4 janvier au soir,
fête de Sainte Angèle de Foligno (voir > ici),
& octave des Saints Innocents.
« La foi guidant l’homme vers l’éternité »
Fresque de Véronèse (1560-1561) dans la Villa Barbaro, à Maser (Vénétie).
Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,
Après l’expression toute traditionnelle de voeux qui, pour conventionnels qu’ils soient, n’en sont toutefois pas moins l’expression d’une volonté de bien et de bonheur pour ceux auxquels ils sont adressés, surtout s’ils sont fondés dans la prière (cf. la « Métaphysique des voeux » publiée dans ce blogue en 7 parties au début de l’année 2015 à partir > d’ici), je voudrais, comme bien souvent aussi en pareille période, vous partager quelques réflexions en lien avec les temps que nous vivons et avec les perspectives qui se dessinent devant nous, puisque justement la période des voeux est souvent l’occasion de regarder l’avenir, de l’envisager, de le « planifier » parfois, de s’y projeter en quelque sorte au moyen des résolutions prises, bref d’y penser et même de tenter d’exercer une influence sur lui.
Nous souhaitons à nos proches, à nos amis, à tous ceux qui nous sont chers – et d’une manière plus globale à nos connaissances – , une bonne et heureuse année.
Nous voudrions que toute la méchanceté disparaisse, que tout le mal qui est dans le monde cesse, que les conflits s’apaisent et que la vie de tous les hommes ne soit environnée que de choses « positives » : paix, lumière, douceur, santé, bienveillance, amour… etc.
Bien sûr que, moi aussi, qui n’entretiens de mauvais sentiments envers personne, je souhaiterais que la vie de tous les hommes d’ici-bas se déroule dans une espèce de paradis terrestre, ignorant le mal et toutes ses conséquences porteuses de souffrances.
Mais nous savons bien que, quelles que soient la sincérité et la ferveur avec lesquelles nous appelons le bien et le bonheur sur les hommes et sur le monde, il n’en sera pas exactement ainsi et que le terrible quotidien des mesquineries, des méchancetés, des jalousies, de la cupidité, de la malveillance, de la violence psychologique et physique, de la volonté de domination perverse des autres… etc. aura tôt fait de nous rattraper, de nous encercler, et de nous assaillir.
Et il y a bien pis !
Le mal n’est pas uniquement et exclusivement autour de nous : il est également et très réellement en nous.
Parce que, en fait, vous aussi bien que moi, nous portons tous, en nous, des racines de malice et de perversion, conséquences intimes du péché originel hérité de nos premiers parents, et conséquences aussi de toutes les mauvaises actions et pensées auxquelles nous avons laissé de la place dans nos coeurs.
Qui osera prétendre qu’il n’en est pas ainsi en lui ?
Qui osera rejeter la responsabilité de tout le mal qui est dans le monde sur « les autres », ou sur « la société », ou sur « les structures mauvaises héritées du passé » ?
Chacun de nous, s’il est un peu observateur et capable d’analyser ses propres actes, ne peut que faire ce constat, triste et amer : si je ne fais pas d’efforts quotidiens et continus, si je ne travaille pas à m’améliorer, si je me laisse glisser sur mes propres pentes de facilité – en raison de mon orgueil et de mes égoïsmes aux variantes infinies – , je contribue moi-même à la propagation du mal dans le monde.
De la même manière, mais inverse, que « toute âme qui s’élève élève le monde », ainsi aussi toute âme qui s’abandonne au mal, même dans le secret de la plus intime solitude et sans conséquence apparente sur le prochain, oeuvre en réalité à l’enfoncement du monde dans le mal.
Et nul homme – ni vous ni moi – ne peut soutenir qu’il n’y est lui-même pour rien (le « c’est pas moi, c’est l’autre », qui nous est si spontané depuis notre petite enfance !).
Tous et chacun, nous portons notre part de responsabilité actuelle et quotidienne sur la malice des temps dans lesquels nous vivons.
Mais c’est aussi un fait que chacun possède, à sa propre mesure, à sa mesure exacte, des moyens – personnels et uniques – pour combattre la propagation du mal qui navre le monde, la société et les familles… etc. : cela s’appelle le travail sur soi, la lutte personnelle contre le péché, la conversion morale, la pénitence, la sanctification…
C’est ainsi que chacun peut neutraliser une partie des causes responsables du mal qui est dans le monde ; c’est ainsi que chacun, pour la partie qui lui incombe à lui, peut exercer une influence contre la prolifération de la malice et de la laideur morale du monde.
