Archive pour la catégorie 'Chronique de Lully'

2013-14. Chronique du mois de janvier 2013 au Mesnil-Marie.

Jeudi 31 janvier 2013,
fête de Saint Jean Bosco. 

2013-14. Chronique du mois de janvier 2013 au Mesnil-Marie. dans Annonces & Nouvelles lever-du-jour-romains-xiii-12

Lever du jour au dessus du Mesnil-Marie

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

Dernier jour du mois de janvier : voici mon traditionnel compte-rendu du mois écoulé en notre Mesnil-Marie.

A – Janvier, mois paisible avec de grands contrastes météorologiques:

Beaucoup de ceux qui nous écrivent, se posent – et nous posent – des questions sur les conditions climatiques auxquelles nous sommes affrontés, en notre haut pays.
Dans les photos que je publiais ici > www et ici > www, vous pouviez vous faire vous-même une idée de la splendeur dont peut-être revêtu notre Mesnil-Marie sous un manteau neigeux, aussi bien que des difficultés de circulation inhérentes aux rigueurs hivernales.

Si nous avons eu à plusieurs reprises des chutes de neige, elles n’ont jamais été très importantes en quantité : jusqu’à présent, la couche la plus épaisse qui nous a enveloppés n’était que d’une quinzaine de centimètres au matin du 23 janvier.
J’ai bien tenté une escapade sur le toit, mais – vous le savez – je ne suis pas vraiment fan de ski, de luge ou de raquettes, et je m’en suis prestement retourné auprès du poêle…

lully-sur-le-toit-23-janvier carême dans Chronique de Lully

Chez nous, il serait normal que nous ayons davantage de neige et sur de plus longues périodes, de la même manière qu’il est absolument normal que nous ayons des températures qui avoisinent les moins 10° au lever du jour.
Or, cette année nous sommes étonnés par les alternances relativement brusques entre des périodes de froid « normales », et des redoux spectaculaires : pouvez-vous imaginer que le 9 janvier, Frère Maximilien-Marie, en visite chez ses amis Danièle et Frédéric, aux Ouches (cette splendide et très ancienne ferme qui a été sinistrée par un incendie en décembre 2010, qu’ils restaurent patiemment : voir ce que je vous en ai écrit le 23 octobre 2011, ici > www), c’est-à-dire à quelque 1350 m d’altitude, a déjeuné dehors avec eux?

Au moment où je vous écris, il fait une douceur toute printanière, mais nous attendons à nouveau la neige dans deux jours, à la Chandeleur où – selon le dicton –  l’hiver périt ou reprend vigueur

Janvier demeure un mois paisible, propice à l’intériorité et au recueillement près de la Crèche.
Dans les premiers jours du mois, il y a les visites entre voisins pour échanger les voeux, mais il y a peu d’activités extérieures, hormis celles que je vous signalerai ci-dessous.
Frère Maximilien-Marie en a profité pour classer et ranger nombre de documents, mais aussi pour s’essayer à quelques petits travaux de couture : il a ainsi confectionné – à partir d’éléments d’anciens ornements dépareillés – deux conopés, un doré et un violet, pour le saint tabernacle.

B – Les visites de la Crèche:

Vous avez pu voir la Crèche réalisée dans notre oratoire grâce à la mini vidéo que je vous avais mise en ligne ici > www.
Tous les dimanches et jours fériés, depuis Noël jusqu’à la Purification, des personnes viennent la visiter. Certaines sont même venues d’assez loin : elle est annoncée dans la presse, à la radio locale, et figure en bonne place parmi les propositions « culturelles » des sites dédiés au tourisme…
Cette année encore, ce sont cent à cent vingt visiteurs qui se sont succédés.
Ces visites sont en même temps l’occasion propice à des échanges : il en est en effet beaucoup qui en profitent pour interroger Frère Maximilien-Marie sur son état, sur sa manière de vivre, sur le Refuge Notre-Dame de Compassion ou, tout simplement, sur des sujets religieux plus généraux en rapport avec la vie de Jésus, l’histoire de l’Eglise, certains points de la doctrine catholique… etc.

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Catafalque dressé pour la Messe du 21 janvier
(cliquer sur la photo pour la voir en grand)

C – La Sainte Messe commémorative du 21 janvier:

Chaque année, c’est pour nous un devoir important que de commémorer l’anniversaire du martyre du Roy.

Victime innocente de passions aveugles et d’une idéologie qui a entraîné – et qui entraîne toujours – le déclin de la France, Louis XVI est la figure emblématique non pas d’un passéisme sclérosé dans ses nostalgies, mais de l’espérance qui, plus vive que jamais, nous anime en face des échecs à répétition, des décadences sans fin et des continuels scandales attentatoires à la véritable dignité de l’homme, produits par les prétendus «immortels principes de 1789» :

« Quand Dieu, dans Sa miséricorde plus encore que dans Sa justice, a résolu de jeter une nation dans le creuset de la tribulation pour la purifier de ses fautes et lui rendre Son amour, ce qu’il importe avant tout, c’est que cette nation puisse offrir au Seigneur des victimes dignes de Lui.
Qu’un agneau sans tache se rencontre à ce moment sur le trône : pour le salut de son peuple, il y vaudra mieux qu’un lion. Ne vous plaignez point qu’il ne sache pas verser d’autre sang que le sien : Dieu lui a donné la conscience secrète de son rôle, qui est le rôle du martyr.
Silence! Silence, ô jugements des hommes, jugements indiscrets et précipités! C’est l’heure de l’holocauste, ce n’est pas encore l’heure du combat.
Sans cela, ne serait-ce pas une énigme qu’en ce pays de France, qui est un pays de courage, tant de têtes innocentes fussent venues docilement se courber sous le fer homicide d’une poignée de scélérats?
Mais tout s’explique pour le chrétien : c’est le grand mystère de la Rédemption qui se continue (…) »
(Mgr Pie, évêque de Poitiers, in «Eloge funèbre de Madame la Marquise de La Rochejaquelein prononcé à la cérémonie de ses funérailles dans l’église de Saint-Aubin de Baubigné, le samedi 28 février 1857»).

En cette année du deux-cent-vingtième anniversaire de l’exécution du Souverain, notre modeste cérémonie paroissiale (d’autant plus modeste que les conditions de circulation, particulièrement difficiles ce jour-là, avaient fait que nous n’étions que sept dans notre église) a été remarquée par la presse : un correspondant de « La Montagne » et du « Progrès » – quotidiens régionaux dont l’idéologie les rend naturellement imperméables aux notions de vérité, de justice et de fidélité – est venu poser quelques questions et assister à une partie de la Messe de Requiem.
Il débarquait sur une planète totalement inconnue – car la culture, surtout en matière d’histoire et de religion, n’est habituellement pas le point fort de cette espèce de journalistes – ; ainsi donc, le catafalque sur lequel était posé une couronne, le latin de la liturgie et l’idée même qu’on puisse prier à la mémoire de Louis XVI, malgré les explications qui lui furent communiquées avec beaucoup de nuances et une patiente aménité, ont dû faire disjoncter son petit formatage. Son compte-rendu publié le lendemain fut en conséquence, c’est-à-dire particulièrement lourd et pernicieux (on peut le  retrouver ici > www)…

Qu’importe! S’il fallait se régler sur les « faiseurs d’opinion » pour pouvoir faire ce qui est objectivement bon, nous ne le pourrions jamais accomplir!

DSC09629-Copie-300x220 Fête de la Sainte-Face

Lully, chat-chouan

D – Trois avis importants:

1) Nous invitons tous nos amis à s’associer à la neuvaine préparatoire à la fête de Notre-Dame de Lourdes, du samedi 2 au dimanche 10 février.
On le sait, la fête de l’anniversaire de la première apparition de Notre-Dame dans la grotte de Massabielle, le 11 février, est aussi, de par la volonté du Saint-Siège, la journée mondiale du malade. Voilà pourquoi cette neuvaine à Notre-Dame de Lourdes est une supplication particulière à l’intention des malades et de ceux qui souffrent, dans leur âme ou dans leur corps… On peut, bien évidemment, ajouter à cela une intention spéciale pour la France, car elle est grandement malade!
Nous proposons ici > www un « formulaire » de prière pour cette neuvaine, mais il est tout-à-fait loisible à chacun d’utiliser un autre type de prière qui le porterait à davantage de ferveur et d’amour…
On lira aussi avec profit le message publié par notre Saint-Père le Pape à l’occasion de cette vingtième journée mondiale du malade sur le site du Saint-Siège > www.

2) Nous ne sommes plus qu’à quelques jours de l’entrée dans le Grand et Saint Carême.
N’attendons pas la dernière minute pour faire un retour sur nous-mêmes, pour prévoir sur quels points particuliers nos efforts doivent porter, pour établir une véritable stratégie de combat spirituel, car le Carême est par excellence le temps du combat.
On peut dès à présent relire, avec profit, le « petit catéchisme sur le Carême et la pénitence » publié ici > www, en attendant la publication prochaine du Message de Carême de notre Saint-Père le Pape.
Comme les années précédentes, Frère Maximilien-Marie propose à ceux qui le souhaitent de leur adresser quotidiennement des textes de réflexion, méditation et prière. Ceux que cela intéressent peuvent s’inscrire pour les recevoir de la manière suivante :
a) si vous avez un compte Facebook devenez participants de l’ « évènement » > [ Méditations quotidiennes de Carême avec le Refuge Notre-Dame de Compassion ] en cliquant sur le lien : vous y trouverez chaque jour sur le « mur » les textes proposés.
b) si vous voulez recevoir chaque jour ces textes directement dans votre boite aux lettres électronique, en dehors de Facebook, envoyez-nous une demande par le moyen de ce formulaire de contact > www

3) Pour ceux qui sont géographiquement proches du Mesnil-Marie, et qui sont libres ce jour-là, nous organisons une journée de récollection amicale, le mardi 12 février (mardi gras) : cette veille du Mercredi des Cendres est le jour assigné pour la fête de la Sainte Face de Notre-Seigneur Jésus-Christ (nous possédons au Mesnil-Marie une des reproductions du voile de Sainte Véronique conservé à la Basilique Saint-Pierre au Vatican diffusées après le miracle du 6 janvier 1849 – voir > www – ; cette copie, semblable à celle de Monsieur Dupont à Tours, est équiparée à une relique de troisième classe).
Le programme de cette journée est le suivant : 11h, Sainte Messe ; déjeuner tiré du sac ; échanges ; 15h, chapelet et adoration du Très Saint-Sacrement.
Si vous désirez y participer, merci de nous le signaler (> www).

* * * * * * *

Il ne me reste plus qu’à prendre congé de vous, en vous souhaitant une belle et fervente fête de la Purification de Notre-Dame et de la Présentation de Notre-Seigneur au Temple, et en vous assurant de mes très félines amitiés.

Lully.

saintefacetours.vignette janvier 2013

Pour aider le Refuge Notre-Dame de Compassion > www

2013-13. Attirez vers le Ciel toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus besoin!

