Archive pour la catégorie 'Lectures & relectures'

2022-95. Les morts spirituels.

15ème dimanche après la Pentecôte :
Péricope évangélique : Luc, VII, 11-15.

Sermon XCVIII
de
notre Bienheureux Père Saint Augustin
sur
l’Evangile de la résurrection du fils de la veuve de Naïm

Sacristie de la cathédrale Saint-Louis Versailles - résurrection du fils de la veuve de Naïm - Jean Jouvenet (1708)

Jean Jouvenet : résurrection du fils de la veuve de Naïm (1708)
[sacristie de la cathédrale Saint-Louis, Versailles]

Résumé : Tous les miracles de Notre-Seigneur ont un sens caché que tous malheureusement ne comprennent pas, et si de toutes les nombreuses résurrections qu’Il a opérées durant le cours de Sa vie il n’est fait mention que de trois dans l’Évangile, c’est parce que ces trois résurrections sont une image de la résurrection spirituelle de tous les pécheurs.
Quelques-uns en effet n’ont fait que consentir intérieurement au péché ; d’autres ont uni l’action extérieure au consentement ; d’autres enfin sont écrasés sous le poids des habitudes coupables. Les premiers sont représentés par la fille du chef de la synagogue, que Jésus ressuscita dans la chambre même où elle venait d’expirer ; les seconds par le fils de la veuve de Naïm, qui était déjà sorti de sa demeure et que l’on portait en terre ; les troisièmes enfin, par Lazare, déjà couvert de la pierre sépulcrale, et enseveli depuis quatre jours. Ces quatre jours signifient les quatre degrés par lesquels on descend dans le tombeau des habitudes coupables.

   §1. Les miracles de Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ font des impressions, mais des impressions bien diverses, sur tous ceux qui en entendent le récit et qui y ajoutent foi. Les uns s’étonnent de ces prodiges corporels, mais sans y voir rien de plus grand ; d’autres, au contraire, contemplent avec plus d’admiration encore dans les âmes les merveilles qu’ils voient se produire dans les corps. Le Seigneur ne dit-Il pas Lui-même : « De même que le Père réveille les morts et leur rend la vie ; ainsi le Fils donne la vie à qui Il veut » (Jean V, 21) ? Ce n’est pas que le Fils ressuscite des morts que ne ressuscite point le Père ; le Père et le Fils ressuscitent les mêmes puisque le Père fait tout par le Fils ; mais c’est pour le chrétien une preuve indubitable qu’aujourd’hui encore Il ressuscite des morts. Mais, hélas ! si chacun a des yeux pour voir des morts ressusciter à la manière dont est ressuscité le fils de la veuve dont il vient d’être question dans l’Evangile, il n’y a pour voir les résurrections du cœur que ceux dont le cœur est ressuscité déjà. Il est plus grand de ressusciter pour vivre toujours, que de ressusciter pour mourir de nouveau.

   §2. Si la résurrection de ce jeune homme comble de joie la veuve, sa mère ; notre mère la Sainte Eglise se réjouit aussi en voyant chaque jour des hommes ressusciter spirituellement. L’un était mort de corps ; les autres l’étaient d’esprit. On pleurait visiblement la mort visible du premier ; on ne s’occupait, on ne s’apercevait même pas de la mort invisible des derniers. Mais quelqu’un connaissait ces morts, Il s’occupa d’eux ; et heureusement, Celui qui seul les connaissait, pouvait les rappeler à la vie. Si en effet le Seigneur n’était venu pour ressusciter ces morts, l’Apôtre ne dirait pas : « Lève-toi, ô toi qui dors ; lève-toi d’entre les morts et le Christ t’éclairera » (Eph. V, 14).
Quand tu entends ces mots : « Lève-toi, ô toi qui dors », tu te figures simplement un homme endormi ; mais ces autres mots : « Lève-toi d’entre les morts », doivent te faire entendre qu’il est réellement question d’un mort. Des morts, même ordinaires, ne dit-on pas qu’il dorment ? Oui, pour Celui qui peut les ranimer ils ne sont qu’endormis. Un mort est pour toi un mort, car il ne s’éveille point quoique tu fasses pour le secouer, pour le pincer, pour le mettre en pièces. Mais pour le Christ qui lui dit : « Lève-toi », ce jeune homme était simplement endormi, puisqu’il se leva aussitôt. Nul n’éveille aussi facilement un homme dans son lit, que le Christ ne tire un mort du tombeau.

   §3. L’Ecriture ne nous parle que de trois morts visibles ressuscités par le Christ.
Il est certain qu’il a ressuscité par milliers des morts invisibles ; mais qui sait combien Il en a ressuscités de visibles ? Car tout ce qu’il a fait n’est pas écrit. « Jésus a fait beaucoup d’autres choses, dit Jean en termes formels ; si elles étaient écrites, je ne pense pas que le monde entier pût contenir les livres qu’il faudrait composer » (Jean XXI, 27). Il est donc sûr que le Sauveur a ressuscité beaucoup d’autres morts ; mais ce n’est pas sans motif qu’il n’est fait mention que de trois.
Notre-Seigneur Jésus-Christ, en effet, voulait qu’on vît encore un sens spirituel dans ce qu’Il faisait sur les corps. Il ne faisait pas des miracles pour faire des miracles ; Il prétendait que, admirables à l’oeil, Ses œuvres fussent une instruction pour l’esprit. Un homme voit des caractères sur un livre magnifiquement écrit, mais il ne sait lire ; il loue l’adresse du copiste, il admire la beauté des traits, mais il en ignore la destination et le sens ; ses yeux s’extasient ainsi devant ce que ne comprend pas son esprit. Un autre au contraire admire et comprend, car il ne voit pas seulement ce que tous peuvent voir ; il sait lire encore, ce que ne sait le premier qui n’a point appris. Ainsi parmi les témoins des miracles du Christ, il y en eut qui ne saisissaient point ce qu’ils signifiaient, ce qu’ils révélaient en quelque sorte à l’intelligence ; ceux-là ne les admiraient que comme des faits extérieurs ; mais il y en eut d’autres qui en comprenaient le sens tout en les admirant, et c’est à ceux-ci que nous devons ressembler dans l’école du Sauveur.
Si l’on dit en effet qu’Il a fait des miracles pour faire des miracles, on peut avancer également qu’en cherchant à cueillir des figues sur le figuier, il ignorait que ce n’en était pas la saison. L’Evangéliste dit positivement que ce n’était pas le moment des figues ; le Sauveur toutefois en cherchait sur cet arbre pour apaiser Sa faim. Mais quoi ! le Christ ignorait-Il ce que savait un paysan ? Le Créateur de ces arbres méconnaissait-Il ce que savait le jardinier ? Il faut donc reconnaître qu’en cherchant des fruits sur cet arbre pour apaiser Sa faim, Il voulait faire entendre qu’Il avait faim d’autre chose et qu’Il cherchait une autre espèce de fruits. On Le vit de plus maudire ce figuier qu’Il trouva couvert de feuilles mais sans aucun fruit, et cet arbre se dessécha. Or comment avait-il démérité en ne portant pas de fruits ? (cf. Matth. XXI, 18-19). Quel crime peut commettre un arbre en demeurant stérile ? Ah ! c’est qu’il est des hommes dont la stérilité est volontaire, et la volonté les rendant féconds, ils sont coupables de ne pas l’être. Tels étaient les Juifs ; arbres chargés de feuilles et dénués de fruits, ils se vantaient de posséder la loi sans en faire les oeuvres.
J’ai voulu prouver, par ces développements, que Jésus-Christ Notre-Seigneur faisait des miracles pour nous instruire ; Il ne les donnait pas seulement comme des œuvres merveilleuses, magnifiques et divines, Il voulait encore nous donner par eux quelques leçons.

   §4. Qu’a-t-Il donc prétendu nous enseigner par les trois morts qu’Il a ressuscités ?
Il a ressuscité d’abord la fille du prince de synagogue qui Le priait de venir la délivrer de sa maladie. Or, lorsqu’Il y allait, on vint annoncer qu’elle était morte, et comme pour Lui épargner des fatigues désormais inutiles on disait au père : « Ta fille est morte, pourquoi tourmenter encore le Maître ? » Mais le Sauveur poursuivit Sa route : « Ne crains pas, dit-Il au père, crois seulement ». Il arriva à la maison, et trouvant déjà tout préparé pour 
l’accomplissement du devoir des funérailles : «Ne pleurez pas, dit-Il, car cette jeune fille n’est pas morte, elle dort ». Il disait vrai : cette fille était endormie, mais pour Celui-là seulement qui pouvait l’éveiller. Il l’éveilla et la rendit pleine de vie à ses parents (Marc, V, 22-43).
Il ressuscita aussi ce jeune homme, fils de veuve, qui nous a donné occasion de faire à votre charité ces réflexions, que le Sauveur Lui-même daigne nous inspirer. On vient de vous rappeler comment eut lieu cette résurrection. Le Sauveur approchait d’une ville : Il rencontra un convoi qui emportait un mort, et on était déjà sorti de la porte. Touché de compassion à la vue des larmes que répandait cette pauvre mère, déjà veuve et privée maintenant de son fils unique, Il fit ce que vous savez : « Jeune homme, dit-Il, Je te le commande, lève-toi ». Ce mort se leva, il se mit à parler, et Jésus le rendit à sa mère.
Il ressuscita enfin Lazare, dans le tombeau même. Les disciples savaient Lazare malade, et comme Jésus S’entretenait avec eux et qu’Il aimait Lazare : « Lazare, notre ami, dort », dit-il. Mais eux, considérant que le sommeil serait bon au malade : « Seigneur, répliquèrent-ils, s’il dort, il est guéri ».
« Je vous le déclare, reprit alors le Sauveur plus clairement, Lazare, notre ami, est mort » (Jean XI, 11-44). Ces deux expressions sont justes : Pour vous il est mort, et pour moi il est seulement endormi.