De la même manière qu’un lac n’est jamais que l’accumulation de simples petites gouttes d’eau, et qu’une prairie n’est jamais que le rassemblement de brins d’herbe uniques, le climat moral de la société n’est d’une certaine manière que la somme des dispositions morales des individus qui la composent.
Si chacun se repose sur les autres pour que « ça aille mieux », et se dispense de l’effort nécessaire pour contrer le mal à l’intérieur de lui-même et sur ce qui est dans son rayon d’influence immédiat, il est évident que la décadence et l’accélération vertigineuse du mal ne pourront qu’aller en empirant.
Cela ne sera sans doute pas suffisant pour ôter tout le mal du monde – parce qu’il existe aussi des causes extérieures à nous-mêmes sur lesquelles nous n’avons que peu de prise – , mais si, toutefois, chacun, de manière très concrète et immédiate, au jour le jour, agit conformément au Vrai, au Beau et au Bien dans le champ d’action qui s’offre à lui, et parfois à lui seul, il est néanmoins certain que des résultats seront visibles.
En résumé, pas de « bonne année » sans conversion.
Pas de « bonne année », s’il n’y a pas d’efforts réels, concrets et suivis d’effets.
Pas de « bonne année », s’il n’y a pas d’amendement personnel capable de se répercuter sur la société.
Parce que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets, n’imaginez pas un seul instant que l’année 2017 sera meilleure que l’année 2016 ou que l’année 2015 s’il n’y a pas ces conversions intérieures profondes qui peuvent seules changer le cours de l’histoire et renouveler le monde.
Vous avez détesté 2015, son climat social, sa dégringolade institutionnelle, son terrorisme et ses attentats sanglants ?
Vous avez détesté 2016, son climat social, sa dégringolade institutionnelle, son terrorisme et ses attentats sanglants ?
Malgré tous les souhaits de « bonne et heureuse année », vous aurez aussi en 2017 un climat social catastrophique, une dégringolade institutionnelle accélérée, un terrorisme toujours plus prégnant, des attentats horriblement sanglants, et même infiniment pis… si vous ne travaillez pas plus efficacement à votre conversion !
Les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets.
Les plans gouvernementaux d’alerte et les dispositifs vigipirates renforcés, les états d’urgence mobilisant les forces de l’ordre et les manifestations populaires d’indignation n’y changeront rien ; pas plus que les propos lénifiants (léninifiants ?) des « curés » bisounours et œcuménisant ; pas davantage que les discours « fermes et résolus » des politiques, qu’ils soient de droite, de gauche, d’extrême centre, de l’infanterie, de la cavalerie ou de la marine (à voile et à vapeur)…
La seule, l’unique manière de faire en sorte qu’il n’y ait « plus jamais ça » réside dans la conversion profonde et continue des coeurs, des intelligences, des esprits, et des âmes.
Voilà pourquoi, à l’occasion de cette nouvelle année 2017, je vous souhaite de n’avoir plus d’illusions, mais – tout au contraire – je vous souhaite par-dessus tout d’avoir les yeux grands ouverts sur la réalité, afin d’entrer dans le réalisme des conversions qui s’imposent.
Je ne vous souhaite pas de n’avoir pas de problèmes, mais je vous souhaite d’avoir la gnaque pour leur rentrer dedans et les combattre de la bonne manière.
Je ne vous souhaite pas des petits bonheurs de bourgeois bornés à leurs horizons bien cosy, mais je vous souhaite l’enthousiasme guerrier des chevaliers de jadis quand ils se préparaient aux mêlées sanglantes.
Je ne vous souhaite pas des espoirs de bonheur se limitant aux horizons du boulot, de la santé et de la paye mensuelle, pour vous et vos proches, mais je vous souhaite des espérances vraiment surnaturelles qui transfigurent le quotidien.
Je ne vous souhaite pas l’absence de souffrances (ce qui est le propre des corps anesthésiés), mais je vous souhaite des capacités de générosité jusqu’au sacrifice, pour porter la Croix et faire de vos vies offertes – voire sacrifiées – des instruments de Rédemption !
Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur