Archive pour la catégorie 'Chronique de Lully'

2016-14. Elles ne prévaudront pas, mais cela ne signifie pas qu’elles ne feront pas tout pour l’emporter et qu’elles ne remporteront pas certaines batailles.

Clefs de St Pierre

Et portae inferi non praevalebunt adversus eam.
Et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle.

(Matth. XVI. 18)

Lundi 22 février 2016 ;
Fête de la Chaire de Saint Pierre à Antioche ;
Mémoire de Sainte Marguerite de Cortone.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       A l’occasion de cette fête de la Chaire de Saint Pierre, je voudrais partager avec vous quelques réflexions qui me tiennent particulièrement à coeur, sur lesquelles je médite depuis fort longtemps, et que j’estime désormais assez mûres pour vous les livrer.

   Comme l’a fort bien exprimé S. Exc. Mgr. Athanasius Schneider il y a quelques semaines dans un entretien que, une fois de plus, l’excellent site « Benoit et moi » de notre amie Béatrice a eu le mérite de rendre accessible aux lecteurs francophones (cf. > ici), beaucoup de catholiques d’aujourd’hui ont hérité d’une espèce de mentalité « papolâtrique » qui n’a rien à voir avec la véritable et saine compréhension de ce qu’est le magistère du pape, ni avec la juste obéissance et la filiale révérence dues au Souverain Pontife.
Monseigneur Schneider s’exprimait ainsi :
« Si un Pape disait à l’Eglise entière de faire quelque chose qui endommage directement une vérité divine immuable ou un commandement divin, tout catholique aurait le droit de le corriger, dans une forme dûment respectueuse, mu par la révérence et l’amour pour l’office sacré, et la personne du Pape. L’Église n’est pas une propriété privée du Pape (…). Le Pape n’est que le Vicaire, pas le successeur du Christ (…). Je crois qu’à une époque où une grande partie des détenteurs de l’office du Magistère sont négligents dans leur devoir sacré, l’Esprit-Saint appelle aujourd’hui, en particulier les fidèles, à intervenir et à défendre courageusement la foi catholique, avec un authentique « sentire cum ecclesia »… »

St Pierre -détail d'un vitrail de C.E. Kempé - église St-Jacques Hunstanworth, comté de Durham

L’Apôtre Saint Pierre – détail d’un vitrail de C.E. Kempe (1837-1907)
dans l’église Saint Jacques de Hunstanworth, comté de Durham – Angleterre.

   L’objection habituelle que l’on s’attire dès que l’on émet quelques réserves en face de certains comportements ou déclarations d’un pape est bien souvent du type de celle-ci : « Mais le Pape a été désigné par le Saint-Esprit ! »

   Ainsi donc, à partir du moment où le Pape serait désigné par le Saint-Esprit, tout ce qu’il ferait et dirait, en toutes circonstances, se trouverait marqué d’un sceau d’absolue infaillibilité ?
C’est ce que semblent croire les « papolâtres ».
Et ce n’est pourtant pas ce à quoi la foi catholique nous demande d’adhérer.
Ces catholiques ignorants – car de telles affirmations procèdent bien de l’ignorance – feraient bien d’approfondir d’une part leur catéchisme, mais d’autre part aussi l’histoire de l’Eglise.

   L’histoire objective (je ne me réfère évidemment pas à des récits calomnieux) ne manque pas de papes – de vrais papes qui, selon la foi catholique, bénéficiaient donc d’une assistance spéciale du Saint-Esprit et du privilège de l’infaillibilité – dont les déclarations ou les actes ont manqué tantôt de prudence, tantôt de la plus élémentaire vertu (qu’on pense à ces papes authentiques – car ce ne sont pas des antipapes – du temps de la « pornocratie pontificale », au Xe siècle), tantôt même d’orthodoxie dans leur enseignement ordinaire (je donnerai pour seul exemple le pape Jean XXII qui soutint, en chaire, que les âmes des justes ne bénéficieraient de la vision divine qu’après le jugement dernier ; mais Jean XXII, qui par ailleurs a aussi posé des actes parfaitement conformes à l’orthodoxie, n’est pas le seul à avoir « frôlé » l’hérésie) !

   L’ « infaillibilité pontificale » – dogme auquel, comme catholique, j’adhère pleinement – ne couvre en aucune manière des faits ou des propos qui ne sont que l’expression d’une pensée personnelle (même dans des questions religieuses) ; et l’assistance du Saint-Esprit promise aux successeurs de Pierre ne concerne en aucune manière la promulgation de doctrines nouvelles ou des innovations contraires à la Tradition des Pères, mais elle s’exerce pour que les papes puissent garder inébranlablement, enseigner fidèlement, et défendre sans faiblir la Révélation confiée aux Apôtres (ce que l’on appelle le dépôt de la foi).

   Ce n’est pas parce qu’un homme est pape, et qu’il reçoit de Dieu des grâces exceptionnelles – je n’en doute pas – , qu’il n’y a plus en lui aucune possibilité d’errer.
Un pape garde ses facultés humaines. Un pape garde sa liberté humaine. Et un pape peut très bien – comme vous et moi – mésuser de sa liberté, ne pas correspondre aux grâces qui lui sont données par Dieu, et leur être infidèle.
Si, du côté de Dieu, la grâce est toujours donnée à l’homme en proportion des responsabilités qui lui sont confiées, du côté de l’homme il n’y a pas toujours la correspondance à la grâce, permettant à celle-ci d’être pleinement efficace.
Si depuis tant de siècles, dans les circonstances les plus graves, la Sainte Eglise, dans sa Tradition inspirée, nous fait demander : « Ut domum Apostolicum et omnes ecclesiasticos ordines in sancta religione conservare digneris, Te rogamus, audi nos ! Pour qu’il Vous plaise de conserver dans la sainte religion le Souverain Pontife et tous les ordres ecclésiastiques, nous Vous en supplions, écoutez nous ! » (litanies des saints), n’est-ce pas justement parce qu’il y a et qu’il y aura toujours un risque d’égarement, même au plus haut de sa hiérarchie ?
Ce n’est pas non plus pour rien que, aux âges de foi, dans ces fameuses et spectaculaires danses macabres ou grandes fresques du Jugement dernier, étaient représentés, au milieu de toutes les autres catégories de fidèles, des prélats et des papes, dans la farandole que les démons entraînent vers l’enfer…

   Il n’y a donc rien d’irrévérencieux à rappeler que le pape n’est pas une espèce de marionnette sans caractère ni volonté propres, dont le Saint-Esprit tirerait les ficelles et qui ne ferait strictement que ce que le « divin marionnettiste » voudrait, et seulement comme il le voudrait.

   - Alors, le Saint-Esprit n’intervient donc pas directement pour l’élection du pape ?
A cette question, un certain cardinal Ratzinger avait répondu (en 1997) : « Je ne dirais pas que c’est l’Esprit Saint qui choisit dans chaque cas le pape, étant donné qu’il y a trop de preuves qui vont à l’encontre de cela ; il y a trop de papes pour lesquels ce n’est pas du tout évident que c’est l’Esprit Saint qui les aurait choisis (…). Mais comme un bon éducateur, Il nous laisse un grand espace, une grande liberté, sans nous abandonner totalement. Le rôle du Saint-Esprit devrait être entendu dans un sens plus souple que le fait d’imposer le candidat pour lequel on doit voter. Probablement la seule assurance qu’Il nous donne est que cette affaire ne peut être totalement catastrophique…»

   Pas « totalement catastrophique ».
L’expression utilisée par celui qui était alors préfet de l’ex-Saint-Office est des plus intéressantes.
Saint Vincent Palotti (1795-1850) a dit sans ambiguïté : « Certains papes le Seigneur les donne, d’autres Il les tolère, d’autres encore Il les inflige ».
Nous croyons fermement que Dieu conduit Son Eglise, qu’Il la garde, qu’Il la protège, qu’Il ne laissera pas les portes de l’enfer prévaloir contre elle.
Cela ne signifie pourtant pas qu’Il ne permet pas parfois à l’enfer et à la malice humaine de « marquer des points », voire d’avoir l’impression de remporter d’importantes batailles.

   Celui qui conduit l’Eglise, qui la garde, qui la protège et qui ne laissera pas l’enfer prévaloir contre elle, est aussi Celui qui avait annoncé à de multiples endroits des Ecritures inspirées que le Messie serait victorieux, que Ses ennemis seraient mis comme un escabeau sous Ses pieds, qu’Il leur fracasserait les dents et anéantirait leur puissance. Et certes il en a bien été ainsi ; toutefois, au moment de Sa douloureuse Passion, les dits ennemis avaient le sentiment, sinon la certitude, que c’étaient eux les vainqueurs, tandis qu’aux yeux des Apôtres les Ecritures ne donnaient pas l’impression de s’accomplir !

   Notre-Seigneur nous a bien prévenus : les disciples ne sont pas au-dessus du Maître. Et l’Eglise – composée des disciples de Jésus-Christ – n’est pas non plus au-dessus de Son divin Epoux.

   Nous croyons fermement que les portes de l’enfer ne prévaudront pas et que l’Eglise sera victorieuse.
Mais cela ne signifie pas que les portes de l’enfer ne mèneront pas des assauts, qu’elles ne feront pas tout pour l’emporter, et que, ponctuellement, elles ne remporteront pas certaines batailles.

   La foi confiante et sereine dans la victoire de l’Eglise ne dispense pas de rester lucide.
La foi confiante et sereine dans la victoire finale de l’Eglise, autorise justement à dire, lorsqu’un membre de la hiérarchie, profitant de sa position, s’autorise à diffuser des opinions purement personnelles – surtout si elles ne sont pas conformes à l’enseignement des Saintes Ecritures et de la Tradition – qu’un catholique n’est pas tenu de le suivre dans cette voie.
Agir autrement serait se comporter comme si les portes de l’enfer l’avaient définitivement emporté et qu’il n’y avait plus rien à faire.