   §5. Ces trois mots désignent trois espèces de pécheurs, ressuscités par le Christ, maintenant encore.
La fille du chef de Synagogue était restée dans la maison de son père, elle n’en avait pas encore été tirée ni emportée publiquement, C’est dans l’intérieur de la demeure qu’elle fut ressuscitée et rendue vivante à ses parents.
Quant au jeune homme, il n’était plus dans sa maison, et pourtant il n’était pas encore dans le tombeau ; il avait quitté le foyer, mais il n’était pas encore déposé dans la terre ; et la même puissance qui avait ressuscité la jeune fille encore sur son lit, ressuscita ce jeune homme qu’on avait sorti du sien, sans l’avoir encore inhumé.
Une troisième chose restait à faire, c’était de ressusciter un mort dans le tombeau : Jésus fit ce miracle sur Lazare.
Venons à l’application.
Il y a des hommes qui ont le péché dans le cœur, quoiqu’il ne paraisse pas encore dans leur conduite. Ainsi quelqu’un ressent un mouvement de convoitise, et comme le Seigneur dit Lui-même : « Quiconque aura 
regardé une femme pour la convoiter, a déjà commis l’adultère dans son cœur » (Matth. V, 28) ; quoique le corps ne l’ait pas approché, dès que le cœur consent au crime, il est mort ; mais ce mort reste encore dans sa demeure, et on ne l’a point emporté. Or, il arrive quelquefois, nous le savons et plusieurs l’expérimentent chaque jour, que ce mort soit frappé en entendant la parole de Dieu, comme si le Seigneur lui disait en personne « Lève-toi ». Il condamne alors le consentement qu’il a donné au mal, et ne respire plus que salut et justice. C’est le mort qui ressuscite dans sa demeure, c’est un cœur qui recouvre la vie dans le sanctuaire de sa conscience, et cette résurrection de l’âme qui s’opère en secret, se produit en quelque sorte au foyer domestique.
Il en est d’autres qui après avoir consenti au mal l’accomplissent. Ne dirait-on pas qu’ils emportent un mort, et qu’ils montrent en public ce qui était dans le secret ? Faut-il, toutefois, désespérer d’eux ? Mais ce jeune homme n’a-t-il pas aussi entendu cette parole : « Lève-toi, je te le commande » ? N’a-t-il pas, lui aussi, été rendu à sa mère ? C’est ainsi que même après avoir commis le crime, on ressuscite à la voix du Christ, on revient à la vie, lorsqu’on se laisse toucher et ébranler par la parole de vérité. On a pu faire un pas de plus vers l’abîme, mais on ne saurait périr éternellement.
Il en est enfin qui, en taisant le mal, s’enchaînent dans des habitudes perverses ; ces habitudes ne leur laissent déjà plus voir la malice de leurs actes ; ils justifient le mal qu’ils font, et s’irritent quand on les reprend, comme ces Sodomites qui répondaient au juste censeur de leurs dispositions trop perverses : « Tu es venu chercher ici un asile, et non pas nous donner des lois » (Gen. XIX, 9). Tel était donc le honteux empire de la coutume, que la débauche leur paraissait vertu et qu’en la leur interdisant on était plutôt blâmé qu’en s’y abandonnant. Ceux qui sont ainsi accablés sous le poids de la coutume, sont déjà comme inhumés ; il y a plus, mes frères, on peut même dire d’eux, comme de Lazare, que déjà ils sentent mauvais. La pierre qui pèse sur le sépulcre est comme la tyrannie, de l’habitude qui pèse sur l’âme, sans lui permettre, ni de se relever, ni de respirer.

   §6. Il est dit de Lazare : « C’est un mort de quatre jours ». C’est que réellement il y a comme quatre degrés qui conduisent l’âme à cette affreuse habitude dont je vous entretiens.
Le premier est comme un sentiment de plaisir qu’éprouve le cœur ; le second est le consentement ; l’action, le troisième ; et l’habitude enfin, 
le quatrième. De fait, il est des hommes qui rejettent si vigoureusement les pensées mauvaises qui se présentent à leur esprit, qu’ils n’y sentent aucune délectation. Il en est qui y goûtent du plaisir, mais sans consentement : ce n’est pas encore la mort, c’en est toutefois comme le commencement. Mais si au plaisir vient se joindre le consentement, on est coupable. Après avoir consenti au mal, on le commet ; puis le péché devient habitude ; on est alors comme dans un état désespéré, on est « un mort de quatre jours, sentant déjà mauvais ». C’est alors que vient le Seigneur. Tout Lui est facile, mais Il veut te faire sentir combien pour toi la résurrection est difficile. Il frémit en Lui-même, Il montre combien il faut de cris et de reproches pour ébranler une habitude invétérée. A Sa voix, néanmoins, se rompent les chaînes de la tyrannie, les puissances de l’enfer tremblent, Lazare revient à la vie. Le Seigneur, en effet, délivre de l’habitude perverse les morts même de quatre jours. Quand le Christ voulait le ressusciter, Lazare après ses quatre jours était-il pour Lui autre chose qu’un homme endormi ?
Mais que dit-Il ? Considérez les circonstances de cette résurrection.
Lazare sortit vivant du tombeau, mais sans pouvoir marcher. « Défiez-le, dit alors le Seigneur à Ses disciples, et laissez-le aller ». Ainsi le Sauveur ressuscita ce mort, et les disciples rompirent ses liens. Reconnaissez donc que la Majesté divine se réserve quelque chose dans cette résurrection. On est plongé dans une mauvaise habitude et la parole de vérité adresse de sévères reproches. Mais combien ne les entendent pas ! Qui donc agit intérieurement dans ceux qui les entendent ? Qui leur souffle la vie dans l’âme ? Qui les délivre de cette mort secrète et leur donne cette secrète vie ? N’est-il par vrai qu’après les reproches et les réprimandes le pécheur est livré à ses pensées et qu’il commence à se dire combien est malheureuse la vie qu’il mène, combien est déplorable l’habitude perverse qui le tyrannise ? C’est alors que honteux de lui-même il entreprend de changer de conduite. N’est-il pas alors ressuscité ? Il a recouvré la vie, puisque ses désordres lui déplaisent. Mais avec ce commencement de vie nouvelle, il ne saurait marcher ; il est retenu par les liens de ses fautes et il a besoin qu’on le délie et qu’on le laisse aller. C’est la fonction dont le Sauveur a chargé Ses disciples en leur disant : « Ce que vous délierez sur la terre, sera aussi délié dans le ciel » (Matth. XVIII, 18).

   §7. Ces réflexions, mes bien-aimés, doivent porter ceux qui ont la vie à l’entretenir en eux, et ceux qui ne l’ont pas à la recouvrer.
Le péché n’est-il que conçu dans le coeur sans s’être encore révélé par aucun acte ? Qu’on se repente, qu’on redresse ses idées. O mort, lève-toi dans le sanctuaire de la conscience.
A-t-on accompli déjà un dessein mauvais ? On ne doit pas désespérer non plus. Si le mort n’est pas ressuscité dans sa demeure, qu’il ressuscite quand il est sorti. Qu’il se repente de ses actes et recouvre au plus tôt la vie. O mort, ne descends pas dans les profondeurs du tombeau, ne te laisse pas recouvrir par la 
pierre sépulcrale de l’habitude.
Mais n’ai-je pas devant moi un malheureux déjà chargé de la froide et dure pierre, déjà accablé sous le poids de l’accoutumance, mort de quatre jours qui exhale l’infection ? Que lui non plus ne désespère pas. O mort, tu es enseveli bien bas, mais le Christ est grand. Il sait de Sa voix puissante entrouvrir les pierres tumulaires, rendre par Lui-même la vie intérieure aux morts et les faire délier par Ses disciples. O morts, faites donc pénitence, car en ressuscitant après quatre jours, Lazare ne conserva plus rien de l’infection première.
Ainsi donc, vivez, vous qui vivez, et vous qui êtes morts, quelle que soit celle de ces trois classes de morts où vous vous reconnaissiez, empressez-vous de ressusciter au plus tôt !

