Archive pour la catégorie 'Commentaires d’actualité & humeurs'

2024-62. Ne faites pas de votre relation avec Dieu une relation de trafic !

Quatrième semaine de Carême.

Hans Memling jeune homme en prière - 1475

Hans Memling (vers 1435-1494) : jeune homme en prière (vers 1475)
[National Gallery, Londres]

     Il y a – malheureusement ! – beaucoup de personnes qui, lorsqu’elles veulent « entrer en relation » avec Dieu, et il y a beaucoup – beaucoup trop – de fidèles qui, lorsqu’ils veulent entretenir, développer et intensifier leur relation avec Dieu, agissent exactement comme s’ils établissaient une relation commerciale avec Lui.
Est-ce en pleine conscience, ou  bien cela est-il inconscient ? Ce n’est pas à moi de le dire.
Cependant leur vie religieuse, consciemment ou inconsciemment, pourrait se résumer à ceci : « Voici ce que je suis prêt à faire… , voilà jusqu’où je suis prêt à aller… , et Vous, mon Dieu, que me donnerez-Vous en échange ? »

   Et il peut arriver que, à plus ou moins longue échéance,  cette « relation commerciale » prenne un goût amer : « Regardez donc tout ce que j’ai fait pour Vous ! Voyez toute la peine que j’ai prise pour Vous ! Considérez tout le temps que je Vous ai consacré… et Vous, Vous n’avez pas répondu à mes attentes… Je n’ai pas l’impression que Vous ayez vraiment fait quelque chose pour moi… »
C’est tout juste si on ne dit pas à Dieu : « Dites donc, depuis le temps que je vous verse des acomptes – quotidiennement, hebdomadairement, mensuellement… -, Vous ne pensez pas que maintenant il est grand temps que Vous pensiez à me faire livraison de ma commande ? »

Vignette - mains jointes - blogue

   Dans une relation de type commercial, chacun recherche son intérêt.
Le vendeur se dessaisit d’un objet ou d’une prestation, mais il ne le fait pas pour rien : il cherche à en retirer le profit maximal.
Et le client consent à payer, parfois même assez cher, mais à la condition d’obtenir ce qu’il convoite.

   Celui qui prie en pensant qu’il fait à Dieu une offre, en lui accordant du temps, en lui accordant un moment de sa vie ou même une part de lui-même, avec le même processus mental que l’on « offre » une somme d’argent, dans l’attente d’une contrepartie divine, ne fait rien d’autre que de se comporter en « honnête commerçant » ou en « honnête acheteur » : donnant, donnant… au juste prix !

   Il arrive aussi que l’on va demander quelque chose à Dieu, en se disant : « Houlala ! quel prix va-t-Il me faire payer ce bienfait, cette grâce, cette faveur que je lui demande ? ». Et l’on craint la « facture » qu’Il va nous demander de Lui régler !

Quentin Massysm - le prêteur et sa femme - 1514 - blogue

Quentin Metsys (1466-1530) : le prêteur et sa femme (1514)
[musée du Louvre, Paris]

   Mais Dieu, Lui, n’est pas un « bon commerçant ».
Il n’est même pas commerçant du tout !

   « Jésus trouva dans le Temple les marchands de bœufs, de brebis, de colombes, ainsi que les changeurs assis sur leurs sièges. Se faisant un fouet avec des cordes, Il les chassa tous du Temple, ainsi que les brebis et les bœufs, envoya promener la monnaie des changeurs et renversa leurs tables. Et aux marchands Il dit : « Enlevez cela d’ici ; ne faites pas de la demeure de Mon Père une maison de trafic ! » [Jean II 14-16 – Evangile du lundi de la quatrième semaine de Carême].

Jan Sanders van Hemessen -Le Christ chassant les vendeurs du temple - blogue

Jan Sanders van Hemessen (vers 1500 – vers 1566) :
le Christ chassant les vendeurs et les changeurs du Temple (1556)
[musée des beaux-arts de Nancy]

   Dieu, Lui, veut donner.
Comprenons-nous bien le sens du verbe donner ?

   Tout ce que Dieu fait, Il le fait par pure gratuité, et avec surabondance : l’existence qu’Il donne gratuitement, toutes les beautés et merveilles de Sa création qu’Il met à notre disposition gratuitement, et surtout, dans l’ordre surnaturel, la vie de la grâce qu’Il nous communique par le saint baptême puis par les sacrements…

   Ai-je une véritable et vive conscience de la générosité de Dieu ?
De quelle « monnaie » d’échange disposé-je pour « acheter » les dons de Dieu ?
Y aurait-il donc, dans les biens que je considère comme miens, et en moi-même aussi, quelque chose qui en réalité me soit propre, que je n’ai pas reçu de Lui, et dont je puisse me servir comme d’une « monnaie » d’échange dont je pourrai ensuite  faire une « somme » proportionnée à ce qu’Il m’a donné et qu’Il me donne ?
Inconsciemment pourtant, je ne cesse pas de vouloir « faire du commerce » avec Dieu. Pour chacun de Ses dons, je garde l’arrière-pensée de la « somme » que je dois Lui verser en échange…

Vignette - mains jointes - blogue

   Pour être dans une relation avec Dieu qui soit juste et véritable, vivante et personnelle, il me faut absolument cesser de vouloir Lui « acheter » des choses, de vouloir Lui « vendre » des choses, de vouloir L’ acheter, Lui et ses dons ! 

   La prière n’est pas une monnaie.
Même si nous passons beaucoup de temps en prière, Dieu ne nous doit rien et ne nous devra jamais rien !
Même si nous avons l’impression d’avoir fait « ce qu’il fallait » – au moment où il le fallait qui plus est -, d’avoir récité la « bonne formule », d’être allé en pèlerinage « au bon endroit », d’avoir accompli le « bon rite », Dieu ne nous doit rien et ne nous devra jamais rien !

   Rajoute autant de formules que tu veux à tes prières, récite une dizaine de chapelet en plus… etc. ; mais ne t’imagine surtout pas qu’avec cela tu pourras mettre la main sur Dieu, qu’avec cela tu pourras avoir un quelconque droit sur Lui et sur Ses dons, qu’avec cela tu pourras L’ « obliger » à faire quelque chose en ta faveur.

Vignette - mains jointes - blogue

   Alors, vas-tu laisser tomber parce que je te dis aujourd’hui qu’on ne peut pas acheter Dieu par des pratiques de piété, par la prière (personnelle ou liturgique) ?

   Considères-tu donc que Dieu est une sorte de distributeur automatique, ou un commerçant derrière le comptoir d’une boutique : la boutique église, un peu différente des autres en raison de son architecture et de son aménagement intérieur, mais fonctionnant néanmoins en tout comme toutes les autres boutiques ?

   Ne te méprends pas sur mes propos, je n’ai pas dit que les rites et la prière étaient inutiles ; je ne t’ai pas dit de cesser la pratique religieuse ni les exercices de piété. Je veux juste te faire comprendre que tout cela n’a pas de sens dans une démarche – plus ou moins consciente – de type commercial.
En revanche, cela prend tout son sens et toute sa valeur si tu penses que ce sont là des moyens d’union à Dieu. Une union dont la cause autant que la finalité est l’amour.

L’union à Dieu doit être une union d’amour, une relation amoureuse. Elle repose sur le don, sur la gratuité, et sur la pleine et entière liberté.
La relation marchande n’est fondée ni sur le don, ni sur la gratuité, ni sur la liberté.

   Dieu, en effet, te propose beaucoup plus et beaucoup mieux, infiniment plus et infiniment mieux, qu’une relation marchande !!!

Tolbiac.

Regard d'amour avec Jésus - blogue

2024-61. Le 12 mars, on fête également Saint Maximilien de Théveste, un martyr de 21 ans.

12 mars,
Fête de Saint Grégoire 1er le Grand, pape et docteur de l’Eglise (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Syméon le Nouveau Théologien (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Maximilien de Théveste, martyr ;
Mémoire de la férie de Carême ;
Anniversaire du couronnement du Vénérable Pie XII (cf. > ici).

   Note : Le Saint Maximilien qui figure au 12 mars dans le martyrologe n’est pas directement le saint patron de mon papa-moine, puisque le sien est Saint Maximilien-Marie Kolbe qu’on fête le 14 août (cf. > ici), toutefois nous ne manquons pas d’honorer avec une ferveur particulière ce jeune et intrépide martyr qui donne aux catholiques de ce temps un magnifique modèle de comportement en face des modernes dioclétiens qui affirment que la loi morale et la religion ne saurait primer sur la loi civile ni prévaloir sur les « valeurs » de la république.

Tolbiac.

Saint Maximilien de Théveste - blogue

Sancte Maximiliane, ora pro nobis !

palmes

       Le 12 mars 295, à Théveste, en Numidie [aujourd’hui Tébessa, en Algérie], sous le consulat de Tuscus et d’Anulin, fut amené à comparaître devant le proconsul d’Afrique Dion Cassius, le vétéran Fabius Victor avec son fils Maximilien (Maximilianus).
Le père était préposé à la levée des nouvelles recrues pour les armées impériales, et Maximilien, son fils, déclarait qu’en sa qualité de chrétien, il ne lui était pas permis de servir comme soldat.