   Nous sommes aussi fermement convaincus – parce que c’est la grande leçon de la Croix – que Dieu peut triompher au moment même où Ses ennemis s’imaginent que ce sont eux qui sont les vainqueurs, et qu’Il peut faire contribuer à Sa victoire ce par quoi Ses ennemis pensaient avoir triomphé de Lui.
Nous avons la ferme confiance qu’à travers des voies mystérieuses qui échappent à nos logiques et manières de faire humaines, la divine Providence fait tout concourir au bien de ceux qui aiment Dieu« Scimus autem quoniam diligentibus Deum omnia cooperantur in bonum ! » (Rom. VIII, 28) – et que, malgré les éclipses passagères et en dépit de toutes les apparences, « les portes de l’enfer ne prévaudront pas » (Matth. XVI, 18).

   Qu’il puisse y avoir des papes calamiteux, l’histoire de l’Eglise est là pour nous le prouver : « contra factum non datur argumentum : contre un fait il n’existe pas d’argument », nous dit le vieil adage juridique.
Ces papes calamiteux ont passé ; l’Eglise, elle, malgré tout, est restée.

   Qu’il puisse y avoir encore des papes calamiteux, il serait totalement présomptueux de le nier.
Nous estimerions-nous meilleurs chrétiens que ceux des siècles passés pour avoir l’outrecuidance de penser que, en nos temps « modernes et éclairés », les papes catastrophiques appartiendraient à un passé lointain et définitivement révolu ?

   L’Eglise, malgré les crises, malgré les persécutions suscitées par ses ennemis, malgré les trahisons et les défections dans les rangs de ses fidèles, malgré les péchés de ses membres, depuis le bas jusqu’au plus haut de sa hiérarchie, se relève et marche ves la victoire finale, et c’est cela qui importe.
A côté de ses authentiques bons chrétiens et de ses saints, la Sainte Eglise de Dieu a eu et aura encore, et jusqu’à la fin des temps, de très lamentables pasteurs : des évêques et des papes médiocres, des évêques et des papes indignes, des évêques et des papes gravement pécheurs, des évêques et des papes calamiteux.
Mais, même s’ils font du mal – beaucoup de mal parfois – , nous ne cessons toutefois pas de croire et d’affirmer bien haut qu’aucun d’entre eux ne pourra arriver à détruire totalement l’Eglise.

   Des évêques, des cardinaux, des papes peuvent, à certains moments, ternir – et de manière tout à fait scandaleuse – , le rayonnement divin de l’Eglise, obscurcir temporairement sa lumière de vérité et sembler la mettre à la remorque des tristes modes humaines : je ne nie pas que cela soit douloureux, très douloureux, pour les vrais fidèles témoins de ce triste spectacle, mais au-delà du scandale et de la souffrance demeure la certitude absolue que le mal ne l’emportera pas : non praevalebunt ! (Matth. XVI, 18).

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

à suivre :
« Dix conseils pour survivre à un pape calamiteux et continuer à être catholique » > ici

Clefs de St Pierre

2016-13. L’allocution consistoriale « Gravissimum » du 21 février 1906.

21 février ;
Fête du Bienheureux Noël Pinot (cf. > ici et > ici) ;
Mémoire de Saint Pépin de Landen, duc de Brabant, maire du palais et conseiller des Rois francs.

frise

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Il semblerait que, en France, les catholiques sont désormais tellement habitués à la loi du 9 décembre 1905, dite loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, qu’ils n’en voient plus du tout la malice, ni la grave offense à Dieu et à Ses droits qu’elle représente.
De nos jours, il y a même des prêtres, des évêques et des cardinaux, qui invoquent cette loi inique, conçue dans les loges maçonniques en vue d’affaiblir l’Eglise, dans le but de revendiquer « une saine laïcité » ! Ils me font penser à des dindes qui manifesteraient contre toute modification du menu traditionnel de Noël.

   A l’occasion de l’anniversaire du jour où elle a été prononcée devant les cardinaux, j’ai donc résolu aujourd’hui de publier ci-dessous le texte complet de l’allocution consistoriale « Gravissimum » (21 février 1906) par laquelle le Pape Saint Pie X, dix jours après l’encyclique « Vehementer nos » (11 février 1906), a élevé de solennelles protestations contre la loi du 9 décembre 1905 : rien ne vous empêche, bien sûr, de vous plonger (ou replonger) dans le texte de l’encyclique (voir la note 2 en bas de page), mais le texte de l’allocution reproduit ci-dessous en constitue une sorte de résumé, plus facile à lire et à retenir.
On notera que c’est véritablement en vertu de son autorité apostolique que Saint Pie X s’est exprimé, ce qui signifie que cette condamnation requiert un assentiment entier de la part des fidèles de la Sainte Eglise.

   Que Dieu nous fasse miséricorde, qu’Il aie pitié de la France, et qu’Il nous donne la grâce de travailler à sa conversion et à son relèvement !

Lully.

Avertissement : Les notes explicatives, tout comme la retranscription de certains passages en caractères gras, sont de notre fait.

Tiare et clefs de Saint Pierre

Saint Pie X - blogue

Allocution Gravissimum
prononcée au consistoire du 21 février 1906
par le Pape Saint Pie X.

Vénérables Frères,

   Ayant à remplir un acte très grave de Notre charge apostolique, Nous vous avons aujourd’hui convoqués.
Nombreuses sont les amertumes et les injustices infligées chaque jour, dans cette tempête désastreuse, à l’Église et à Nous, qui, malgré notre indignité, la gouvernons comme vicaire de Jésus-Christ. Mais Nous souvenant néanmoins de la patience de ce même Jésus-Christ et confiant dans Ses promesses certaines, Nous Nous efforçons de supporter l’adversité avec mansuétude ; afin que, comme Lui, Nous marchions dans l’espérance de la gloire des fils de Dieu.

   Mais l’offense infligée naguère (1) à l’Église et à Nous est si grave et si violente que Nous ne pouvons la passer sous silence, et, le voudrions-Nous, Nous ne pourrions la taire sans manquer à notre devoir.

Rappel du droit et des faits

   Vous devinez, Vénérables Frères, que Nous voulons parler de cette loi absolument inique, ourdie pour la ruine du catholicisme, qui vient d’être promulguée en France en vue de la séparation de l’État d’avec l’Église.

   Notre récente Encyclique adressée aux évêques, au clergé et au peuple français (2) a montré pleinement combien cette loi est odieuse et contraire aux droits de Dieu et de l’Église. Mais pour ne négliger en aucun point Notre charge apostolique, Nous Nous proposons de préciser et de confirmer solennellement, en votre présence auguste, ce que Nous avons dit.

   En effet, pouvons-Nous ne pas réprouver cette loi, lorsque son titre même montre sa malice et la condamne ?
Il s’agit, Vénérables Frères, de séparer violemment l’État de l’Église. Donc, telle qu’elle est, elle tend au mépris du Dieu éternel et Très-Haut, puisqu’elle affirme qu’aucun culte ne Lui est dû par l’État. Or, Dieu n’est pas seulement le Seigneur et le Maître des hommes considérés individuellement, mais Il L’est aussi des nations et des États ; il faut donc que ces nations et ceux qui les gouvernent Le reconnaissent, Le respectent et Le vénèrent publiquement.

   Si l’oubli de ce devoir et ce divorce sont partout injurieux pour la majesté divine, ils sont en France une ingratitude plus grande et un malheur plus funeste.

   Car si l’on considère en toute vérité l’ancienne gloire de la France, on reconnaîtra qu’elle lui vient en majeure partie, et de beaucoup, de la religion et de l’union constante avec le Saint-Siège, qui en découlait. De plus, cette union de l’Église et de l’État était sanctionnée en France par un pacte solennel (3).

   Or, ce qui ne se ferait pour aucun État, si petit qu’il fût, on l’a fait pour le Siège apostolique, dont l’autorité et l’importance sont si grandes dans le monde.

   En effet, au mépris de tout devoir d’urbanité, contrairement au droit des gens et aux règles des États, ce pacte, si solennel et si légitime, a été déchiré sans aucune déclaration préalable de la volonté de le rompre, par le fait d’une des parties seulement, sans égard à la foi jurée.

   Et maintenant, si nous examinons la teneur même de la loi, qui ne voit que le fait de sa proposition détruit la constitution même par laquelle Jésus-Christ a façonné l’Église qu’Il a acquise par Son sang ?

   Ainsi, on n’y trouve aucune mention du Pontife Romain ni des évêques. Au contraire, toute l’administration et toute la surveillance du culte public sont remises à des associations de citoyens (4) auxquelles seules, dans tout le domaine religieux, la république reconnaît des droits civils. Et si quelque contestation s’élève entre elles, ce n’est pas par les évêques ni par Nous que le litige sera jugé et tranché, mais par le Conseil d’État.

   Après l’adoption de cette loi, ce qu’il faut penser, Vénérables Frères, de la liberté de l’Église, Nous l’avons exposé plus amplement dans la Lettre Encyclique rappelée plus haut (2).

   Mais ici Nous dirons en résumé que, d’un côté, les évêques ne peuvent plus régir le peuple chrétien dans la pleine souveraineté de leur charge, de l’autre, on enlève au peuple chrétien le droit très sacré de professer librement sa religion ; enfin, l’action de l’Église sur la société est affaiblie sur de nombreux points ou tout fait entravée.

   Or, cette violation des droits et cette diminution de liberté s’aggravent encore de ce fait que l’Église, par le seul pouvoir de la loi, au mépris de la justice et nonobstant la foi des traités, est troublée dans la légitime possession de son patrimoine.

   Quant à la République, elle se délie de toute obligation de subvenir aux dépenses annuelles de la religion, dépenses que, par une convention, elle avait prises à sa charge en compensation de la spoliation officielle (5).

Condamnation sans appel

   Après vous avoir fait, en raison de l’importance du sujet, ces communications, Nous rappelant les devoirs de la charge apostolique par laquelle Nous sommes tenu de protéger et de défendre par tous les moyens les droits sacrés de l’Église, Nous prononçons solennellement en votre auguste assemblée Notre sentence sur cette loi.