Jean Jouvenet - résurrection de Lazare (1706) - musée du Louvre

Jean Jouvenet : la résurrection de Lazare (1706)
[musée du Louvre]

2022-94. « Les catholiques vous regardent comme le réparateur de la foi ancienne, et tous les hérétiques vous détestent. »

4 septembre,
L’octave de notre Bienheureux Père Saint Augustin (double majeur) ;
Mémoire de Sainte Rosalie la Palermitaine, vierge, née du sang de France ;
Anniversaire du rappel à Dieu de la Vénérable Anne-Marie de Jésus Crucifié (cf. > ici).

   Au jour octave de Saint Augustin, nous vous proposons un texte court mais d’une grande densité qui constitue l’un des plus beaux parmi les éloges de notre Bienheureux Père, puisqu’il est de la plume de Saint Jérôme lui-même : ce grand défenseur de la vérité que fut le moine pugnace de Bethléem, rendant hommage à cet autre indéfectible défenseur de la vérité que fut le Docteur d’Hippone, pouvions-nous rêver mieux ?

Statue de Saint Augustin - oratoire du Mesnil-Marie

Statue de Saint Augustin dans l’oratoire du Mesnil-Marie

frise

Lettre de Saint Jérôme de Stridon, prêtre,
à
notre Bienheureux Père Saint Augustin
(en l’an 418)

   « J’ai toujours eu pour votre béatitude le respect qui lui est dû, me faisant un plaisir et un devoir d’aimer et de respecter une personne dont le cœur est la demeure de Jésus-Christ.
Mais aujourd’hui ces sentiments d’estime et de vénération que j’ai pour vous sont devenus encore plus vifs qu’ils n’étaient (si néanmoins cela est possible), de telle sorte que je ne puis être un moment sans parler de vous, et sans faire l’éloge de votre zèle et de la fermeté avec laquelle vous vous êtes opposé aux pernicieux desseins des ennemis de l’Eglise. Vous avez mieux aimé, autant qu’il a été en votre pouvoir, vous sauver seul du milieu de Sodome que de demeurer avec ceux qui périssaient, et de vous voir enveloppé dans leur ruine.
Fasse le ciel que ce beau zèle que vous avez pour les intérêts de Jésus-Christ, ne se refroidisse jamais !
Tout Rome vous applaudit. Les catholiques vous regardent comme le réparateur de la foi ancienne, et ce qui relève encore davantage votre gloire, tous les hérétiques vous détestent.
Ils ne me haïssent pas moins, et s’ils n’ont pas le pouvoir de nous tuer l’un et l’autre, ils en ont du moins la volonté.
Je prie Notre-Seigneur Jésus-Christ qu’il vous conserve, et je conjure votre béatitude de ne me point oublier ».

frise

Saint Augustin - canivet XIXe siècle

2022-93. Méditation sur l’Evangile de la guérison des dix lépreux (treizième dimanche après la Pentecôte).

13ème dimanche après la Pentecôte.

Méditation sur l’Evangile de la guérison des dix lépreux

(Luc. XVII, 11-19)

Guérison des dix lépreux - détail la supplication

   Présence de Dieu :
« O Jésus Sauveur, j’ai besoin de Vous ! Guérissez-moi ! Ayez pitié de moi ! »

   Méditation :

1 – Dans le cycle des dimanches qui suivent la Pentecôte, l’Eglise continue à nous montrer, tantôt sous un aspect, tantôt sous un autre, l’œuvre miséricordieuse de Jésus envers nos âmes.
Il y a quinze jours, elle nous la montrait esquissée dans la guérison du sourd-muet ; dimanche dernier, dans l’acte miséricordieux du bon Samaritain, et aujourd’hui, dans la scène émouvante des dix lépreux guéris par le Seigneur.
De cette manière, l’Eglise veut nous empêcher de nous endormir, de perdre la conscience de notre misère et du besoin immense que nous avons continuellement de l’œuvre rédemptrice de Jésus. En même temps, elle veut nous faire sentir que cette œuvre est toujours en acte, que nous vivons sous son influence chaque jour et à chaque moment.
Le passage évangélique choisi pour la Messe de ce jour, a une efficacité toute particulière pour mettre en évidence l’aspect central de la Rédemption : la guérison de nos âmes de la lèpre du péché.
Dès l’antiquité, la lèpre a été considérée comme la figure la plus propre à nous donner une idée de la laideur du péché. Il serait difficile, en effet, d’imaginer quelque chose de plus horrible, de plus rebutant. Et cependant, alors que la lèpre du corps est réellement redoutée, quelle indifférence, quelle désinvolture, même parmi les chrétiens, envers la lèpre de l’âme. Comme nous sommes éloignés de ce sentiment profond et réaliste qui animait les saints à l’égard de l’offense de Dieu.
« Oh ! s’exclame Sainte Thérèse d’Avila, comme nous comprenons mal que le péché est une guerre ouverte, une guerre de tous nos sens et de toutes les puissances de notre âme, contre Dieu ! Celui qui est le plus puissant est celui qui ourdit les plus noires trahisons contre son souverain Roi » (Exclamations XIV).
Un des fruits de l’Evangile d’aujourd’hui, est précisément celui de réveiller en nous l’horreur du péché, d’exciter dans nos âmes un repentir vif et efficace pour les fautes commises, et un sentiment d’humilité profonde dans l’aveu de notre misère.
Allons nous aussi, avec les dix lépreux, à la rencontre du Seigneur, et crions : « Jésus, Maître, ayez pitié de nous ! »

Guérison des dix lépreux

2 – Dans l’Evangile, nous trouvons aussi les remèdes au péché.
Avant tout, une humilité sincère qui reconnaît sa misère personnelle ; mais l’humilité ne suffit pas, il faut qu’elle soit accompagnée d’un recours confiant à Dieu.
Conscients de leur état pitoyable, les pauvres lépreux ont mis leur confiance en Jésus en Lui adressant leur invocation pleine de foi : ce fut le premier pas vers la guérison. Certaines âmes pleurent leurs misères, s’en affligent, mais n’en guérissent pas, parce qu’elles ne savent pas recourir en toute confiance à Jésus, l’unique Médecin capable de les guérir. Les péchés commis les retiennent, elles n’osent presque pas approcher de Lui, ni se confier en Sa miséricorde. Ces âmes n’ont pas encore compris que c’est précisément parce que nous sommes pécheurs que nous devons aller à Jésus et que « ce ne sont pas les bien portants qui ont besoin du médecin mais les malades » (Luc. V, 31).
Le divin Maître n’a pas guéri directement les lépreux, mais les a renvoyés aux prêtres : « Allez vous montrer aux prêtres ». Ils ont obéi sans discuter, sans douter et, « comme ils y allaient, les voilà guéris ». Jésus agit de même à notre égard : c’est toujours Lui qui guérit, mais ordinairement, Il veut le faire par l’intermédiaire de Ses ministres.
Certaines âmes n’ont pas suffisamment foi dans la parole et l’œuvre du ministre de Dieu, elles ne croient pas assez à l’efficacité des sacrements, de l’absolution sacramentelle et vivent, dès lors, dans de continuelles angoisses.
Lorsqu’une âme a exposé avec sincérité l’état de sa conscience, c’est-à-dire qu’elle n’a eu aucune intention de tromper, elle doit demeurer en paix et s’en remettre pleinement au jugement du prêtre. En ce cas, douter de la parole du ministre de Dieu, de l’absolution reçue, c’est douter de Jésus Lui-même, car c’est Lui qui a décidé d’agir en nous moyennant Son représentant.
Des dix lépreux guéris, un seul a senti le devoir de revenir pour exprimer sa reconnaissance au Seigneur. « Heureuse l’âme, commente Saint Bernard, qui se tourne vers Dieu à chaque don de Sa grâce, vers Celui qui répond à notre gratitude pour les bienfaits reçus, par de nouveaux bienfaits. Ce qui nous empêche d’avancer dans la vie chrétienne, c’est l’ingratitude, car Dieu estime comme perdu ce que nous recevons sans reconnaissance, et Il S’abstient de nous accorder de nouvelles grâces ».

