication avec son site « Benoît et moi ») d’avoir traduit en français et ainsi rendu accessible aux lecteurs francophones l’éditorial de ce mois d’août du site italien « Radicati nella Fede ».

   Analyse irréfragable, logique impitoyable, constat d’une terrible lucidité : tels sont les qualificatifs que nous attribuons à cet article.
Comme, malgré nos recommandations réitérées, nous ne sommes pas certains que les lecteurs de ce modeste blogue vont régulièrement lire les publications de « Benoît et moi », nous avons demandé à Béatrice, qui nous l’a très volontiers accordée, la permission de reprendre ci-dessous sa traduction, et nous lui en savons un gré immense.

Lully.

Caspar David Friedrich l'abbaye dans une forêt de chênes

Un squelette de messe pour une église squelettique :

       Ils attendaient une nouvelle Eglise, pour cela ils se sont mis à changer la messe.
Ils voulaient une Eglise avec de nouveaux dogmes et une nouvelle morale, alors ils ont dû retoucher la messe catholique, au point d’en faire un squelette d’elle-même.
Et à messe squelettique correspond squelette d’Eglise, faite d’une dogmatique et d’une morale squelettiques.

   La nouvelle liturgie a prétendu sauter deux millénaires d’histoire chrétienne, avec l’illusion de renouer avec un mythique début du christianisme.
Ils ont dit, ces messieurs de la réforme post-conciliaire, qu’il était nécessaire de simplifier, de faire ressortir la noble simplicité du rite catholique. Ils ont considéré comme fondamentalement négatif tout ce qu’avait fait l’Eglise durant des siècles et des siècles, pour rendre le rite catholique de plus en plus limpide et pédagogique. Ils ont enlevé et encore enlevé, considérant pratiquement tout ajout comme négatif, et il en est sorti un squelette de messe.
Une messe pleine de vides et de non-dits, vides et non-dits remplis par l’imagination du célébrant et des fidèles. Et l’imagination s’est multipliée, autant qu’il y a d’églises dans le monde, parce qu’on sait bien qu’on ne peut pas vivre d’un squelette : les hommes rembourrent le squelette, mais la chair et le sang qu’ils lui donnent ne sont pas ceux de Dieu, mais ceux de la dictature de la mentalité commune.
Ainsi, en fonction de la saison, nous avons eu les messes socialistes, les messes engagées, les messes intimes, les messes joyeuses, les messes verbeuses, les messes-catéchèses, les messes de guérison, les messes charismatiques, les messes missionnaires, les messes rapides, et ainsi de suite… bref, la messe, c’est toi qui la construis afin qu’elle corresponde à toi et à ton christianisme.

La messe ainsi appauvrie n’a pas nourri, et il a fallu se tourner vers les diverses idéologies du moment pour la rembourrer. Ayant enlevé beaucoup de Dieu, la messe a dû être remplie avec beaucoup d’humain, pour la considérer encore utile : une tragédie, la perte du cœur catholique, c’est-à-dire la Rédemption opérée par le Christ crucifié.

   Et la tragédie s’est propagée à tout l’organisme catholique : la messe nouvelle, squelettique, pleine de vide, est devenue tellement ambigüe qu’elle a produit un squelette de christianisme, au dogme et à la morale squelettiques ; un christianisme ambigu.
Les prêtres, réduits à célébrer un squelette de messe, n’ont plus été nourris et défendus par la messe elle-même, de sorte qu’à leur tour, ils n’ont plus nourri ni défendu le peuple.

   Nous parlions d’un Christianisme au dogme squelettique :
Que reste-t-il, pour la majorité des chrétiens d’aujourd’hui, du dogme catholique né de la Révélation divine ?
Presque rien.
Peut-être reste-t-il que Dieu existe, et qu’à la fin, il va nous sauver : aucun doute, de toute la Révélation, de tout le dogme, de tout le catéchisme, il ne reste presque rien dans le vécu de la majorité des chrétiens ; mais alors, pourquoi Dieu s’est-il révélé, pourquoi a-t-il parlé dans l’Ancien et le Nouveau Testament, pourquoi a-t-il accompli la Révélation en Jésus-Christ ? Il ne l’a certainement pas fait pour se voir « simplifié » horriblement dans le christianisme moderne.

   Certains diront que nous oublions la richesse biblique de la réforme liturgique !
Certes, la Bible, on l’a beaucoup lue, mais la messe squelettique l’a emporté aussi sur la Bible, tant et si bien que les chrétiens n’ont jamais été aussi ignorants qu’aujourd’hui dans l’histoire sacrée et dans la Sainte Ecriture. Oui, ils lisent la Bible à chaque occasion, mais ils ont été formés à l’idéologie du moment, qui rembourrait la messe squelettique.

   Nous parlions d’une morale chrétienne squelettique :
Que reste-t-il, pour la majorité des chrétiens d’aujourd’hui, de la richesse morale catholique ?
Ils savent peut-être que Dieu est amour, que nous devons nous aimer les uns les autres, et un peu plus : c’est peu.
De la morale catholique, de la loi et de la grâce, on ne sait presque plus rien.
Voilà pourquoi nous sommes terriblement sans défense face au déferlement de l’immoralité et face, surtout, à l’idéologie de l’immoralité, qui veut tout admettre, sous le prétexte de l’amour. Nous assisterons à la réalisation de l’apostasie : seront promulguées les lois les plus immorales avec le silence des catholiques, avec l’approbation de certains, et avec la fausse prudence des bergers, qui se tairont au nom de la liberté et du respect humain. Plus qu’une morale squelettique, c’est sa mort pure et simple.