   En vertu de la suprême autorité dont Nous jouissons comme tenant la place du Christ sur la terre, Nous la condamnons et réprouvons comme injurieuse au Dieu très bon et très grand, contraire à la divine constitution de l’Église, favorisant le schisme, hostile à Notre autorité et à celle des pasteurs légitimes, spoliatrice des biens de l’Église, opposée au droit des gens, ennemie du Siège apostolique et de Nous-même, très funeste aux évêques, au clergé et aux catholiques de France ; Nous prononçons et Nous déclarons que cette loi n’aura jamais et en aucun cas aucune valeur contre les droits perpétuels de l’Église.

Paternelle sympathie

   Et maintenant, Notre cœur se tourne vers la nation française ; avec elle, Nous sommes affligé ; avec elle, Nous pleurons. Que personne ne pense que Notre amour pour elle s’est refroidi parce que Nous avons été si amèrement traité. Nous songeons avec douleur à ces Congrégations privées de leurs biens et de leur patrie (6). Nous voyons avec une paternelle inquiétude des multitudes d’adolescents réclamant une éducation chrétienne. Nous avons devant les yeux les évêques, Nos Frères, et les prêtres jetés au milieu des tribulations et exposés à des maux plus graves encore. Nous chérissons les fidèles opprimés sous cette loi ; Nous les embrassons d’un cœur paternel et plein d’amour.

   L’audace et l’iniquité des méchants ne pourront jamais effacer les mérites acquis par la France, durant le cours des siècles, envers l’Église. Notre espoir est que ces mérites s’accroîtront encore quand les temps seront redevenus paisibles. C’est pourquoi Nous exhortons Nos Fils chéris à ne pas se décourager ni se laisser abattre par les épreuves et les difficultés des temps. Qu’ils veillent, fermes dans la foi ; qu’ils agissent virilement, se rappelant la devise de leurs ancêtres : Christus amat Francos (7). Le Siège apostolique sera toujours près d’eux, ne laissant jamais la Fille aînée de l’Église réclamer inutilement les secours de sa sollicitude et de sa charité.

Armoiries de Saint Pie X

Notes :
1) La loi dite de séparation de l’Eglise et de l’Etat a été votée le 9 décembre 1905, soit deux mois et demi avant cette allocution.
2) L’encyclique « Vehementer nos », datée du 11 février 1906 (10 jours avant ce discours devant l’ensemble des cardinaux). On en trouvera le texte complet > ici.
3) Le « pacte de Reims », au baptême de Clovis, qui a fait naître la France de l’union sacrée de la Royauté franque avec le catholicisme.
4) La loi du 9 décembre 1905 ordonne la création d’association cultuelles, régies par des laïcs, auxquelles sera dévolue l’administration des biens des Eglises.
5) La loi de 1905 abolit le traitement versé par l’Etat aux ministres du Culte : or ce « salaire » des prêtres par l’Etat, en France, avait été établi au moment du concordat de 1801 pour compenser le vol – car c’en était un – des biens du clergé, lors de la grande révolution. En 1801, l’Eglise avait donc accepté de ne pas réclamer la restitution des biens qui lui avaient été volés, et qui avaient assuré jusqu’à la révolution la subsistance des ecclésiastiques et le fonctionnement des oeuvres éducatives et caritatives de l’Eglise de France, contre la promesse de voir ses ministres payés par l’Etat. La loi de 1905 renouvelle donc en quelque manière le vol perpétré à la révolution.
6) Depuis 1880 et jusqu’à cette loi du 9 décembre 1905, la troisième république n’a cessé de persécuter l’Eglise catholique par une surenchère de lois visant à limiter par tous les moyens l’influence de l’Eglise dans la société : en particulier par des lois de plus en plus sévères contre les congrégations religieuses qui contraignirent un grand nombre de religieux, spoliés de leurs couvents, à prendre la route de l’exil.
7) Christus amat Francos : le Christ aime les Francs (prologue de la Loi salique).

Tiare et clefs de Saint Pierre

2016-12. Et les grenouilles ?

Samedi 6 février 2016,
Fête de Saint Vaast d’Arras, catéchiste du Roi Clovis.

Grenouilles et nénuphars

Et les grenouilles ?
Y a-t-on pensé aux grenouilles ?

Nos si mignonnes et si gentilles petites grenouilles qui depuis des siècles – aussi bien sur la quiétude champêtre de nos mares que sur la plus aristocratique langueur des bassins de nos parcs – aiment à se reposer sur les sérénissimes feuilles des nénuphars et se lover jusqu’au coeur de leurs sublimes corolles…

Qui donc ira leur expliquer, aux grenouilles, que ce ne sont plus sur des feuilles de nénuphars, mais sur des feuilles de nénufars qu’elles devront se poser désormais ?
Quel ministre ou quel commissaire du peuple osera semer le trouble – voire peut-être le désarroi – dans la conscience et dans la vie de nos charmants petits batraciens ?
Quel inspecteur d’académie, ou même simple professeur des écoles, aura l’indicible cruauté de perturber profondément et durablement la paix séculaire des mares et des bassins, en y introduisant l’anarchie ?
Car même justifiée par un décret officiel, par la sanction d’un gouvernement et les doctes péroraisons des linguistes les plus à la mode, la transformation d’un nénuphar en nénufar n’est pas sans incidences sociales, politiques et psychologiques dans la noble société des grenouilles.

Et en plus, on ne leur a pas demandé leur avis aux grenouilles !
Personne n’a eu l’idée, alors que ce sont-elles qui sont tout de même concernées au premier chef, d’organiser un référendum pour leur demander s’il leur sied davantage de faire la sieste sur une feuille de nénufar plutôt que sur une feuille de nénuphar !
La cuistrerie des hommes envers de si délicates bestioles est véritablement inqualifiable.
Ne devrait-on pas la dénoncer comme un exemple flagrant de maltraitance envers ces merveilleuses grenouilles, déjà si dramatiquement menacées par le remenbrement et la suppression des haies, par la construction des autoroutes et la pollution, par l’urbanisation galopante et les poisons répandus par les firmes agrochimiques ?

A l’heure de la défense de toutes les minorités opprimées, comment l’Académie Française ose-t-elle en rajouter une louche et accepter que l’on transforme les nénuphars en nénufars ?
L’ersatz, en effet, n’est en rien anodin.
Un nénuphar, c’est noble. Un nénuphar, c’est beau. Un nénuphar, c’est vraiment extraordinaire : il y a derrière chaque feuille et chaque fleur de nénuphar, un gage de beauté et de qualité.
Mais un nénufar, cela n’a plus aucun charme.
C’est même déprimant, tellement c’est commun, tellement c’est trivial.
Déprimant, oui !
Et qui paiera les antidépresseurs et les consultations chez les psychothérapeutes animaliers pour nos ravissantes grenouilles, qui ne manqueront pas d’être profondément affectées d’avoir dû abandonner leurs sublimes nénuphars pour de vulgaires nénufars ?

A l’heure où tout est mis en oeuvre pour éduquer les jeunes générations à la solidarité et à la lutte contre toutes les formes d’oppression induites par l’inquiétant retour de fascismes larvés, comment un ministère de l’éducation nationale peut-il prescrire une telle mesure révisionniste, attentatoire aux séculaires libertés batraciennes ?
Nos grenouilles ont un droit imprescriptible à leurs nénuphars : ne les leur enlevons pas pour leur substituer de simples nénufars !
Aujourd’hui, je suis solidaire avec les grenouilles : je suis grenouille à nénuphar !

Et comment, lors même qu’Elle vient de promulguer une très salutaire encyclique sur l’écologie et qu’Elle se montre habituellement attentive à la défense de tous les droits menacés par les pharisaïsmes sans coeur, Sa Sainteté le Pape ne prêche-t-Elle pas une croisade oecuménique mondiale pour la défense des nénuphars menacés par les nénufars, substitution qui s’avèrera gravissime pour nos soeurs les grenouilles ?
« En vérité, en vérité, Je vous le déclare, le moindre tourment orthographique que vous aurez fait subir à l’un de ces nénuphars dont la survie est essentielle à la vie et à l’équilibre du petit peuple des mares et des bassins, c’est à Moi que vous l’aurez fait ! »

Patte de chat Lully.

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Publié dans:Commentaires d'actualité & humeurs |on 6 février, 2016 |8 Commentaires »

2016-11. Pèlerinage légitimiste pour le jubilé du Puy.

Jeudi 4 février 2016,
Fête de Sainte Jeanne de France (voir > ici).

       Cette fête de l’une des plus attachantes figures de sainteté de la Maison Capétienne, est l’occasion providentielle d’annoncer le Pèlerinage Légitimiste programmé au Puy-en-Velay les samedi 4 et dimanche 5 juin prochains, pour le Jubilé du Puy : un pèlerinage de « Grand Pardon » aux pieds de Notre-Dame, organisé conjointement par la Confrérie Royale et par l’Union des Cercles Légitimistes de France, dans les pas de nos Rois, et auquel nous invitons tous les amis du Refuge Notre-Dame de Compassion à participer, bien sûr, afin d’implorer la miséricorde et le secours de Dieu sur chacun de nous et sur la France !

panorama du Puy-en-Velay depuis le parvis du sanctuaire de Saint Joseph de Bon Espoir

Panorama de la ville du Puy-en-Velay depuis l’ouest.

lys 2

Pèlerinage jubilaire au Puy-en-Velay
de la
Confrérie Royale
et de l’
Union des Cercles Légitimistes de France

Samedi 4 & dimanche 5 juin 2016

1) Pourquoi un pèlerinage au Puy-en-Velay ?

   Selon la tradition admise par l’Eglise et crue par tous jusqu’aux temps du rationalisme et de l’hyper-critique historique, l’origine du sanctuaire du Puy-en-Velay remonte au premier siècle de notre ère, au temps des premiers évangélisateurs envoyés dans les Gaules par Saint Pierre.

A l’époque de Saint Georges, premier évêque du Velay (au milieu du premier siècle), la Très Sainte Vierge Marie apparut à une chrétienne très malade : elle lui enjoignit de se rendre sur le Mont Anis et de s’y coucher sur une grande pierre noire en forme d’autel, ce qu’elle fit. Sur cette pierre, la dame eut un songe et, selon les termes de l’ancienne chronique, entendit ces paroles : « Entre tous les lieux du monde, l’auguste Mère du Sauveur s’est choisie spécialement cet endroit pour y être servie et honorée jusqu’à la fin des siècles ; et afin que vous ne preniez pas ce que vous voyez pour un vain songe, sachez que la guérison que vous désirez vous est accordée. »
Saint Georges, averti par la femme effectivement guérie, vint au lieu du miracle et le trouva couvert d’une neige miraculeuse alors qu’on était au 11 juillet. Un cerf traça alors dans cette neige le périmètre d’un sanctuaire. Faute de moyens, Saint Georges ne put l’édifier mais il prit soin de faire planter sur ces limites dessinées par l’animal une haie d’aubépines.

   Il fallut attendre le début du IIIème siècle pour que les successeurs de Saint Georges puissent répondre à la demande de Notre-Dame et c’est une autre guérison miraculeuse qui en fut l’occasion : une chrétienne de Ceyssac – village proche du Puy – , paralysée, eut un songe dans lequel la Très Sainte Vierge lui demandait de se faire transporter sur le Mont Anis, à l’intérieur de l’enceinte sacrée délimitée jadis par Saint Georges, et de se faire déposer sur l’antique dalle noire. La dame de Ceyssac obtempéra et fut guérie à son tour. Elle eut alors, elle aussi, une manifestation de Notre-Dame entourée d’anges lui demandant d’aller trouver l’évêque, qui était Saint Vosy, et de lui demander la construction du sanctuaire que ses prédécesseurs n’avaient pu mener à bien.
Saint Vosy, comme autrefois Saint Georges, trouva lui aussi l’endroit couvert d’une neige miraculeuse : convaincu de l’authenticité des faits, il entreprit la construction du sanctuaire demandé par la Madone, puis d’y transporter son siège épiscopal.
Lorsque les travaux furent achevés et que vint le temps de procéder à la dédicace de cette nouvelle église, un nouveau miracle se produisit : ce furent les anges eux-mêmes qui en accomplirent les cérémonies de consécration (11 juillet 225), d’où le nom de « chambre angélique » qui fut donné à ce premier sanctuaire voulu par le Ciel (cet espace correspond aux deux travées orientales de l’actuelle cathédrale).

   En résumé, donc, la cathédrale du Puy est le lieu de la plus ancienne apparition connue de la Très Sainte Vierge Marie sur le sol de France : c’est un lieu que Notre-Dame a explicitement voulu pour y répandre ses grâces, et cette cathédrale appartient au très petit nombre des sanctuaires qui, à travers toute la Chrétienté, ont été consacrés par les Anges (tout comme Einsiedeln en Suisse ou le Mont Gargan dans le sud de l’Italie).

Pierre des fièvres & chapelle du Crucifix

Cathédrale du Puy : dans la chapelle du Saint Crucifix se trouve la « pierre des fièvres » ;
c’est sur cette dalle de pierre basaltique que Notre-Dame a opéré les miracles
et c’est autour d’elle qu’elle a voulu voir se développer son pèlerinage.

2) Est-il raisonnable aujourd’hui de croire à ces histoires merveilleuses ?

   Certes, l’Eglise ne vous oblige pas à y donner votre assentiment (comme elle n’oblige d’ailleurs personne à croire comme un « dogme de foi » les apparitions de la Vierge ou des Saints dont elle affirme cependant l’authenticité).
Mais cette tradition a été crue de manière unanime pendant des siècles, et en particulier aux âges où la foi était la plus florissante et la plus féconde. De très nombreux saints, des prélats, des papes, des souverains et des princes y ont cru, et c’est ce qui a motivé leur pèlerinage à Notre-Dame du Puy.
Cette tradition a commencé à être contestée et tenue pour une pieuse légende sans consistance à partir du « siècle des lumières ».
N’est-il pas préférable d’adhérer de toute notre âme à cette tradition, avec les saints, les Rois chrétiens et les Papes des siècles de foi, plutôt que de la mettre en doute avec les disciples de Voltaire ?

Façade de la cathédrale Notre-Dame de l'Annonciation

Façade de la cathédrale Notre-Dame de l’Annonciation du Puy-en-Velay
édifiée autour de la « pierre des fièvres » et consacrée par les Anges.

3) Pourquoi un jubilé au Puy ?

   Depuis des siècles, la Sainte Eglise notre Mère accorde à ses fidèles la grâce d’un jubilé spécial célébré à la cathédrale du Puy chaque fois que le Vendredi-Saint coïncide avec le 25 mars : c’est-à-dire chaque fois que coïncident l’anniversaire de l’Incarnation et celui de la Rédemption.

   Rappelons au passage que, en effet, selon la tradition la plus ancienne (et à rebours des calculs « modernes »), c’est à la date du vendredi 25 mars de l’an 33 de notre ère que Notre-Seigneur Jésus-Christ a souffert Sa Passion : en fait foi le martyrologe romain qui mentionne à la date du 25 mars le « dies natalis » (c’est-à-dire le jour de la mort, lequel a été le jour de sa naissance dans l’éternité bienheureuse) du Saint Bon Larron.

   Les anciennes traditions nous apprennent que le premier des jubilés du Puy aurait eu lieu en l’an 992, ce qui en fait le plus ancien des jubilés de la Chrétienté après celui de Rome.

   L’occurrence du 25 mars et du Vendredi-Saint peut se produire une ou deux fois par siècle, parfois trois.
Le dernier jubilé du Puy a été célébré en 2005. L’année 2016 est celle du 31 ème jubilé du Puy. Il faudra attendre ensuite l’année 2157 pour voir le 32 ème jubilé du Puy.
Jusqu’en 1524, les jubilés du Puy n’étaient célébrés que sur 24 h, dans la seule journée du Vendredi-Saint 25 mars.
En raison de l’affluence des pèlerins, les évêques du Puy obtinrent peu à peu du Saint-Siège une extension du jubilé sur une, puis sur deux semaines : ce fut le cas à partir du jubilé de 1622 et jusqu’au 29 ème jubilé, celui de 1932.
A l’occasion du 30 ème jubilé, en 2005, le Saint-Siège a accordé que le jubilé du Puy soit célébré à partir du 25 mars et jusqu’au 15 août. C’est aussi le cas en cette année 2016.
 

Statue de la Vierge Noire

Cathédrale du Puy : la statue de la Vierge Noire,
copie de celle qui a été brûlée le 8 juin 1794, couronnée au nom du Bx Pie IX le 8 juin 1856.

4) Quels liens unissent nos Rois à la cathédrale du Puy ?

   Les catholiques du XXIème siècle ont un peu de peine à imaginer que le pèlerinage du Puy-en-Velay a été pendant des siècles au moins aussi important que ne l’est de nos jours le pèlerinage de Lourdes.
On n’exagère pourtant pas lorsqu’on affirme que la cathédrale Notre-Dame de l’Annonciation du Puy figure parmi les plus anciens et les plus illustres de nos « sanctuaires nationaux ».

   Le pèlerinage du Bienheureux Charlemagne à la Vierge du Puy a été souvent cité, mais on ne peut cependant pas en apporter la preuve historique.
En revanche, depuis le Roi Raoul 1er (922-936) jusqu’à la fin de l’Ancien Régime l’historien peut attester d’une sollicitude particulière et continue de nos Souverains pour le sanctuaire du Puy, pour consolider le pouvoir de ses évêques, et pour octroyer des privilèges à la cité.

   Une vingtaine de nos Rois est venue en pèlerinage au Puy : parmi les plus célèbres on peut citer Philippe II Auguste, Louis VII, Saint Louis, Charles VII, Louis XI, Charles VIII et François Ier. Le dernier en date fut Monseigneur le Prince Alphonse de Bourbon (+ 1989), de jure Alphonse II, le 15 août 1979.

   Chaque fois qu’une souveraine se trouvait enceinte, des prières particulières étaient prescrites auprès de Notre-Dame du Puy, pour que la grossesse de la Reine et sa délivrance se passent bien.

   Enfin, n’oublions pas que parmi la foule immense des pèlerins du 25 mars 1429, accourue pour implorer le secours divin sur ce Royaume où il y avait alors « grande pitié », se trouvait Isabelle Romée, mère de Sainte Jeanne d’Arc. Nous le savons par des témoignages irréfragables : en particulier celui du Frère Jean Paquerel, moine augustin, qui devint confesseur et aumônier de la Pucelle. C’est lors du jubilé du Puy qu’il rencontra Isabelle Romée : la nouvelle de l’entrevue de Jeanne avec Charles VII à Chinon (juste 20 jours auparavant : le 6 mars 1429) commençait à se répandre dans tout le Royaume. Les pèlerins interrogeaient fébrilement la pieuse mère de la jeune fille, étaient touchés par son récit, étaient gagnés par une espérance surnaturelle. Frère Jean Paquerel partit rejoindre l’héroïne, et il ne la quittera plus jusqu’au moment de sa captivité…

   Il y aurait encore beaucoup à dire puisqu’il faudrait aussi raconter l’importance du Puy lors de la première croisade : le pape Urbain II y vint en pèlerin avant d’ouvrir le concile de Clermont et fit de l’évêque du Puy, Adhémar de Monteil, son légat au milieu des troupes chrétiennes.

Statue de St Louis

Cathédrale du Puy : statue de Saint Louis
(qui offrit au sanctuaire une épine de la Sainte Couronne, voir > ici)

5) Pourquoi irons-nous en pèlerinage au Puy les 4 et 5 juin prochains ?