Guérison des dix lépreux - détail la reconnaissance

   Colloque :

« O Seigneur, Médecin des âmes, guérissez-moi, afin que je reconnaisse Vos dons, ô Santé de mon âme, et Vous remercie de tout mon cœur, des bienfaits dont Vous m’avez nourri dès ma jeunesse et continuerez à me nourrir jusque dans un âge avancé. Dans Votre bonté, ne m’abandonnez pas, je Vous prie. Vous m’avez créé lorsque je n’existais pas ; Vous avez voulu me racheter lorsque je périssais et étais mort ; Vous êtes descendu jusqu’à la mort et avez assumé la mortalité ; Roi, Vous êtes venu au serviteur pour le racheter et Vous Vous êtes donné Vous-même, afin que je vive ; Vous avez subi et vaincu la mort, et en Vous humiliant, Vous m’avez rétabli.
Je périssais, j’étais éloigné, plongé dans le péché ; Vous êtes venu à moi pour me racheter. Vous m’avez tant aimé que Vous avez donné Votre Sang pour moi. Vous m’avez aimé, Seigneur, plus que Vous-même, puisque Vous avez voulu mourir pour moi. A un prix si élevé Vous m’avez ramené de l’exil, délivré de la servitude, retiré du supplice, appelé de Votre Nom, marqué de Votre Sang, afin que Votre souvenir fût toujours auprès de moi et qu’Il ne Se retirât jamais de mon cœur Celui qui pour mon amour ne S’est pas retiré de la croix. Vous m’avez oint de cette huile avec laquelle Vous avez été oint, afin que par Vous, ô Christ, je sois appelé chrétien. Votre grâce et Votre miséricorde m’ont ainsi toujours devancé. Souvent, Vous m’avez délivré de dangers graves et nombreux, ô mon Libérateur ; lorsque j’errais, Vous m’avez reconduit sur la voie droite ; quand je gisais dans l’ignorance, Vous m’avez enseigné ; corrigé, quand je péchais ; consolé quand j’étais triste ; réconforté quand je désespérais ; relevé quand je tombais ; soutenu lorsque j’étais sur pied ; guidé lorsque je cheminais ; reçu quand je suis venu ; gardé quand je dormais ; exaucé quand je Vous invoquais » (Saint Augustin). 

Guérison des dix lépreux - détail le Christ médecin des âmes et des corps

Voir aussi :
- La lèpre est la figure des fausses doctrines > ici

2022-92. Soyons des Mousquetaires spirituels !

Mercredi 24 août 2022,
139ème anniversaire de la sainte mort de Henri V, « Comte de Chambord ».

Domine salvum fac Regem - fresque au dessus de l'orgue de la chapelle royale à Versailles

« Domine, salvum fac Regem ! »
au-dessus de l’orgue à la voûte de l’abside de la Chapelle Royale de Versailles

Blason de la Confrérie Royale

2015 – 25 août – 2022

septième anniversaire de la fondation
de la
Confrérie Royale

Bien chers membres et amis de la Confrérie Royale,

   Ce 25 août 2022 marque donc le septième anniversaire de la fondation de notre si chère Confrérie Royale : l’usage associe au septième anniversaire des personnes l’expression d’ « âge de raison », et j’espère qu’il en est bien ainsi pour cette Confrérie dont les membres s’engagent solennellement, et certains par un vœu – ce qui est loin d’être anodin – à prier quotidiennement, et plusieurs fois par jour, pour notre Roi légitime, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XX.

   Qu’il me soit permis, en ma qualité de cofondateur de la Confrérie (mais ce titre de « cofondateur » n’est pas un motif d’orgueil, car nous avons bien conscience que nous avons été mus et poussés par une inspiration et une détermination qui ne sont pas de notre fait, mais nous poussent à n’être toujours davantage que d’humbles et dociles instruments entre les mains de la divine Providence), de vous renvoyer à l’annonce que j’en avais faite dans le modeste « Blogue du Mesnil-Marie » le 25 août 2015, et de vous inviter avec une certaine insistance à relire la présentation de Monsieur l’Abbé Louis de Saint-Taurin qui y était publiée et qui a marqué le commencement de cette aventure (voir > ici).
   Il est important que nous revenions souvent aux fondamentaux de ce qui nous anime et que nous en ravivions la ferveur et l’enthousiasme des débuts !
   Il est important que nous nous efforcions de lutter, de toutes les manières possibles, contre les habitudes qui ont tendance à se transformer en ronronnements affadis et en routines mortifères !
   Il ne serait pas superflu qu’à l’occasion de ce septième anniversaire de notre fondation, chacun des membres de la Confrérie, dans son cœur, en présence de Dieu Trois Fois Saint, en présence de notre très douce Mère et Reine – Notre-Dame de l’Assomption -, et en présence des Saints protecteurs de la France, renouvelle son engagement, et prie pour qu’en lui le sel ne s’affadisse pas, afin de ne pas mériter d’être jeté dehors et foulé aux pieds par les passants (cf. Matth. V, 13).

   Je reviens maintenant sur le mot principal qui se trouve dans l’expressions « âge de raison » : notre attachement à la Monarchie capétienne traditionnelle de droit divin, et à Celui qui aujourd’hui en incarne les Principes, c’est-à-dire l’Aîné des Capétiens, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, n’est pas un attachement de sensiblerie ni de sentiment ; il est fondé dans des faits solides, attestés par l’histoire la plus certaine, et dans une logique rationnelle imparable qui découle de ces événements, qui ne sont pas de fumeuses légendes.

   Quels sont ces événements ?
-         C’est la fondation de la Royauté franque indissociablement unie à la foi catholique romaine, en la personne de Clovis, entouré de saints et de circonstances où il est impossible de ne pas voir le doigt de Dieu : Sainte Geneviève et Sainte Clotilde, Saint Remi et Saint Vaast, la miraculeuse victoire de Tolbiac et le don surnaturel du Chrême céleste apporté par une colombe qui n’était pas de la terre, pour ne citer que les principaux.
-         C’est la manière dont Dieu a suscité tout au long de l’histoire des deux premières races de nos Rois, des nuées de saints, dont la prière et les sacrifices ont, malgré les infidélités et les péchés malheureusement liés à nos vies humaines grevées par l’héritage d’Adam, enraciné en profondeur la foi chrétienne et sa pratique assidue dans ce Royaume des Lys.
-         C’est enfin l’aboutissement et la plénitude apportées par les Capétiens qui ont fait de la Royauté franque la plus achevée, la plus équilibrée, la plus sage et la plus rayonnante de toutes les monarchies, montrée en exemple et soutenue par les exhortations des plus grands hommes de Dieu.
-         C’est la geste johannique qui vint, en un temps de crise et de désarroi profond, faire briller au sommet du firmament les principes de la Légitimité, leur conférant un éclat incomparable pour la suite des siècles !
-         C’est aussi, a contrario, l’acharnement de tout ce qu’il y a d’impie et de révolté contre l’ordre divin pour détruire cette Monarchie capétienne de droit divin dont la fondation n’appartient pas aux hommes mais à Dieu : la révolution, par ses principes, par ses hommes, par ses actes, et par ce qu’elle a mis en œuvre depuis la fin du XVIIIème siècle et jusqu’à ces jours que nous vivons, prouve de manière évidente combien cette Royauté qu’elle abhorre est de Dieu ! Car ce que la révolution a combattu, en 1789 et en 1830, et depuis à travers toutes les institutions républicaines, ce ne sont pas les imperfections inhérentes à toute société terrestre, mais bien ce que la Monarchie traditionnelle de droit divin avait de plus pur et de plus saint, pour y substituer les faux principes de l’ange révolté et de ses suppôts !

   Les légitimistes d’aujourd’hui ne sont pas des irréalistes perdus dans d’évanescentes rêveries, ne sont pas d’inconsistants nostalgiques des perruques poudrées et des chaises à porteurs, ne sont pas d’inconséquents déconnectés du monde où la Providence a permis qu’ils naquissent : leurs convictions sont enracinées dans ce qu’il y a de plus raisonnable au regard de l’histoire et du plan de Dieu, leur action est ce qui est aujourd’hui de plus conforme à la raison quand on veut bien se donner la peine d’être pleinement cohérent.

   Puisse la lumière immarcescible de cette raison divine et royale non seulement habiter en nous, mais rayonner à travers nous, par notre vie de cohérence totale avec les principes de la Royauté traditionnelle auxquels nous adhérons de tout notre cœur, de toute notre âme et de tout notre esprit !

   Nous sommes indubitablement à une heure grave, très grave, pour la France, pour l’Eglise, pour l’humanité tout entière.
C’est l’heure de la puissance des ténèbres.
C’est l’heure où les forces du mal sont coalisées dans un assaut peut-être jamais vu encore dans l’histoire humaine pour achever le triomphe de la révolution.
C’est l’heure où ceux qui veulent être du côté de Dieu et de Sa loi, du côté de Ses desseins de salut, du côté de Ses projets miséricordieusement grandioses sur la France à travers l’institution et la conservation de sa Royauté sacrée, ne doivent pas s’assoupir, mais redoubler de générosité et de zèle, redoubler de ferveur et de don d’eux-mêmes, redoubler de vigilance et d’ardeur au combat !

   Il se trouve que cette année 2022 est aussi celle du quatrième centenaire de la création, par SM le Roi Louis XIII, de la Compagnie des Mousquetaires du Roi.
Je ne vais pas entreprendre ici une histoire, même résumée, de ce que fut ce corps d’élite. Nous essaierons toutefois de nous extraire des fantaisies romanesques par lesquelles le génial Alexandre Dumas a conféré une aura légendaire à ces soldats, en prenant malheureusement des libertés coupables avec l’histoire, pour nous attacher à la réalité :

-         Les Mousquetaires étaient un corps d’élite : nous devons aspirer à l’être nous aussi !
-         Les Mousquetaires étaient prioritairement au service de la Personne auguste du Souverain : nous devons l’être aussi !
-         Les Mousquetaires étaient réputés pour leur intrépidité, leur vaillance, leur courage : nous devons l’être aussi !
-         Les Mousquetaires ne se ménageaient pas : nous ne le devons pas non plus !
-         Les Mousquetaires se sont distingués en de nombreuses batailles : distinguons-nous aujourd’hui dans les batailles qu’il faut soutenir pour Dieu et pour le Roi !
-         Les Mousquetaires étaient des hommes au mérite reconnu : que nos exemples de fidélité et d’exactitude dans l’accomplissement de nos devoirs de bons et authentiques catholiques, et de loyaux sujets de Sa Majesté soient notre meilleure recommandation !