   Vainement Dion Cassius insista, le jeune homme répondait, invariablement : « Je ne serai point soldat, je ne combattrai pas pour le siècle, je suis le soldat de mon Dieu ! » Et encore : « Je ne reçois point de marque du siècle ; si l’on m’impose le signe de l’empereur, je le briserai, car il est pour moi sans valeur. Je suis chrétien ; il ne m’est pas permis de porter au cou la bulle de plomb, moi qui porte déjà le signe sacré du Christ, Fils du Dieu vivant. C’est Lui que nous servons, nous tous chrétiens ; c’est Lui que nous suivons, car Il est le Prince de la vie, l’auteur du Salut ».

   Finalement, le proconsul fit effacer sur les tablettes le nom de Maximilien, et il ajouta : « Puisque, d’une âme insoumise, tu as refusé le service militaire, tu encourras la sentence de mort qui servira d’exemple aux autres ».
« Grâces en soient rendues à Dieu ! », répondit Maximilien.

   Pourquoi Maximilien refusait-il, au nom de sa foi, de porter l’uniforme militaire et le jugeait-il incompatible avec le service de Notre-Seigneur ?
C’est parce que dans le contexte précis de cette fin du troisième siècle, où régnait le terrible empereur Dioclétien, ce tyran avait décidé, pour consolider le civisme et renforcer la cohésion des troupes, de restaurer le vieux paganisme romain et de supprimer les religions « inassimilables », au premier rang desquels se trouvait le christianise contre lequel il prit des mesures particulièrement coercitives : destruction des églises, confiscation des livres saints, emprisonnement des évêques.. etc. La « grande persécution » fit des milliers et des milliers de martyrs.
Accepter de porter au cou la bulle de plomb marquée du signe de l’empereur, c’était nécessairement participer au culte de Rome et de l’empereur, consentir à l’adoration des faux dieux, participer aux sacrifices idolâtres. Voilà pourquoi Maximilien opposa si fermement la « marque du siècle », le « signe de l’empereur », la « bulle de plomb », au « Signe sacré du Christ », peut-être déjà la Croix, qu’il portait autour du cou .

   Ce jeune homme, né en 273,  était âgé de vingt et un ans, trois mois et dix-huit jours lorsqu’il consomma son martyre.
Comme on le conduisait au supplice, il dit aux chrétiens qui l’entouraient : « Frères bien-aimés, de toutes vos forces et de toute l’ardeur de vos désirs, hâtez-vous afin d’obtenir de voir Dieu et de mériter une semblable couronne ».
Ensuite, le visage tout rayonnant de joie, il ajouta en se tournant vers son père : « Donne au soldat qui va me frapper le vêtement neuf que tu m’avais préparé pour la milice. Que les fruits de cette bonne oeuvre se multiplient pour toi au centuple, et que je puisse bientôt te recevoir au ciel. Tous deux, nous nous glorifierons dans le Seigneur ».

   Il fut aussitôt décapité.
Une matrone, nommée Pompéiana, obtint du juge le corps du martyr. Elle le plaça sur une litière et le transporta à Carthage, où il fut enterré sous un monticule auprès du grand pontife martyr : Saint Cyprien.  

   Treize jours après, Pompéiana mourut à son tout et fut ensevelie dans le même lieu.
Quant à Victor, père de Maximilien, il rentra plein de joie dans sa maison, remerciant Dieu de lui avoir permis d’envoyer un tel présent au ciel. Il ne devait pas tarder à le suivre.

   Les Actes de la passion de Saint Maximilien de Théveste sont l’un des documents historiques les plus solides dont on dispose sur la grande persécution de la fin du IIIe siècle en Afrique du nord. 

palmes

2024-57. Où, à l’occasion du deuxième anniversaire de Son Altesse Félinissime le Prince Tolbiac, on rappelle comment le chevalier de Mérancourt fut sauvé par les chats de Son Eminence le Cardinal-ministre.

Dimanche de Laetare 10 mars 2024,
Deuxième anniversaire de la naissance de Son Altesse Félinissime le Prince Tolbiac
(on peut revoir la chronique de son premier anniversaire > ici).

vignette Tolbiac et souris - blogue

       Mon papa-moine, à l’occasion de mon deuxième anniversaire, a voulu me parler d’un très important personnage de l’histoire de notre France, pour lequel il a une immense admiration : Armand-Jean du Plessis, cardinal-duc de Richelieu, principal ministre de Sa Majesté le Roi Louis XIII, très grand serviteur de la Couronne, et – à ce titre sans doute – détesté de beaucoup et fort injustement calomnié.

   Son Eminence aimait les chats et fut sans nul doute un précurseur en « félinophilie ». Je n’en fais pas un secret : je tiens pour absolument certain qu’un homme qui aime les chats ne saurait être un mauvais homme. Or le grand cardinal-ministre eut jusqu’à quatorze chats !!!

   Le cardinal de Richelieu passe pour avoir été l’un des premiers à la Cour, sinon le premier, à nous avoir donné autant d’importance. Sans doute avait-il compris combien nous pouvons être, par notre seule présence et nos exemples, de précieux auxiliaires d’une saine politique et gestion de l’Etat.
Il y avait certes un côté pragmatique à la chose : nous autres, chats, si efficaces dans la lutte contre les petits rongeurs, sommes comme les anges gardiens d’une bibliothèque, d’une garde-robe, d’une sacristie, et, bien sûr, des celliers et de vos réserves de nourriture ; sans compter que le judicieux artisan de l’entrée de la France dans la période moderne avait bien compris que nous serions de précieux auxiliaires de la marine royale : sans chats à bord, un navire est en grand danger, parce que les rats, outre les dégâts qu’ils peuvent commettre dans une cambuse, sont également friands du suif avec lequel on graissait les cordages, et qu’ils peuvent ronger le bois dont les vaisseaux étaient faits…

    Bref ! Pour m’inspirer un aussi grand amour que le sien pour le cardinal de Richelieu, mon papa-moine m’a lu une belle histoire, celle de la grâce qui fut accordée au chevalier de Mérancourt, magnifiquement rapportée par un écrivain bien oublié aujourd’hui, Monsieur Sonolet. Pour le cas où vous ne la connaîtriez point déjà, je vous la recopie ci-dessous.

pattes de chat Tolbiac.

Richelieu et ses chats - blogue

 Charles Édouard Delort (1841-1895) : la distraction de Richelieu (avant 1865)
[Detroit Institute of Arts]

       « Mistigri, veux-tu laisser Raton tranquille ? Et toi, Cyrus, je vais t’aider à déranger mes papiers. »
Après avoir consacré plusieurs heures aux affaires de l’Etat, le cardinal de Richelieu se délasse un instant en regardant jouer ses chats favoris. Dans le cabinet de travail aux boiseries sévères, ils sont là, quatre effrontés, qui se poursuivent, se roulent, bondissent sur les meubles, grimpent, sans le moindre respect, sur la table de travail.
C’est tout juste si Blanchette, la mère, a plus de réserve et de dignité. Mais on croirait vraiment qu’il coule du vif-argent sous le pelage soyeux et doux de ses trois petits : Raton, Mistigri et Cyrus. Que de sauts, de cabrioles, de folles gambades ! Et le plus remuant, le plus turbulent, le plus hardi de la bande, c’est ce Mistigri dont les yeux semblent des émeraudes toujours en mouvement et qui vous a des moustaches hérissées et insolentes comme celles d’un jeune mousquetaire.
Le cardinal de Richelieu raffole des chats. Il goûte un véritable plaisir à suivre leurs mouvements gracieux, leurs gestes câlins. A le voir sourire avec bonhomie devant les jeux de Blanchette et de ses petits, on aurait peine à  reconnaître le ministre puissante et redouté dont les terribles édits font trembler la France.

   Ah ! il n’est pas tendre, le grand cardinal. En ce moment, ce sont les duellistes qu’il poursuit tout spécialement de ses rigueurs. Il a prescrit que quiconque croiserait le fer serait immédiatement puni de mort. Déjà, le comte de Montmorency-Bouteville et plusieurs autres seigneurs des premières familles du royaume ont payé de leur tête leur désobéissance.
Justement, un laquais vient d’introduire dans le cabinet de travail le grand juge chargé de poursuivre les coupables : l’impitoyable Laubardemont.
« Quoi de nouveau, monsieur le grand juge ? » demande Richelieu.
- Eminence, répond Laubardemont, un jeune téméraire se permet encore de nous braver. On vient d’arrêter le chevalier de Mérancourt au moment où il provoquait un autre gentilhomme et où il voulait le forcer à se battre en plein Paris.
Le cardinal détourne ses yeux des débats capricieux de ses quatre chats. Sa figure longue et pâle prend une expression de dure et froide résolution.
« Eh bien, fait-il d’une voix sourde, le chevalier de Mérancourt mourra comme les autres. »
Impassible, Laubardemont continue :
« Sa fiancée a supplié qu’on l’introduise auprès de Votre Emincence. Elle veut se jeter à vos pieds et vous demander la grâce du coupable. Suivant vos instructions, je lui ai fait répondre que vous ne pouviez la recevoir.
- Vous avez bien fait, monsieur le grand juge. Quel âge a le chevalier de Mérancourt ?
- Vingt ans.
- Vingt ans ! Et à la veille de se marier. Quelle folie a donc poussé ce malheureux ? N’importe, il faut que la loi s’accomplisse.
Laubardemont tend au ministre un rouleau de parchemin d’où pend un large cachet rouge :