   Tout a commencé avec le dépouillement de la messe, la vidant de ses défenses dogmatiques dans les mots et les gestes.
Et la renaissance commencera avec le retour à la messe catholique véritable et complète.

   Les réformateurs post-conciliaires voulaient un nouveau christianisme plus libre, plus humainement attrayant, à cette fin, ils ont privé la messe de ses défenses, et ils n’ont pas voulu défendre le Christianisme de Dieu.

   Paul VI n’avait peut-être pas prévu cette tragédie, il s’était peut-être illusionné de pouvoir limiter la simplification et la modernisation à la seule langue, peut-être… mais la langue est aussi contenu ; et les vides de la langue sont des vides de contenu, que le monde s’empresse de remplir comme il veut.

   Peut-être Paul VI n’avait-il pas imaginé autant, mais il est certain qu’aujourd’hui, un Pape ne pourra plus arrêter la dérive sans accepter le martyre. Oui, il devra accepter le martyre, parce que s’il essaie vraiment d’y porter remède, il sera attaqué par le monde, par ce monde qui s’est infiltré dans la Maison de Dieu.
Mais s’il n’accepte pas le martyre, il risquera de ne pas se comporter en Pape.

Missel romain traditionnel

Prière à Notre-Dame des Neiges :

miracle de la neige 5 août

Prière à Notre-Dame des Neiges :

     I. Par la très sainte résolution que vous avez vous-même inspirée dans les âmes du patricien romain Jean et de sa digne épouse, afin de leur faire consacrer à votre honneur tous leurs biens, puisque privés d’héritier par une stérilité invétérée, obtenez-nous, ô très Sainte Mère de Dieu, de savoir toujours tirer profit des contradictions et oppositions qui nous assaillent sur cette terre pour travailler plus ardemment à l’acquisition des biens éternels du Ciel, spécialement en soutenant les œuvres qui concourent à votre gloire.

Je vous salue, Marie…

     II. Vous avez révélé au même moment, tant au saint patricien Jean, à son épouse stérile et et au pape Libère, votre souhait de voir une église érigée en votre honneur, là où l’on trouverait le sol couvert de la neige miraculeusement envoyée par vous au plus fort de la chaleur estivale : par cette illustre révélation, obtenez-nous, ô très illustre Vierge, de toujours reconnaître clairement vos très saintes volontés pour que nous nous y conformions avec exactitude dans toute notre conduite.

Je vous salue, Marie…

     III. Sous les yeux de Rome toute entière, vous avez recouvert d’une neige miraculeuse le sommet du Mont Esquilin, et vous l’avez conservée intacte sous l’ardent soleil d’août, afin d’indiquer le lieu et les dispositions du sanctuaire que vous demandiez en votre honneur : par ce miracle inédit, obtenez-nous, ô puissante Reine céleste, de ne jamais douter de l’ampleur de votre pouvoir, aussi bien dans l’ordre de la nature que dans celui de la grâce, et de nous confier toujours en votre toute puissance.

Je vous salue, Marie…

     IV. Par cette leçon mystérieuse que vous avez donnée au monde entier en envoyant de la neige au mois d’août sur une des collines de Rome, vous avez symboliquement manifesté le devoir qui nous incombe de garder nos âmes pures, afin de bénéficier de votre sainte protection : obtenez-nous donc, ô Sainte Vierge des vierges, de nous préserver toujours des souillures de l’âme et de garder intacte la chasteté de notre état, afin d’avoir part aux bénédictions célestes que Dieu se plaît à répandre par vos mains.

Je vous salue, Marie…

     V. L’église qui vous fut ainsi dédiée sous le vocable de Sainte-Marie aux Neiges, rendue encore plus illustre par les saintes reliques de la Crèche de Notre-Seigneur rapportées de Bethléem et pour le titre de Sainte-Marie-Majeure qu’elle reçut enfin, fut de tout temps l’objet d’une sollicitude particulière des pontifes romains et de la dévotion de nombreux saints : par la gloire particulière que vous avez procurée à cette basilique, obtenez-nous, ô notre Mère et notre Souveraine, de toujours travailler à votre gloire, de nous dédier, autant qu’il est en notre pouvoir, à l’entretien et à l’ornementation de vos sanctuaires et de vos autels, afin que nous puissions, au terme de cette vie, être introduits auprès de vous dans le Temple du Ciel, pour y chanter avec vous un « Magnificat » éternel.

Je vous salue, Marie…

Oraison :

     Accordez à Vos serviteurs, nous Vous en prions, Seigneur notre Dieu, de jouir toujours de la santé de l’âme et du corps : et par la glorieuse intercession de la Bienheureuse Marie toujours Vierge, d’être délivrés des tristesses du temps présent et d’avoir part aux joies de l’éternité.
Nous Vous le demandons par Jésus-Christ Notre-Seigneur.