Mercredi 30 janvier 2013,
fête de Sainte Bathilde, reine des Francs (cf. > ici),
fondatrice de monastères et moniale.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

Lorsque, en préparation des apparitions de Notre-Dame de Fatima, l’Ange du Portugal se manifesta aux trois petits bergers, au printemps de l’année 1916, il leur enseigna d’abord à se prosterner face contre terre et à répéter : « Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime ! Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas ! »

Quelques semaines plus tard, lors de sa deuxième apparition, il insistera : « Offrez constamment au Très-Haut des prières et des sacrifices. (…) De tout ce que vous pourrez, offrez un sacrifice au Seigneur, en acte de réparation pour les péchés par lesquels il est offensé, et de supplication pour la conversion des pécheurs.(…) Par dessus tout, acceptez et supportez avec soumission les souffrances que le Seigneur vous enverra. »

Puis ce fut la Très Sainte Vierge Marie qui, lors de sa troisième apparition, le 13 juillet, après leur avoir montré l’enfer, leur enseigna cette prière, pour qu’ils la récitent désormais à la suite de chacune des dizaines de leur chapelet : « Ó meu Jesus, perdoai-nos, livrai-nos do fogo do inferno ; levai as almas todas para o Céu, principalmente as que mais precisarem. »

Cette prière est maintenant très connue, très répandue.
Tellement connue qu’on la récite trop souvent de manière machinale et sans lui accorder toute l’attention qu’il faudrait, sans mettre dans ces paroles toute la ferveur d’âme qu’il conviendrait.

En français, cette prière est traduite par plusieurs formules, souvent assez voisines l’une de l’autre, mais qui ne sont généralement pas vraiment littérales. J’ai donné ci-dessus le texte en langue portugaise tel qu’il a été transmis par les voyants ; la traduction exacte pourrait être celle-ci : « Ô mon Jésus, pardonnez-nous, délivrez-nous du feu de l’enfer, conduisez au Ciel toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus  besoin. » Pas de « bon Jésus », pas de redondance avec « nos péchés » ajoutés au « pardonnez-nous », pas de « pauvres âmes », pas davantage de mention de « votre miséricorde » ou de « votre sainte miséricorde ». Une formule concise, qui n’a finalement pas besoin – pour être parfaitement claire – qu’on lui surajoute ce que l’Ange n’avait pas jugé bon de mettre en sus.

2013-13. Attirez vers le Ciel toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus besoin! dans Commentaires d'actualité & humeurs apparition-nd-de-fatima

Cette prière enseignée par l’Ange, ainsi que la formule d’adoration et de réparation amoureuse donnée dès sa première apparition, est en rapport direct avec un certain nombre de paroles prononcées ensuite par Notre-Dame : -Voulez-vous vous offrir à Dieu pour supporter toutes les souffrances qu’Il voudra vous envoyer, en acte de réparation pour les péchés qui l’offensent, et de supplication pour la conversion des pécheurs ? -Sacrifiez-vous pour les pécheurs et dites souvent, spécialement chaque fois que vous ferez un sacrifice : 0 Jésus, c’est pour votre amour, pour la conversion des pécheurs, et en réparation pour les péchés commis contre le Cœur Immaculé de Marie. -Vous avez vu l’Enfer, où vont les âmes des pauvres pécheurs (…). -Priez, priez beaucoup et faîtes des sacrifices pour les pécheurs, car beaucoup d’âmes vont en enfer parce qu’il n’y a personne qui se sacrifie et prie pour elles.

Je me suis rendu compte que beaucoup de fidèles qui récitent la prière « ô mon Jésus » pensent que c’est une prière à l’intention des âmes des défunts, spécialement les plus délaissées. Il ressort pourtant clairement que cette supplication est faite en faveur des pécheurs qui sont encore sur la terre et qui sont le plus exposés au danger de la damnation éternelle.

Lorsque nous demandons à Notre-Seigneur de conduire au Ciel « toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus besoin », nous Le supplions pour les âmes de ceux qui ne Le connaissent pas ou qui L’ont renié ; nous Le prions pour les pécheurs les plus endurcis, quelque odieux et monstrueux que puisse nous paraître leur péché ; nous implorons Son salut pour les ennemis de la Sainte Eglise, pour les francs-maçons et les membres des diverses sectes sataniques ; nous Le prions pour ceux qui persécutent et torturent Ses fidèles ; nous appelons Sa grâce sur ceux qui sont égarés dans de fausses doctrines religieuses ; nous prions – oui ! – pour les âmes de tous ces anticatholiques de plus en plus haineux et virulents qui, par exemple, brandissent des pancartes blasphématoires dans les manifestations ; nous invoquons Sa miséricorde pour les âmes de ceux qui ont apostasié les engagements de leur baptême et pour ceux qui – dans leurs mandats politiques – étouffent la voix de leur conscience et soutiennent des projets de société à l’encontre de la Loi Naturelle inscrite dans le fond de leurs cœurs ; nous prions pour les âmes des « conducteurs du Peuple de Dieu » (selon l’expression de Notre-Dame à La Salette > ici) qui ne prennent pas la défense du Troupeau, qui s’enfuient devant les loups rapaces ou pactisent avec eux ; nous supplions pour les âmes de ceux qui tirent dans l’ombre les ficelles du mondialisme esclavagiste ; nous appelons la conversion et le salut sur les âmes de tous ceux qui sont faibles et qui retombent sans cesse dans les mêmes fautes, de ceux qui manquent de courage dans leur vie chrétienne et qui rechignent sous le poids de la Croix, celles de ceux qui voudraient le Royaume du Christ sans avoir part à Ses souffrances… et nous en faisons nous-mêmes partie!

« Ô mon Jésus, pardonnez-nous, délivrez-nous du feu de l’enfer, conduisez au Ciel toutes les âmes, principalement celles qui en ont le plus  besoin ! »

« Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime ! Je vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas ! »... et je suis parfois moi-même de leur nombre, malgré toutes mes protestations de bonne volonté et de fidélité.

O mon Jésus, qui nous demandez avec insistance de prier et de faire pénitence (cf. > ici) : - accordez-moi la très grande et très précieuse grâce de prendre au sérieux ce temps de pénitence et de conversion personnelle, en me souvenant que « toute âme qui s’élève élève le monde » (Elisabeth Leseur) ; - enseignez-moi à être plus généreux dans la voie – si contraire à ma nature – du sacrifice ; - donnez-moi d’être chaque jour plus pénétré de zèle pour le salut des âmes, de toutes ces âmes pour lesquelles Vous avez répandu Votre Sang précieux ; -  apprenez-moi à m’offrir à Vous pour supporter toutes les souffrances que Vous voudrez m’envoyer, en acte de réparation pour les péchés qui Vous offensent, et de supplication pour la conversion des pécheurs ; - faites que je sois profondément tourmenté, dans ma conscience de chrétien, à la pensée de ces âmes qui vont en enfer « parce qu’il n’y a personne qui se sacrifie et prie pour elles » ; - embrasez mon pauvre cœur de l’ardente et dévorante charité qui consume Votre propre Cœur, « propitiation pour nos péchés », « rassasié d’opprobres », « broyé à cause de nos crimes », « notre vie et notre résurrection », « notre paix et notre réconciliation » (litanies du Sacré-Cœur)…

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

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2013-12. Les adieux à l’Alléluia.

       Ce samedi, en fin d’après midi, avec les premières vêpres du dimanche, nous inaugurons le cycle liturgique de Pâques en entrant dans le temps de la Septuagésime (cf. > ici).

   Relisons – si vous le voulez bien – ce que Dom Prosper Guéranger a écrit dans « l’Année Liturgique », au sujet de la suspension de l’Alléluia et des touchantes célébrations d’adieu par lesquelles, autrefois, cette interruption était marquée.

2013-12. Les adieux à l'Alléluia. dans De liturgia samedi-avant-la-septuagesime

Le samedi avant le dimanche de la Septuagésime :
suspension de l’Alléluia. 

    »Le mouvement du Cycle doit ramener  prochainement la commémoration des douleurs du Christ et les joies de sa Résurrection ; neuf semaines seulement nous séparent de ces grandes solennités. Il est temps pour le chrétien de préparer son âme à une nouvelle visite du Seigneur, plus sacrée et plus décisive encore que celle qu’il a daigné nous faire dans sa miséricordieuse Nativité.

   La sainte Eglise, qui sent le besoin de réveiller nos cœurs de leur assoupissement, et de leur donner une forte impulsion vers les choses célestes, accomplit aujourd’hui une grande mesure dans cette intention. Elle nous sèvre du divin Alléluia, ce chant du Ciel qui nous associait aux concerts des Anges. Nous ne sommes que des hommes fragiles, pécheurs courbés vers la terre ; comment ce cri d’une meilleure patrie a-t-il pu sortir de notre bouche? Sans doute, l’Emmanuel, le divin réconciliateur de Dieu et des hommes, nous l’a apporté du Ciel, au milieu des joies de sa Naissance, et nous avons osé le répéter ; nous le redirons même encore, avec un nouvel enthousiasme, dans l’allégresse de sa Résurrection ; mais, pour chanter dignement l’Alléluia, il faut aspirer au séjour d’où il nous est venu. Ce n’est pas là un vain mot, une mélodie profane ou insignifiante ; c’est le souvenir de la patrie dont nous sommes exilés, c’est l’élan vers le retour.

   Le mot Alleluia signifie Louez Dieu ; mais son accent est particulier. L’Eglise ne suspendra pas, durant neuf semaines, l’exercice du devoir qui l’oblige à louer Dieu. Elle substituera à ce terme échappé d’un monde meilleur un autre cri qui proclame aussi la louange : Laus tibi, Domine, Rex œternœ gloriœ! Louange à vous, Seigneur, Roi de l’éternelle gloire! Mais ce dernier cri part de la terre, tandis que l’autre est descendu du Ciel.
« L’Alléluia, dit le pieux Rupert, est comme une goutte de la joie suprême dont tressaillit la Jérusalem supérieure. Les Patriarches et les Prophètes le portèrent au fond de leur âme ; l’Esprit-Saint le produisit avec plus de plénitude sur les lèvres des Apôtres. Il signifie l’éternel festin des Anges et des âmes bienheureuses, qui consiste à louer Dieu sans cesse, à contempler sans fin la face du Seigneur, à chanter sans jamais se lasser des merveilles toujours nouvelles. L’indigence de notre vie actuelle n’arrive pas à goûter ce festin ; la perfection en cette vie est d’y prendre part au moyen des joies de l’espérance, d’en avoir faim, d’en avoir soif. C’est pour cela que ce mot mystérieux Alléluia n’a pas été traduit, et qu’il est resté en hébreu, comme pour signifier, plutôt qu’il ne la saurait exprimer, une allégresse trop étrangère à notre vie présente » (De divinis officiis. Lib. I, cap. 35). 