« Eminence, voici la sentence. Il n’y manque que votre signature.
Le cardinal a pris la feuille. Il a trempé sa plume dans l’encrier, mais, au moment de signer, on dirait qu’il se consulte, qu’il hésite. C’est qu’il se sent quelque trouble à envoyer à l’échafaud un enfant de vingt ans. Pour la première fois, peut-être, un éclair de pitié a pénétré dans cette âme de bronze.
« Monsieur le grand juge, dit-il à Laubardemont surpris, voulez-vous me laisser cette sentence ? Avant de signer, je veux réfléchir un peu au cas de ce jeune fou. Revenez dans une demi-heure. Je serai au Conseil du Roi, mais vous trouverez votre parchemin sur cette table. S’il porte ma signature, le chevalier de Mérancourt devra être exécuté dès demain, au petit jour. Dans le cas contraire, vous attendrez mes ordres. »

   Laubardemont s’est retiré. L’inflexible ministre demeure seul, pensif, au fond de son grand fauteuil. Mistigri ronronne sur ses genoux, tout en mordillant de ses petites dents pointues les boutons de son camail rouge. Blanchette fait tranquillement sa toilette sur le tapis et, fatigués de leurs exercices, Raton et Cyrus se sont pelotonnés l’un contre l’autre pour dormir.
Une demi-heure s’écoule. Le cardinal tortille toujours sa plume entre ses doigts maigres. Va-t-il signer ? Va-t-il faire grâce ? A la fin, c’est la raison politique qui l’emporte. D’une main ferme, il appose son nom au bas de la sentence. Puis, après avoir mis 
doucement Mistigri sur le fauteuil, l’allure calme et paisible, il se rend au Conseil du Roi.
Pauvre petit chevalier de Mérancourt !

   Oh ! Mistigri ne reste pas longtemps sur le fauteuil. Il semble plus vif, plus espiègle, plus fou que jamais. Ses petits yeux d’émeraude brillent avec l’air de dire :
« Maintenant que nous sommes seuls, il s’agit de nous en donner. »
A toute vitesse, il court donner l’assaut à Raton et à Cyrus qu’il réveille en sursaut. Puis il s’en prend spécialement au pacifique Raton. Il le charge, le roule, le culbute, lui mordille les oreilles. Fort peu disposé à cette gymnastique, Raton cherche partout un refuge.
Il saute sur le fauteuil, puis sur la table qu’encombrent les papiers du cardinal. Mais, d’un bond, l’acharné Mistigri y rejoint le fuyard. Fatalité ! Dans cet élan impétueux, il renverse l’encrier du cardinal. Et voilà qu’un flot d’encre se répand, noircissant les papiers, mouillant les pattes blanches de Mistigri qui s’arrête tout surpris, mais point du tout affecté de la catastrophe.

   Le lendemain, en arrivant à son cabinet de travail, le cardinal de Richelieu était de fort mauvaise humeur.
Ce n’était pas à cause de l’accident causé par Mistigri, car les laquais l’avaient réparé tant bien que mal, et le sévère ministre ne s’aperçut de rien tout d’abord. Mais il regrettait amèrement sa décision de la veille. Il venait  d’apprendre que le chevalier de Mérancourt était un jeune homme plein de vaillance qui avait déjà fait ses preuves sur le champ de bataille. Et puis il était si jeune !
« Ah ! murmurait-il en caressant Mistigri qui faisait le gros dos sur le bras du fauteuil, je n’aurais pas dû la donner si vite cette signature. Hélas ! pourquoi est-il trop tard ! »
A ce moment même, on annonça M. de Laubardemont.
« Eh bien, monsieur le grand juge, demanda le cardinal avec un accès de tristesse dans la voix, le chevalier de Mérancourt à dû mourir en brave ? »
Une expression de profonde stupéfaction se peignit sur les traits de Laubardemont :
« Mourir ? Mais, Eminence, à l’heure qu’il est le chevalier de Mérancourt est aussi vivant que vous et moi.
- Vivant ! Dieu soit loué ! Mais comment se peut-il ?
- Je me suis conformé aux ordres de Votre Eminence. Voyez vous-même. Il n’y a pas trace de signature sur la sentence. »
Ce disant, le grand juge présenta au cardinal la feuille de parchemin de la veille. Mais ce fut en vain que celui-ci y chercha sa signature. Impossible de la trouver. Elle avait disparu dans une large tache d’encre que
 couvrait tout un coin de la feuille et qui était due à la turbulence maladroite de ce polisson de Mistigri.

   Richelieu resta un moment sans mot dire, intrigué, pris de soupçon.
« Cette tache, se demandait-il, qui l’a faite ? »
Tandis qu’il s’interrogeait de la sorte, il sentit un poids inaccoutumé au bout de son grand cordon du Saint-Esprit. C’était l’irrespectueux Mistigri qui s’y cramponnait de toute la force de ses griffes, en faisant résonner le plus bruyant des ronrons.
Tout de suite, son maître remarqua en lui quelque chose d’anormal :
« Ah ! çà, où as-tu mis tes pattes, Mistigri ? »
Puis, après avoir examiné de plus près les petites pattes tachées de noir :
« Mais c’est de l’encre, ma parole. Ah ! je comprends tout maintenant. »
Sa longue main blanche se plongea, caressante, dans la fourrure soyeuse du petit chat et, d’une voix émue, il murmura :
« Ah ! Mistigri, Mistigri, si tu savais la joie que tu me causes ! »
Se tournant alors vers Laubardemont :
« Monsieur le grand juge, nous nous contenterons d’envoyer quelque temps ce petit Mérancourt dans ses terres. Il pourra s’y marier tout à son aise et y méditer aussi sur les inconvénients qu’il y a à mettre flamberge au vent. »
Il chercha encore sous sa main le poil douillet et fin de Mistigri. Mais déjà celui-ci avait entamé une grande partie autour de la chambre avec Blanchette, Raton et Cyrus. Le cardinal les suivit un instant d’un regard affectueux, puis il conclut avec un bon sourire :
« Et voilà comment un tout petit chat peut sauver la vie d’un gentilhomme. Ah ! monsieur le grand juge, ceci nous prouve que la Providence se sert parfois des plus petits pour apprendre aux grands la clémence. »

Louis Sonolet (1872-1928)

Prédiction d'une grande carrière ecclésiastique

2024-45. L’État totalitaire et antireligieux qui exige une Église qui affaiblit la loi de Dieu, en l’adaptant au goût des volontés humaines…

20 février.

Claves Petri - blogue

Très chers Amis,

   En triant des notes, j’en ai retrouvé une sur laquelle j’avais griffonné des citations du Vénérable Pie XII relevées à l’occasion d’une lecture, et leur teneur m’a poussé à rechercher l’intégralité du texte qui est un discours daté du dimanche 20 février 1949, prononcé devant la foule des fidèles de Rome réunis sur la Place Saint-Pierre. Ce discours ne se trouve qu’en langue italienne sur le site du Saint-Siège, vous en trouverez ci-dessous une traduction.

   Ce 20 février 1949, Sa Sainteté le Pape Pie XII protestait solennellement contre la condamnation inique qui venait de frapper, au terme d’un procès ignoble, le Vénérable Joseph cardinal Mindszenty, archevêque métropolitain d’Esztergom et primat de Hongrie (1892-1975). C’était un temps de persécutions terribles pour les catholiques dans tous les pays d’Europe et d’Asie tombés sous le joug communiste.

   Au-delà des circonstances historiques de cette courageuse prise de parole du « Pasteur Angélique », nous trouvons dans ce texte des phrases remarquables (nous nous sommes permis d’en mettre certaines en caractères gras) qui sont absolument intemporelles… et qui se trouvent aussi particulièrement adaptées à nos temps où, sous une autre forme que la persécution qui sévissait en 1949, des formes totalitaires de l’Etat, soutenu par une opinion désormais majoritaire – chez nous, en France, en particulier ! – habilement manipulée, s’acharnent à faire passer pour coupables et méprisables la foi et l’Eglise catholiques.

   Mais il y a pis encore.
Ce 20 février 1949, le peuple romain avait interrompu par de vibrants et énergiques « No ! » le discours de Pie XII, dont les questions présentaient des situations qui paraissaient alors impossibles et impensables, ces mêmes questions, lues aujourd’hui, nous permettent de prendre la mesure de la décadence inouïe dans laquelle s’enlisent l’Eglise et la société : un Pontife romain, fort et fidèle, qui poseraient aujourd’hui les mêmes questions entendrait-il la foule répondre un « Non » unanime et vigoureux ? Les situations morales les plus évidemment contraires aux commandements de Dieu sont considérées comme quasi normales, ou du moins devant être tolérées, par une majorité de prétendus catholiques (en dehors des églises et chapelles traditionnelles) ; tandis que les hiérarques eux-mêmes, jusqu’à des degrés très élevés de la hiérarchie – je l’écris dans les larmes et l’effroi ! -, se comportent comme les représentants de commerce d’« une Église qui affaiblit la loi de Dieu, en l’adaptant au goût des volontés humaines, alors qu’elle devrait la proclamer et la défendre » !

Parce, Domine ! Parce populo tuo !
ne in aeternum irascaris nobis !

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur

Sa Sainteté le pape Pie XII - blogue

Romains! Fils et filles bien-aimés !

   Une fois de plus, en une heure grave et douloureuse, le peuple fidèle de la Ville éternelle a afflué vers son évêque et Père.
Une fois de plus, cette superbe colonnade semble pouvoir difficilement étreindre de ses bras gigantesques les foules qui, comme des vagues mues par une force irrésistible, se sont pressées au seuil de la basilique vaticane, pour assister à la Messe d’expiation, au point central de tout le monde catholique, et pour répandre les sentiments dont leurs âmes débordent.