Ainsi soit-il.

Icône Salus populi romani Sainte Marie aux Neiges à Rome

Icône miraculeuse « Salus populi romani », attribuée à Saint Luc
(chapelle Borghese de la basilique Sainte-Marie-aux-Neiges, Rome)

2015-69. Dominus flevit : le mystère des larmes de Jésus.

Neuvième dimanche après la Pentecôte 2015.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

   Au neuvième dimanche après la Pentecôte, le Saint Evangile nous entraîne à contempler Notre-Seigneur Jésus-Christ pleurant sur Jérusalem (Luc XIX, 41-47). Permettez donc que je propose à votre réflexion et à votre méditation le texte de l’homélie prononcée à l’occasion de ce dimanche par Monsieur l’Abbé Henri V. lors de la Sainte Messe, à l’intention des fidèles réunis dans l’église de Ceyssac.

Bonne lecture et bonne méditation à vous…

Lully. 

Flevit super illam - Enrique Simonet 1892

« Flevit super illam » – toile monumentale d’Enrique Simonet (1892 – musée de Malaga)

Le mystère des larmes de Jésus.

Homélie de Monsieur l’Abbé Henri V.,
sur l’Evangile du IXe dimanche après la Pentecôte (Luc. XIX, 41-47).

Jésus a pleuré.
Il pleure.

Contemplons Jésus pleurant.
Cet Evangile a de quoi nous toucher. Comme ce spectacle inattendu est émouvant : le Fils de Dieu pleurant.

Adorons.
Et recueillons ces larmes divines avec piété et vénération ; elles attirent notre amour, n’est-ce-pas ? Qui pourrait être insensible aux larmes du Christ !

Un mauvais esprit pourrait s’en choquer, en y voyant un signe de faiblesse.
Mais c’est bien le Fils de Dieu qui pleure, Lui dont l’humanité sainte est d’une absolue perfection, Dieu qui a pris un cœur foyer d’émotion et dont la sensibilité est d’une infinie délicatesse, aux frontières de Son Esprit d’amour, le Fils de Dieu qui a voulu partager notre condition humaine ici-bas, dans cette vallée de larmes.

Jésus pleure avec ceux qui pleurent.
Mais là, pourquoi pleure-t-Il ?
Le Seigneur pense aux malheurs qui vont s’abattre sur Jérusalem à cause de l’infidélité des hommes. Car Jérusalem, c’est ce que le Père Lui a confié et qui est l’objet de Son amour et de Sa miséricorde.

Jérusalem représente tout d’abord le Peuple élu, celui de la Promesse, cette nation que Dieu avait chérie tout au long de l’Ancien Testament, mais qui dans son ensemble, exceptés quelques justes ainsi que les plus humbles, a refusé de reconnaître le Christ comme le Messie, au temps du Salut : « Il est venu chez les siens, et les siens ne l’ont pas reçu » (Jean I, 11).
Jésus pense donc aux calamités qui vont s’abattre en conséquence : la destruction de Jérusalem, la dispersion du peuple, mais aussi l’aveuglement et la dureté de cœur.
Certes, les dons de Dieu sont irréversibles, de sorte qu’Il leur garde Son amour au point même de prévoir que ce peuple reviendra à Lui avant la fin de ce monde.

De façon plus générale, cette Jérusalem sur laquelle pleure le Seigneur, représente les pécheurs qui refusent Sa grâce, la cité sans Dieu, là où l’amour de soi conduit à sa perte.
Souvenons-nous de la station sur le chemin du Calvaire où Jésus déclare aux femmes de Jérusalem : « Pleurez plutôt sur vous et sur vos enfants ».
En effet, la mort, la souffrance, la guerre, la violence, la haine sont le fruit du péché.
Mais Dieu aime l’homme qu’Il a créé. Il veut son bonheur, Il pleure son malheur. Il aime le pécheur qu’Il a sauvé sur la Croix. Le Fils de Dieu est venu en ce monde non pas pour juger mais pour guérir.
Certes Notre-Seigneur assume la souffrance de l’homme à laquelle Il a donné la vertu de la Rédemption, mais Il compatit et a pitié de nos épreuves.
Ouvrez l’Evangile : le Seigneur console, accomplit sans cesse des miracles de guérison, donne à manger à ceux qui ont faim, ressuscite.
Bien sûr, au-delà des biens et des joies d’ici-bas, sa mission essentielle consiste en le Salut et la vie éternelle. En pleurant, Il pense donc à tous ceux qui refuseront Sa grâce et qui se damneront. Car s’Il est infiniment bon et miséricordieux, Dieu est également parfaitement juste.

Nous pouvons comprendre ici que les larmes du Seigneur coulent de son Cœur Sacré plein d’amour, mais qu’elles ne sont pas l’effet d’une émotion égoïste ou d’une faiblesse sentimentale.
Jésus pleure sur les malheurs dont les pécheurs sont eux-mêmes responsables et qu’ils causent par leur propre faute. Jésus déplore que l’amour ne soit pas aimé, que les ténèbres refusent la lumière, que la mort soit préférée à la vie.

Ces malheurs, Dieu ne les veut pas, ce sont les châtiments que les hommes se causent à eux-mêmes. Et si Dieu les permet, alors, Il veut S’en servir pour purifier, relever et restaurer, sachant par Sa toute puissance miséricordieuse tirer du mal un plus grand bien.
N’est-ce pas en souffrant que l’homme pécheur souvent revient à Dieu ?
Alors, les larmes se transforment en joie parce qu’il n’y a pas de plus grande joie dans le Ciel que celle du pécheur qui se convertit.

De tout cela, il ressort que les larmes du Seigneur ne sont pas des larmes de tristesse, mais des larmes de compassion. Elles ont une vertu salutaire : elles méritent et provoquent la conversion des pécheurs ; elles sont édifiantes ; elles arrosent nos cœurs pour les consoler et les guérir.

Cette Jérusalem sur laquelle pleure le Seigneur représente l’Eglise, Son Epouse mystique bien-aimée, parce que celle-ci, pourtant l’objet de toutes Ses bontés, est cependant, tout au long de son pèlerinage ici-bas, la proie de tant de luttes et d’épreuves, mais aussi de péchés et d’infidélités qui blessent sa sainteté, éclipsent son rayonnement et apportent confusion même en son propre sein.
Ces hommes d’Eglise qui oublient ou trahissent leur mission au service du Salut, qui falsifient l’Evangile et la Parole de Dieu, ceux qui pactisent avec le monde ennemi de Jésus-Christ ou qui ouvrent les portes du sanctuaire à l’abomination de la désolation…
Ces chrétiens qui abandonnent les promesses de leur baptême et les exigences de leur Foi, et qui laissent envahir leurs cœurs par les illusions et les vanités de ce monde.
Mais aussi ces chrétiens qui disent : « Seigneur ! Seigneur ! », mais dont la Foi ne sert à rien parce qu’ils ne pratiquent pas la charité.
Et ces chrétiens appelés à la sainteté et que Dieu comble de grâces mais qui ne vont pas jusqu’au bout de l’amour.

Jésus pleure sur l’Eglise, parce qu’elle est ce qu’Il a de plus cher et que l’infidélité de ses membres entraîne la perte de beaucoup d’âmes et l’apostasie désastreuse du monde !
Certes, Dieu est fidèle ; Il lui a promis qu’elle ne serait jamais abattue mais qu’au contraire elle sortirait toujours plus forte et plus belle en ses victoires assurées : « Je vis la Cité sainte, la nouvelle Jérusalem descendant du Ciel d’auprès de Dieu, parée comme une épouse et ornée pour son époux » (Apoc. XXI, 2).

Quant à nous, qui voyons Jésus pleurer, que pouvons-nous donc faire pour Le consoler et Lui sécher Ses larmes ?

Flevit super illam (détail)

2015-68. Du neuvième anniversaire du Sérénissime Maître-Chat Lully.

Lully a 9 ans

Le chat ouvrit les yeux,
Le soleil y entra.
Le chat ferma les yeux,
Le soleil y resta

Voilà pourquoi, le soir,
Quand le chat se réveille,
J’aperçois dans le noir
Deux morceaux de soleil.

Maurice Carême, « Le chat et le soleil »,
in « L’Arlequin » (1972)

Vendredi soir 10 juillet 2015.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

Lorsque mon « papa-moine » m’a montré le « portrait officiel » de mon neuvième anniversaire – qu’il a réalisé aujourd’hui tandis que je m’étais installé pour méditer sur la « terrasse Saint-Constantin », à l’ombre bienfaisante d’un lilas – , ce poême de Maurice Carême m’est revenu à la mémoire, tant, sur ce cliché, mes yeux semblent avoir absorbé la lumière…

Eh oui ! J’ai eu neuf ans aujourd’hui : il paraît que cela équivaut à cinquante-deux ans chez vous les humains ; c’est donc dire que je suis désormais un « senior » et un sage.

Cela ne m’empêche nullement de garder mon espiéglerie naturelle, et j’avoue que j’ai profité de mon jour d’anniversaire pour me faire câliner, papouiller et dorlotter encore davantage qu’à l’accoutumée.
Et puis, bien évidemment, j’ai eu droit à un « extra » dans mon écuelle : en l’occurrence, de la terrine de lapin, offerte par un chanoine ami qui nous a rendu visite la semaine dernière, qui a célébré la Sainte Messe dans notre oratoire et qui, ayant bien retenu ma date de naissance, n’avait point omis d’apporter quelque chose pour la célébrer dignement : qu’il soit chat-leureusement remercié pour cette si prévenante attention !

Pour la circonstance, mon « papa-moine » ne m’a pas écrit une lettre ouverte, ainsi qu’il en avait publié une l’an dernier (cf. > ici), mais, puisqu’il sait combien je goûte les belles-lettres, il m’a dédié ce matin un sonnet de Jules Lemaître.

Il existe de très nombreux poêmes qui nous sont consacrés, à nous, les chats.
« Parce que nous le valons bien », ajouterai-je « cum grano salis ».

Mais c’est une évidence pour tout être sensé que, gracieux et distingués par nature, la délicatesse du langage et des sentiments, qui sont le propre de la poésie, ne peuvent que s’accorder avec nos moeurs aristocratiques…

Comme Jules Lemaître est aujourd’hui un auteur quelque peu oublié (sans doute ses engagements politiques lui valent-ils d’avoir été envoyé aux oubliettes par les tribunaux de l’inquisition maçonnique et républicaine), je ne résiste donc pas à l’immense plaisir de publier ci-dessous ce sonnet.

Patte de chat Lully.

Chat gif

Vieux frère.

Mon chat, hôte sacré de ma vieille maison,
De ton dos électrique arrondis la souplesse,
Viens te pelotonner sur mes genoux, et laisse
Que je plonge mes doigts dans ta chaude toison.

Ferme à demi, les reins émus d’un long frisson,
Ton oeil vert qui me raille et pourtant me caresse,
Ton oeil vert semé d’or, qui, chargé de paresse,
M’observe d’ironique et bénigne façon.

Tu n’as jamais connu, philosophe, ô vieux frère,
La fidélité sotte et bruyante du chien :
Tu m’aimes cependant, et mon coeur le sent bien.

Ton amour clairvoyant, et peut-être éphémère,
Me plaît, et je salue en toi, calme penseur,
Deux exquises vertus : scepticisme et douceur.

Jules Lemaître (1853-1914)
in « Les Médaillons ».

Lully sur la mezzanine - 10 juillet 2015

10 juillet 2015 – Monseigneur le Maître-Chat au bord de la mezzanine du bureau
(N.B. : Non ! Il ne dort pas, il médite)

2015-67. « La voix apparaît la première, et bientôt le Verbe suivra ».

Sermon de
notre glorieux Père Saint Augustin
sur
la Nativité de Saint Jean-Baptiste.

       Plusieurs sermons de notre glorieux Père Saint Augustin prononcés à l’occasion de la fête de la Nativité de Saint Jean-Baptiste nous ont été conservés. Voici le premier de tous.

Esteban Murillo -  Saint Jean-Baptiste enfant

Saint Jean-Baptiste enfant (Esteban Murillo, 1665, musée du Prado – Madrid)

La voix apparaît la première, et bientôt le Verbe suivra.

§ 1. Le Sauveur, précédé des prophètes, est venu dans le monde malgré satan qui a usurpé la souveraineté sur ce monde

   Notre Roi, avant de naître d’une Vierge, S’était fait précéder de l’armée des Prophètes, afin que le monde, jusque-là révolté contre les édits de son Prince, acceptât enfin le joug de Dieu et ne pût envisager sans crainte l’arrivée de son Souverain Juge.
Mais le désespoir devint de l’audace, notre misérable humanité se mit en guerre ouverte contre Dieu, comme si elle ne dût avoir aucun juge de sa conduite, comme si elle n’eût aucun désir de se réconcilier avec son Créateur et qu’elle ne pût tenir aucun compte de ses ordres.
C’est alors que le Verbe, s’enveloppant dans un secret impénétrable, descendit des hauteurs du ciel et vint S’incarner dans l’obscurité la plus profonde.

§ 2. Saint Jean-Baptiste est le précurseur, préparant les âmes à la venue du Messie.

   Mais auparavant, ce même Verbe avait envoyé pour Son précurseur, saint Jean, avec mission de préparer les âmes à la venue du Messie.
Ecoutez cette voix céleste, ce héraut terrible du grand Roi, cette trompette éclatante faisant retentir ces cris impétueux : « Je suis la voix de Celui qui crie dans le désert : Préparez la voie au Seigneur, rendez droits les sentiers de notre Dieu. Toute vallée sera comblée, toute montagne et toute colline seront abaissées, les chemins courbes seront redressés, les sentiers escarpés seront aplanis, la gloire de Dieu apparaîtra, et toute chair verra le salut du Seigneur notre Dieu » (Luc III, 4- 6).
A la naissance de saint Jean, Jésus-Christ était encore caché dans le sein de sa Mère ; Marie tenait renfermés dans ses entrailles, parmi les lis et les roses, les membres invisibles du Dieu fait homme.
La voix apparaît la première, et bientôt le Verbe suivra. Saint Jean s’adresse donc aux hommes, il presse, il crie : Préparez le chemin au Seigneur, rendez droits les sentiers de notre Dieu. Arrachez des coeurs toute perversité, corrigez toutes ces perfidies tortueuses, aplanissez parles oeuvres de la simplicité et de la foi les collines anfractueuses de l’iniquité, et les erreurs levant audacieusement leur front orgueilleux. Dieu nous arrive ; Jésus-Christ approche ; accueillez présent Celui que vous avez méprisé absent. Quoique étant l’offensé, Dieu Se donne de lui-même, parce qu’il désire être apaisé !

§ 3. Saint Jean fut livré à une femme impudique.

   Mais le Précurseur fut, de la part des hommes, l’objet d’une horrible cruauté et d’un profond mépris, à tel point que sa tête fut le prix des danses voluptueuses d’Hérodiade ; l’innocence du saint Précurseur devint l’enjeu d’un combat entre la passion et la fureur ; le roi, tout à coup aveuglé par la honteuse concupiscence qu’enflammaient à dessein les grâces impudiques d’une jeune danseuse, livre honteusement le sang innocent, non point à un guerrier armé, mais à une femme éhontée.