   Oui, chers membres de la Confrérie Royale, soyons aujourd’hui, et chaque jour, ces Mousquetaires spirituels qui luttent par la prière, la pratique fervente des sacrements et l’usage assidu des sacramentaux que la Sainte Eglise met à notre disposition, et qui tiennent à distance de la Personne aimée de notre Souverain légitime, tout ce qui cherche à Lui nuire et à entraver Son action.

Domine, salvum fac Regem nostrum Ludovicum !
Domine, salvum fac Regem,
et exaudi nos in die qua invocaverimus Te !

   Je vous souhaite à tous un joyeux et saint anniversaire, puisque nous sommes les membres du corps spirituel de la Confrérie Royale,

Vôtre, in Corde Iesu & Mariae.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

Mousquetaires du Roi

2022-91. « Pour moi, héritier de la longue lignée des Rois de France c’est un devoir d’encourager ceux qui défendent l’histoire, la tradition, la vérité et les valeurs qui sont les leurs… »

Dimanche 21 août 2022,
Onzième dimanche après la Pentecôte ;
Mémoire de Sainte Jeanne-Françoise de Chantal.

frise lys

   Depuis 2019 (cf. > ici et > ici) s’est formé un Comité du souvenir des victimes de la révolution en Midi toulousain qui organise désormais tous les ans une journée commémorative, à Montréjeau, lieu d’une bataille qui marqua la fin de l’insurrection royaliste dans le sud-ouest et fut l’occasion du massacre de plusieurs milliers de royalistes et catholiques.
A l’occasion de cette quatrième journée commémorative, qui a eu lieu hier, samedi 20 août 2022, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté le Roi Louis XX, a adressé un message aux participants dont la teneur, au-delà des organisateurs de la journée commémor
ative de Montréjeau, constitue un chaleureux encouragement à tous ceux qui œuvrent pour rétablir la vérité historique sur la grande révolution, à tous ceux qui résistent à l’esprit de la révolution toujours à l’œuvre de nos jours dans l’institution républicaine, à tous les défenseurs de la tradition catholique et française…

Louis XX

Chers Amis,

   1799-2022, les années n’estompent pas le souvenir du massacre de Montréjeau qui a vu l’assassinat de milliers de braves animés par leur volonté de préserver leur terre et au-delà de sauver leur pays de la folie révolutionnaire. Vos aïeux avaient vu juste. Ils avaient compris que si la France rompait avec sa tradition, rompait avec ses institutions, rompait avec sa foi, une période de troubles et de malheurs pour tous s’en suivrait. 

   Plus de deux siècles après, force est de constater que les ravages causés par la Révolution française sont immenses. La société est ébranlée au plus profond d’elle-même puisque nombre de ses repères ont été peu à peu remis en cause. La France a souvent du mal à se reconnaître dans l’image que certains véhiculent d’elle, car, et peut-être est-ce là le plus grand crime de la Révolution, elle a été forcée de rompre avec son histoire et sa mémoire ; forcée d’oublier se grandeur et sa gloire au risque d’être fragilisée face à ses ennemis ! Les évènements de Montréjeau, en 1799, en sont la preuve puisque durant des dizaines d’années ce massacre a été occulté. Sans doute, pour une part, parce que la France officielle d’alors en avait honte, mais encore plus parce qu’il y avait une volonté de réécrire l’histoire, pour donner raison aux vainqueurs. Travestir l’histoire et la vérité à des fins de propagande !

   Mais la mémoire conservée dans les familles, a fini par ressurgir permettant des journées telles que celle d’aujourd’hui. Des historiens honnêtes avaient dans les dernières décennies, ouvert le chemin à une relecture scientifique et non plus seulement idéologique de la Révolution n’hésitant plus à mentionner aussi ses crimes. Pourtant ce salutaire mouvement n’a pas duré. Au contraire, nous assistons à d’autres travestissements de l’histoire. Depuis quelques années, venu des Etats-Unis, un nouveau danger est apparu, visant toujours à trahir la vérité historique, mais cette fois avec, en plus, la volonté clairement exprimée de gommer l’héritage des siècles. Cela prend des formes diverses mais repose sur le mensonge et l’objectif de taire l’identité de notre pays en le coupant de ses racines. Cette culture de l’oubli est grave puisqu’elle ampute notre pays de la compréhension de sa longue destinée commencée il y a quinze siècles avec le baptême de Clovis.
 
   Heureusement la résistance s’organise. Il y a un peu partout en France de salutaires sursauts et des Français qui continuent à exalter le souvenir des générations qui les ont précédés C’est la société civile qui œuvre en ce sens devant les carences de l’état. L’exemple de la réunion de Montréjeau s’inscrit dans cette volonté. J’en félicite les organisateurs. Les manifestations mémorielles prennent une importance accrue. Il ne s’agit plus seulement d’honorer des morts qui n’ont pas hésité à aller jusqu’au sacrifice pour défendre leurs convictions, mais il s’agit de rappeler ce qu’est la France, son identité, son destin fruit du travail des générations passées qui toutes ont apporté leur pierre à l’édifice.
 
   Pour moi, héritier de la longue lignée des Rois de France c’est un devoir d’encourager ceux qui défendent l’histoire, la tradition, la vérité et les valeurs qui sont les leurs. C’est ainsi, sur des fondements solides, que la France pourra écrire, demain, de nouvelles pages de son histoire.
Ainsi d’ores et déjà, c’est à l’an prochain que je vous donne rendez-vous. Les martyrs de Montréjeau ne sont pas morts en vain. Leur sacrifice nous montre la voie de l’espérance. Continuez ! 

Louis,
Duc d’Anjou

montrejeau affiche 2022

2022-90. Ce n’est qu’après avoir nous-mêmes observé la parole de Dieu que nous avons le droit de l’annoncer à notre prochain.

Onzième dimanche après la Pentecôte ;
Evangile : Marc VII, 31-37.

   C’est dans ses homélies sur le prophète Ezéchiel que le pape Saint Grégoire le Grand a donné un commentaire de la péricope évangélique proclamée à la Sainte Messe de ce onzième dimanche après la Pentecôte dont certains extraits sont donnés à méditer au troisième nocturne des matines de ce jour. Voici, ci-dessous, le passage complet duquel sont tirées les leçons de ce troisième nocturne (cf. Saint Grégoire le Grand, Homélies sur Ezéchiel I, 10 – PL LXXVI, 893-894).

Bartholomeus Breenbergh - la guérison du sourd-muet de la Décapole 1635 - Louvre

La guérison du sourd-muet de la Décapole
(Bartholomeus Breenbergh – 1635 – Musée du Louvre)

frise

Ce n’est qu’après avoir nous-mêmes observé la parole de Dieu
que nous avons le droit de l’annoncer à notre prochain.

§ 1 – La guérison du sourd-muet :

   Il faut noter avec soin que le Seigneur ordonne au prophète [Ezéchiel] d’écouter d’abord Ses paroles et de ne parler qu’ensuite (cf. Ezech. III, 10). En effet, nous écoutons la parole de Dieu si nous l’observons. Et ce n’est qu’après l’avoir nous-mêmes premièrement observée, que nous avons le droit de l’annoncer à notre prochain. C’est ce que nous confirme l’Evangéliste Marc, lorsqu’il nous raconte ce miracle du Seigneur : « On Lui présenta un sourd-muet, en Le priant de lui imposer les mains » (Mc. VII, 32). Il nous décrit ensuite les actes successifs de cette guérison : « Le Seigneur lui mis les doigts dans les oreilles, puis avec un peu de salive, lui toucha la langue. Levant ensuite les yeux vers le ciel, Il soupira et lui dit : Ephpheta, c’est-à-dire : ouvre-toi ! Et aussitôt les oreilles de l’infirme s’ouvrirent, le lien qui retenait sa langue se dénoua et il parlait correctement » (Mc. VII, 33-35).

§ 2 – Les doigts :

   Or pourquoi Dieu, qui a créé toutes choses, a-t-Il voulu, pour guérir ce sourd-muet, lui mettre les doigts dans les oreilles, et lui toucher la langue avec un peu de salive ?
Que figurent les doigts du Rédempteur sinon les dons du Saint-Esprit ?
C’est pourquoi Il dit ailleurs, après avoir chassé un démon : « Si c’est par le doigt de Dieu que J’expulse les démons, c’est donc que le royaume de Dieu commence à se réaliser parmi vous » (cf. Lc, XI, 20). Et comme un autre Evangéliste, à propos de la même scène, Le fait S’exprimer ainsi : « Si c’est par l’Esprit de Dieu que J’expulse les démons, c’est donc que le Royaume de Dieu est déjà venu à vous » (cf. Matth. XII, 28) ; de la comparaison de ces deux passages nous pouvons conclure que l’Esprit est appelé le doigt de Dieu. 