   La condamnation infligée, au milieu de la condamnation unanime du monde civilisé, sur les bords du Danube, à un éminent cardinal de la Sainte Église romaine, a soulevé sur les bords du Tibre un cri d’indignation digne de la ville.
Mais le fait qu’un régime hostile à la religion ait frappé cette fois un prince de l’Église, vénéré par l’immense majorité de son peuple, n’est pas un cas isolé ; c’est l’un des maillons de la longue chaîne de persécutions que certains États dictatoriaux mènent contre la doctrine et la vie chrétiennes.
Une caractéristique bien connue des persécuteurs de tous les temps est que, non contents de tuer physiquement leurs victimes, ils veulent aussi les rendre méprisables et haineuses pour la patrie et la société.

   Qui ne se souvient des protomartyrs romains, dont parle Tacite (Annal. 15, 44), immolés sous Néron et représentés comme des incendiaires, des malfaiteurs abominables, des ennemis du genre humain ?
Les persécuteurs modernes se montrent des disciples dociles de cette école peu glorieuse.
Ils copient, pour ainsi dire, leurs maîtres et leurs modèles, s’ils ne les surpassent pas en grossièreté, habiles qu’ils sont dans l’art d’utiliser les progrès les plus récents de la science et de la technique dans le but de dominer et d’asservir le peuple, tels qu’ils n’auraient pas été concevables autrefois.

   Romains ! L’Église du Christ suit le chemin tracé pour elle par le divin Rédempteur. C’est éternel ; elle sait qu’elle ne peut périr, que les tempêtes les plus violentes ne pourront pas la submerger. Elle ne mendie pas de faveurs ; les menaces et les malheurs des puissances terrestres ne l’effraient pas. Elle ne se mêle pas de questions purement politiques ou économiques, et ne se soucie pas non plus de contester l’utilité ou le mal de l’une ou l’autre forme de gouvernement. Elle désire toujours, dans la mesure où cela dépend d’elle, avoir la paix avec tous (cf. Rom. XII, 18), elle donne à César ce qui lui revient de droit, mais elle ne peut ni trahir ni abandonner ce qui est à Dieu.

   On sait maintenant ce que l’État totalitaire et antireligieux exige et attend de vous comme prix de sa tolérance ou de sa reconnaissance problématique. C’est-à-dire qu’il voudrait une Église qui se tait quand elle devrait parler ; une Église qui affaiblit la loi de Dieu, en l’adaptant au goût des volontés humaines, alors qu’elle devrait la proclamer et la défendre avec tant d’importance ; une Église qui se détache du fondement inébranlable sur lequel le Christ l’a bâtie, pour s’étendre confortablement sur le sable mouvant des opinions du jour ou pour s’abandonner au courant qui passe ; une Église qui ne résiste pas à l’oppression des consciences et qui ne protège pas les droits légitimes et les justes libertés du peuple ; une Église qui, avec une servilité inconvenante, reste enfermée entre les quatre murs du temple, oublieuse du mandat divin reçu du Christ : Allez à la croisée des chemins (Matth. XXII, 9) ; instruisez toutes les nations (Matth. XXVIII, 19).

   Fils et filles bien-aimés ! Héritiers spirituels d’une légion innombrable de confesseurs et de martyrs ! Est-ce là l’Église que vous vénérez et aimez ? Reconnaîtriez-vous dans une telle Église les traits du visage de votre Mère ? Pouvez-vous imaginer un successeur du premier Pierre qui se plierait à de telles exigences ?

   Le Pape a des promesses divines ; même dans sa faiblesse humaine, il est invincible et inébranlable ; Proclamateur de la vérité et de la justice, principe de l’unité de l’Église, sa voix dénonce les erreurs, l’idolâtrie et les superstitions, condamne les iniquités et fait aimer la charité et la vertu.
Peut-il donc garder le silence, lorsque, dans une nation, les Églises qui lui sont unies sont arrachées par la violence ou par la ruse au centre de la chrétienté, à Rome, lorsque tous les évêques gréco-catholiques sont emprisonnés parce qu’ils refusent d’apostasier leur foi, que les prêtres et les fidèles sont persécutés et arrêtés parce qu’ils refusent de se séparer de leur véritable Mère l’Église ?
Le Pape peut-il garder le silence quand le droit d’éduquer ses enfants est retiré aux parents par un régime minoritaire qui veut les éloigner du Christ ?
Le Pape peut-il garder le silence lorsqu’un État, dépassant les limites de sa compétence, s’arroge le pouvoir de supprimer des diocèses, de déposer des évêques, de bouleverser l’organisation ecclésiastique et de la réduire au-dessous des exigences minimales pour le soin efficace des âmes ?
Le Pape peut-il garder le silence lorsqu’il s’agit de punir d’emprisonnement un prêtre coupable de ne pas vouloir violer le plus sacré et le plus inviolable des secrets, le secret de la confession sacramentelle ?
S’agit-il d’une ingérence illégitime dans les pouvoirs politiques de l’État ? Qui pourrait honnêtement dire cela ? Vos exclamations ont déjà donné la réponse à ces questions et à bien d’autres semblables.

   Que le Seigneur Dieu, fils et filles bien-aimés, récompense votre fidélité. Puisse-t-Il vous donner de la force dans les luttes présentes et futures. Qu’Il vous rende vigilants contre les coups de Ses ennemis et les vôtres. Qu’Il éclaire de Sa lumière l’esprit de ceux dont les yeux sont encore fermés à la vérité. Puisse-t-Il accorder à tant de cœurs, encore loin de Lui aujourd’hui, la grâce d’un retour sincère à cette foi et à ces sentiments fraternels dont la négation menace la paix de l’humanité.

   Et maintenant, que Notre Bénédiction apostolique descende largement, paternellement et affectueusement sur vous tous, sur la Cité et sur le monde.

Sa Sainteté le Pape Pie XII,
discours aux fidèles de Rome réunis sur la Place Saint-Pierre,
le dimanche 20 février 1949
in « Discours et messages radiophoniques du Pape Pie XII », tome X, dixième année de pontificat pp. 389 – 391

(Typographie polyglotte du Vatican)

Pie XII face à la foule de la place Saint-Pierre - blogue

2024-43. Quelques graves avertissements de l’Abbé Huvelin à propos de la tiédeur.

Lundi de la 1ère semaine de Carême.

croix et couronne d'épines - vignette

       Voici d’autres extraits des entretiens spirituels de Carême que l’abbé Henri Huvelin (1830-1910) donna lors de la récollection du 11 mars 1885, à la paroisse Saint-Eugène de Paris, dont nous avons déjà publié une citation il y a peu (cf. > ici).

   Dans les passages que nous publions ci-dessous, l’abbé Huvelin délivre de judicieux avertissements afin de nous mettre en garde contre la tiédeur, cette maladie de l’âme qu’il qualifie de « la plus redoutable des menaces ».
Six jours seulement après le mercredi des Cendres, ces mises en garde ne sont pas inutiles tant
 nos résolutions manquent souvent de constance, et tant nos habitudes, la routine reviennent si vite paralyser nos desseins de générosité et de ferveur.
Faisons donc grands cas des avertissements de ce grand connaisseur des âmes, dont l’œil était si exercé à débusquer les menaces de la vie spirituelle… 
 

Tiédeur - blogue

La tiédeur

 1) La plus grande des menaces : la tiédeur.

   « La tiédeur… Bien petit mot pour la plus redoutable des menaces et pour un état particulièrement dangereux [...].
La tiédeur est l’état de l’âme qui se laisse aller au péché véniel, à l’infidélité [...] mais qui néanmoins reste tranquille tout en résistant à Dieu.
Des âmes arrivent au confessionnal avec le poids de fautes très lourdes [...] mais elles ont la volonté de sortir de cette mauvaise voie. D’autres âmes ont, en apparence, moins à se reprocher. Aussi facilement que de l’eau, elles boivent ce qu’il leur plaît de nommer ‘fautes vénielles’. A force de résister à la Grâce, celle-ci ne devient plus qu’un petit souffle imperceptible. Voilà justement l’état dangereux : celui dont on ne souffre pas ! [...]

   L’âme tiède n’ira pas jusqu’au péché mortel, elle s’arrêtera ; mais elle se complait dans les infidélités et demeure dans cet état parce que, avant tout, elle craint de se gêner.
Par petitesse, mauvaise volonté ou lâcheté, absence d’ambition ou d’idée de grandeur, elle s’habitue à sa médiocrité… Elle méprisera ou négligera ce qu’elle traite de ‘petites choses’, comme si elle se plaçait au-dessus d’elles ; mais ces choses ‘petites’ forment l’ensemble des mérites de la vie ! [...]

   De telles âmes ne s’inquiètent pas. Elles voient le mal qu’elles n’ont pas commis, mais ignorent celui qu’elles font et se targuent de n’être jamais tombées dans la faute mortelle. Elles ne cherchent pas à sortir de leur dangereuse quiétude.
Leur acte de contrition est aussi machinal que leur confession. Elles n’ont aucun regret et ne prennent aucune résolution [...].
Il y a là quelque chose d’infiniment douloureux. Je ne parle de ce mal qu’avec la plus profonde tristesse. »

croix et couronne d'épines - vignette

 2) Les causes de la tiédeur :

    « La tiédeur provient de différentes causes :
… de la lâcheté d’une âme qui redoute plus l’effort et la peine que la déplaisance à Dieu.
… d’une disposition à se disperser.
On vit hors de chez soi. On recherche de tristes ressources dans les choses, parce que la pensée de Dieu est pénible et que l’on veut y échapper [...].