   « Les hommes d’armes combattront et Dieu donnera la victoire » affirmait Sainte Jeanne d’Arc.
Dans le combat spirituel et politique de notre temps, parfois bien plus terrible que celui des champs de bataille, nous ne pouvons pas lutter efficacement ni espérer vaincre sans attendre de Dieu et les forces et la victoire. Et pour que Dieu donne la victoire, il faut d’abord la Lui demander : prier, supplier, implorer…
Voilà pourquoi la Confrérie Royale et l’UCLF s’associent pour proposer à leurs membres, à leurs adhérents et à leurs sympathisants, de se retrouver au Puy-en-Velay les 4 et 5 juin prochains pour une démarche jubilaire commune.

   Le pèlerinage jubilaire de la Confrérie Royale et de l’Union des Cercles Légitimistes de France doit être un moment privilégié de ferveur catholique et royale dans notre travail de reconquête spirituelle et politique du Royaume de France. Une reconquête qui passe nécessairement par l’effort de conversion et de sanctification – l’une et l’autre ne sont jamais achevées – de chacun de nous.
La grâce du jubilé, reçue au Puy, ne peut manquer d’être salutaire, stimulante et fortifiante, dans les combats qui nous attendent.

Statue de Ste Jeanne d'Arc

Cathédrale du Puy : statue de Sainte Jeanne d’Arc.

6) Que ferons nous au Puy-en-Velay les 4 et 5 juins prochains ?

   Les détails du programme de ce pèlerinage sont encore à préciser, mais nous pouvons déjà en donner les grandes lignes :
- Rassemblement au début de l’après-midi du samedi 4 juin ; après un temps d’enseignement nous accomplirons ensemble le parcours jubilaire qui s’achèvera par la Sainte Messe (selon le rite latin traditionnel), célébrée à 19 h dans la cathédrale Notre-Dame de l’Annonciation.
Le dimanche 5 juin au matin, nous aurons la Sainte Messe de la solennité du Sacré-Coeur (normalement dans l’église de Ceyssac, village où eut lieu la seconde apparition de Notre-Dame en l’an 350), suivie d’une « procession du vœu de Louis XVI » (pour accomplir le vœu du Souverain captif, voir > ici).
Nous prévoyons aussi la possibilité de monter à la chapelle Saint-Michel d’Aiguilhe (pour les personnes ayant de bonnes jambes), érigée au X ème siècle au sommet d’un neck volcanique, afin d’y placer la Confrérie Royale et l’UCLF sous la protection de l’archange victorieux.

Chapelle Saint-Michel d'Aiguilhe

La chapelle Saint-Michel édifiée au sommet du neck d’Aiguilhe au Xème siècle.

Note importante :

   L’organisation matérielle du pèlerinage (transport, covoiturage, repas du samedi soir, logement au Puy ou dans les environs proches) est à mettre en oeuvre dans les provinces par chaque président de Cercle et par des bénévoles.
Le Cercle Légitimiste du Vivarais Abbé Claude Allier, qui est géographiquement le plus proche du Puy, se propose de faciliter cette organisation en répondant aux questions (notamment pour ce qui concerne les possibilités d’hébergement) : vivarais.legitimiste@gmail.com
Nous pensons pouvoir organiser un repas en commun pour le déjeuner du dimanche 5 juin, mais, afin de le prévoir, il nous faut déjà avoir une idée au moins approximative du nombre de participants (un acompte sera ensuite demandé pour les inscriptions à ce repas).

lys 2

2016-10. Des adieux à la Crèche et de la Crèche blanche.

2 février,
Fête de la Chandeleur.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Conformément aux indications données par le Saint Evangile (cf. Luc II, 22-32), aujourd’hui 2 février, c’est-à-dire quarante jours après Noël (et l’on sait combien le chiffre quarante a une importance symbolique très riche dans les Saintes Ecritures), nous célébrons dans la joie la Purification de la Bienheureuse Vierge Marie et la Présentation de Jésus au Temple, en accomplissement des rites prescrits par la loi mosaïque.
Au matin de ce jour donc, la Sainte Famille a quitté Bethléem pour monter à Jérusalem : le temps de la Crèche s’achève.

   Parmi les anciennes traditions malheureusement bien oubliées aujourd’hui, il y a celle des « adieux à la Crèche ».
Au matin du 2 février, les enfants du village – ou les enfants de chœur – se rassemblaient une dernière fois devant la Crèche de l’église, chantaient un dernier noël populaire, puis ils en retiraient les santons de l’Enfant Jésus, de la Sainte Vierge et de Saint Joseph qu’ils apportaient processionnellement à leur curé à l’entrée du sanctuaire ou sur les marches du maître-autel. Ainsi étaient figurés le départ de Bethléem et la venue de la Sainte Famille dans le Temple du Seigneur.

   Aussitôt après, parce qu’il n’était pas possible de la démonter et de la ranger à ce moment-là (car les Crèches n’étaient pas alors minimalistes comme elles le sont dans beaucoup d’églises de nos jours), on recouvrait la Crèche – ou au minimum la grotte-étable – d’un grand tissu blanc. Puis on plaçait par devant un tableau de la Présentation de Jésus au Temple.
Certaines paroisses possédaient même des santons spéciaux représentant tous les protagonistes de ce mystère : la Sainte Vierge portant l’Enfant Jésus dans ses bras, Saint Joseph avec les deux colombes, un prêtre du Temple, Syméon et la prophétesse Anne…

Le drap blanc dont on recouvrait la Crèche et qui servait de fond à cette représentation est à l’origine du nom qu’on lui donne : la Crèche blanche.

   La belle tradition de la Crèche blanche a subsisté de nos jours dans certaines paroisses de Provence et du Comtat Venaissin.
Toutefois j’ai appris avec un grand bonheur qu’en certains lieux, où la tradition était tombée entre les années 50 et 60 du précédent siècle, elle avait été récemment reprise avec enthousiasme par quelques prêtres zélés, pour la plus grande joie des plus fervents de leurs fidèles.
En certaines paroisses provençales, on laisse en place la Crèche blanche jusqu’au 9 février, c’est-à-dire tout le temps d’une octave.

Crèche blanche du Mesnil-Marie

La Crèche blanche du Mesnil-Marie.

   Au Mesnil-Marie, nous faisons nous aussi une Crèche blanche.
Pour le moment, après avoir retiré la Sainte Famille de l’étable et recouvert tout le décor de la Nativité d’un grand tissu blanc, nous devons nous contenter de disposer par devant une reproduction du très beau tableau de la Présentation de Jésus au Temple peint par Philippe de Champaigne (l’un de nos artistes de prédilection).

   Malgré des recherches longues et obstinées en effet, Frère Maximilien-Marie n’a pas encore trouvé tous les santons – de même style et de même taille que tous ceux que nous avons déjà dans notre Crèche – , qui nous permettraient de figurer ce beau et grand mystère du 2 février.
Comme vous pouvez le voir vous-mêmes sur les clichés ci-dessus et ci-dessous, nous ne possédons actuellement qu’un santon représentant un prêtre du Temple.
J’ai suggéré à notre Frère de le placer à côté du tableau.

Crèche blanche - prêtre du Temple

   Je dois vous avouer que cette suggestion n’était pas tout à fait dénuée d’intérêt, puisque je lui ai également demandé (avec une insistance hautement persuasive) qu’il « me » retire de l’étable avant qu’il ne la recouvre avec le tissu blanc, de sorte que je puisse moi aussi accompagner la Sainte Famille jusqu’au Temple de Jérusalem : vous n’ignorez pas en effet qu’il y a dans la Crèche du Mesnil-Marie un santon-chat qui me représente et qui est toujours placé tout près du Petit Jésus !

Crèche blanche - Lully

   Bon, maintenant je dois vous laisser : après les nourritures spirituelles, il faut aussi penser aux nourritures temporelles, et j’ai justement deux miens cousins à la mode de Bretagne – cela va de soi en ce jour – qui m’attendent en cuisine pour préparer les crêpes…

Bonne et belle fête de la Chandeleur à tous !

Lully.

chats et crèpes

« Je mets ma confiance, Vierge, en votre secours ».

- Cantique attribué à Saint Louis-Marie Grignon de Montfort -

1er février,
Fête du Bienheureux Guillaume Repin
et de ses 98 Bienheureux compagnons – prêtres, religieuses et laïcs – martyrs,
à Angers et à Avrillé, dans les premières semaines de l’année 1794.
Voir > ici, > ici et > ici.

       La première édition de ce célèbre cantique se trouve, en 1749, dans un recueil de cantiques pour les missions publié à Lyon par les Jésuites. Une tradition très ancienne en attribue les paroles à Saint Louis-Marie Grignon de Montfort, sans que l’on puisse toutefois l’attester de manière irréfragable : on note que certaines expressions et les idées de ce chant sont plutôt favorables à cette attribution.
Plusieurs témoignages nous rapportent que les ecclésiastiques, religieuses et humbles fidèles massacrés dans les provinces de l’Ouest pendant la grande terreur chantaient ce cantique dans la charrette qui les conduisait vers l’échafaud ou dans ces longues files qu’on emmenait à la fusillade.

   En cette fête du Bienheureux Guillaume Repin et de ses compagnons, martyrs à Angers et à Avrillé, en complément des textes que j’ai déjà publiés à leur sujet (voir les liens ci-dessus), je veux publier ci-dessous les paroles de ce cantique, telles qu’elles figurent dans l’édition de référence des cantiques de Saint Louis-Marie Grignon de Montfort.

Martyrs d'Avrillé

Les Bienheureux Martyrs d’Avrillé fusillés au bord des fosses dans lesquels leurs corps vont être jetés
(détail d’un vitrail de la chapelle du Champ des Martyrs)

Je mets ma confiance.

Je mets ma confiance,
Vierge, en votre secours,
Servez-moi de défense,
Prenez soin de mes jours ;
Et quand ma dernière heure
Viendra fixer mon sort,
Obtenez que je meure
De la plus sainte mort.

Sainte Vierge Marie,
Asile des pécheurs,
Prenez part, je vous prie,
A mes justes frayeurs :
Vous êtes mon refuge,
Votre Fils est mon Roi,
Mais Il sera mon Juge,
Intercédez pour moi.

Ah ! Soyez-moi propice
Avant que de mourir,
Apaisez Sa justice,
Je crains de la subir ;
Mère pleine de zèle,
Protégez votre enfant,
Je vous serai fidèle
Jusqu’au dernier instant.

A dessein de vous plaire,
O Reine de mon coeur !
Je promets de rien faire
Qui blesse votre honneur :
Je veux que, par hommage,
Ceux qui me sont sujets,
En tous lieux, à tout âge,
Prennent vos intérêts.

Voyez couler mes larmes,
Mère du bel Amour ;
Finissez mes alarmes
Dans ce mortel séjour :
Venez rompre ma chaîne,
Pour m’approcher de vous,
Aimable Souveraine,
Que mon sort serait doux !

Vous êtes, Vierge Mère,
Après Dieu, mon support ;
Je sais qu’Il est mon Père,
Mais vous êtes mon fort :
Faites que dans la gloire,
Parmi les bienheureux,
Je chante la victoire
Du Monarque des cieux.

« Les Oeuvres du Bx de Montfort »
Ses cantiques avec notes par le R.P. F.Fradet smm, édition type
Librairie mariale – Pontchâteau 1932.

   Enfin, voici un autre enregistrement que celui que j’avais déjà publié (tout en bas de page ici), puisque les paroles de ce cantique peuvent-être chantées sur deux mélodies différentes. Dans ma première publication, c’était la mélodie du très ancien noël populaire « Or nous dites Marie » ; ci-dessous voici la seconde version, interprétée par la Schola Sainte-Cécile, avec pour les couplets des paroles qui différent de celles du recueil de référence : le cantique a en effet connu un certain nombre de variantes au XIXe siècle, selon les recueils et leurs diverses éditions.

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2016-9. De Sainte Bathilde, Reine des Francs, que l’on fête le 30 janvier.

30 janvier,
Fête de Sainte Bathilde,
Mémoire de Sainte Martine,

Anniversaire de la mort de S.A.R. le Prince Alphonse de Bourbon (cf. > ici).

       Il y a des saints que nous aimons tout particulièrement au Mesnil-Marie.
A ce propos, permettez-moi d’ouvrir ici une parenthèse anecdotique amusante : un jour, dans une conversation qui roulait sur l’histoire de l’Eglise et la sainteté, à plusieurs reprises Frère Maximilien-Marie s’était exclamé à la mention de certains noms de saints : « L’une de mes saintes préférées ! » ou encore : « Un de  mes saints de prédilection ! ». Le bon père dominicain qui était son interlocuteur finit par lui rétorquer, dans un soupir : « Dites-nous plutôt quels sont les saints que vous ne préférez pas… La liste sera plus courte ! »

   Il y a donc, oui, des saints que nous aimons tout particulièrement au Mesnil-Marie.
Et Sainte Bathilde, dont le propre de France mentionne la fête à la date du 30 janvier, est de ce nombre.

Sainte Bathilde sur un vitrail de l'église Ste Radegonde à Poitiers

Sainte Bathilde représentée sur un vitrail de l’église Sainte Radegonde à Poitiers

   Anglo-Saxonne de naissance (elle était probablement née en 626 mais d’autres avancent la date de 630), Bathilde avait été emmenée en captivité et vendue comme esclave alors qu’elle était à peine adolescente. Elle avait été achetée par Archambaud (ou Erchinoald), Maire du palais de Clovis II, Roi de Neustrie et de Bourgogne. Clovis II était fils du fameux Roi Dagobert 1er et il n’avait que quatre ans à la mort de son père, en 629. 

   Bathilde gagna rapidement la faveur de tous, en raison de son charme, de sa beauté et de sa nature gracieuse et douce. Elle était aimée aussi bien de ses compagnes esclaves, envers lesquelles elle témoignait de nombreuses attentions telles que le nettoyage de leurs chaussures et de leurs vêtements, que de ses maîtres, si bien que lorsque Archambaud perdit son épouse, il résolut d’épouser la jeune esclave.
Bathilde, alarmée par cette perspective, se déguisa avec de vieux vêtements et des haillons, et se cacha le temps de se faire oublier.
Archambaud, p
ensant qu’elle s’était définitivement enfuie, épousa une autre femme. Lorsque Bathilde l’apprit, elle revint au palais pour reprendre son service, essuyant force moqueries parce qu’elle avait préféré la condition d’esclave à celle de princesse. 

   Elle attira toutefois l’attention du Roi Clovis II qui était à peine plus âgé qu’elle (il était né en 625), et qui l’épousa : en 649, la jeune esclave devint donc Reine des Francs. 
Elle donna à Clovis II cinq enfants, dont trois fils qui furent Rois après lui : Clotaire III (Roi de Neustrie et de Bourgogne), Childéric II (Roi d’Austrasie puis de tous les Francs après la mort de Clotaire III) et Thierry III (Roi de Neustrie et de Bourgogne à la mort de Clotaire III, rapidement détrôné par Childéric II, puis Roi de tous les Francs à la mort de Childéric II et de son cousin Dagobert II). 

Ste Bathilde statue dans les jardins du Palais du Luxembourg (Paris)

Sainte Bathilde : statue érigée dans les jardins du Palais du Luxembourg à Paris (détail).

   A la mort de son époux (survenue le 31 octobre 657, alors qu’il n’avait que 22 ans), Bathilde fut nommée régente pour son fils aîné, Clotaire III, Roi de Neustrie, qui n’avait que cinq ans. 
Elle gouverna avec compétence et sagesse pendant huit ans, s’attachant à réformer les abus et à rendre son peuple heureux, ayant pour principaux conseillers Saint Éloi, évêque de Noyon, et Saint Ouen, évêque de Rouen.

   N’oubliant jamais qu’elle avait été esclave, Bathilde usa en particulier de son pouvoir pour soulager ceux qui étaient en captivité. A cette époque, il n’était pas rare que les plus pauvres vendissent leurs propres enfants comme esclaves quand ils n’avaient plus de ressources. Bathilde réduisit les impôts, interdit l’achat d’esclaves chrétiens et la vente de sujets francs, et déclara que tout esclave qui mettait le pied dans le Royaume serait libre, dès cet instant. 

   Bathilde soutint le travail de l’Eglise de tout son pouvoir, tant en ce qui concerne l’évangélisation de ses peuples que dans les oeuvres d’instruction et de charité. Elle lutta contre la simonie et favorisa la vie religieuse : elle fonda deux abbayes royales – celles de Corbie et de Chelles – et soutenait de ses largesses les abbayes royales de Saint-Denys et de Saint-Martin de Tours, les abbayes de Jumièges, de Saint-Wandrille, de Jouarre, de Luxeuil… etc. et nombre d’autres établissements ecclésiastiques et sanctuaires.
Elle fonda et dota des hospices, n’hésitant pas à vendre ses propres bijoux pour venir en aide aux nécessiteux.
Sous son gouvernement enfin, des forêts furent défrichées afin de permettre l’extension des terres agricoles. 

Ste Bathilde près du lit mortuaire de St Eloi

Sainte Bathilde près du lit de mort de Saint Eloi (tableau du XVIIe siècle)

   Quand son fils, Clotaire III, fut en âge de gouverner, Bathilde se retira à l’abbaye royale de Chelles, qu’elle avait fondée dans la vallée de la Marne.
On raconte qu’elle eut par trois fois la vision de Saint Eloi, rappelé à Dieu peu de temps auparavant, qui lui enjoignait de quitter le siècle et de prendre le voile.
C’est de tout coeur qu’elle avait renoncé au monde et aux honneurs, aussi ne voulut-elle avoir aucun statut particulier dans la communauté, vivant l’humilité et la parfaite obéissance comme la dernière des moniales : « Il me semble que le plus grand bonheur qui me puisse arriver, c’est d’être foulée aux pieds de tout le monde », aurait-elle déclaré.

   Elle mourut à Chelles le 30 janvier 680.
A l’heure de rendre le dernier soupir, elle déclara qu’elle voyait une échelle partant de l’autel de la Sainte Vierge et dressée jusqu’au ciel, et que, sur celle-ci, elle se voyait elle-même montant en compagnie des anges.

Elle fut inhumée à Chelles, et non à Saint-Denis auprès de son époux Clovis II.

   Vénérée dès après sa mort, son culte fut promu par les abbesses de Chelles (nombre d’entre elles étaient de la famille royale), en particulier par Sainte Gisèle (+ 810), abbesse de Chelles et sœur de Saint Charlemagne.
Quoique ses reliques eussent déjà fait l’objet d’une élévation (ce qui, à cette époque, correspondait à peu de choses près à ce que nous appelons aujourd’hui une canonisation), présidée par l’évêque de Paris, et de translations, Sainte Bathilde fut définitivement canonisée par le pape Nicolas II, au Xe siècle.
Ses reliques furent protégées par les habitants de Chelles lors des pillages et profanations révolutionnaires, et nous ont donc été conservées.

Leonhard Beck 1480-1552 vision de Ste Bathilde

Vision de Sainte Bathilde (gravure de Leonhard Beck – XVe siècle)

Oraison propre de la Messe de Sainte Bathilde :

     O Dieu, qui avez enseigné à la Bienheureuse Bathilde à passer de tout son coeur de la grandeur du monde à l’humilité de la Croix, accordez-nous que, par son intercession et son exemple, nous apprenions à fouler aux pieds les délices périssables de la terre, et par l’embrassement de Votre Croix nous triomphions de tout ce qui nous est contraire.
O Vous qui vivez et régnez… etc.

Oraison de la fête de Ste Bathilde

2016-7. Tant qu’il reste un seul descendant direct d’Hugues Capet, né d’un mariage catholique réputé valide au moment de la naissance, il reste un Roi en France.