Mettre les doigts dans l’oreille d’un sourd, c’est donc ouvrir son âme à l’obéissance par les dons de l’Esprit-Saint.

§ 3 – La salive :

   Mais que signifie toucher la langue de l’infirme avec un peu de salive ?
La salive qui sort de la bouche du rédempteur, c’est la Sagesse divine que nous recevons dans la parole de Dieu. Car la salive descend de la tête dans la bouche, et lorsque le Christ, qui est cette Sagesse, touche notre langue, Il la dispose promptement à l’office de la prédication.

§ 4 – Un soupir :

   « Et levant les yeux vers le ciel, Il soupira ». Ce n’est pas qu’Il eût besoin de soupirer, puisqu’Il donnait Lui-même ce qu’Il demandait ; mais Il nous apprenait à soupirer vers Celui qui règne dans le ciel, afin qu’Il ouvre nos oreilles par les dons de l’Esprit-Saint, et qu’Il délie notre langue pour la prédication, par la salive de Sa bouche, c’est-à-dire par la science de la parole divine.

§ 5 – « Ouvre-toi » :

    »Jésus dit ensuite : Ephpheta, c’est-à-dire : ouvre-toi ! Et à l’instant même les oreilles de l’infirme s’ouvrirent et le lien qui retenait sa langue se dénoua ».
Il faut ici remarquer que s’il est dit : « Ouvre-toi », c’est parce que ses oreilles étaient fermées. Mais une fois les oreilles de son cœur ouvertes pour obéir, sa langue devait assurément par une suite logique être aussi déliée, afin qu’il pût exhorter le prochain à le suivre dans la pratique du bien. Ainsi le texte ajoute-t-il avec raison : « Et il parlait correctement ». Car celui-là parle correctement, qui réalise d’abord dans l’obéissance, ce que par la parole il recommande d’observer.

Saint Grégoire le Grand - Matthias Stom

Matthias Stom (v. 1589 – ap. 1650) : Saint Grégoire le Grand

2022-87. « Plutôt que de se plaindre de l’inculture d’aujourd’hui, faisons nôtre la vraie culture du beau, du vrai et du juste. »

Lundi 8 août 2022,
Au diocèse de Viviers, la fête de Saint Venance, évêque et confesseur ;
Mémoire des Saints Cyriaque, diacre, Large et Smaragde, et leurs compagnons, martyrs ;
Anniversaire du rappel à Dieu du Rd. Père Jean Charles-Roux (cf. > ici et > ici).

Armes de France & Navarre

   Alors que l’Université Saint Louis s’est achevée vendredi dernier, 5 août, le Secrétariat du Prince a rendu public ce matin le message particulier que Monseigneur le prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XX, a adressé à ses participants, qui en avaient bien évidemment reçu la primeur en temps opportun.
Au-delà des participants eux-mêmes, ce message manifeste l’estime de Sa Majesté pour le travail de formation accompli par l’Union des Cercles Légitimistes de France, en même temps qu’il constitue, à l’adresse de toutes les personnes qui sont conscientes de la très grave crise actuelle, un chaleureux encouragement à travailler à se former dans la Vérité des principes spirituels et politiques, culturels et historiques, qui permettent de lutter efficacement contre les poisons révolutionnaires…

Louis XX (2)

Chers Amis de l’Université Saint-Louis,

Vous voilà réunis pour une semaine de travail au moment où beaucoup se reposent. Vous sacrifiez un peu de votre temps pour apprendre et comprendre. Vous êtes des sentinelles de la pensée. Soyez en remerciés. Votre démarche mérite non seulement tous mes encouragements mais encore plus toutes mes félicitations.

Celles-ci s’adressent aussi aux organisateurs de l’Université Saint-Louis qui préparent avec une grande attention chaque session annuelle. Réaliser chaque été, depuis plus de vingt ans maintenant, cette université est un grand succès de l’Union des Cercles Légitimistes de France et montre sa constance et sa rigueur dans le travail.

Dans une époque qui n’ose plus réfléchir de peur d’être confrontée à sa vacuité, vous osez, vous, relever le défi de la culture contre l’inculture ambiante ; le défi de la Vérité, contre l’erreur.

Celle-ci est partout présente : les informations sont tronquées et orientées, la connaissance historique objective bafouée, les faits cachés ou travestis au nom des idéologies perverses du moment, l’une chassant l’autre.

Heureux ceux qui peuvent maintenir des îlots de science et de savoir. Vous en faites partie et ainsi vous préparez le renouveau de demain. Par vos travaux et le sérieux avec lequel ils sont menés, vous écrivez l’avenir.

Le thème que vous avez choisi cette année, les religions politiques, est tout à fait à propos. En effet les fausses religions idéologiques sont avant tout politiques, il faudrait dire même politiciennes, car elles ne servent trop souvent que des intérêts très éloignés du bien commun. Fausses religions aussi parce qu’elles travestissent et s’attaquent au fait religieux et notamment à la religion catholique. Ces religions politiques, fausses par nature, sont le fondement de toutes les idéologies les plus pernicieuses dont nombres d’entre elles, au XXe siècle notamment, ont abouti aux totalitarismes les plus inhumains. Ces religions politiques mènent la plupart du temps à la mort qu’elle soit extermination, génocide, euthanasie, dévalorisation de la nature humaine. Cela dure depuis plus de deux siècles, depuis la complète inversion des valeurs qu’a été la Révolution française quand la vérité est devenu une variable ; quand le relativisme a envahi toutes les sphères de la pensée ; quand la transcendance a cessé de guider la politique.

Heureusement il y a toujours des êtres pour résister. Vous en êtes ! Tel est l’honneur de votre Université Saint Louis.

Je souhaite un plein succès à cette session 2022. Ne vous découragez pas. Formez-vous et ensuite soyez assez forts pour reconquérir par l’intelligence, la société qui manque cruellement de vraies valeurs et aussi du recul de la Sainte Religion puisque sans les enseignements du décalogue il est bien vain de vouloir établir une société politique juste.

Tel est notre devoir à tous. Plutôt que de se plaindre de l’inculture d’aujourd’hui, faisons nôtre la vraie culture du beau, du vrai et du juste. Celle de la culture française de toujours. La culture des quinze siècles d’histoire légués par tous mes aïeux dont la France peut être fière et que nous avons tous le devoir de transmettre.

Que Saint Louis vous assiste.

Louis de Bourbon
Duc d’Anjou

Nota bene :
Pour télécharger les Cahiers de l’Université d’été Saint Louis 2022 > ici.

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2022-86. De la correspondance à la grâce.

Neuvième dimanche après la Pentecôte.
[Epître : 1 Cor. X, 6-13 / Evangile : Luc XIX, 41-47].

Adoration du veau d'or - Domenico Gargiulo

Domenico Gargiulo (1609-1675) : l’adoration du veau d’or
[musée de l'Ermitage à Saint-Pétersbourg]

Présence de Dieu : « O Seigneur, faites que Votre grâce ne soit pas vaine en moi ! »

Méditation :

   1 -  Aujourd’hui la liturgie nous invite à réfléchir sur le grave problème de notre correspondance à la grâce. Elle nous présente le triste tableau des vicissitudes d’Israël, le peuple élu, que Dieu avait comblé de bienfaits, auréolé de grâces, protégé avec un soin jaloux et qui, toutefois, s’est perdu par son infidélité.
Après avoir touché, dans l’Epître, certains points de la prévarication d’Israël, Saint Paul conclut : « Toutes ces choses leur arrivaient en figure et elles ont été écrites pour notre instruction… Que celui donc qui croit être ferme prenne garde de tomber ».
C’est un puissant rappel à la vigilance, à l’humilité. Si Dieu nous a prévenus de Ses grâces, s’Il nous a appelés à une vie intérieure plus intense, à une plus grande intimité avec Lui, tout cela, loin de nous rendre présomptueux, doit creuser dans notre cœur une humilité plus profonde : les dons de Dieu doivent être gardés sous la cendre d’une humble défiance de soi. Malheur à nous si nous devions nous croire affranchis désormais de ces faiblesses que nous rencontrons et condamnons peut-être chez les autres ! Répétons plutôt humblement : Seigneur, aidez-moi, sinon je pourrais faire pire.
Mais en nous exhortant à l’humilité, Saint Paul nous pousse aussi à la confiance car « Dieu est fidèle et ne permettra pas que vous soyez tentés au-dessus de vos forces, et même Il vous fera tirer avantage de la tentation, afin que vous puissiez persévérer ».
L’Apôtre nous enseigne aussi que la conscience de notre faiblesse ne doit pas nous décourager, parce que Dieu est toujours prêt à nous soutenir de Sa grâce. Dieu connaît nos faiblesses, les luttes que nous devons soutenir, les tentations qui nous assaillent et, pour chacune d’elles, Il nous donne la mesure de grâce nécessaire pour en triompher.
Il est vrai que, lorsque la rafale fait rage, nous ressentons uniquement le choc de la lutte, alors que la grâce par laquelle Dieu vient à notre secours, demeure entièrement cachée. Cependant, elle est là, nous devons en être assurés, parce que « Dieu est fidèle ».
« Dieu m’a toujours secouru, disait Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Je compte sur Lui. La souffrance pourra atteindre au paroxysme, mais je suis sûre qu’Il ne m’abandonnera pas » (Histoire d’une âme XII).