   On recherche certaines familiarités, certaines conversations frivoles. On perd le goût de la piété, on évite les personnes pieuses. On traite de haut certains devoirs comme s’ils étaient à l’usage des enfants et non à celui d’une âme qui commence à grandir [...].

   En un mot, la tiédeur vient du besoin de s’affranchir de ce qui commence à ennuyer, d’un travail trop lourd… Oui, l’âme tiède fuit la gêne, essaie de se faire une vie plus facile [...]. Elle s’enferme dans une existence sans gêne.
L’Evangile, ce n’est pas cela ! Dieu merci ! Le sentier est plus rude, mais aussi l’horizon plus étendu ! »

croix et couronne d'épines - vignette

 3) Débusquer sa propre tiédeur :

 « La tiédeur se reconnaît facilement. J’entends tous les jours : ‘Ma prière m’ennuie. Je ne la fais plus’. Voilà une âme tiède ! [...]

   Si Jésus passait [...] et disait : ‘Que voulez-vous que Je fasse ?’ Cette âme ne saurait que répondre. Au moment de prier elle subit l’ennuyeuse nécessité de la prière quotidienne et ne sait rien dire à Dieu. Voilà bien la tiédeur ! [...]

   Une âme me dirait : ‘J’essaie, je me reprends à plusieurs fois… quand je renonce à prier je suis triste de n’avoir rien su, rien pu dire’ ; alors ce ne serait plus de la tiédeur : le simple regret qui exprime une douleur serait le commencement d’une excellente prière ! [...]

   D’autres affirment : ‘Je n’ai rien fait que de très petites fautes’. [...] Elles comptent pour rien les résistances à la Grâce et toute la multitude des fautes d’omission, l’absence de tout effort, de toute pensée… Elles oublient les petites émotions malsaines recherchées, l’entraînement des sens auquel elles ont obéi… les pensées auxquelles elles n’ont pas résisté.
Elles ont joué aux abords du mal et, parce qu’elles n’ont pas été jusqu’au bout, elles comptent pour rien ce qu’elles ont fait ! [...]

   Certaines vies ne comptent aucun acte bienveillant, salutaire ; aucune gêne de soi-même : ces âmes-là ignorent la bonté… et elles jugent n’avoir rien fait de répréhensible parce qu’elles n’ont pas fait directement un grand mal ! [...]

   Les âmes qui vivent de pensées futiles, d’entrainement, de laisser-aller, perdent tant d’occasions de faire le bien ! Elles refusent si souvent la Grâce de Dieu [...].
Le seul moyen de les réveiller de cette torpeur sera la chute qui fait du bruit, entraînant tant de choses avec elles.
Dieu peut permettre cette chute humiliante pour réveiller l’âme qui s’endort, plutôt que de la laisser aller dans ses illusions. »

(Récollection prêchée à la paroisse  Saint-Eugène le 11 mars 1885)

La contrition - blogue

« Faites-moi miséricorde, ô Jésus, et ramenez mon cœur à Vous
dans la contrition et la ferveur ! »

2024-34. Où une question somme toute anodine entraîne un long développement : « De gustibus et coloribus non est disputandum ».

Des goûts et des couleurs on ne dispute pas
(mais on en peut sereinement discuter)

7 février 2024,
Fête des Bienheureux Jacques et Guillaume, martyrs (cf. > ici) ;
Mémoire du Bienheureux Pie IX, pape et confesseur (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Romuald, abbé et confesseur ;
Mémoire de la Bienheureuse Marie de la Providence, vierge.

Tolbiac au clavier - blogue

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Vous avez été plusieurs, depuis un peu plus de deux mois, à poser une question récurrente à mon papa-moine, à l’occasion de messages ou de commentaires, et Frère Maximilien-Marie n’a jusqu’ici répondu qu’à une seule des personnes qui l’interrogeaient à ce sujet, me semble-t-il…
Cette question, formulée de diverses manières, demande avec quelque insistance parfois : « d’où proviennent donc ces magnifiques images qui illustrent vos articles sur Jésus et les saints ? »
Cette question, c’est moi qui vais aujourd’hui y répondre, mais pas sans avoir rappelé ou précisé certaines choses…

Tolbiac au clin d'œil - blogue

A -  De gustibus et coloribus…  

   Vous l’avez compris depuis bien longtemps, Amis lecteurs, Frère Maximilien-Marie aime illustrer les publications du blogue avec des reproductions de tableaux ou d’œuvres d’art, des photographies ou dessins, adaptés au sujet traité dans l’article, ou le complétant d’une certaine manière. Ce faisant, il a d’ailleurs énormément approfondi ses études d’histoire de l’art ainsi que la connaissance des œuvres picturales, comme aussi d’ailleurs ses talents de photographe (dans les premières années de ce blogue, il ne possédait qu’un tout petit appareil photo  numérique de poche de qualité fort médiocre, et maintenant – grâce à un cadeau – il utilise un appareil photo « Canon Reflex » de qualité professionnelle qui permet des prises de vue beaucoup plus précises et belles).

   Evidemment, il choisit les illustrations en fonction du sujet traité… et de ses goûts.
Et là, je puis vous garantir que vous ne trouverez pas chez nous de reproductions de tableaux dits abstraits, non figuratifs ou produits de « l’art conceptuel »… etc.
Peut-être, très occasionnellement et comme par exception, des œuvres de la période romantique, mais probablement jamais d’œuvres impressionnistes ou issues des mouvements postérieurs de la peinture : exception faite peut-être de certains tableaux de l’inclassable Salvador Dali…

   Car, à la vérité, Frère Maximilien-Marie est, en peinture comme en architecture et en musique, essentiellement – et plus que viscéralement – attaché aux deux siècles qui suivent le saint concile de Trente : le maniérisme, l’âge baroque par dessus tout, le classicisme français, et un peu (à doses homéopathiques) le néo-classicisme ou l’académisme du XIXème siècle.
Pour l’art comme pour la politique, mon papa-moine, dont j’ai entièrement adopté les goûts et la pensée, est un religieux d’Ancien Régime« totalement assumé et décomplexé » comme on dit de nos jours.

   En outre, il ne renie en aucune manière son engouement, dans le domaine des représentations religieuses, pour les images de dévotion de « style italien » ou « sulpicien » au charme désuet qui l’ont toujours fasciné, et lui ont parlé au cœur depuis sa petite enfance : ces images que l’on a tellement critiquées depuis « l’après-guerre » (j’ai lu des articles de la fin des « années 40 » et des « années 50 » – sans parler de la période conciliaire ! – de la revue d’études liturgiques « La Maison-Dieu » qui me donnent vraiment envie de mordre et de griffer tellement je les trouve bêtes et méchants !).

   Vous serez peut-être scandalisés si je vous dites que les fresques du Bienheureux Giovanni da Fiesole, dit Fra Angelico, dont on lui a vanté le talent et l’ « art spirituel » usque ad nauseam lors de ses études d’iconographie religieuse (et qu’il a visitées pendant des heures au Couvent Saint-Marc de Florence), le laissent de marbre ; ou que l’art religieux du quatrocento et même de la première moitié du cinquecento ne lui « parlent » absolument pas.
De la même façon, le style de certains artistes du XXème siècle – profondément catholiques au demeurant -, fort prisés par certains prêtres ou religieux « tradis », n’éveille en nous (« nous », parce que je parle pour Frère Maximilien-Marie et pour moi) aucun écho, aucune élévation spirituelle, aucun élan de l’âme.

Rien !
Strictement rien !

   En matière de sensibilité artistique religieuse il y a autant de cas que de personnes ; et il y a – Dieu merci ! – une grande et légitime liberté.
Certaines âmes sont « portées » par le béton de la chapelle du couvent Sainte-Marie de La Tourette, l’église Notre-Dame de Royan ou la cathédrale de Brasilia : grand bien leur fasse ! Pour nous, ces édifices sont archidéprimantissimes et psychologiquement oppressants, tandis que nous nous trouvons en vérité spirituellement transportés dans les églises baroques et rococos d’Italie, de Bavière ou d’Autriche.

   A un pilier droit et sobre, nous préfèrerons toujours une colonne torse, surchargée de détails ornementaux : le premier nous est aussi rébarbatif que l’énoncé d’un problème mathématique, la seconde nous enthousiasme et nous remplit d’une joie vivifiante, sorte d’avant-goût du paradis.

basilique Saint-Alexandre et Saint-Théodore de l'abbaye d'Ottobeuren

Basilique Saint-Alexandre et Saint-Théodore de l’abbaye d’Ottobeuren (Bavière)

B – In omnibus caritas…

   Je ne partirai pas en croisade contre ceux qui goûtent la peinture religieuse de Fra Angelico ou de Giotto, de Maurice Denis ou de Pierre Puvis de Chavannes, ou qui s’émerveillent devant les sculptures d’Henri Charlier : simplement je ne les comprends pas – car c’est pour moi de l’ordre d’une totale incompréhension, comme si l’on me parlait une langue inconnue -, mais je puis entendre que cela corresponde à quelque chose d’important pour eux et je le respecte.
Je ne leur demande point de communier à mon enthousiasme pour les toiles du Caravage, de Simon Vouet ou de Pierre de Cortone, celles de Charles Le Brun, Hyacinthe Rigaud ou Pierre Mignard, ni d’éprouver les tressaillements d’esprit et d’âme qui sont les miens dans la contemplation de la sculpture du Bernin : j’attends juste – s’ils ne les comprennent pas – qu’ils acceptent que l’art baroque est profondément accordé à mon tempérament spirituel, et qu’ils le respectent.