   Durant ces jours où il nous faut sentir la dureté de notre exil, sous peine d’être laissés comme transfuges au sein de la perfide Babylone, il importait que nous fussions prémunis contre les entraînements du dangereux  séjour  où se passe notre captivité. Voilà pourquoi l’Eglise, prenant pitié de nos illusions et de nos périls, nous donne un si solennel avertissement. Elle nous dit,  en nous enlevant le cri de l’allégresse, que nos lèvres ont besoin d’être purifiées avant d’être admises à prononcer de nouveau la parole des Anges et des Saints ; que nos cœurs, souillés par le péché et par l’amour des biens terrestres, doivent  être épurés par le repentir. Elle va dérouler sous nos yeux le triste spectacle de la chute de notre premier père, évènement lamentable d’où sont sortis tous  nos malheurs, avec la nécessité d’une rédemption. Elle pleure sur nous, cette Mère tendre, et elle veut que nous nous affligions avec elle.

   Acceptons donc la loi qui nous est faite ; et si déjà les joies pieuses sont suspendues pour nous, comprenons qu’il est temps de faire trêve avec les frivolités du monde. Mais, avant tout, écartons-nous du péché : assez longtemps il a régné en nous. Le Christ approche avec sa croix ; il vient tout réparer par le fruit surabondant de son Sacrifice. Nous ne voulons pas, sans doute, que son sang tombe inutilement sur nos âmes, comme la rosée du matin sur les sables encore tièdes du désert. Confessons d’un cœur humble que nous sommes pécheurs, et, semblables au publicain de l’Evangile qui n’osait lever ses regards, reconnaissons qu’il est juste que l’on nous retire, au moins pendant quelques semaines, ces chants auxquels notre bouche coupable s’était trop familiarisée, ces sentiments d’une confiance trop présomptueuse qui combattaient dans nos cœurs la sainte crainte de Dieu.

   L’insouciance pour les formes liturgiques, qui est l’indice le plus sensible de l’affaiblissement de la foi dans une chrétienté, et qui règne si universellement autour de nous, est cause que beaucoup de chrétiens, de ceux même qui fréquentent l’Eglise et les Sacrements, voient chaque année, sans en être émus, cette suspension de l’Alléluia. C’est à peine si plusieurs d’entre eux y donnent une attention légère et distraite, préoccupés qu’ils sont des habitudes d’une piété toute privée et en dehors de la pensée de l’Eglise. Si ces lignes leur tombent quelque jour sous les yeux, nous les engageons à réfléchir sur la souveraine autorité et sur la profonde sagesse de notre Mère commune, qui considère la suspension de l’Alléluia comme l’un des incidents les plus graves et les plus solennels de l’Année liturgique. Peut-être leur sera-t-il avantageux d’écouter un moment les accents si touchants que l’interruption forcée du cri céleste arrachait à la piété de nos pères, à l’époque où la foi chrétienne était encore la loi suprême des individus comme des sociétés.

   Les adieux à l’Alléluia dans les diverses Eglises, au Moyen-Age, étaient empreints, comme on va le voir, de sentiments divers selon les lieux. On profitait de la circonstance pour exprimer tout ce que cette parole céleste inspirait de tendresse ou d’enthousiasme ; d’autres fois, le regret des fidèles pour le céleste compagnon de leurs prières s’épanchait en accents plus tristes.

   Nous commencerons par nos vieilles Eglises de l’âge carolingien, et nous produirons d’abord ces adieux d’une familiarité naïve, par lesquels nos pères du IX° siècle se séparaient de l’Alléluia, en annonçant toutefois l’espérance de le revoir, quand la victoire du Christ aurait ramené la sérénité au ciel  de la sainte Eglise. Nous empruntons  les deux Antiennes qui suivent, et dont l’origine paraît être romaine, à l’Antiphonaire de Saint-Corneille de Compiègne, publié par dom Denys de Sainte-Marthe.

Ant.  Que le bon Ange du Seigneur t’accompagne, Alleluia ; qu’il rende ton voyage prospère, afin que tu reviennes avec nous dans la joie, Alleluia, Alleluia.

Ant. Alleluia, reste encore avec nous aujourd’hui ; demain, tu partiras, Alleluia ; et quand le jour se lèvera, tu te mettras en route, Alleluia, Alleluia, Alleluia.

   Voici maintenant les chants par lesquels l’Eglise gothique d’Espagne saluait l’Alléluia, à la veille du jour où il devait cesser. Nous prenons seulement les principaux traits d’un ensemble liturgique qui forme, pour ainsi dire, un Office entier :

Hymne :

   Habitants du ciel, faites résonner l’Alléluia dans vos sacrés cantiques ; d’un concert unanime chantez l’Alléluia éternel.
Vous qui vivez au sein de la lumière qui ne s’éteindra jamais, dans vos chœurs mélodieux, chantez avec ardeur l’Alléluia éternel.
Remontez vers cette heureuse cité de Dieu qui va vous recevoir, et qui, retentissante de cantiques joyeux, répète l’Alléluia éternel.
Dans votre victoire, prenez possession des honneurs de la patrie céleste, où il vous appartient de chanter l’Alléluia éternel.
C’est là que des voix augustes font résonner à jamais, à la gloire du grand Roi , le cantique joyeux, l’Alléluia éternel.
Repos après le labeur, nourriture, breuvage, il fait les délices de ceux qui rentrent dans la patrie, il les enivre à longs traits, l’Alléluia éternel.
Nous aussi, Auteur des êtres, nous célébrons dans nos cantiques mélodieux, nous chantons à votre louange l’Alléluia éternel.
Christ tout-puissant, nos voix te glorifient, et nous disons à ta gloire l’Alléluia éternel. Amen.

A son heureux retour, jubilez d’allégresse ; rendez au Seigneur le tribut de gloire et de mélodie, l’Alléluia éternel.

Capitule : L’Alléluia est du ciel, et il est de la terre ; au ciel il dure toujours, mais sur la terre il peut être chanté. Au ciel, il retentit sans interruption ; sur la terre, il trouve du moins des bouches fidèles. Au ciel, il éclate à jamais ; ici-bas, il n’est pas sans douceur. Au ciel, il exprime l’enthousiasme du bonheur ; sur la terre, il exprime la concorde. Au ciel, il est ineffable ; ici-bas, on le répète avec instance. Au ciel, il n’a pas besoin de syllabes ; sur la terre, il lui faut encore le secours de nos faibles mélodies. Au ciel, il est chanté par les Anges ; ici-bas, par les peuples. Ce ne fut pas seulement au ciel, mais sur la terre, que les bienheureux le chantèrent à la naissances du Christ Seigneur, lorsqu’il annoncèrent la gloire à Dieu, au plus haut des cieux, et la paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. Faites donc, Seigneur, que par nos actes nous méritions d’être réunis dans la vie bienheureuse à ceux dont nous cherchons à imiter l’office, en répétant vos louanges.

Ant. Tu nous quittes, Alléluia. Ton voyage sera heureux, Alléluia : tu reviendras à nous avec allégresse, Alléluia. liste porteront sur leurs bras, afin que ton pied ne heurte pas contre la pierre, et  tu reviendras à nous avec allégresse, Alléluia.

Bénédiction :
Que l’Alléluia, parole religieuse et pleine d’allégresse, soit proféré, à la louange de Dieu, par la bouche de tous les peuples.
R/. Amen.

Qu’elle soit mélodieuse dans la bouche des croyants, cette parole qui dans les concerts des Anges exprime la gloire.
R/. Amen.

Les citoyens de l’éternité la font retentir sans le secours d’une harmonie matérielle ; que dans vos cœurs elle fructifie à l’aide d’un sentiment d’amour toujours croissant.
R/. Amen.

Que le bon Ange du Seigneur t’accompagne, Alléluia : qu’il te prépare un voyage heureux, et tu reviendras à nous avec allégresse, Alléluia.

   Les Eglises d’Allemagne, au moyen âge, formulèrent les adieux à l’Alleluia, dans cette magnifique Prose que l’on trouve dans leurs Missels jusqu’au XVe siècle.

Séquence :

   Chantons tous Alléluia. A la louange du Roi éternel, que le peuple fasse retentir Alléluia.
Que les chœurs célestes chantent dans les hauteurs du ciel Alléluia.
Que le concert des bienheureux, dans les jardins du Paradis, exécute l’Alléluia.
Que les sphères éclatantes des cieux jubilent en proclamant dans les hauteurs l’Alléluia.
Que les nuées dans leur cours, les vents dans leur vol rapide, les éclairs dans leur marche étincelante, les tonnerres dans leur fracas, s’unissent pour rendre la douceur de l’Alléluia.
Flots et ondes, pluies et orages, tempêtes et sérénité, ardeurs et froidure, neiges, frimas, bois et forêts, célébrez l’Alléluia.
Et vous, race si variée des oiseaux , louez votre créateur avec mélodie par l’Alléluia.
La grande voix des animaux terrestres s’unira pour répondre Alléluia.
Puis, les sommets des montagnes renverront à leur tour Alléluia.
Et la profondeur des vallées répétera en tressaillant Alléluia.
Toi aussi, abîme des mers, jubile, et dis à ton tour Alléluia.
Et que l’immensité des espaces terrestres pousse ce cri : Alléluia.
Genre humain tout entier, fais entendre avec transport le chant de la louange, Alléluia.
Et rends au Créateur tes actions de grâces, en répétant sans cesse : Alléluia.
Ton Créateur se complaît à entendre éternellement cette parole : Alléluia.
Le Christ aussi accepte ce chant céleste : Alléluia.
Maintenant donc, frères, chantez dans l’allégresse : Alléluia.
Et vous, enfants, répondez toujours : Alléluia.
Chantez tous ensemble, chantez au Seigneur : Alléluia ; au Christ : Alléluia ; à l’Esprit-Saint : Alléluia.
Louange soit à l’éternelle Trinité qui parut avec gloire au baptême du Seigneur : chantons-lui : Alléluia.

   Nos Eglises de France, au XIII° siècle, et longtemps encore après, chantaient, aux Vêpres du samedi de Septuagésime, l’Hymne touchante que nous donnons ci-dessous.

Hymne :

   Alléluia est un chant de douceur, une voix d’allégresse éternelle ; Alléluia est le cantique mélodieux que les chœurs célestes font retentir à jamais, dans la maison de Dieu

   Alléluia! Céleste Jérusalem, heureuse mère, patrie où nous avons droit de cité ; Alléluia! c’est le cri de tes fortunés habitants ; pour nous, exilés sur les rives des fleuves de Babylone, nous n’avons plus que des larmes.

   Alléluia! Nous ne sommes pas dignes de le chanter toujours. Alléluia! Nos péchés nous obligent à le suspendre ; voici le temps que nous devons employer à pleurer nos crimes.

   Recevez donc, ô heureuse Trinité , ce cantique par lequel nous vous supplions de nous faire assister un jour à votre Pâque céleste, où nous chanterons à votre gloire, au sein de la félicité, l’éternel Alléluia. Amen.

   Dans la Liturgie actuelle, les adieux à l’Alléluia sont plus simples ; l’Eglise se contente de répéter quatre fois cette mystérieuse parole, à la fin des Vêpres du Samedi.

V/. Bénissons le Seigneur, Alléluia, Alléluia.
R/. Rendons grâces  à Dieu, Alléluia, Alléluia.