Flevit super illam - Enrique Simonet 1892

« Flevit super illam » – toile monumentale d’Enrique Simonet (1892 – musée de Malaga)

   2 – Reprenant le sujet de l’Epître, l’Evangile nous montre Jésus pleurant sur Jérusalem.
Le Créateur, le Seigneur, le Sauveur, pleure sur la ruine de Ses créatures, du peuple qu’Il a aimé avec prédilection, jusqu’à le choisir comme compagnon de Sa vie terrestre, et qu’Il aurait voulu sauver à tout prix.
« Jérusalem, Jérusalem… que de fois J’ai voulu rassembler vos enfants, comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ! » (Matth. XXIII, 37). Telle fut l’attitude constante de Jésus envers la cité sainte, mais celle-ci est toujours demeurée aveugle à toute lumière, sourde à toute invitation et le Sauveur, peu de jours avant d’aller à Sa passion, lui lança le rappel ultime et désolé : « Si tu connaisais, toi aussi, du moins en ce jour qui t’est donné, ce qui ferait ta paix! » Mais, encore une fois, la cité résiste et Jésus, après l’avoir tant aimée, après avoir tant pleuré sur elle, comme un père pleure son fils dévoyé, lui prédit sa ruine : « tes ennemis… ne laisseront pas en toi pierre sur pierre, parce que tu n’a pas reconnu l’heure où tu as été visitée ».
Et toi, sais-tu reconnaître les moments où le Seigneur rend visite à ton âme ?
Une bonne parole, lue ou entendue, peut-être même au hasard, un exemple édifiant, une inspiration intérieure, une lumière nouvelle qui te fait voir tes défauts plus à fond, qui t’ouvre de nouvelles perspectives de vertu et de bien, – voilà autant de visites de Jésus.
Comment y corresponds-tu ? Ton âme est-elle sensible à ces lumières, à ces rappels ? Ne te surprends-tu pas quelquefois à tourner le regard ailleurs, de crainte que la lumière entrevue ne demande des sacrifices trop durs à ton amour-propre ?
Oh ! Si tu avais toujours reconnu le moment où le Seigneur t’a invité ! Si tu t’étais toujours ouvert à Son action !
Tâche donc de recommencer aujourd’hui, comme chaque fois qu’il t’arrivera de céder à la nature.
« Ce qui ferait ta paix », ton bien, ta sanctification, se trouve précisément dans cette adhésion continuelle aux motions de la grâce.

Colloque :

   « Ainsi que je Vous l’ai confessé auparavant, ô gloire de ma vie, ô Seigneur mon Dieu, force de mon salut, j’ai mis quelquefois mon espoir dans ma force qui n’était cependant rien ; c’est lorsque j’ai voulu courir, me croyant très ferme, que je suis tombé le plus vite et que j’ai reculé au lei d’avancer ; ce que je croyais atteindre s’est éloigné de moi et ainsi, ô Seigneur, Vous avez mis de manières différentes mes forces à l’épreuve. Sous Votre lumière, je vois maintenant que je n’ai pu accomplir par moi-même ce que j’avais le plus l’intention de faire. Je me disais : je ferai ceci, je terminerai cela, et je ne fis ni l’un ni l’autre. J’en avais bien la volonté, mais non le pouvoir, et lorsqu’il y avait capacité, la volonté faisait défaut, parce que je me fiais à mes forces. Soutenez-moi donc, ô Seigneur, car seul, je ne puis rien ; mais quand Vous êtes ma stabilité, je suis vraiment fort ; mais lorsque je veux être ma propre stabilité, alors je ne suis que faiblesse » (Saint Augustin).
« O Seigneur, enseignez-moi à être toujours docile à Votre grâce, à Vous dire toujours oui. Dire toujours oui à Votre Volonté, signifiée dans Vos commandements, aux inspirations intimes par lesquelles Vous me sollicitez, m’invitez à une plus intense union, à un dévouement plus généreux, un détachement plus total. Faites que je sois toujours prêt[e] à Vous ouvrir la porte de ma volonté, mieux, à la tenir toujours large ouverte, afin que Vous puissiez y entrer et que je ne perde pas une seule de Vos visites, pas une de ces touches délicates, et qu’aucune de Vos demandes ne m’échappe.
Faites-moi bien comprendre que la vraie paix ne consiste pas à être exempt[e] de difficultés, à suivre mes désirs. Ce n’est pas en cela que je dois la rechercher, mais dans l’adhésion totale à Votre Volonté, dans la docilité aux inspirations du Saint-Esprit » (Sœur Carmela du Saint-Esprit, ocd).

Père Gabriel de Sainte Marie-Madeleine, ocd
in « Intimité Divine – méditations sur la vie intérieure pour tous les jours de l’année »
2ème volume (juin à novembre) pp.201-204

Mosaïque de l'autel de l'église Dominus flevit -Jérusalem

« Jérusalem, Jérusalem… que de fois J’ai voulu rassembler vos enfants,
comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ! »

Mosaïque de l’autel de l’église « Dominus flevit » à Jérusalem
(lieu où, selon la Tradition, NSJC a versé des pleurs sur Jérusalem)

2022-83. Etre de bons arbres afin de pouvoir porter de bons fruits.

Septième dimanche après la Pentecôte :

Sermon LXXII de
notre Bienheureux Père Saint Augustin
sur
les bons arbres
(cf. Matth. VII, 15-21 et XII, 33).

cueillette d'un bon fruit

C’est au fruit que l’on connaît l’arbre…

1. Notre-Seigneur veut que nous travaillions à devenir de bons arbres : ce qui fait comprendre la nécessité de ce commandement, c’est qu’un arbre mauvais ne saurait porter de bons fruits.

   Notre-Seigneur Jésus-Christ nous a avertis d’être de bons arbres afin de pouvoir porter de bons fruits : « Ou rendez l’arbre bon et son fruit bon, dit-Il ; ou rendez l’arbre mauvais et son fruit mauvais ; car c’est par le fruit qu’on connaît l’arbre ». Dans ces mots : « Ou rendez l’arbre bon et son fruit bon », il y a non point un avis, mais un précepte salutaire que nous sommes obligés d’accomplir. Et dans ces autres : « Rendez l’arbre mauvais et son fruit mauvais », il n’y a pas un précepte à accomplir, mais l’avis d’être sur ses gardes. Car cet avis s’adresse à ces hommes qui croyaient, tout mauvais qu’ils étaient, pouvoir bien parler ou bien agir. Cela ne se peut, dit le Seigneur Jésus. Pour changer la conduite, il faut d’abord changer l’homme. Si celui-ci reste mauvais, il ne peut bien agir : et s’il est bon, il ne saura agir mal.

2.  Aussi, Jésus-Christ est venu travailler à nous rendre bons.

   Or qui a été trouvé bon par le Seigneur, lorsque le Christ est mort pour les impies ? (cf. Rom. V, 6). Il n’a donc rencontré que des arbres mauvais ; mais Il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu s’ils croyaient en Son nom (cf. Jean, I, 12). Ainsi quiconque est bon aujourd’hui, c’est-à-dire est un bon arbre, a d’abord été trouvé mauvais et est devenu bon. Ah ! s’Il avait voulu, en venant parmi nous, arracher tous les mauvais arbres, en resterait-il un seul qui ne méritât d’être déraciné ? Mais Il est venu avec la miséricorde, afin d’exercer ensuite la justice, ainsi qu’il est écrit : « Je chanterai, Seigneur, Votre miséricorde et Votre justice » (Ps. C, 1). Aussi a-t-Il accordé aux croyants la rémission de leurs péchés sans vouloir même revenir avec eux sur les comptes passés. Il a fait d’eux de bons arbres ; Il a détourné la cognée et apporté la paix.

3. Il nous menace de la mort éternelle si pour le devenir, nous ne profitons pas des délais que nous accorde sa bonté.

   C’est de cette cognée que parle Jean quand il dit : « Déjà la cognée est mise à la racine des arbres. Tout arbre qui ne produit pas de bon fruit, sera coupé et jeté au feu » (Matt. III, 10). C’est de cette cognée que menace le père de famille, lorsqu’il dit dans l’Evangile : « Voilà trois ans que je viens voir cet arbre, sans y trouver de fruit. Je dois maintenant rendre libre la place. Qu’on le coupe donc ». Le vigneron intercède : « Seigneur, dit-il, laissez-le encore cette année ; je vais creuser tout autour et y mettre une charge de fumier. Vous serez content, s’il porte du fruit ; s’il n’en porte pas, vous viendrez et l’abattrez » (cf. Luc XII, 7-9).
Le Seigneur, en effet, a visité le genre humain comme pendant trois ans, c’est-à-dire à trois époques déterminées. La première époque précède la loi ; la seconde est celle de la loi, et la troisième est l’époque actuelle de la grâce. Si le Seigneur n’avait point visité le genre humain avant la loi, comment expliquerait-on la justice d’Abel, d’Enoch, de Noë, d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, dont Il a voulu être nommé le Seigneur, comme s’Il n’était le Dieu que de ces trois hommes, Lui à qui toutes les nations appartiennent ? « Je suis, dit-Il, le Dieu d’Abraham, et d’Isaac et de Jacob » (Exod. III, 14). Et s’Il ne nous avait point visités sous la loi, aurait-il donné cette loi ? Ce père de famille est venu aussi après la loi ; Il a souffert, Il est mort, Il est ressuscité, Il a fait prêcher l’Evangile dans tout l’univers ; et il reste encore quelque arbre stérile ! Il est encore une portion de l’humanité qui ne se corrige point ! Le jardinier se fait médiateur ; l’Apôtre prie pour le peuple : « Je fléchis pour vous, dit-il, les genoux devant le Père, afin qu’enracinés et fondés dans la charité, vous puissiez comprendre, avec tous les saints, quelle est la largeur et la longueur, la hauteur et la profondeur, et acquérir aussi la science suréminente de la charité du Christ, pour être remplis de toute la plénitude de Dieu » (Ephes. III, 14-19). En fléchissant ainsi les genoux devant le Père de famille, il demande que nous ne soyons pas déracinés. Puisque ce Père de famille viendra nécessairement, faisons en sorte qu’Il trouve en nous des arbres féconds. On creuse autour de l’arbre par l’humilité d’un coeur pénitent, attendu qu’on ne peut creuser sans descendre. Le fumier figure l’abjection à laquelle se livre le repentir. Est-il en effet rien de plus abject que le fumier ? Et pourtant, est-il rien qui rapporte plus, si l’on en fait bon usage ?

4. N’est-il pas incompréhensible que l’homme ne veuille rien avoir que de bon et que toutefois il ne cherche pas à devenir bon lui-même ? Qu’il s’attache donc à Dieu, source de bonté.

   Que chacun donc devienne un bon arbre, et qu’on ne s’imagine pas porter de bons fruits en restant arbre mauvais. Il n’y a de bons fruits que sur les bons arbres. Change ton coeur et tu changeras de conduite. Arraches-en la cupidité et plantes-y la charité. De même que la cupidité est la racine de tout mal (cf. 1 Tim. VI, 10), la racine de tout bien est la charité. Pourquoi alors, pourquoi des hommes murmurent-ils, disputent-ils entre eux et disent-ils Qu’est-ce que le bien ?
— Ah ! si tu savais ce que c’est que le bien ! Le bien véritable n’est pas ce que tu voudrais avoir, mais ce que tu ne veux pas être. Tu voudrais avoir la santé du corps ; c’est un bien sans doute, mais ce n’est pas un grand bien, car le méchant l’a aussi. Tu veux avoir de l’or et de l’argent ; j’en dis autant, c’est un bien, mais à la condition que tu en feras un bon usage. Et tu n’en feras pas un bon usage, si tu n’es bon toi-même. D’où il suit que l’or et l’argent sont un mal pour les méchants et un bien seulement pour les bons. Ce n’est pas que l’or et l’argent rendent ceux-ci bons ; mais ils ne sont employés à un bon usage que pour être tombés entre les mains des bons. Tu veux de l’honneur ; c’est un bien, mais à condition encore que tu en feras un sage emploi. Combien y ont trouvé leur ruine ! Et pour combien a-t-il été un instrument de bonnes oeuvres !

5. Savoir ordonner sa vie au bien de la même manière qu’on désire avoir de bonnes choses ici-bas.

   Ainsi donc, s’il est possible, sachons mettre de la différence entre ces diverses sortes de biens, puisqu’il est aujourd’hui question de bons arbres.  Or il n’est rien dont chacun doive ici s’occuper davantage que de tourner ses regards sur lui-même, de s’examiner, de se juger, de se sonder, de se chercher et de se trouver ; que de détruire ce qui Lui déplait, que de souhaiter et de planter ce qui Lui plait. Comment être avide des biens extérieurs, lorsqu’on est vide des biens meilleurs ? Qu’importe d’avoir la bourse pleine, quand la conscience est vide ? Tu veux des biens sans vouloir être bon ! Ne comprends-tu pas que tu dois rougir de ce que tu possèdes, si dans ta maison tout est bien excepté toi ? Que veux-tu avoir de mauvais ? Dis-le moi. Rien absolument ; ni épouse, ni fils, ni fille, ni serviteur, ni servante, ni campagne, ni tunique, ni même chaussure. Et tu veux toutefois mener une mauvaise vie ! Je t’en conjure, élève ta vie au dessus de ta chaussure. Tout ce que rencontrent tes regards autour de toi, est élégant, beau et agréable pour toi : toi seul restera laid et, hideux. Ah ! si ces biens dont ta maison est pleine, si ces biens dont tu as convoité la possession et dont tu redoutes la perte, pouvaient te répondre, ne te crieraient-il pas : Tu veux que nous soyons bons et nous aussi nous voulons avoir un bon maître ? Mais ils crient silencieusement contre toi devant ton Seigneur : Vous lui avez, disent-ils, accordé de bonnes choses, et lui reste mauvais ! Que lui importe ce qu’il a, puisqu’il n’a pas l’Auteur de tout ?

6. Saint Augustin actualise le psaume quatrième pour mieux exhorter ses auditeurs.

   Ces paroles touchent ici quelque cœur ; livré peut-être à la componction il demande ce que c’est que le bien, quelle en est la nature, l’origine. Tu l’as donc bien compris, c’est de cela que tu dois t’enquérir. Eh bien ! je répondrai à ta question et je dirai : Le bien est ce que tu ne saurais perdre malgré toi. Tu peux, malgré toi, perdre ton or, et ta demeure et tes honneurs et la santé même ; mais le bien qui te rend bon, tu ne peux ni l’acquérir, ni le perdre malgré toi. Quelle est maintenant la nature de ce bien ? Nous trouvons dans un psaume un grand enseignement, c’est peut-être ce que nous cherchons. « Enfants des hommes, y est-il dit, jusques à quand aurez-vous le cœur appesanti ? » Jusques à quand cet arbre demeurera-t-il stérile ? « Enfants des hommes, jusques à quand serez vous appesantis de cœur ? » Que signifie, « Appesantis de cœur » ? — « Pourquoi aimez-vous la vanité et recherchez vous le mensonge? » Venant ensuite au fond même de la question : « Sachez que le Seigneur a glorifié son Saint » (Ps IV, 3-4). Déjà en effet le Christ est venu, déjà Il est glorifié, Il est ressuscité et monté au ciel, déjà Son nom est célébré par tout l’univers : « Jusques à quand serez-vous appesantis de coeur ? » N’est-ce pas assez du passé ? Et maintenant que ce Saint est glorifié, jusques à quand aurez-vous le cœur appesanti ? » Les trois ans écoulés, qu’avez-vous à attendre, sinon la cognée ? « Jusques à quand serez-vous appesantis de cœur ? Pourquoi aimez-vous la vanité et recherchez-vous le mensonge ? » Même après la glorification du Saint, du Christ, on s’attache encore à la vanité, encore à l’inutilité, encore à l’ostentation, encore à la frivolité ! La vérité se fait entendre et l’on court encore après la vanité ! « Jusques à quand aurez-vous le cœur appesanti ? »

7. Les calamités présentes doivent nous servir d’avertissement sérieux.

   C’est avec justice que le monde endure de si cruels fléaux ; car il connaît aujourd’hui la parole de son Maître : « Le serviteur qui ne sait pas la volonté de son maître, est il écrit, et qui fait des choses dignes de châtiment, recevra peu de coups ». Pourquoi ? Afin de l’exciter à rechercher cette volonté. Tel était le monde avant que le Seigneur glorifiât son Saint ; c’était un serviteur ignorant la volonté de son Maître ; aussi recevait-il peu de coups. Mais aujourd’hui et depuis que Dieu a glorifié Son Saint, le serviteur qui connaît la volonté de son Maître et qui ne l’accomplit point, recevra un grand nombre de coups. Est-il donc étonnant que le monde soit si fort châtié ? C’est un serviteur qui connaît les intentions de son maître et qui fait des choses dignes de châtiment. Ah ! qu’il ne se refuse pas aux nombreuses afflictions qu’il mérite (cf. Luc XII, 48-47) ; car s’il ne veut pas écouter son précepteur, il trouvera justement en Lui un vengeur. Qu’il ne murmure pas contre la main qui le frappe, qu’il se reconnaisse digne de châtiment ; c’est le moyen de mériter la miséricorde divine, par Jésus-Christ, qui vit et règne avec Dieu le Père et avec l’Esprit-Saint dans les siècles des siècles. Amen.

Bons arbres et bons fruits

A frúctibus eórum cognoscétis eos…

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