   Ce blogue étant celui du Mesnil-Marie, dont le moine et le chat sont l’un comme l’autre baroquissimes jusqu’à la moëlle, il ne faut point s’attendre à y trouver autre chose que des illustrations qui leur conviennent à l’un comme à l’autre.
S’il y a certains de nos lecteurs auxquels elles ne plaisent pas, mais qui, par ailleurs, apprécient nos textes, ils n’ont qu’une seule chose à faire : ne pas regarder ces images et continuer leur lecture sans y prêter attention.
De notre côté, cela ne changera pas : si toutefois vous aviez encore quelque illusion à ce sujet, je vous puis assurer que c’est absolument en vain.

   Un vieil adage augustinien répète (et c’est grande sagesse) : « In necessariis unitas, in dubiis libertas, in omnibus caritas : dans les choses essentielles (celles qui touchent à la doctrine révélée, au dogme et à la morale), il faut l’unité ; dans les domaines pour lesquels diverses manières de penser sont légitimes, liberté ; mais en toutes choses, il faut conserver la charité ».
La perception artistique, la manière dont les divers tempéraments psychologiques appréhendent les œuvres d’art, ou la façon qu’a tel ou tel de percevoir l’esthétique de ce tableau ou de cette sculpture (sauf évidemment dans le cas d’œuvres blasphématoires, obscènes ou impies) sont de l’ordre de ces « in dubiis » où la liberté est pleinement légitime… mais où la charité n’est pas facultative.

   Nous vivons, malheureusement, dans un monde où des questions de pure sensibilité (je ne parle pas des questions doctrinales ou morales, ni des sujets qui leurs sont connexes) sont la source d’innombrables soupçons négatifs et querelles, qui s’enveniment et s’exacerbent pour arriver à des ruptures d’une radicalité inouïes : la mentalité qui tend, à tout propos et sans relâche, à « chercher des poux sur la tête d’un chauve » n’est pas, en définitive, un signe de bonne santé psychologique et spirituelle.

Tolbiac avec Saint Augustin

C – J’en reviens maintenant à la question initiale…

   Après ces réflexions qui nous ont entraînés bien loin dans les profondeurs de l’âme humaine, je puis maintenant revenir à la question initiale : d’où proviennent donc nos illustrations ?

   C’est très simple : lorsque ni Frère Maximilien-Marie ni moi-même ne trouvons d’images conformes à ce que nous recherchons et aimons, pour illustrer nos textes – soit parce qu’il n’en existe pas soit parce que celles qui existent ne nous plaisent vraiment pas -, nous les créons, tout simplement !
Désormais certaines fonctionnalités informatiques, liées à ce que l’on nomme très improprement « intelligence artificielle » (en effet, l’intelligence est et sera toujours et uniquement du côté de l’homme : la machine, elle, ne fera jamais que mettre en œuvre ce pourquoi l’intelligence humaine l’a programmée en lui permettant d’effectuer à grande vitesse des inventaires et des associations), sont des outils de création d’images.

   Nous ne dessinons pas ni ne peignons sur un écran d’ordinateur : nous nous contentons de demander à l’outil informatique ce que nous souhaitons, en écrivant des phrases, qui précisent le style que nous souhaitons (par exemple : une fresque dans le style de Raphaël, une sculpture gothique en bois, une gravure en taille douce, un tableau baroque de style flamand ou une enluminure de livre d’heures du XVème siècle… etc.) et le sujet (par exemple un évêque en ornements baroques ou une vierge martyre de l’époque paléochrétienne, en précisant les attributs [livre, auréole, fleurs...], la couleur de ses cheveux ou de ses yeux… etc) : les propositions rendues par l’application correspondent à nos souhaits… ou pas.
Il faut trier, recommencer, approfondir la connaissance des ressorts sur lesquels il faut appuyer pour approcher au mieux du résultat espéré.
Il faut de la patience, comme, en définitive, lorsqu’on dessine ou peint.

   Parfois, des détails incongrus apparaissent, parce que la très bête « intelligence artificielle », qui dispose, pour inspirer son travail, de milliers de détails recensés et inventoriés dans des milliers d’œuvres d’art déjà existantes dont elle a les références en ses banques de données, ne fera pas les bonnes associations, ne comprendra pas exactement la description qu’on lui a donnée, n’a pas la subtilité ni la sensibilité que nous attendons d’elle.

   Mais d’autres fois, c’est plutôt satisfaisant ; même si ce n’est jamais vraiment parfait.
Nous sélectionnons finalement, puis publions les images qui nous plaisent et qui, à notre sens et selon nos goûts, peuvent contribuer à attirer l’attention de l’œil et de l’âme vers ces saints oubliés, méconnus, peu invoqués, qui ont contribué à la première évangélisation de notre beau Royaume ou qui sont issus de nos chères dynasties royales, mais pour lesquels l’iconographie est terriblement indigente.
Il est fréquent, en effet, qu’il n’existe pas – ou plus – de portraits de ces saints ou que le peu qui existe ne soit pas très esthétique.
Une très authentique miniature du XIVème siècle n’est pas forcément une réussite artistique ; et je connais des tempera sur bois de l’école siennoise qui coûtent des fortunes sur le marché de l’art, mais aussi sur lesquelles la Mère de Dieu louche ou est affublée d’un goître !
Entre une fresque du XIIIème siècle sur laquelle un saint a autant d’expression qu’un poisson rouge après 999 tours dans son bocal, et un  portrait – imaginaire certes – réalisé grâce à l’ « intelligence artificielle » mais correspondant à ce que nous souhaitons en matière de dévotion, d’expression et de symbolique, nous n’hésitons pas et nous choisissons la seconde !

   Plusieurs de nos amis, prêtres, religieux et même authentiques artistes, nous ont félicité pour ces réalisations : comme je crois qu’ils sont de véritables amis, nous ne les soupçonnons pas de vile flagornerie à notre endroit.
Et nos œuvres, habituellement nous les signons. Pour moi : « Tolbiac fecit », et pour Frère Maximilien-Marie « Fr. Mx.M.  fecit », puisqu’elles deviennent véritablement nos œuvres propres.

   Pour mon papa-moine, qui souffre depuis des mois et des mois de névralgies dans la main droite, qui éprouve de grandes souffrances pour écrire, et qui ne peut plus dessiner, alors que pour lui le dessin et l’illustration ont toujours été une quasi nécessité, la découverte de cet outil – qui n’est et ne restera jamais qu’un simple outil – a été un véritable soulagement de l’esprit, puisque, quoique différemment, il lui est ainsi possible de continuer une production picturale.

   Il est possible que certains autres de nos lecteurs ne nous disent pas qu’ils n’aiment pas nos illustrations parce qu’ils les trouvent trop « sulpiciennes », « sucrées », « baroques », « de goût italien » : nous les remercions de leur charitable patience à notre endroit, et les invitons – pourquoi pas ? – à travailler eux-mêmes à réaliser des images conformes à leur piété et à leurs goûts, pour éventuellement les porter à notre connaissance. Nous en serons honorés : « in omnibus caritas » !

   Voilà, j’espère avoir répondu aux interrogations qui nous ont été adressées, mes bien chers Amis…
Restons chat-leureusement unis dans l’amour de la Beauté et Bonté suprême qui est Dieu Lui-même, Lequel nous a donné des sensibilités différentes pour que nous Le goûtions tous et chacun d’une manière unique.

pattes de chat Tolbiac

Moine peintre - blogue

2024-29. Intervention de Sa Majesté exprimant son soutien aux paysans de France.

Dimanche de la Septuagésime 28 janvier 2024,
Fête de Saint Charlemagne, Roi des Francs et empereur d’Occident.

       Ce samedi 27 janvier 2024 en début de soirée, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté le Roi Louis XX de France, a publié sur les réseaux sociaux le texte suivant.
A ceux qui prétendent que le Prince est loin des Français et de leurs préoccupations, et qui n’ont qu’une conception assez binaire de la politique, ce texte donne- une fois de plus, une belle et forte leçon d’authentique réalisme et montre à quel point le Roi est proche de ses sujets et désireux d’apporter une solution juste, conforme à la manière dont la Famille Capétienne a toujours recherché le bien des Français.

Prince Louis de Bourbon

       Quand donc seront entendues les plaintes des agriculteurs et des pêcheurs de France que l’on empêche de travailler ? Comment ne pas être solidaires de ceux qui depuis des décennies subissent des contraintes aux finalités assez opaques et souvent contradictoires les unes les autres ?

   Quand arrêtera-t-on de faire établir des règlements par des autorités lointaines, déconnectées de la vie des métiers ? Les technocrates ont, hélas, bien trop souvent perdu depuis plusieurs générations, tout contact avec les particularités de la terre et de la mer. Quand cessera-t-on d’accorder crédit aux plus radicaux visant, pour toute l’Europe, non pas les progrès mais la disparition de l’agriculture traditionnelle nourricière ?