       C’est avec un plaisir extrême que je veux porter à votre connaissance un texte de circonstance jailli de la plume élégante (même s’il fut écrit au moyen d’un clavier) d’un jeune homme qui, lorsqu’il était porte-parole du Cercle Légitimiste d’Ile de France, en quelques lignes percutantes et sûres, avait rectifié les approximations et erreurs d’une chronique parue sur le site Boulevard Voltaire, – quel horrible nom ! -, peut-être motivée par quelques « bonnes intentions » (sont-ce celles-là même dont est pavé l’enfer ?), à l’occasion de l’anniversaire de l’assassinat du Roi-martyr, mais qui n’en induisaient pas moins le lecteur à une espèce de « romantisme » qui n’a rien à voir avec la réalité de ce que fut – de ce qu’est toujours ! – la Royauté Française légitime : le romantisme s’enlise dans les approximations d’une sentimentalité qui se complaît en ses humeurs bileuses, alors que la Monarchie Capétienne traditionnelle – dans son réalisme vital et sa pragmatique logique – est toujours forte d’une joyeuse et invincible espérance !
Il est donc très important, au-delà de la tristesse inévitable – mais non sentimentaliste – qui accompagne la date anniversaire du 21 janvier, que nous sachions raison garder et que nous profitions de cette occasion pour rappeler les principes et lois fondamentaux de la Monarchie pour laquelle nous militons fièrement.

pattes de chatLully.

Grandes armes de France

A propos du martyre du Roi Louis XVI :

     « Chaque 21 janvier, la même histoire recommence.
De braves chroniqueurs, journalistes, éditorialistes improvisés, plus ou moins catholiques, plus ou moins royalistes, y vont de leur article sincèrement désolé sur la mort de Louis XVI. 

L’intention est louable.

Et chaque année, faute de culture politique et historique digne de ce nom, c’est la catastrophe.
Cette année, c’est Monsieur Philippe Rodier, sur le site mal heureusement nommé Boulevard Voltaire, qui tombe dans le panneau (cf. > ici).

Que Monsieur Rodier commette un pléonasme en parlant d’ « incarnation charnelle » (comme si une « incarnation » pouvait être autrement que « charnelle »), nous le lui pardonnerons volontiers puisque l’idée demeure juste.
Louis XVI, parce que Roi de France, était bien l’incarnation du pays tout entier.

Mais enfin, quelle drôle d’idée de dire qu’ « en tuant la reine, les révolutionnaires tuaient la royauté » !
En quoi la Reine de France était-elle à ce point identifiée à la fonction royale qu’en la tuant on supprimât aussitôt la dite fonction ? Sous prétexte qu’elle ne pouvait plus avoir d’enfants royaux ? Certes, mais le Roi était mort avant elle, et le Roi Louis XVII son fils mourut après. 

La logique de Monsieur Rodier m’échappe absolument.

Rappelons donc seulement la vérité qu’un docteur en droit ne devrait pas ignorer : en France, la fonction royale ne meurt pas !

Tant qu’il reste un seul descendant direct d’Hugues Capet, né d’un mariage catholique réputé valide au moment de la naissance, alors il reste un Roi en France (note *).
A la mort de Louis XVI, toute tragique qu’elle fut, le Dauphin Louis, Duc de Normandie, devint aussitôt par la grâce de Dieu Sa Majesté Très-Chrétienne le Roi Louis XVII. 

Et cela, la Reine Marie-Antoinette ne l’ignorait pas, pas plus que les Vendéens et Chouans des quatre coins de France et de Navarre.

Enfin je m’insurge vivement contre la citation, séduisante mais fausse, du sinistre Renan : « Le jour où la France coupa la tête à son roi, elle commit un suicide. »
Certes, il est séduisant d’utiliser au profit de la royauté une caution républicaine telle que Renan.

Pourtant Renan a tort, car en aucun cas ce n’est la France qui tua le Roi, mais bien la République, et elle seule.
La France, révulsée d’horreur et de douleur devant ce crime qui criait vengeance à la face de Dieu, ne devait plus tarder à se révolter massivement contre la tyrannie républicaine, qui déjà usurpait les noms de « France » et de « patrie ».

En conséquence, la France n’a commis aucun suicide. Bien au contraire, le martyre de son Roi ouvrit l’une des plus belles pages de son histoire : les épopées vendéennes et chouannes. 

Combien donc il y a loin du désespoir latent de Monsieur Rodier à la forte Espérance qui ne peut que nous animer en ce jour !
Que notre Roi Louis XVI « le Bienfaisant », du haut du Ciel où il est sans doute allé tout droit, hâte le jour de la Restauration et veille sur le Royaume des Lys qui fut, par la grâce de Dieu, le sien. »

Michel Berryer,
porte-parole du Cercle Légitimiste d’Ile de France,
mercredi 20 janvier 2016
.

Note * :
Ceci découle naturellement des Lois Fondamentales du Royaume de France, à lire ou à relire > ici.

Statue de Louis XVI - Chapelle Expiatoire

Louis XVI auquel un ange montre le Ciel,
oeuvre de François-Joseph Bosio, Chapelle expiatoire – Paris.

2016-6. « Celui qui fut à sa manière un sillon de lumière et dont la voix reste en quelque sorte la messagère du salut de la France… »

Voici le texte de l’Eloge funèbre de Sa Majesté le Roi Louis XVI qui a été prononcé ce 21 janvier 2016 par le Révérend Père Augustin Pic o.p. (cf. > ici) au cours de la Sainte Messe de Requiem célébrée à la Basilique-nécropole royale de Saint-Denys.

Nous sommes infiniment reconnaissants au Révérend Père Pic de nous en avoir communiqué le texte avec célérité et de nous avoir très amicalement autorisés à le publier.

Nous souhaitons très vivement que ce non seulement très beau, mais surtout très profond enseignement ne fasse pas l’objet d’une lecture superficielle, mais qu’il soit lu et relu, approfondi et médité, en raison de l’excellence des vérités qu’il transmet avec autant d’élévation et de vigueur.

frise lys

Statue de S.M. le Roi Louis XVI dans le déambulatoire de la basilique de Saint-Denys

Orant de Sa Majesté le Roi Louis XVI
dans le déambulatoire de la Basilique royale de Saint-Denys

Oraison funèbre de Louis XVI

Saint-Denis, jeudi 21 janvier 2016

Tantus labor non sit cassus …

Au Nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.

Ainsi soit-il.

A mesure que l’ancien fatalisme perdait de sa force, on pensa que les grands malheurs ont pour cause le libre choix des individus. Et, certes, à regarder ce que la raison, l’expérience et la Révélation enseignent, là est bien la vérité. Mais à considérer par ailleurs les complexités de l’Histoire, on ne saurait ignorer que tout ce qui arrive, en bon autant qu’en mauvais, résulte aussi des déterminismes, que produiront toujours en se compénétrant, et le mouvement du temps qui passe et l’enchaînement des effets à leurs causes. De sorte que nous pâtissons aujourd’hui d’erreurs, sottises ou méchancetés de nos Pères où nous n’eûmes aucune part, tout en commettant celles que nos enfants ou neveux à naître auront à supporter demain, sans avoir pu y mettre du leur. Et ce mal, sachons-le, durera dans la chair de péché qui est nôtre jusqu’à la fin du monde. Ainsi, sans le ravage du Palatinat par Louis XIV puis les guerres criminelles de Bonaparte, aurions-nous eu l’horrible Premier conflit mondial ? Mais sans les décisions irréfléchies des vainqueurs de 1918 d’une part, l’affligeante République de Weimar de l’autre, aurions-nous connu le sommet d’ignominie que fut le régime hitlérien ? Ou encore, sans l’oppression des masses ouvrières par une industrialisation anarchique dont s’indignait si justement notre pieux Henri V, aurions-nous eu le Communisme et par lui, autant qu’avec le Nazisme, des forfaits presque impossibles à décrire et à dénombrer ?

Sentir assez cette conspiration des libertés délinquantes et des déterminismes historiques dut être, dès avant la Révolution et pendant, une souffrance bien grande et un impératif de dévouement bien fort pour le chef-né de la France. Chrétiens, c’est là ce que dut vivre, à l’intime et jusqu’à la mort

TRES HAUT, TRES PUISSANT,

TRES EXCELLENT PRINCE

LOUIS XVI

ROI de FRANCE et de NAVARRE.

Lorsque le futur monarque vint au monde, tout en un sens était déjà consommé puisque le mal avait commencé bien avant lui. En un autre, la puissance de la grâce et la part restée bonne en l’homme après le péché d’Adam étant à jamais le ferment de tous les renouveaux, tout demeurait possible. Aussi montrerai-je d’abord quelle conscience eut Louis de la perversité de son siècle, et non seulement de son siècle mais des deux qui l’avaient préparé ; je dirai ensuite et surtout quelle espérance contre toute espérance il garda en Dieu et en ses chers Français, et quelle leçon il laisse ainsi, à tous les cœurs désireux aujourd’hui encore de s’élever eux-mêmes et d’élever autrui.

I

Dans le premier temps de sa réflexion sur la crise révolutionnaire, soit dès 1789, l’abbé Barruel expliqua celle-ci non, comme à partir de 1792, par le fameux triple complot, philosophique, maçonnique et illuministe mais par la seule philosophie du XVIIIe siècle. Loin de s’en tenir là toutefois, c’est ultimement par une décadence du clergé, et déjà bien ancienne, qu’il expliqua ce philosophisme même et son dessein de détruire, ou d’asservir au moins, le Trône et l’Autel.

Remontons plus haut, donc. Des historiens ultérieurs ont assez montré l’ébranlement de la conscience individuelle et collective que produisirent les guerres religieuses du XVIe siècle, guerres dont l’origine fut, avouons-le, dans les scandales de la finissante Eglise médiévale presque autant que dans les erreurs de Luther. Et de là quel désenchantement, cynique et libertaire, habita ces jeunesses « d’après-guerres de religion » qui fleurirent entre 1580 et 1650, et quel sentiment d’une faillite radicale de la Chrétienté, injuste au fond mais vraisemblable à vues seulement humaines, anima tout ce qui prétendit, dès le temps d’Henri IV et de Louis XIII, préparer un avenir meilleur. Et c’est dans les horreurs d’une guerre de Trente Ans, aussi religieuse en son fond qu’au siècle précédent, plus tard encore dans l’interminable querelle de la grâce et dans celle du pur amour, dont le Christianisme sortit durablement ridiculisé aux yeux des mondains qu’il devait convertir, enfin dans l’échec, au tournant de 1700, de la réunion tant attendue des Eglises qui sembla consacrer à jamais la rupture du XVIe siècle et le relativisme religieux, c’est dans ces faits, dis-je, et bien d’autres, que l’incertitude et l’errance des cœurs et des esprits, souvent respirées dès la naissance et absorbées dès le lait maternel, trouvèrent leur irréversible aggravation.

En voici pour symbole, le Régent, d’après l’abbé Proyart, historien contre-révolutionnaire, et contemporain si méconnu, de l’abbé Barruel : « Dans l’emportement de ses passions, écrit-il, il prétendait que la conscience n’était qu’une chimère mais … il en était sans cesse obsédé, et plus cruellement les jours consacrés aux plus saints mystères de la Religion. La monstrueuse affectation qu’il mettait à profaner ces jours … trahissaient visiblement mais ne guérissait pas les frayeurs secrètes dont le retour de ces solennités remplissaient son cœur coupable ». Voyez, donc, chez un seul, ce vertige intérieur de toute une société, chrétienne encore par le fond, mais que l’air du temps pervertit et entraîne presque malgré soi au pire ; voyez l’enchevêtrement des libres décisions mauvaises, et d’un état d’empêchement au bien, où une sorte d’hérédité de la rébellion jetait la conscience française. Comment ne pas penser alors aux paroles de Dieu selon Son Prophète, reprises par Jésus-Christ Lui-même : Je les ai aveuglés pour qu’ils ne voient pas, sinon ils comprendraient et se convertiraient. Mystérieux croisement des choix humains et des dispositions divines.

Quelle exacte perception eut Louis XVI d’un pareil état ? Moraliste, il n’ignora pas la force subversive des passions charnelles lorsqu’elles entendent substituer un ordre temporel humain à celui que Dieu veut. Historien et politique, il sut quels maux les clergés attiédis ou dévoyés et les querelles religieuses valent à tous les royaumes. Sans doute pensa-t-il à ce sujet comme Louis XIV dans ses Mémoires et Réflexions au Grand Dauphin, document dont il remit personnellement le manuscrit au général de Grimoard, en 1785, pour qu’il fût publié : « L’Eglise, disait le grand roi, sans compter ses maux ordinaires, après de longues disputes sur des matières … dont on avouait que la connaissance n’était nécessaire à personne pour le salut, les différents s’augmentant chaque jour avec la chaleur et l’opiniâtreté des esprits, et se mêlant sans cesse à de nouveaux intérêts humains, était enfin ouvertement menacée d’un schisme par des gens d’autant plus dangereux qu’ils pouvaient être très utiles, d’un grand mérite, etc. ».

Bref, quoi qu’il en soit de ses limites ou de ses erreurs, Louis XVI eut conscience du mal, très désolé de l’abaissement moral et spirituel de ses peuples et de la perte de ce qu’on appelait en ce temps-là l’esprit public, c’est-à-dire de tout souci pour le bien commun, temporel et éternel.

 

II

Formé politiquement et spirituellement, ce prince professait, au moins d’intention et pour l’essentiel, une juste conception de l’humain, une anthropologie chrétienne, et en ce sens, l’homme des Lumières qu’il fut indubitablement n’en demeura pas moins jusqu’à sa fin à l’opposé de ces Lumières, qui réduisaient et réduisent encore aujourd’hui le sommet, que nous sommes, de toute la création visible, à n’être qu’animal et machine, à n’exister que pour la chair et la sensualité.

Ce chrétien, donc – et mûri par l’épreuve – regardait l’homme comme à la fois déterminé par ses contextes dans l’espace et dans le temps, la seule liberté pure et absolue étant Dieu, et libre par nature et sous la grâce. De sorte que ce Fils de saint Louis, ultimement désabusé, ultimement résigné, osons dire même ultimement et intimement usé, garda j’en suis sûr, et emporta dans cette mort qui, nous le souhaitons, le fit monter au ciel, la certitude que la victoire sur tous les déterminismes d’une part et toutes les perversions de l’autre est, de par Dieu, et demeure, une possibilité et une vocation, une grâce et un devoir. Et de nos jours, où plus rebelles sont les libertés et plus oppressants que jamais ces déterminismes, à un point que ni lui ni personne en son temps n’eussent imaginé ou conçu, pareille vérité ne laisse pas de s’imposer à nous avec une force nouvelle.

Dans la tristesse de ses derniers temps, Louis XVI apparaît donc, majestueux et humble, en rien moins qu’en homme et en roi de l’espérance. Si en effet la formule « Le roi ne meurt pas en France » fut, à la veille de la mort, sa dernière profession monarchique, elle exprima aussi sa certitude qu’au fond de nous resteront toujours, tant qu’il y aura une France, l’amour et la nostalgie de celui qui doit l’incarner. Au cœur d’un Français, non, la figure royale ne saurait mourir.

Mais il y a plus. En disculpant le Peuple du sacrilège que fut le régicide, il entrevit la permanence de son Christianisme au-delà du bouleversement ou de la cessation de la Chrétienté. Et le cours même de la Révolution lui donnera raison, car la Terreur, on le sait trop peu, s’explique en partie par la furie que suscita, vigoureuse, la résistance sacerdotale et laïque d’une religion que les naïfs ou les menteurs disaient usée par tant de siècles. Or, pour avoir alors donné si grand nombre de saints et de martyrs, pour avoir opéré par la suite un relèvement spirituel comme celui dont s’honore le XIXe siècle, ne fallait-t-il pas que quelque chose de la Foi fût resté intact dans les entrailles de la Nation ? Et pour avoir suscité récemment encore les protestations que l’on sait, de toute une jeunesse, contre les lois que l’on sait, ne faut-il pas que, par un côté, la France tienne encore et toujours, trop peu mais réellement, aux promesses d’un Baptême qui fut mystérieusement le sien autant que celui de Clovis ? Oui, Louis XVI resta, dans l’insondable chagrin des derniers mois de sa monarchie puis de sa vie, l’homme de l’espérance, et c’est à ce titre, plus qu’à bien d’autres peut-être, qu’il garde un droit, le droit, par-delà plus de deux cents ans, à notre gratitude, à notre vénération et, dans la personne de son successeur, à notre fidélité.

Cédons la péroraison, bien chers Frères, à Mgr Freppel, grand évêque si justement apprécié d’Henri V. Car les paroles vibrantes qu’il prononça en 1873, quelques mois seulement avant l’affaire du drapeau, disent bien, quatre-vingts ans presque jour pour jour après le triste 21 janvier, le fond du cœur de celui que nous commémorons : « Le plus grand des malheurs pour un siècle ou pour un pays, c’est l’abandon ou l’amoindrissement de la vérité. On peut se relever de tout le reste ; on ne se relève jamais du sacrifice des principes. Les caractères peuvent fléchir à des moments donnés et les mœurs publiques recevoir quelque atteinte du vice ou du mauvais exemple mais rien n’est perdu tant que les vraies doctrines restent debout dans leur intégrité. Avec elles, tout se refait tôt ou tard, les hommes et les institutions, parce qu’on est toujours capable de revenir au bien lorsqu’on n’a pas quitté le vrai. Ce qui enlèverait jusqu’à l’espoir même du salut, ce serait la désertion des principes, en dehors desquels il ne se peut rien édifier de solide et de durable. Aussi le plus grand service qu’un homme puisse rendre à ses semblables, aux époques de défaillances ou d’obscurcissement, c’est d’affirmer la vérité sans crainte, alors même qu’on ne l’écouterait pas car c’est un sillon de lumière qu’il ouvre à travers les intelligences, et si sa voix ne parvient pas à dominer les bruits du moment, du moins sera-t-elle recueillie dans l’avenir comme la messagère du salut ». Voilà ce qu’on peut lire dans le Panégyrique de saint Hilaire, du 19 janvier 1873.

Que celui qui fut à sa manière un sillon de lumière et dont la voix reste en quelque sorte la messagère du salut de la France, alors même qu’après le bien on en vient désormais à quitter aussi le vrai, soit pour elle et pour chacun de nous s’il a plu à Dieu de le mettre en cette position, un puissant intercesseur, au côté du saint roi de sa dynastie et sous le manteau de la Vierge de l’Assomption, notre Mère et Patronne à jamais.

Au Nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.

Ainsi soit-il.

Armes de France - Vitrail de l'une des cryptes de Saint-Denys

Grandes armes de France
(vitrail dans l’une des cryptes de la Basilique royale de Saint-Denys)

frise lys

Tous les textes relatifs à Sa Majesté le Roi Louis XVI et à son martyre
publiés dans les pages de ce blogue :
- Un récit des dernières heures du Souverain ici
- Le testament de Louis XVI ici

- Son voeu au Sacré-Coeur ici
- Maximes et pensées de Louis XVI ici
- La complainte « Louis XVI aux Français » ici
- L’allocution consistoriale du Pape Pie VI sur le martyre de Louis XVI ici
- L’oraison funèbre de Louis XVI prononcée à Rome devant le Pape ici
- Le récit de l’exhumation des restes de Louis XVI et Marie-Antoinette en janvier 1815 – à partir d’ ici
- Le transfert des dépouilles royales à Saint-Denis (21 janvier 1815) ici
- Les funérailles solennelles des Souverains martyrs le 21 janvier 1815 ici
- La publication de la correspondance et des récits de l’abbé Edgeworth (Rd.P. Augustin Pic) > ici
- La Messe de Requiem composée par Cherubini à la mémoire de Louis XVI (20 janvier 1816) ici

Publié dans:Lectures & relectures, Memento, Vexilla Regis |on 22 janvier, 2016 |3 Commentaires »
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