§ 4. Naissance miraculeuse de saint Jean.

   Mais je m’aperçois, mes frères, qu’au lieu de vous parler de la naissance même de saint Jean, je vous entretiens déjà de sa mort. Je reviens donc à mon sujet, car je ne veux pas m’étendre outre mesure ni m’exposer à faire naître le dégoût et l’ennui. La lecture même de l’Evangile a été d’une certaine étendue ; sous peine donc de mériter à bon droit le reproche d’oisiveté, j’expliquerai le mystère qui nous est proposé, en l’exposant comme Dieu m’en fera la grâce.
Le père de saint Jean remplissait dans le temple les fonctions de son sacerdoce, lorsque l’ange Gabriel, fendant l’espace et traversant les airs, se présenta devant Zacharie tremblant de crainte et de respect. Mais au nom du Seigneur l’envoyé céleste le rassure et lui dit : « Ne craignez pas, Zacharie : voici que votre prière a été exaucée ; votre épouse Elisabeth vous donnera un fils à qui vous imposerez le nom de Jean : il sera grand et beaucoup se réjouiront à sa naissance » (Luc I, 13-14).
Or, Zacharie était déjà accablé de vieillesse ; il sentait ses membres ployer sous le poids de l’âge et son corps tourner à la dissolution. Son épouse gémissait de sa stérilité ; depuis longtemps la fleur de la jeunesse était en eux desséchée, et ils se croyaient impuissants à laisser des héritiers de leur nom. Mais tout est possible à Dieu : ces vieillards croient toucher aux limites de la vie, et soudain le fils qu’ils désirent depuis longtemps leur est donné. Toutefois Zacharie, accablé sous le poids de la vieillesse judaïque, refuse de croire à la parole de l’ange. Gabriel lui reproche cette incrédulité et, pour le punir, lui retire l’usage de la parole.

§ 5. Cette naissance est pour nous la source de la plus vive des joies.

   Cependant les promesses du Seigneur s’accomplissent ; saint Jean met un terme à la stérilité de ses parents et, rendant à son père l’usage de la parole, annonce déjà par avance l’arrivée du souverain Juge.
Nous célébrons aujourd’hui l’anniversaire de cette naissance. Saint Jean naît, comme Dieu l’avait promis, et en naissant, il délie la langue de son père, afin que selon la parole prophétique de l’ange, cette naissance fût réellement une cause de joie pour plusieurs.
Prenons part à cette joie, mes frères, afin qu’après avoir reçu à coeur ouvert Jésus-Christ, le Souverain Juge, nous entourions de respect et de gratitude la naissance de Son précurseur.
Célébrons donc cette solennité, non pas en nous livrant aux honteux désordres des Gentils, mais en rendant à Dieu un culte simple et digne, et surtout en observant les règles de la chasteté chrétienne. Laissons aux temples païens leurs guirlandes et aux Gentils leurs folies et leurs danses voluptueuses ; c’est dans le Saint des saints que doit briller et se faire le concours de tous les fidèles.

feu gif

Un texte du Maître-Chat, écrit à l’occasion de la fête de la Nativité Saint Jean-Baptiste,
consacré au symbolisme liturgique de la fête du 24 juin > ici.

2015-66. Parce que c’est bon pour ma planète…

Lettre ouverte du Maître-Chat Lully
à
Sa Sainteté le Pape François
sur
l’écologie et la décroissance
dans la pastorale et la liturgie de la Sainte Eglise Catholique

Chat gif en marche

Très Saint Père,

Infiniment reconnaissant envers Votre Sainteté
pour l’enseignement que, dans Sa sollicitude admirable pour le salut de nos âmes,
Elle a daigné nous dispenser dans Sa dernière encyclique,
je sollicite très humblement la grâce d’apporter ma modeste contribution féline à une si noble entreprise,
et, à cette fin, je me permets quelques suggestions très concrètes et pratico-pratiques, dont je ne doute pas qu’elles retiendront l’attention et le souci de cohérence de Votre Sainteté,
puisqu’elles vont de manière suréminente dans le sens de l’écologie et de la décroissance.

Ainsi donc,
d’une part pour donner l’exemple de la lutte contre l’émission des gaz résultant de la combustion des carburants,
et d’autre part pour réaliser d’importantes économies sur les frais de déplacement (qui sont en définitive pris sur les offrandes faites à l’Eglise par les fidèles),
je suggère que, sans aucun retard :
1) Sa Sainteté abandonne la papamobile et reprenne l’usage de la sedia gestatoria, absolument non polluante, qui est faite de matériaux naturels (bois et tissus en fibres naturelles) et qui, en outre, ne demande que très peu d’entretien ;
2) Sa Sainteté renonce à l’usage de l’avion, gros consommateur de carburants polluants (et également source de pollution sonore), et utilise le temps qu’Elle aura ainsi gagné en n’effectuant pas ces déplacements à prier davantage et à étudier la doctrine et la théologie traditionnelles ;
3) Sa Sainteté donne l’ordre impératif à Nos Seigneurs les Eminentissimes et Révérendissimes Archevêques et Evêques, au lieu de multiplier les déplacements, de demeurer dans leurs diocèses respectifs – dans le plus pur respect des canons des anciens conciles – , afin de s’y consacrer uniquement à gouverner (par l’application du Droit Canon), instruire (par l’enseignement du catéchisme catholique) et sanctifier (par la célébration la plus digne et fervente possible des sacrements) le peuple fidèle à eux confié ;
4) l’on cesse de procéder à des regroupements de paroisses confiées à un seul prêtre passant une bonne part de son temps sur les routes, mais que l’on lance une grande et persévérante offensive de prière et de jeûne pour obtenir de nombreuses saintes et solides vocations sacerdotales qui permettront d’avoir à nouveau un prêtre par clocher…

Ensuite,
parce que l’énergie la plus écologique est celle que l’on ne consomme pas,
et pour réaliser ainsi de substantielles économies d’électricité,
je suggère aussi
que l’on arrête immédiatement dans les églises l’utilisation des micros, hauts-parleurs, enceintes acoustiques et autres appareils de « sono », tant pour diffuser de la musique pré-enregistrée, que pour la prédication : il sera très avantageux en effet que, pour cette dernière, on reprenne l’usage des chaires de vérité dont la consommation d’électricité est nulle.

Et puis,
pour mettre un coup d’arrêt décisif à la déforestation,
j’implore instamment Votre Sainteté pour qu’Elle demande à Son clergé de veiller aux économies de papier, et d’arrêter la surproduction de « feuilles dominicales », réalisées à grand renfort de photocopies tous les vendredis ou samedis et mises à la corbeille le dimanche soir.
Ce pourquoi je préconise que l’on revienne à l’usage universel du bon vieux missel dominical complet – cadeau de première communion ou de communion solennelle – , dont chaque fidèle gardait l’usage tous les dimanches depuis son enfance jusqu’à sa mort.

Enfin,
parce que les matières synthétiques sont le résultat d’industries chimiques des plus polluantes et qu’elles mettent ensuite plusieurs siècles pour disparaître, après avoir commis d’irréparables dégâts dans la terre et dans les océans,
tout spécialement au nom de mes frères les poissons,
je demande avec une très respectueuse insistance, 

1) qu’aux Messes de Sa Sainteté, lors des grands rassemblements, pour donner l’exemple de l’éco-responsabilité, les Saintes Hosties ne soient plus jamais dans des gobelets jetables en plastique, mais contenues dans des ciboires traditionnels, en matériaux certifiés durables et indéfiniment réutilisables ;
2) qu’en lieu et place des aubes et chasubles en matières synthétiques, on revienne aux aubes de lin, aux broderies et dentelles en fil de coton, et aux ornements en soie naturelle – ou velours de soie (damassé ou non) – toutes fibres parfaitements naturelles dont l’usage remis à l’honneur ne manquera pas de booster l’agriculture écologique et l’économie solidaire…

… et parce que tout ça, comme le dit la Madame de la météo, « c’est bon pour ma planète ! »

Prosterné aux pieds de Votre Sainteté et implorant Sa bénédiction apostolique, j’ai l’honneur d’être, Très Saint-Père, avec le plus profond respect, de Votre Sainteté le très humble et très obéissant fils et serviteur.

Lully.

ange chat

2015-65. Où Gustave Thibon, interrogé sur ses racines paysannes, citant Dante, expliquait que l’homme doit être enraciné pour parvenir à la contemplation des vérités éternelles.

Mardi 16 juin 2015,
fête de Saint Jean-François Régis (cf. > ici).

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Parmi les commémorations remarquables de cette année 2015, il y a  le sept-cent-cinquantième anniversaire de la naissance de Dante.

   C’est en effet au printemps de l’année 1265 (entre la mi-mai et la mi-juin : on n’en connaît pas la date exacte) qu’est né, à Florence, Durante degli Alighieri, couramment appelé Dante Alighieri.
Ecrivain et poète, il est considéré comme le « père de la langue italienne » et demeure à jamais l’un des plus grands poètes de la période médiévale, l’un des plus grands écrivains de la Chrétienté.
Il est également un homme politique qui prend une part active non seulement à l’administration de la ville de Florence, mais encore à la lutte armée, à la diplomatie, et aux mouvements d’idée de son temps.

   Les célébrations du sept-cent-cinquantième anniversaire de la naissance de Dante ont été solennellement inaugurées au début du mois de mai par les autorités italiennes lors d’une cérémonie au Sénat au cours de laquelle l’acteur Roberto Benigni a lu le Chant XXXIII du « Paradis », celui qui marque la fin du voyage du poète et s’achève dans la contemplation de la splendeur divine.

   Au passage, je ne peux m’empêcher d’imaginer – et de vous porter à imaginer – quel déchaînement de furieuse bêtise laïciste et quelles manifestations de l’intégrisme maçonnique déclancherait en France la lecture publique et officielle, au parlement, d’un texte poétique qui commence par magnifier la Très Sainte Vierge Marie et se termine de manière quasi extatique sur la louange de l’incommensurable lumière, beauté et sagesse de Dieu  (cf. > Parad. cant. XXXIII) !

   Plusieurs centaines de cérémonies ou manifestations culturelles, célébrant Dante et son oeuvre, marqueront les prochains mois, non seulement en Italie, mais dans le monde entier.
J’encourage bien évidemment mes fidèles lecteurs et amis à profiter de cet anniversaire pour découvrir – s’ils ne la connaissent pas déjà – ou pour relire de manière méditative l’oeuvre majeure de l’Alighieri : la justement célèbre « Divine Comédie ».

   Ma – très modeste – contribution à cet anniversaire, se bornera à faire paraître, ci-dessous, un texte – à ma connaissance non encore publié par écrit - (je l’ai moi-même retranscrit) de Gustave Thibon, : il est extrait d’un entretien qu’il avait accordé à la radio diocésaine de Viviers, quelques semaines après la publication de « Au soir de ma vie » (1993), et dont nous conservons précieusement l’enregistrement au Mesnil-Marie.
Interrogé sur ses origines paysannes, Gustave Thibon se saisit de l’occasion pour parler du nécessaire enracinement de l’homme, et c’est alors qu’il appuie son propos sur l’exemple et une citation de Dante, dont la lecture lui était familière.

   Le style oral, le style de la conversation impromptue qui est celui de cet entretion, remettra immanquablement dans l’oreille de ceux qui ont eu le bonheur de l’entendre et d’échanger avec lui, les accents à la fois rocailleux et chantants, de Gustave Thibon.

Lully.

Domenico di Michelino - 1465 - Dante illuminant Florence par son oeuvre

Dante illuminant Florence par son oeuvre :
détail de « Dante et les trois royaumes », huile sur toile de Domenico di Michelino, 1465
(musée de l’Oeuvre du Duomo – Florence)

giglio

« L’homme a besoin de racines : de racines sur la terre qui lui permettent de fleurir dans le ciel… et d’avoir même des racines dans le ciel. »

* * * * * * *

   « Paysan, eh bien, oui ! c’est l’homme du pays, l’homme de la terre, l’homme enraciné, l’homme d’un terroir, l’homme localisé en quelque sorte, c’est-à-dire l’homme qui a des racines.
Notez bien que les racines ne suffisent pas. Seulement, les fleurs, eh bien, naissent des racines en quelque sorte.
Il n’y a pas de belle floraison s’il n’y a pas d’enracinement. Alors je crois beaucoup, eh bien, aux racines terrestres qui sont nécessaires même pour l’épanouissement spirituel le plus universel.

   A ce sujet je pourrai citer une anecdote : vous savez que Dante a été exilé de Florence à la fin de sa vie, dans ces querelles des gibelins et des guelfes qu’on a oubliées aujourd’hui. Il était donc exilé à Ravenne, et quelqu’un lui avait écrit : tu dois être bien malheureux loin de ta patrie. Et alors il a répondu un très beau mot, en latin d’ailleurs – je traduis - , il a répondu : « Les hautes vérités dans leur douceur suprême sont visibles sous tous les cieux » !
Alors moi je commenterai : elles sont visibles sous tous les cieux, mais elles ne poussent pas dans toutes les terres ! Et si Dante n’avait pas été un florentin, s’il n’avait pas été nourri de cette civilisation extraordinaire de Florence, il n’aurait pas pu voir les vérités suprêmes sous tous les cieux.

   Je crois que c’est extrêmement important.
Regardez les grandes oeuvres du génie humain : les plus universelles, les plus admirées dans le monde entier, sont des œuvres enracinées.
« L’Illiade » est une œuvre très localisée : le conflit des Troyens, bon, ainsi de suite… « La Divine Comédie » de Dante est florentine jusqu’au dernier point : il y parle de toutes les familles de Florence. Le « Quichotte » de Cervantès : c’est localisé dans la Castille, et en même temps ça a une portée universelle. Le « Mireille » et le « Calendal » de Mistral sont des œuvres enracinées dans la Provence et qui prennent également une portée universelle…

   Alors, l’homme a besoin de racines : de racines sur la terre qui lui permettent de fleurir dans le ciel… et d’avoir même des racines dans le ciel.
Platon parlait du double enracinement de l’homme qui est en même temps enraciné dans la terre et en même temps ouvert aux vérités célestes, qui viennent d’en-haut.
Je crois que cette union est absolument nécessaire.

   Simone Weil a été très méchante pour les Américains – je m’empresse de dire Simone Weil la grande, la philosophe, pas la femme politique, n’est-ce pas ! – ; eh bien, (elle) disait en parlant des Américains - elle était en Amérique à la fin de sa vie – un peu sévèrement : « Ils sont impropres au surnaturel parce qu’ils n’ont pas assez d’enracinement terrestre ». Peut-être exagérait elle un peu, mais enfin il y a de ça, quoi !

   C’est pourquoi je crois profondément à une vie qui est très près de la terre et qui permet de monter plus haut ! »

Gustave Thibon
réponse à Monsieur l’abbé Estieule qui l’interrogeait pour « Radio présence »
(entretien enregistré au Mas de Libian, à Saint-Marcel d’Ardèche, en 1993).

Miniature Divine Comédie Cod. It. IX. 276 1380-1400 - Bibliothèque Marciana, Venisee

Détail d’une miniature du manuscrit de la « Divine Comédie » des années 1380-1400
(Codex it. IX-276, Bibliothèque Marciana, Venise)

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