   L’histoire enseigne que la souveraineté alimentaire est essentielle pour qu’un pays assume son destin.
La crise qui explose actuellement vient de loin. Ceux qui savent écouter les Français et les comprendre, la sentaient poindre depuis longtemps. Elle prolonge celle des Gilets Jaunes de 2018 qui n’a connu que quelques réponses faibles, partielles et ponctuelles sous forme d’aumônes.

   Il était alors attendu du pouvoir une remise en cause de l’ignorance des réalités des professions et la prise en compte de la dégradation continue des territoires ruraux livrés à l’abandon des services publics ; attendu un changement d’attitude vis-à-vis de ceux qui travaillent et peinent pour des salaires de misère et des conditions de vie très dures mettant un cinquième de la population sous le seuil de pauvreté.

   Chaque fois, le même mal est dénoncé. Celui de ne pas vouloir écouter ceux qui savent, pour ne prendre que le parti de ceux qui spéculent et qui cogitent dans leur cabinet loin des réalités de terrain. Celui du décalage entre la vraie vie et l’idéologie surtout quand celle-ci n’est même plus capable de penser en termes de système global. Chacun y va de sa spécialité ou de sa particularité sans se préoccuper d’une approche globale dans laquelle la société tout entière trouverait sa place.
Pourtant l’agriculture comme la pêche permettent aisément de comprendre que la société est une chaîne et que, si certains veulent se nourrir correctement et au juste prix, il faut que d’autres produisent, et surtout, actuellement, puissent produire sans entraves.

   Si la France officielle ne revient pas au réalisme politique, sans chercher à être prophète, gageons que les carrefours et les autoroutes resteront bloqués pour longtemps. Virtuellement aucun barrage n’a été enlevé depuis les Gilets jaunes puisqu’aucune réforme de fond n’est apparue jusqu’alors.
Suspendus un temps, ils peuvent reprendre leur vigueur.

   En politique il n’y a rien de pire que le déni de réalité. Les agriculteurs et les pêcheurs en font les frais actuellement mais ils savent qu’ils ne sont que l’avant-garde de tout un peuple qui peu à peu redécouvre que s’il a beaucoup de devoirs, il a aussi des droits. Notamment celui de vivre de son travail.

   Alors ne restons ni aveugles ni silencieux face à la tragédie que vivent nos agriculteurs et nos pêcheurs afin qu’ils soient entendus et qu’enfin l’État se souvienne qu’en France il ne peut y avoir de pays sans paysans.

manifestation des paysans janvier 2024

2024-26. Diverses communications de Sa Majesté autour de la date anniversaire du martyre du Roi Louis XVI et message politique de vœux pour 2024.

28 janvier 2024,
Fête de Saint Charlemagne (cf. > ici) ;
Anniversaire de la mort d’Henri de La Rochejaquelein (cf. > ici et > ici).

Monogramme Prince Louis de Bourbon - Louis XX

       Comme chaque année désormais, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté le Roi Louis XX, après avoir adressé au commencement de janvier de manière relativement rapide ses vœux aux Français (voir > ici), attend les alentours de la date hautement symbolique du 21 janvier pour faire une autre publication de début d’années, plus longue et au caractère plus politique.
Cette année, Sa Majesté l’a fait au moyen d’en entretien accordé au « Journal du dimanche » (JDD) et Elle l’a annoncé de la sorte sur les réseaux sociaux le 24 janvier en milieu de journée :

Capture d’écran - FB du Roi 24 janvier 2024 - Vœux

   Je vous engage donc à vous rendre sur le site de cette parution et à y lire de manière paisible, en prenant le temps de la réflexion, le texte que notre Souverain légitime nous donne comme une espèce d’encouragement à une saine réflexion politique, à la lucidité, et à une action en conséquence pour 2024 : cliquer > ici (nota bene : ce texte est en accès gratuit, mais il faut toutefois accepter les « cookies » pour y avoir accès).

   Remercions Dieu de nous avoir donné un Prince qui sait où se trouvent les priorités, et qui n’omet donc jamais de rappeler l’Alliance originelle conclue dans les fonts baptismaux de Reims et le primat du plan divin :

Louis XX fin du texte des vœux aux Français 24 janvier 2024

   Sa Majesté se trouvait à Paris, le dimanche 21 janvier, pour assister à la Messe célébrée à la Chapelle Expiatoire, où l’on a compté plus de 900 personnes.
Nous ne possédons pas encore, à ma connaissance, le texte complet du texte de plusieurs minutes qui a été lu par le Roi à l’occasion du déjeuner qui a suivi cette fervente cérémonie, texte qui à ce jour ne figure pas en entier dans les médias officiels chargés de les publier.
Sur Facebook, accompagnant la publication de plusieurs photos ou petites vidéos de cette célébration à la Chapelle Expiatoire et du « bain de foule » qui a suivi, Sa Majesté a écrit :

« Chaque année nous nous retrouvons plus nombreux à cette même date autour de la Mémoire du Roi Louis XVI et du souvenir de son sacrifice.
Louis XVI, ne l’oublions pas, dans son admirable Testament ne s’attardait pas aux malheurs de son temps mais se plaçait dans l’avenir : « Que le sang répandu ne retombe pas sur les Français » ; que son sacrifice soit rédempteur.
Louis XVI nous rappelle ce qu’est un roi chrétien en période de trouble. Son Testament est un acte de foi et nullement un plaidoyer pour la politique qu’il a menée. Il ne se défend pas devant la justice des hommes dont il sait d’ailleurs combien elle est détournée, mais il s’inscrit pleinement dans la promesse du sacre et dans les devoirs qu’il a vis-à-vis du Créateur. »

Et aussi :

« Je vous remercie chaleureusement de votre présence à mes côtés malgré le froid glacial. Vous êtes chaque année plus nombreux, chers Amis, chers Fidèles, pour honorer le souvenir du Roi Louis XVI et, plus largement, pour ce qu’a représenté et peut représenter toujours pour la France le principe de la royauté, gardons espoir en l’avenir. »

foule à la Chapelle Expiatoire 21 janvier 2024

La foule devant la Chapelle Expiatoire au moment de la Procession d’entrée et de l’arrivée de Sa Majesté

   Pour ne rien omettre, il faut enfin signaler que l’hebdomadaire « Marianne » (n°1400 11-17 janvier 2024) a ouvert l’une de ses tribunes à un débat sur le sujet de « l’aide à mourir », c’est-à-dire l’épineuse question du « suicide assisté », au sujet duquel un projet de loi devrait être présenté dans les prochains mois.
Guillaume Trichard, récemment porté à la tête du Grand Orient de France (et donc, à ce poste, successeur de Philippe Egalité !) s’y montre évidemment favorable, tandis que le contradicteur qui a été choisi pour porter une voix contradictoire et argumenter contre est Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, qui s’en acquitte avec la fermeté et l’intelligence qui conviennent.
On peut accéder (pour 1 € !) à la totalité de cet échange > ici.

Louis XX contre le suicide assisté

Monogramme Prince Louis de Bourbon - Louis XX

2024-19. A travers Louis XVI, Dieu est certes visé, et la couronne bien sûr, mais c’est aussi le premier coup porté dans notre pays contre la paternité et contre l’éducation que tout parent donne à sa descendance.

Prône pour la Messe solennelle de Requiem pour le repos

de l’âme du Roi Louis XVI

Eglise Saint-Eugène-Sainte-Cécile, Paris,
- 20 janvier 2024 -

La Famille Royale au Temple - blogue

La Famille Royale au Temple

Au Nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il. 