   Désormais, à partir des Complies qui vont suivre, nous n’entendrons plus ce chant du Ciel, jusqu’à l’heure où le cri de la Résurrection éclatera sur la terre. »

Chasuble violette du Mesnil-Marie (détail)

Publié dans:De liturgia, Lectures & relectures |on 26 janvier, 2013 |7 Commentaires »

2013-11. « Le monde a-t-il jamais joui d’une félicité durable ? »

Sermon de
notre glorieux Père Saint Augustin

sur
les tribulations et les misères de ce monde.

2013-11. « Le monde a-t-il jamais joui d'une félicité durable ? » dans De liturgia sandro-boticelli-st-augustin-dans-sa-cellule

Boticelli : Saint Augustin dans sa cellule

Dans l’esprit du magnifique temps de la Septuagésime (pour ce qui concerne ce temps liturgique voir ici > www), voici un court sermon de notre glorieux Père Saint Augustin bien propre à favoriser notre réflexion sur notre condition terrestre, sur ces vicissitudes, mais aussi sur le recul qu’il nous est indispensable d’acquérir par rapport aux évènements et tribulations d’ici-bas (nota : les divisions et les résumés des diverses parties que nous avons intercalés sont de notre fait). 

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§ 1. Notre époque n’est pas plus mauvaise que les précédentes : les siècles passés n’apparaissent bon qu’à ceux qui n’y ont pas vécu. C’est en raison du péché que le genre humain, à tous les âges, est soumis à des tribulations diverses.

Toutes les fois que nous éprouvons quelque tribulation ou quelque misère, nous devons y voir un avertissement et une correction. Nos Saints Livres eux-mêmes, en effet, ne nous promettent pas la paix, la sécurité et le repos : ils nous annoncent, au contraire, des tribulations, des misères et des scandales. L’Evangile ne s’en tait pas : « Mais », dit-il, « celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé » (Matth. X, 22). De quel bonheur l’homme a-t-il joui en cette vie, depuis le moment où notre premier père nous a mérité la mort et a reçu la malédiction de Dieu, malédiction dont le Christ Seigneur nous a délivrés? « Mes frères », dit l’Apôtre, « ne murmurez pas, comme quelques uns d’entre eux ont murmuré et ont trouvé la mort dans la morsure des serpents » (I Cor. X, 10). Aujourd’hui, mes frères, le genre humain est-il soumis à des épreuves inconnues jusqu’à nos jours, et que nos pères n’aient pas subies avant nous? Ou plutôt, souffrons-nous seulement ce que, au dire de l’histoire, ils ont souffert en leur temps? Et tu rencontres des hommes qui murmurent de l’époque actuelle! Quand est-ce que nos aïeux ont eu à se louer entièrement de leur existence? Hé quoi? Si l’on pouvait faire remonter ces hommes au temps de leurs pères, ils murmureraient encore. Parmi les siècles passés, lequel, à ton avis, a été bon? Ils t’apparaissent bons, parce que tu n’y as pas vécu. Aujourd’hui, pourtant, tu as échappé à la malédiction, tu crois au Fils de Dieu, tu es imbu et instruit de la doctrine renfermée dans nos Saints Livres. Je m’étonne de te voir supposer qu’Adam ait passé une vie paisible : or, tes parents n’ont-ils pas hérité d’Adam? C’est bien à lui que Dieu a adressé ces paroles : « Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front ; tu travailleras la terre d’où tu as été tiré, et elle te produira des ronces et des épines » (Gen. III, 18-19). Il a mérité cette punition, il l’a reçue et cela a été l’effet du juste jugement de Dieu.

* * * * *

§ 2. Exemples tirés de la Sainte Ecriture prouvant la dureté des temps passés : les tribulations actuelles ne doivent donc pas nous entraîner à murmurer contre les dispositions de la Providence.

Pourquoi donc t’imaginer que les temps anciens ont été meilleurs que le temps présent? Depuis le premier Adam jusqu’à l’Adam d’aujourd’hui, il y a eu travail et sueurs, ronces et épines. Il y a eu le déluge, des moments difficiles, des années de famine et de guerre, les annales de l’histoire en font mention ; nous ne devons donc point prendre occasion des jours actuels, pour murmurer contre Dieu. Nos ancêtres ont vu jadis, et il y a de cela bien longtemps, de bien tristes choses : alors se vendait à poids d’or la tête d’un âne mort (IV Rois II, 25) ; on achetait à prix d’argent la fiente de pigeons (ibid.) ; on vit même des femmes s’engager mutuellement à faire mourir leurs enfants pour les manger (IV Rois VI, 28) : lorsqu’elles furent arrivées à bout du premier, la mère du second ne consentit point à tuer le sien : la cause fut donc portée au tribunal du roi, et celui-ci se reconnut plutôt comme coupable que comme juge. Mais à quoi bon rappeler les guerres et la famine de ce temps-là? Qu’elles ont été terribles, les calamités d’alors! A en entendre le récit, à le lire, nous frémissons tous d’horreur. En réalité, n’est-ce point pour nous un motif de remercier Dieu, au lieu de nous plaindre de l’époque où nous vivons?

* * * * *

§ 3. Tribulations et inquiétudes sont inhérentes à notre condition terrestre.

Quand le genre humain s’est-il trouvé à l’aise? En quel temps n’a-t-on pas vu régner la crainte et la douleur? Le monde a-t-il jamais joui d’une félicité durable? De trop vieilles misères n’ont-elles pas toujours été son partage? Si tu ne possèdes pas, tu brûles d’acquérir ; et si tu possèdes, ne crains-tu point de perdre? Et ce qu’il y a en cela de plus malheureux, c’est qu’en dépit de tes désirs et de tes craintes, tu te trouves bien. Tu vas épouser une femme : qu’elle soit mauvaise, elle fera ton supplice ; qu’elle soit bonne, tu auras une peur incessante de la voir mourir. Avant de naître, les enfants sont une source de douleurs atroces ; ils n’inspirent que des inquiétudes, une fois qu’ils sont nés. Qu’on est heureux à la naissance d’un enfant, et, toutefois, comme on redoute de le voir mourir et de le pleurer! Où rencontrer une existence à l’abri du malheur? La terre que nous habitons ne ressemble-t-elle pas à un immense navire? Ne sommes-nous pas, comme des nautonniers, ballottés au gré des flots, sans cesse exposés à perdre la vie, toujours battus par l’orage et la tempête, à chaque instant menacés du naufrage, et soupirant ardemment après le port ; car ils ne sentent que trop qu’ils sont des passagers? Par conséquent, peut-on vraiment appeler bons des jours remplis d’incertitude, qui passent avec la rapidité de l’éclair, dont on peut dire qu’ils ont fini avant de commencer, et qu’ils ne viennent qu’afin de cesser d’être?

* * * * *

§ 4. Les seuls jours qui seront véritablement bons seront ceux de l’éternité : vivons donc saintement pour mériter d’y prendre part.

Donc, « où est l’homme qui souhaite vivre et désire voir des jours heureux?» (Ps. XXXIII, 13). Pour ce bas monde, il n’y a, à vrai dire, ni vie, ni jours heureux. Les seuls jours de bonheur sont ceux de l’éternité. Ce sont des jours, et des jours sans fin ; le Prophète l’a dit : « J’habiterai pendant toute la durée des jours éternels (Ps. XXII, 9), parce qu’un jour passé dans votre demeure vaut mieux que mille jours » (Ps. LXXXIII, 10). Oui, un jour sans fin est préférable à tous les autres. Voilà ce qu’il nous faut désirer : voilà ce qui nous est promis en termes ordinaires et se réalisera d’une manière ineffable. « Où est l’homme qui souhaite vivre? » On dit tous les jours : Vie et vie ; mais pour celle-ci, de quoi s’agit-il? « Et désire voir des jours heureux? » Tous les jours, on parle même d’heureux jours ; et, si on les examine de près, il n’y en a plus. Tu as aujourd’hui passé une bonne journée, si tu as rencontré ton ami, et si cet ami consentait à rester avec toi, quelle bonne journée tu passerais! Après avoir rencontré son ami, l’homme ne se plaint-il pas d’avoir dû le quitter? Voilà comme est bon, pour toi, le jour qui te quitte après t’avoir visité. J’ai passé de bonnes heures : où sont-elles? Ramène-les-moi. J’ai passé un moment agréable : tu t’en réjouis ; plains-toi plutôt de ce qu’il n’est plus. « Quel est l’homme qui souhaite vivre et désire voir des jours heureux? » Et tous de s’écrier : « Moi ! » Mais ce ne sera qu’après cette vie, après les jours présents. Il nous faut donc attendre ; mais que nous recommande-t-on de faire pour parvenir à ce que l’avenir seul peut nous procurer? Que ferai-je dans cette vie telle quelle, pour arriver à la vie et voir des jours heureux? Ce que dit ensuite le Psalmiste : « Préserve ta langue de la calomnie et tes lèvres des discours artificieux ; éloigne-toi du mal et pratique le bien » (Ps. XXXIII, 14-15). Fais ce qui est commandé, et tu recevras ce qui est promis. S’il y a des efforts à t’imposer et que tu aies peur de la peine, que, du moins, l’éclat de la récompense te ranime!

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2013-9. Du cantique « Mère de l’Espérance » qui fut chanté au cours de l’apparition de la Très Sainte Vierge à Pontmain.

 17 janvier,
Anniversaire de l’apparition de Notre-Dame à Pontmain.

       A la suite de ma publication relatant l’apparition de la Très Sainte Vierge Marie à Pontmain, le 17 janvier 1871 (cf. > ici), un de nos fidèles amis m’a fait parvenir quelques documents des plus intéressants dont je tiens à vous donner un aperçu en les condensant ci-dessous à votre intention.
Que soit très chat-leureusement remercié Monsieur D.A., qui me précisait qu’il a reçu le sacrement de confirmation des mains de Son Excellence Monseigneur Paul-Marie Richaud (futur cardinal archevêque de Bordeaux) dans la basilique de Pontmain le 6 juin 1944, jour du débarquement des forces alliées en Normandie… 

Lully.

2013-9. Du cantique

Note concernant le cantique Mère de l’Espérance

       En 1848, en plein orage révolutionnaire, Monsieur le chanoine Prud’homme eut l’inspiration de fonder une vaste association de prières pour le salut de la France. Cette association prit de l’ampleur jusqu’à devenir l’Archiconfrérie de Notre-Dame d’Espérance.
Pour appuyer cette oeuvre il composa le fameux cantique Mère de l’Espérance qui se répandit rapidement dans toute la France. En voici les paroles : 

R./ Mère de l’Espérance,
Dont le nom est si doux
Protégez notre France.
Priez, priez pour nous ! (bis)

Souvenez-vous, Marie,
Qu’un de nos Souverains
Remit notre Patrie
En vos augustes mains.

La crainte et la tristesse
Ont gagné notre cœur.
Rendez-nous l’allégresse,
La paix et le bonheur.

Vous calmez les orages,
Vous commandez aux flots,
Vous guidez au rivage
Les pauvres matelots.

De la rive éternelle,
Secondez nos efforts ;
Guidez notre nacelle
Vers les célestes ports.

En ces jours de souffrances
Sauvez-nous du danger ;
Épargnez à la France
Le joug de l’étranger.

Des mères en alarmes
Raffermissez les cœurs ;
Venez sécher leurs larmes,
ô Mère des douleurs !

Au chemin de la gloire,
Conduisez nos soldats
Donnez leur la victoire
Au jour des saints combats.

Et si, pour la Patrie,
Bravant les coups du sort
Ils vont donner leur vie,
Ah ! couronnez leur mort !

   Le cantique fut adopté dans la paroisse de Pontmain : il n’y a rien d’étonnant à ce qu’il fut au programme des prières entonnées par les paroissiens pendant le temps l’apparition. Or c’est à ce chant, écrira plus tard Joseph Barbedette, que « la Très sainte Vierge devait réserver son plus beau sourire de toute l’apparition ».
Elevant les mains à hauteur des épaules, elle se mit à remuer les doigts, paraissant accompagner le chant avec une extrême délicatesse. Elle était radieuse. Aussi la joie des enfants devint-elle à ce moment-là exubérante : « Voilà qu’Elle rit, voilà qu’Elle rit ! » disaient-ils, « Oh ! qu’elle est belle ! Oh ! qu’elle est belle ! »

   Arrivé au septième couplet toutefois, l’avant-dernier du cantique, où l’on demandait : « Au chemin de la gloire Conduisez nos soldats ; Donnez-leur la victoire… », la banderole qui s’étendait aux pieds de la Vierge ne subsista pas dans le ciel.

   Le surlendemain de l’apparition, le chanoine Prud’homme apprit par une lettre ce qui s’était passé, et il ne put retenir ses larmes quand il sut que la Très Sainte Vierge avait honoré de son sourire sa composition. Cette émotion devait lui rester jusqu’à la fin de sa vie.

   En ce qui nous concerne, nous sommes aujourd’hui vivement choqués du fait qu’on a donné au cantique qui avait réjoui le coeur de Notre-Dame une tonalité toute différente de celle qui a prévalue à Pontmain durant tout un siècle.
En effet, dans les années qui ont suivi le second concile du Vatican et ont été marqué – spécialement en France – par cette démangeaison maladive d’entendre des nouveautés et de marquer une certaine forme de rupture, les paroles du cantique « Mère de l’Espérance » ont été totalement remaniées, au point que l’intention profonde initiale dont il était l’expression a disparu. Voici le texte de cette nouvelle version : 

R./ Mère de l’Espérance
Dont le nom est si doux,
Madone de l’enfance,
Demeure auprès de nous ! (bis)

Tu es bien notre Mère,
Toi qui as visité
sur leur lointaine terre
les enfants extasiés.

Apparaît ton sourire
Dans la nuit étoilée,
Il fait toujours revivre
Les cœurs désemparés.

Apprends-nous la prière,
Icône de beauté ;
Dieu n’est-il pas le Père,
Tout Amour et Bonté ?

Mère de toute grâce,
A l’univers troublé,
Fais resplendir la face
De ton fils Bien-Aimé.

Ta douleur nous oppresse
Devant le Crucifié,
Tu mets nos cœurs en liesse:
Christ est ressuscité !

Messagère joyeuse
De la Sainte Cité,
Guide-nous, Bienheureuse,
aux chemins de la paix.

   Notre ami fit partie de ceux qui protestèrent, en disant que c’était un abus de remplacer ainsi des paroles qui avaient été l’objet d’un sublime échange entre le ciel et la terre, ce qui leur donnait une haute valeur historique déjà, si ce n’est surnaturelle, et qui – de ce fait – ne nous appartenaient plus.
Il rappela à ce propos la lettre pastorale que Monseigneur Richaud, alors évêque de Laval, avait publié le 2 janvier 1940 :

« La corrélation est évidente entre la cessation de l’invasion ennemie, à sa pointe la plus avancée et l’événement de Pontmain ! Une corrélation non moins claire est indiquée par la Très Sainte Vierge entre l’intervention de la Providence et la supplication nationale qui s’élevait de toutes parts. A l’heure même de l’apparition et tandis que les villageois de Pontmain priaient la Madone qui apparaissait à leurs enfants, prières et cantiques, supplications et promesses jaillissaient à Notre-Dame de l’Espérance à Saint-Brieuc et à Notre-Dame des Victoires à Paris. Dans toute la France se répandaient depuis plusieurs mois les circulaires du P. Ramière en faveur d’une Consécration de la France et M. Legentil, quelques jours plutôt, le 11 janvier, avait prononcé à Poitiers la première formule du Voeu National. Tel est le sens des mots : « Mon Fils se laisse toucher » et encore, Nous ne parlons pas des autres voeux qui furent, à la même époque, émis en de nombreux sanctuaires.
Mais l’on peut bien dire que Marie, à qui Louis XIII avait autrefois consacré officiellement son royaume, a, d’une manière manifeste, pris en charge à Pontmain le salut de la France et a voulu marquer, en ce lieu béni de notre chère Mayenne, de quelle façon elle encourageait toutes nos supplications patriotiques. Son message est aussi bien un message d’espérance, de prière et de sacrifice, et il vaut pour toutes les situations personnelles et familiales qu’on vient lui confier. Mais il intéresse, directement et au premier chef, la Patrie. Notre-Dame de Pontmain, si toutes les Madones ont leur spécialité, c’est la Madone de la France en péril ».

X  Paul-Marie Richaud, évêque de Laval

   Et notre ami conclut par ces lignes, dont nous avons nous-mêmes éprouvé la vérité puisque -ayant eu l’occasion de passer à Pontmain il y a quelques années – nous nous sommes faits doucement « rabroués » par la personne de l’accueil lorsque nous commîmes « l’erreur » (presque impardonnable) de lui rappeler que le sanctuaire devait être un lieu spécifique de prière pour la France :  « On ne prie plus officiellement pour la France à Pontmain depuis quarante ans, et, dans la pénombre qui nous fait aujourd’hui aller à tâtons, on peut se dire qu’il est bien vrai que nous n’avons de grâces que celles de nos prières ! »

   Rappelons-le, l’invocation officielle à Notre-Dame de Pontmain – assortie alors de précieuses indulgences – était originellement celle qui figure sur l’image que nous reproduisons ci-dessous : « Notre-Dame de Pontmain, priez pour nous, pour l’Eglise et pour la France ! »

pontmain-image-devotion 17 janvier dans Commentaires d'actualité & humeurs

2013-8. De l’apparition de la Très Sainte Mère de Dieu et notre Mère à Pontmain, le soir du 17 janvier 1871.

17 janvier,
Anniversaire de l’apparition de Notre-Dame à Pontmain.

       Pontmain : à peine un village, une toute petite paroisse du bas Maine aux confins de la Bretagne.

       Janvier 1871 : la guerre entre la Prusse et la France se prolonge, et les circonstances semblent vraiment désespérées. L’armée prussienne déferle vers l’Ouest de la France, enfonçant toute résistance. Le mardi 17 janvier, elle est aux portes de Laval.

   Il neige abondamment. L’heure est à l’angoisse. Une épidémie de typhoïde s’est déclarée. La variole se répand. Les éléments eux-mêmes semblent perturbés : le 11 janvier, une aurore boréale a vivement frappé les esprits. Ce 17 janvier, vers midi trente, la terre a tremblé dans toute la contrée, déjà ravagée par l’inquiétude.

   L’abbé Michel Guérin est curé de Pontmain depuis 36 ans. C’est un homme de prière : il prie, et il fait prier. Il communique à ses paroissiens sa foi vive, et aussi son immense amour pour la Vierge Marie.
Pourtant, la population de Pontmain vit des journées d’angoisse, tant les rumeurs les plus affolantes courent le pays. On est sans nouvelles des trente-huit jeunes gens de la paroisse mobilisés.
L’oppression des coeurs est telle que le dimanche 15 janvier, après les Vêpres, après la récitation du chapelet et la prière pour les soldats, personne n’ose entonner le cantique «Mère de l’espérance», comme à l’accoutumée.
Le bon abbé Guérin essaie de ranimer la confiance par quelques paroles pleines de réconfort, et il conclue résolument : « Allons mes enfants, chantez votre cantique : Mère de l’Espérance ! ».
A son insu, le bon curé vient de préparer ses paroissiens à une faveur inouïe.

2013-8. De l'apparition de la Très Sainte Mère de Dieu et notre Mère à Pontmain, le soir du 17 janvier 1871. dans Chronique de Lully pontmain-eglise-paroissiale

   La prière quotidienne rythme la vie de la famille Barbedette, comme de toutes les familles de cette paroisse fervente.
César et Victoire, les parents, ont trois fils : l’aîné Auguste – né d’un premier mariage de Victoire – est âgé de 25 ans ; les deux plus jeunes, Eugène et Joseph, ont respectivement 12 et 10 ans.
Eugène et Joseph Barbedette vont servir la Sainte Messe chaque matin. Auparavant, à la maison, comme ils le lui ont promis, ils récitent le chapelet à l’intention de leur frère Auguste, mobilisé ; ensuite, à l’église, en attendant la messe de sept heures, ils font le chemin de Croix pour demander la cessation de la guerre.
Le soir du mardi 17 janvier, au retour de l’école, vers 16h30, Eugène et Joseph aident leur père à piler des ajoncs dans la grange attenante à la maison familiale. Leur travail est interrompu par la visite d’une personne du voisinage, Jeannette Detais, qui a recueilli des nouvelles des soldats et vient les rassurer au sujet d’Auguste. Malgré son inquiétude vis-à-vis de son grand frère qui est aussi son parrain, Eugène ne s’attarde pourtant pas auprès d’eux : il sort de la grange, comme attiré par un mystérieux appel.

   La neige couvre le sol et les toits. Il fait très froid. Le ciel est clair, parsemé d’étoiles qui paraissent encore plus nombreuses et plus brillantes que les autres jours.
Alors, arrêtant son regard au-dessus de la maison d’Augustin Guidecoq, en face de la grange, il aperçoit une « belle Dame » vêtue d’une robe bleue, parsemée d’étoiles d’or – comme le plafond de l’église – : elle tend ses mains abaissées dans un geste d’accueil. Elle le regarde en souriant, il la regarde longuement en silence. Il n’a jamais rien vu d’aussi beau.

   Au moment où Jeannette Détais se dispose à rentrer chez elle, Eugène l’interpelle dans l’espoir de lui faire admirer ce qu’il est en train de contempler, mais Jeannette lui déclare à regret qu’elle ne voit « rien du tout ».
César, le père, sort de la grange avec Joseph, mais, dans la direction indiquée, il ne voit rien d’autre que le ciel tout scintillant d’étoiles.
Quand à Joseph, il aperçoit aussitôt « au milieu des airs, une Dame d’une beauté ravissante » qui regarde les deux enfants et leur sourit, comme une mère : elle semble encore plus heureuse de les voir qu’ils ne le sont de la contempler.

   Eugène s’assure vite que la vision découverte par Joseph est bien identique à celle qu’il a lui-même sous les yeux : « Vois-tu bien, Joseph ? – Holà ! oui, je vois une belle grande dame ! – Comment est-elle habillée ? – Elle a une robe bleue et puis, des étoiles dorées dessus, et puis des chaussons bleus avec des boucles d’or. – Dis donc, Joseph, regarde donc aussi : elle a une couronne. – Je vois bien une couronne dorée qui va en s’agrandissant, et puis un fil rouge au milieu de la couronne, et puis un voile noir ».

   Le père écoute tout en continuant à regarder le ciel mais, très perplexe dans un premier temps, il ordonne à ses garçons d’aller reprendre le travail inachevé. Cependant, rapidement pris de remord, il demande à Eugène de retourner voir s’il aperçoit toujours la même chose. L’enfant confirme, plein de joie, que la Dame est toujours là ; il l’envoie alors chercher sa mère.
Victoire arrive aussitôt, mais elle ne réussit pas à voir ce que Joseph et Eugène seraient si heureux de lui faire découvrir. Elle est toutefois ébranlée par leur récit et par l’émotion visible de leur père. La pensée lui vient alors qu’il s’agit peut être d’une apparition de la Sainte Vierge : elle les fait rentrer tous trois dans la grange dont elle ferme la porte, par discrétion vis-à-vis des voisins qui commencent à être attirés par le bruit des voix. Puis, derrière la porte et tournés du côté de la vision, les parents Barbedette et leur deux enfants récitent à genoux cinq Pater et cinq Ave en l’honneur de la Sainte Vierge.

   Quand ils sortent de la grange, la Dame est encore là, toujours souriante. A l’aide de ses lunettes, Victoire tente encore une fois de l’apercevoir, mais sans obtenir – on s’en doute! – de meilleur résultat. Un peu dépitée, elle donne l’ordre à ses enfants d’aller terminer leur travail. Puis, après le souper, pris debout et à la hâte, ils obtiennent la permission de retourner à la grange avec la recommandation de leur mère de réciter à nouveau cinq Pater et cinq Ave. Ils reviennent ensuite à la maison.

pontmain-phase-1-de-lapparition 17 janvier dans De Maria numquam satis

   Victoire décide alors d’aller avec Eugène jusqu’à l’école des sœurs, à quelques pas de leur maison, chercher Sœur Vitaline : « Les sœurs sont meilleures que vous, leur dit-elle : si vous voyez quelque chose, elle le verra bien aussi ».
Sœur Vitaline les suit jusqu’à la porte de la grange.
Tout de suite Eugène l’interroge. Il voudrait tellement qu’elle soit témoin, elle aussi, de ce qu’il voit !
« Voyez-vous bien, ma sœur ? » demande-t-il.
« J’ai beau ouvrir les yeux, dit la sœur, je ne vois absolument rien. »
Contrarié, il insiste en lui indiquant le point précis où se trouve la vision : trois étoiles extraordinaires, beaucoup plus brillantes que les autres, forment un triangle délimitant l’apparition ; la plus élevée est située juste au dessus de la tête de la Dame.
Mais Sœur Vitaline ne voit toujours rien, à part les trois étoiles exceptionnelles, visibles pour tout le monde ce soir là. Elle prend donc le parti de rentrer chez elle.

   Victoire la reconduit jusqu’à la porte de la communauté des religieuses et revient à la grange avec trois petites pensionnaires que lui confie Sœur Vitaline : Françoise Richer (11 ans), Jeanne-Marie Lebosse (9 ans) et Augustine Mouton (12 ans).
A peine arrivées auprès d’Eugène qui les appelle du seuil de la grange, Françoise et Jeanne-Marie s’écrient ensemble : « Oh la Belle Dame avec une robe bleue ! » et elles la décrivent à leur tour.

   Joseph, qui n’avait pas osé jusqu’ici sortir sans permission, se hâte de les rejoindre tandis que Sœur Vitaline revient auprès d’eux, suivie de Sœur Marie-Edouard.
Cette dernière, déçue elle aussi de ne rien apercevoir, constate que seuls des enfants semblent avoir le privilège de la vision. Elle décide donc d’aller chercher d’autres enfants plus jeunes encore. Accompagnée d’Eugène, elle passe chez les grands-parents Friteau pour leur demander d’emmener à la grange leur petit Eugène, enfant chétif et malade. Parvenu à la grange, le petit Eugène Friteau a le regard immédiatement attiré par la vision et son visage s’éclaire aussitôt de joie ; il garde le silence mais affirmera les jours suivants qu’il a « vu la Belle Dame ».
Sœur Marie-Edouard s’empresse d’aller chercher Monsieur le Curé, qui est tout d’abord saisi de crainte et profondément 
bouleversé quand il l’entend, toute émotionnée, lui annoncer qu’il y a un « prodige chez les Barbette…. que les enfants voient la Sainte Vierge ».

   En ressortant du presbytère avec le bon curé et sa servante Jeannette, Sœur Marie-Edouard donne l’éveil dans plusieurs familles, notamment celles où se trouvent des petits enfants.
De proche en proche, la nouvelle se répand et tout le bourg se trouve bientôt rassemblé devant la grange. 
Parmi les derniers arrivants, il y a encore une petite fille Augustine Boitin, 25 mois, que sa maman porte dans ses bras ; l’enfant est instantanément fascinée par l’Apparition et s’exclame en battant des mains : « Le Jésus, le Jésus ! » L’assemblée est saisie d’émotion.
Plus tard dans la soirée, arrive le charpentier Avice avec ses deux filles et portant dans ses bras son fils Auguste âgé de 4 ans. L’enfant dit aussitôt très doucement à son père « Je vois bien aussi, moi… une belle dame… une robe bleue avec des étoiles comme dans l’église, mais plus belle ! » Son visage rayonne d’un bonheur extraordinaire. Son père lui recommande de ne plus rien dire jusqu’à leur retour à la maison.

pontmain-phase-2-de-lapparition 17 janvier 1871 dans Lectures & relectures

   C’est au moment même où Monsieur le curé s’approche de la grange qu’une petite Croix rouge se forme instantanément sur le cœur de la Dame.
En même temps, un ovale bleu se dessine autour d’elle et quatre bougies se fixent à l’intérieur de l’ovale, détails analogues à ceux qui entourent la statue de la Vierge installée dans l’église de Pontmain. Scrutant en vain le ciel étoilé, l’abbé Guérin interroge les enfants qui lui décrivent en détail ce qu’ils contemplent.

   Les petits voyants ont constaté à plusieurs reprises une expression de tristesse sur le visage de la Dame qui cesse de sourire chaque fois que l’entourage se met à bavarder, à plaisanter ou à émettre des doutes sur sa présence. Et, comme l’assistance manifeste une certaine agitation, Monsieur le Curé demande le silence. Puis, Sœur Marie-Edouard lui suggère de parler à la Sainte Vierge et de demander aux enfants de lui parler. En réponse, il prononce le seul mot que Marie semble attendre : « Prions !»
C’est alors une belle veillée de prière qui commence : le dialogue est engagé entre le ciel et la terre. Le curé Guérin prend lui-même l’initiative des prières, et chose merveilleuse, les phases de l’apparition semblent se dérouler conformément aux prières qui sont demandées.

   Pendant toute la durée du chapelet, au fur et à mesure que s’intensifie la prière, la Dame embellit et « grandit » progressivement tandis que les « Ave Maria », en s’élevant jusqu’à elle, se transforment en autant d’étoiles d’or qui viennent s’imprimer sur sa robe. L’ovale bleu qui l’entoure s’élargit également. Les étoiles qui l’environnent semblent s’écarter comme pour lui faire place et, dans un mouvement harmonieux, viennent se ranger sous ses pieds.
L’émerveillement des enfants, devant la splendeur de cette vision de lumière en plein ciel, est inexprimable.

   A l’invitation de Monsieur le Curé, Sœur Marie-Edouard entonne le Magnificat. Mais le premier verset n’est pas achevé que les enfants s’écrient : «Voilà quelque chose qui se fait ! »
Une grande banderole blanche de la longueur de la maison Guidecoq vient d’apparaître au dessous de la Belle Dame.
Le Magnificat à peine repris, ils s’écrient à nouveau : « Voilà encore quelque chose qui se fait ! » Des lettres d’or en majuscule apparaissent lentement sur la banderole : MAIS.
Ce mot, répété par les enfants et provoquant la perplexité des assistants, brille seul pendant une dizaine de minutes environ.
Puis d‘autres lettres se forment, une à une, aussitôt proclamées par les enfants. A la fin du Magnificat, ils lisent ces mots : MAIS PRIEZ MES ENFANTS.

   Un petit événement vient entre-temps de se produire : un habitant du bourg rentre en catastrophe d’Ernée d’où il ramène des nouvelles. Entendant chanter le Magnificat, il crie à l’assemblée en prière : « Vous pouvez prier le bon Dieu, les Prussiens sont à Laval ! »
Mais l’Apparition a déjà rempli tous les cœurs d’une telle confiance qu’il entend cette réponse stupéfiante : « Ils seraient à l’entrée du bourg que nous n’aurions pas peur ! »
Fortement impressionné, il vient se joindre à ceux qui prient.

   Le froid étant extrêmement vif, on fait entrer tout le monde dans la grange, portes ouvertes. Puis, à la demande de Monsieur le Curé, Sœur Marie-Edouard entonne les litanies de la Sainte Vierge : « Il faut, dit le Curé Guérin, prier la Sainte Vierge de manifester sa Volonté. »

   Pendant le chant des litanies, d’autres lettres se sont formées, les enfants épèlent : DIEU VOUS EXAUCERA EN PEU DE TEMPS
Après le mot TEMPS, se forme un gros point semblable à un soleil d’or.

   Cette promesse provoque une véritable exultation dans l’assistance et chez les enfants qui sont dans un bonheur indescriptible. Tous sont remplis d’une immense espérance : « C’est fini ! C’est fini ! » dit-on « La guerre va cesser, nous aurons la paix ! »
« Oui ! répond Eugène, mais PRIEZ ! »

   Monsieur le Curé fait alors chanter l’ « Inviolata »Les enfants s’exclament à nouveau : « Voilà encore quelque chose qui se fait ! »
Sur une nouvelle ligne au-dessous de la première, à l’instant même où se chantent les paroles « Ô sainte Mère du Christ », de nouvelles lettres de forment : MON FILS
A ces mots, lus et répétés par les enfants, une émotion indicible se répand parmi les assistants : « C’est bien la Sainte Vierge ! » crient les enfants. « C’est elle, c’est elle ! » répète l’assistance.

   Souriant toujours, la Dame continue à les regarder. Dans un immense élan de reconnaissance et d’amour, on chante le « Salve Regina » tandis que les lettres continuent à se former. A la fin de l’antienne, les enfants peuvent lire : MON FILS SE LAISSE TOUCHER
Un gros trait d’or souligne cette dernière ligne qui se termine sans ponctuation. L’inscription totale est donc celle-ci :

MAIS PRIEZ MES ENFANTS DIEU VOUS EXAUCERA EN PEU DE TEMPS.
MON FILS SE LAISSE TOUCHER

   Les chants sont interrompus : l’assistance émue et recueillie, prie un moment en silence. Puis le Curé Guérin suggère de chanter un cantique à la Sainte Vierge et Sœur Marie-Edouard entonne « Mère de l’Espérance » ; pendant ce chant les enfants exultent en raison de la joie qu’ils lisent sur le visage de la Madone (qui a élevé les bras et agite les doigts en cadence) : « Voilà qu’elle rit ! Oh ! Qu’elle est belle ! Qu’elle est belle ! »
« Jamais, on n’a rien vu de pareil ni en personne, ni en image », diront ils plus tard.

pontmain-phase-3-de-lapparition apparition dans Memento

   Vers la fin du cantique, la banderole d’inscription disparaît, comme si un rouleau couleur du ciel passait en l’enroulant sur lui-même.
Monsieur le Curé fait alors chanter un autre cantique : « Mon doux Jésus, enfin, voici le temps de pardonner à nos coeurs pénitents… », avec le « Parce Domine » en guise de refrain.
A ce moment le visage de l’Apparition se voile de la tristesse : « Encore quelque chose se fait » s’écrient les enfants dont les visages s’assombrissent soudain.
En effet, une croix rouge haute de cinquante centimètres apparaît en avant de la Vierge Marie qui abaisse les mains pour la saisir et la tenir devant elle. Cette croix d’un rouge vif porte un Christ d’un rouge sombre. A l’extrémité du bâton de la croix, un croisillon porte, en lettres rouge vif, l’inscription : JESUS–CHRIST

   Pendant tout ce cantique, Marie a les yeux constamment baissés : elle contemple le Christ qu’elle présente à tous. Ses lèvres remuent. Elle paraît s’unir au chant qui implore le pardon. Son visage est empreint d’une tristesse indicible qui dépasse tout ce qu’on peut imaginer. Les voyants eux-mêmes affirmeront plus tard que « jamais de toute leur vie, ils n’avaient vu pareille douleur sur un visage humain »C’est bien la Mère des Douleurs au pied de la croix de son Fils.
Une étoile se détache et vient allumer successivement les quatre bougies réparties autour de l’Apparition.

pontmain-phase-4-de-lapparition apparition de la Mère de Dieu

   L’assistance entonne l’hymne « Ave, maris Stella » et le crucifix rouge disparaît. Une petite croix blanche apparaît sur chaque épaule de la Vierge dont le visage s’éclaire à nouveau ; elle reprend son sourire ; un sourire où reste cependant comme un souvenir de l’immense tristesse par laquelle elle vient de passer.

   Le curé Guérin invite ses paroissiens à faire ensemble la prière du soir.
Vers la fin de la prière, Marie disparaît tout doucement derrière un voile blanc qui se déroule progressivement à partir du bas jusqu’à ce que les voyants n’aperçoivent plus que son visage, qui leur prodigue, avant de s’effacer, ses derniers sourires et son dernier regard chargé de toute sa tendresse maternelle.
« Voyez vous encore ? » demande M le Curé. « Non, répondent les enfants. C’est tout fini !»
Il est près de vingt et une heures.

   Chacun rentre chez soi, le cœur tout imprégné de cette présence maternelle de Marie. Alors qu’ils étaient plongés dans l’angoisse et le découragement quelques heurs plus tôt, tous sont maintenant envahis par une paix profonde, par une immense reconnaissance et par une confiance sans limite, dans la certitude d’une prière déjà exaucée.

   Le 22 janvier, à la surprise des chefs militaires français, les troupes allemandes se retirent. Pontmain et la Bretagne sont providentiellement épargnés.
Le 28 janvier, l’armistice est signé. Les jeunes gens de la paroisse mobilisés reviennent tous, sains et saufs.

* * * * * * *

   Ô combien est lumineux le message de Notre Dame de Pontmain et d’une si grande actualité :

Mais priez mes enfants, Dieu vous exaucera en peu de temps.
Mon Fils se laisse toucher

   Cette grande recommandation, destinée à être gravée dans nos cœurs en caractères indélébiles, est un appel impérieux à la prière.
Marie peut tout obtenir de Dieu – même des miracles – , mais notre prière est indispensable. Dieu, pour pouvoir intervenir dans nos vies, a besoin de notre prière persévérante…
Prions donc! Prions le plus possible! Ne nous lassons pas de prier, et de demander l’intercession de Notre-Dame.
Plus s’intensifie notre prière, plus s’accroît la puissance d’intercession de notre Mère céleste.
 

pontmain-image-devotion Notre-Dame

   L’année suivante, le 2 février 1872, l’Evêque de Laval proclamera : « Nous jugeons que l’Immaculée Vierge Marie, Mère de Dieu, a véritablement apparu le 17 janvier 1871 à Pontmain »

* * * * * * *

On trouvera ci après :
– le cantique « Mère de l’Espérance » > ici
– le récit de ce qui s’est passé à la basilique de Notre-Dame des Victoires, à Paris, pendant le temps même de cette apparition, le 17 janvier 1871 > ici

2013-7. La bénédiction des animaux pour la fête de Saint Antoine le Grand.

17 janvier,
fête de Saint Antoine le Grand, père de tous les moines d’Orient et d’Occident (cf. > ici, et > ici) ;
Mémoire de Sainte Roseline de Villeneuve (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Théodose 1er le Grand, empereur (cf. > ici) ;
Anniversaire de l’apparition de Notre-Dame à Pontmain (cf. > ici).

2013-7. La bénédiction des animaux pour la fête de Saint Antoine le Grand. dans Chronique de Lully saint-antoine-le-grand

       Saint Antoine le Grand – appelé encore Saint Antoine d’Egypte, Saint Antoine du désert ou Saint Antoine abbé – est en vénération particulière en notre Mesnil-Marie : sa fête liturgique est célébrée ce 17 janvier et nous honorons en lui « le père de tous les moines », mais aussi l’un des célestes protecteurs des animaux.
On lira, ou relira, avec profit sa biographie écrite par Saint Athanase d’Alexandrie (cf. > ici).

   J’ai déjà eu l’occasion de vous parler de Sainte Gertrude de Nivelles, la céleste protectrice des chats (cf. > ici), et l’on sait qu’on invoque spécialement Saint Ambroise de Milan pour la protection des abeilles, Saint Eloi – et parfois aussi Saint Martin – pour celle des chevaux – , Saint Jean-Baptiste pour les agneaux, Saint Roch pour les chiens… etc.

   Je sais bien que certains prêtres de nos jours – dans leur pseudo intellectualisme moderniste – regardent cela comme de la superstition et s’en moquent, mais ce n’est point là l’esprit de notre Mère la Sainte Eglise qui considère que Dieu n’a de mépris pour aucune de Ses créatures, et dont le rituel, depuis des siècles, renferme de précieuses bénédictions en faveur des animaux ; elle sait bien, en effet, que Dieu les a créés pour Sa gloire ainsi que pour le service et la consolation des hommes. Par cette bénédiction, elle ouvre des trésors de grâce pour que toute la création soit rendue à son Créateur et soit protégée du mal.
Et puis, il n’y a qu’à voir aussi à quel point les animaux de toutes sortes sont présents dans la vie des saints : je vous renvoie à la belle histoire écrite par Frère Maximilien-Marie et intitulée « Des Saints et des animaux » (cf.> ici et suivants car il y a quatre parties), dans laquelle sont justement évoqués nombre d’épisodes de l’hagiographie relatifs aux animaux.

   Bref, le Rituale Romanum contient donc, pour la fête de Saint Antoine le Grand, une bénédiction particulière « pour les chevaux ou pour tous les autres animaux » ; vous en trouverez le texte et sa traduction ci-dessous.
En France, cette bénédiction est – malheureusement! – assez peu pratiquée dans les paroisses, alors que la plupart des abbayes ou monastères qui possèdent des animaux en ont gardé l’usage.

   Frère Maximilien-Marie m’a raconté que, pendant les années où il a été si charitablement accueilli au Village d’Enfants de Riaumont et où il a rendu quelques services à cette belle oeuvre d’éducation et de protection de la jeunesse, en attendant de pouvoir fonder le Refuge Notre-Dame de Compassion, cette bénédiction se faisait au cours d’une procession à laquelle participaient, avec les moines, les enfants et adolescents de Riaumont : la procession se rendait jusqu’à la petite ferme, et la bénédiction de Dieu était invoquée sur les volailles de la basse-cour, sur les pigeons, les lapins, les chèvres, les porcs et les chevaux… 
Il se souvient très spécialement d’une scène très touchante : alors que le Révérend Père Argouarc’h, revêtu de la chape, était en train de lire les oraisons de la bénédiction, la jument s’est approchée de lui par derrière et a posé très tendrement sa tête sur l’épaule du prêtre, donnant tout à la fois l’impression de lui montrer sa reconnaissance et de lire avec lui dans le rituel !

   En Espagne et en Italie, cette bénédiction est restée très populaire. A Rome même, l’église des Saints Antoine et Eusèbe, près de la basilique de Sainte Marie-Majeure, connaît le 17 janvier (ainsi que le dimanche qui en est le plus proche) une affluence particulière. 
L’agence d’information internationale au service du Saint-Siège, Zenit, en rendait compte en ces termes pour l’année 2006 :

    »L’église était envahie par la foule des grandes fêtes, toutes générations confondues : les plus âgés et leurs fidèles compagnons à quatre pattes, dans les bras ou au pied, les enfants avec un lapin ou des perruches, les jeunes couples avec poussette fièrement gardée par un tendre molosse, les ados avec un, parfois deux, parfois trois chiens.
Au pied d’une Pietà illuminée, une boule de poils noirs, un chiot de Terre-Neuve plongé dans un sommeil réparateur, qui, inspecté par tous ses congénères qui passaient, n’a pas un instant ouvert l’œil pour autant. 
Qui aurait imaginé pouvoir réunir pendant une heure tant d’animaux sans provoquer quelque salissure ou une bagarre violente, sans que la liturgie n’en souffre et que les fidèles ne se distraient de l’action liturgique?
Pendant l’homélie, le prêtre n’a dû répéter qu’un seul passage, couvert inopinément par un aboiement. Il expliquait que Dieu est « présent partout, parfois même là où nous ne l’attendons pas ». Il ne parlait pas à ce moment-là des animaux : « même dans nos ennemis », disait-il. « Je répète, parce qu’on n’a peut-être pas bien entendu, reprenait le célébrant avec humour, après l’aboiement intempestif, « même dans nos ennemis ». (…) Pour chant final, de tous les cœurs a jailli le Cantique des Créatures de saint François d’Assise. (…) 
A la fin de la messe, une bénédiction générale a eu lieu sur le parvis de l’église, prière publique en présence de membres de la Garde des finances à cheval, des Carabiniers à cheval et de l’unité cynophile de la Protection Civile, rappelant les services rendus à la sécurité de nos villes par des chiens, parfois découverts dans les refuges et choisis pour leurs qualités spéciales. (…)
Puis le diacre a descendu la volée d’escaliers, goupillon en main, passant au milieu de cette foule joyeuse pour donner une bénédiction individuelle : eau bénite sur le museau ou sur le bec. Beaucoup de voisins qui ne se connaissaient que comme « maître de chien » avaient la joie de se reconnaître plus profondément comme chrétiens.
Ainsi, l’Eglise de Rome n’a pas renoncé à cette tradition antique qui est aussi dans l’esprit de saint François d’Assise, patron de l’Italie, un moyen d’évangéliser – car certaines personnes ont cessé d’aller à la messe, mais ne manquent pas cette fête célébrée dès l’enfance – une occasion de rendre grâce pour le don de la Création, et finalement de redonner « à Dieu ce qui est à Dieu ».

   En 2012 encore, Zenit annonçait cette Messe et cette bénédiction, ajoutant en outre que Monsieur le cardinal Angelo Comastri, archiprêtre de la Basilique Vaticane et Vicaire de Sa Sainteté pour la Cité du Vatican, irait lui-même bénir les animaux de ferme rassemblés sur la piazza Pio XII (juste devant la place Saint-Pierre) pour l’exposition organisée par l’Association Italienne des Eleveurs. J’ai alors relevé cette phrase : « La Nouvelle évangélisation passe aussi par la gratitude envers le Créateur pour sa générosité dans toutes les bestioles dont parle la Genèse ».

   En lisant ces articles, je ne pouvais m’empêcher de penser que si, en France, la Garde républicaine et les unités cynophyles de la police venaient à l’église pour y faire bénir leurs chevaux et leurs chiens, les sectes qui tiennent aujourd’hui dans leurs griffes les structures et les hommes de l’Etat comme des médias déchaîneraient une fois de plus leur haine anti-chrétienne et y verraient quelque gravissime atteinte à la laïcité, tant leur orgueil les rend… bêtes.
Je trouve d’ailleurs regrettable que, en Français, ce soit un même mot qui, prit substantivement désigne l’animal, lequel est doté d’une intelligence propre « selon son espèce » (cf. Gen. I, 20-25), et qui, employé comme adjectif, désigne un homme dépourvu de bon sens, sans intelligence, obtus et éloigné de la juste compréhension des choses…
Nous autres, animaux, n’avons de « bêtes » que le nom (cf. aussi ce que j’ai écrit > ici) et la Sainte Eglise nous prodigue d’affectueuses bénédictions, tandis que pour nombre de ces « bêtes » à deux pattes, qui se croient très intelligentes, il serait plus judicieux de les orienter vers le sacrement de pénitence, et même parfois vers le ministère d’un exorciste !

patteschats 17 janvier dans De liturgiaLully.

benedictio-equorum-etc-001 animaux dans Nos amis les Saints

Traduction (par nos soins) :

Bénédiction des chevaux ou d’autres animaux :

V./ Notre secours est dans le Nom du Seigneur.
R./ Qui a fait le ciel et la terre.
V./ Le Seigneur soit avec vous.
R./ Et avec votre esprit.

   Prions :
O Dieu, notre refuge et notre force : montrez-vous favorable aux pieuses prières de votre Eglise, Vous qui êtes Vous-même l’auteur de sa piété, et accordez que ce que nous demandons avec foi, nous l’obtenions avec efficacité. Par Jésus-Christ Notre-Seigneur.

R./ Ainsi soit-il!

   Prions :
Dieu tout puissant et éternel, qui avez fait aller sans dommage le glorieux Saint Antoine, éprouvé par des tentations variés, au milieu des troubles de ce monde, accordez à nous qui sommes Vos serviteurs de tirer profit de son illustre exemple et que par ses mérites et son intercession nous soyons libérés des périls de la vie présente. Par Jésus-Christ Notre-Seigneur.

R./ Ainsi soit-il!

   Prions :
Que ces animaux reçoivent votre béné+diction, Seigneur : par elle qu’ils reçoivent la santé du corps et qu’ils soient libérés de tout mal par l’intercession du Bienheureux Antoine. Par Jésus-Christ Notre-Seigneur.

R./ Ainsi soit-il!

Et ils sont aspergés avec l’eau bénite.

2013-6. Gustave Thibon : « Libertés ».

   Le 19 janvier va ramener l’anniversaire du rappel à Dieu de notre cher et vénéré Gustave Thibon.
2001-2013 : voici que s’achève la douzième année après son départ de ce monde, après son entrée dans la Lumière – je n’en doute pas – , après avoir souffert pendant tant de longues années l’épreuve des ténèbres…

   Ceux qui me sont proches savent à quel point la pensée et les écrits de Gustave Thibon constituent  pour moi une nourriture quotidienne : j’y puise chaque jour des lumières et des forces.
Lumières de l’intelligence et du coeur, qui apportent aux situations actuelles l’éclairage de bon sens et de vraie sagesse nécessaire pour les considérer avec un recul convenable ; force morale et spirituelle pour éviter les écueils du pessimisme et du découragement d’une part, des enthousiasmes irréfléchis et des illusions optimistes d’autre part.

   En ce début d’année 2013, il me paraît particulièrement adapté de vous recopier ci-dessous un texte, auquel je n’hésite pas un instant à attribuer le qualificatif de prophétique, qui fut publié en… 1940 !
C’est la sixième (et très courte) partie de « Diagnostics » (éditions Librairie de Médicis – 1940) et elle s’intitule : « Libertés ».

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Coeur.

Gustave Thibon - une vue du mas de Libian

Une vue du Mas de Libian, la propriété ancestrale de la famille Thibon

frise

« Libertés »

        »Il y aurait autant d’horreur à détruire la liberté où Dieu l’a mise, que de l’introduire où elle n’est pas, a dit Pascal. Cette formule ramasse et stigmatise les deux attentats dont les tyrans (avoués ou masqués) menacent la vraie liberté des peuples : l’oppression et la corruption, la destruction par atrophie et la destruction par boursouflure.

   En France, depuis plus d’un siècle (note : rappelons-le, ce texte fut publié en 1940), on introduit la liberté où elle n’est pas. On arrache le peuple à la nécessité nourricière, à l’humble et maternelle alvéole d’institutions, de coutumes et de devoirs, à l’intérieur de laquelle sa liberté peut se déployer sainement, pour faire jouer celle-ci hors de son lieu, dans un domaine adapté à sa nature et où elle se réfute elle-même : dogme de la souveraineté du peuple, avec son corollaire pratique, le suffrage universel… Autant vaudrait demander à un aveugle de choisir librement entre les couleurs! A l’idéal de la liberté, on immole les cadres de la nature. On dit à l’agneau : tu es libre d’être ou de n’être pas herbivore. Car c’est à cela que se ramènent en définitive les institutions qui entretiennent dans la cervelle de tous les hommes l’illusion d’être souverains, égaux à quiconque et de trancher, par leur bulletin de vote, les problèmes les plus étrangers à leur compétence.

   Mais étirer, dilater ainsi la liberté, c’est encore la façon la plus sûre (et la plus perfide) de la supprimer. D’un bien dont on mésuse, on perd même l’usage. Qui veut trop courir aujourd’hui ne pourra plus marcher demain… Après avoir promené son désir et son choix parmi les aliments carnés, l’herbivore corrompu ne sait plus choisir sainement entre les plantes qui l’entourent ; – l’homme du peuple farci « d’idées générales » et d’ambition saugrenues perd la sagesse spécifique de son milieu social et professionnel. Il n’est pas libre hors de son ordre : là, il n’a que l’illusion de la liberté ; en réalité, il est mû par des mots creux ou des passions malsaines et sa souveraineté universelle se résout en fumée et en comédie. Mais ce qui est plus grave, ce qui est terrible, c’est que dans son ordre même, il n’est plus libre. Rien plus qu’un certain mythe de liberté n’a contribué à détruire, dans l’âme des masses, la vraie liberté, la vraie sagesse.

   On peut modifier ainsi le mot de Pascal : en voulant mettre la liberté où elle n’est pas, on la détruit où Dieu l’a mise. L’homme qui n’accepte pas d’être relativement libre sera absolument esclave. »

2013-6. Gustave Thibon :

Autres publications consacrées à Gustave Thibon dans les pages de ce blogue :
« In memoriam » pour le 7ème anniversaire de sa mort (2008) > ici
Gustave Thibon : dix ans déjà – 19 janvier 2011 > ici
« Eloignement et connaissance » > ici
– Pour le centenaire de l’apparition de Notre-Dame de La Salette > ici
« Le goût de l’aliment éternel » > ici

Recette du Mesnil-Marie : Crumble pommes & kiwis.

Une de mes lectrices assidues m’a fait remarquer que je n’avais pas publié de recette depuis plus de deux mois.
Je suis donc allé inspecter ce que nous avions en cuisine et, fort de mes constatations, je suis allé tirer Frère Maximilien-Marie de son étude :
« Dis, il y a des pommes et des kiwis qui sont bien mûrs : tu n’en manges qu’un de chaque par jour, alors, puisque le dimanche arrive, tu devrais préparer un crumble pommes & kiwis!… Tu n’en as jamais fait? Ce n’est pas compliqué, je vais tout t’expliquer… »

Recette du Mesnil-Marie : Crumble pommes & kiwis. dans Recettes du Mesnil-Marie lully

Ingrédients :

5 kiwis de bonne taille ; 4 grosses pommes ; de la gelée de groseille (mais on peut prendre aussi de la gelée de pommes) ; un sachet de 125 grammes d’amandes hachées (c’est facultatif, mais c’est beaucoup mieux avec) ; 140 grammes de farine ; 140 grammes de sucre en poudre ou de cassonade ; 85 grammes de beurre.

Préparation :

Préchauffer le four à 200°. Prendre un plat à gratin et en graisser le fond et les bords. Eplucher les kiwis et les pommes, les couper en dés, les disposer dans le plat à gratin : les pommes au fond, les kiwis par dessus. Rajouter alors la gelée (nous avions de la gelée de groseille, c’est ce que nous avons utilisé, mais de la gelée de pommes fait très bien l’affaire), comme ceci :

preparation-crumble-pommes-and-kiwis crumble dans Recettes du Mesnil-Marie

Préparer le crumble dans une jatte : faire d’abord ramollir le beurre (mais pas fondre), le mélanger à la main avec la farine, puis le sucre et enfin les amandes hachées. Travailler cette pâte en réduisant les grumeaux afin qu’elle soit la plus fine possible. La saupoudrer sur les fruits.
Enfournez et laissez cuire environ une demi-heure : il faut surveiller la cuisson car, selon les fours, elle prendra un peu moins ou un plus de temps.

Servir tiède, accompagné de chantilly ou de crème fouettée…

crumble-pommes-and-kiwis kiwis

pattes-de-chat-frise pommes

Publié dans:Recettes du Mesnil-Marie |on 12 janvier, 2013 |2 Commentaires »
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