                                                           Mes chers Frères,

       Le Roi va mourir, et il est seul, en présence de Dieu. Louis le Désiré, – comme le peuple le surnomma -, va mourir car les nouveaux maîtres ne peuvent accepter que le Lieutenant du Christ leur rappelle que tous les hommes sont soumis à la loi divine. Celui qui va verser son sang n’est pas qu’un monarque, le roi très chrétien ; il est aussi un père, celui des enfants de France et celui de toutes ses nations et de tous ses peuples à l’unisson. À travers lui, Dieu est certes visé, et la couronne bien sûr, mais c’est aussi le premier coup porté dans notre pays contre la paternité et contre l’éducation que tout parent donne à sa descendance.  En 1786, il avait fait part à Monsieur de Malesherbes d’une de ses craintes à l’égard du monde nouveau : «  Prenons-y garde, nous aurons peut-être un jour à nous reprocher un peu trop d’indulgence pour les philosophes et pour leurs opinions. La philosophie trop audacieuse du siècle a une arrière-pensée » (Lettre, 13 décembre 1786). Cette philosophie ne s’est jamais fatiguée de saper tous les fondements de la monarchie en transformant la Révélation en une simple religion naturelle dans le meilleur des cas. La paternité n’échappa pas à cette attaque en règle. Il suffit de lire l’Émile ou De l’éducation de Jean-Jacques Rousseau : la nature fait bien les choses et il ne faut pas la contrarier ; l’enfant doit donc être libre de ses propres expériences ; le père de famille ne doit pas user d’autorité puisque les seules valeurs sont la liberté, la tolérance, l’égalité. Cette première balafre dans le tissu éducatif chrétien prépare notre décadence actuelle, et Louis XVI, dans sa jeunesse, en fut en partie victime mais il sut rapidement s’en défaire car il laissa agir les lumières surnaturelles. Il ne pouvait oublier que Notre Seigneur fut reconnu pour l’autorité de son enseignement et que le Fils ne cessa d’obéir au Père jusqu’à la mort de la Croix. Si le Roi nous émeut tant, c’est parce qu’il mit en pratique, jusqu’au dernier jour, un souci paternel envers les Français et qu’il fut père attentionné pour ses enfants prisonniers au Temple avec lui. Les principes qui le portèrent alors ne pouvaient que faire enrager ses ennemis, tel Bertrand Barère de Vieuzac déclarant à la Convention le 20 janvier 1793 : « L’arbre de la liberté ne saurait croître s’il n’était arrosé du sang des rois. » Les principes boursouflés de la Révolution prirent racine dans un terreau préparé de longue date par les philosophes, les sociétés secrètes et les journalistes du temps, ceci à partir d’un enseignement déjà perverti. Quelques mois après l’exécution du Roi en 1793, le P. Pierre de Clorivière, – jésuite dans le secret depuis la suppression de son Ordre en 1762 et qui rétablira la Compagnie de Jésus en France en 1814 -, écrit ses Études sur la Révolution, avec déjà à l’esprit l’idée d’une restauration de la foi et des mœurs : « Nous n’aurions pas vu la religion dépérir si promptement parmi nous si la jeunesse eût été élevée d’une manière plus chrétienne, et si cette partie de l’éducation qui regarde plus directement la foi n’y eût été trop négligée. Ceux qui se sont servis de leur pouvoir pour établir le règne de l’impiété ont bien senti cette influence de l’éducation, et pour établir solidement leur œuvre mauvaise, pour en perpétuer les effets, ils se sont emparés de tout ce qui regardait l’instruction publique. » Son diagnostic n’a pas pris une ride. Et Louis XVI, prisonnier, comprit que le dernier exemple qu’il pouvait léguer à ses peuples était celui d’une famille unie dans l’épreuve, soucieuse de l’éducation et de l’instruction de ses enfants. Les témoignages à ce sujet sont bouleversants, surtout en pensant à ce que la Convention fera subir à Louis XVII avant de le laisser périr misérablement. Le roi fut proche du dauphin, comme un vrai père aimant et autoritaire jusqu’à ce qu’il fût séparé de force des siens. Il fut fidèle à son devoir de transmission, comme lui-même en avait été le bénéficiaire de la part de son grand-père Louis XV, contre le mauvais air du temps. Adolescent, admirablement instruit notamment par Monsieur de La Vauguyon, il avait été l’objet du mépris d’un philosophe comme Helvétius affirmant avec hauteur : « On ne peut sans inconséquence être à la fois pieux et homme d’État, dévot et bon citoyen, c’est-à-dire honnête homme. » (De l’Homme, de ses Facultés intellectuelles et de son éducation) Ce dernier persifle à l’unisson des frères du futur Louis XVI, qui eux épousèrent sans vergogne l’esprit des Lumières. Propagande donc contre le futur roi qui tient sa source dans des principes éducatifs tordus mis en place en amont de la Révolution. Le P. de Clorivière notera encore : « Il ne suffit pas d’inculquer aux enfants les premiers éléments de la doctrine chrétienne, il faut déraciner de leur esprit et de leur cœur les fausses notions qu’on y a jetées. Il faut accoutumer au joug, des esprits qui n’en ont jamais connu, leur inspirer l’horreur pour le péché dont ils ont été habitués à ne faire aucun cas. Il ne s’agit pas seulement d’annoncer la foi à des hommes qui ne l’ont jamais reçue, mais d’y ramener une nation qui, publiquement, y a renoncé ; il faut l’amener à s’avouer coupable d’apostasie, alors qu’elle se glorifiait de porter la lumière chez les autres peuples. » Cette analyse est plus que jamais actuelle : la France contemporaine ne pourra renaître qu’en passant par ces étapes et en commençant par l’humble repentir de sa trahison.

   Alors que le roi n’est plus roi aux yeux de la Nation, il ne lui reste plus qu’à accomplir jusqu’au bout son devoir paternel, et celui-ci s’exprime par des gestes ordinaires. Le fidèle valet de chambre Cléry nous rapporte certains gestes : chaque matin au Temple, à 9 heures, le roi descendait chez la reine et peignait le dauphin avant que tous ne partageassent un même déjeuner. Puis Louis XVI s’occupait de l’éducation du dauphin, en lui faisant réciter des vers de Corneille et de Racine, en lui donnant des leçons de géographie et de cartographie. Souvenons-nous que Louis XVI était très cultivé, intéressé par toutes les sciences, parlant couramment plusieurs langues. La reine se chargeait de l’éducation de Madame Royale. En début d’après-midi, tous avaient le droit de se promener dans le jardin, et le dauphin, sous la direction de Cléry, jouait au palet, au ballon et pratiquait la course. Après le dîner de midi, le dauphin s’exerçait à l’écriture puis jouait à la balle et au volant. Le soir, la reine et Madame Élisabeth lisaient pour tous un ouvrage d’histoire. Le dauphin soupait le premier et sa mère lui faisait réciter ses prières avant de le coucher. Tout ceci malgré la surveillance grossière et humiliante des municipaux de la Commune. Par exemple, le roi ne pouvait apprendre l’arithmétique au dauphin, sous prétexte qu’il aurait pu « parler en chiffres » (sic). Les dames n’eurent pas le droit de faire de la tapisserie car elle aurait pu être « des hiéroglyphes destinés à correspondre avec le dehors » (resic). Le roi tenait bon, s’imposant une discipline parfaite. N’étant pas autorisé à entendre la messe, il lisait chaque jour l’office des chevaliers du Saint-Esprit et Cléry lui procura un bréviaire, ainsi que des livres de piété pour toute la famille. Louis XVI ne se lassa pas de lire durant sa captivité : plus de deux cent cinquante ouvrages, dont Montesquieu, Buffon, Hume, les tragiques français, l’Imitation de Jésus-Christ, et, quatre heures par jour, les auteurs latins. Son inaltérable sérénité déconcertait les conventionnels qui lui rendaient visite. Le 11 décembre 1792, début du procès de Louis Capet, il fut séparé de sa famille, et notamment du dauphin, ce qui, nota Cléry, le plongea dans une tristesse vite surmontée. Le ciel était bas et il pleuvait ce jour-là. Tant de larmes étaient à venir et elles ruissellent encore sur le visage de la France parricide.  À la fin de cette parodie de procès, de Sèze, un des trois avocats de Louis XVI, tous admirables, s’écria avec courage devant les juges iniques : « Louis sera donc le seul Français pour lequel il n’existera aucune loi ni aucune forme ! Il n’aura ni les droits du citoyen ni les prérogatives de roi ! Il ne jouira ni de son ancienne condition ni de la nouvelle ! Quelle étrange et inconcevable destinée !…» Victime de tant d’injustice, Louis XVI ne fléchit point, demeurant ferme dans l’empire sur lui-même et dans la persévérance, fruit de l’éducation qu’il avait reçue comme dauphin. Les qualités d’âme de ce roi n’apparaissent pas miraculeusement au pied de l’échafaud. Elles y sont couronnées par l’ultime sacrifice car ce prince les cultiva depuis son plus jeune âge. Jules Michelet lui-même, pourtant très hostile à l’ancienne France, reconnaît que « Louis XVI n’eut qu’un vice, qui était la royauté même. » Il est possible d’ajouter que la royauté, aux yeux de ses adversaires, n’eut également qu’un vice : celle de dépendre de Dieu. Louis XVI traversa une purification à l’aune de l’épreuve et de la douleur, comme la reine d’ailleurs. À l’adresse de la France, de ses nations et de ses peuples, il poussa un cri identique à celui du Maître face à la ville sainte : « Jérusalem ! Jérusalem ! Que de fois j’ai voulu rassembler tes enfants à la manière d’une poule qui rassemble ses poussins sous ses ailes, et tu ne l’as pas voulu ! » (Matthieu, XXIII. 37) Le 20 juin 1791, il avait ainsi essayé de réveiller ses sujets par cet appel : « Français, et vous surtout Parisiens, … revenez à votre roi, il sera toujours votre père, votre meilleur ami. Quel plaisir n’aura-t-il pas d’oublier ses injures personnelles et de se trouver au milieu de vous lorsqu’une constitution qu’il aura acceptée librement fera que notre sainte Religion sera respectée. » Et surtout ses dernières confidences à Cléry, le 18 janvier, alors qu’il vient d’apprendre sa condamnation à mort : « Je ne crains pas la mort ; mais je ne puis envisager sans frémir le sort cruel que je vais laisser après moi à ma famille, à la reine, à nos malheureux enfants ! Je vois le peuple livré à l’anarchie, devenir la victime de toutes les factions, les crimes se succéder, de longues dissensions déchirer la France ; – Oh ! mon Dieu, était-ce là le prix que je devais recevoir de tous mes sacrifices ? N’avais-je pas tout tenté pour assurer le bonheur des Français ? » Paroles d’un père pour sa propre famille et aussi pour la grande famille de la France. Il est blessé dans sa paternité car la Révolution ne peut que la haïr, comme elle détestera aussi la maternité. Paternité et maternité confiés à l’homme par Dieu comme image visible de la relation qui lie tout être à son Créateur, et donc objets de la vindicte d’un régime qui s’arroge les droits divins. Telle est la république française qui poursuit, inlassablement, son œuvre de destruction contre la famille, contre l’éducation chrétienne et même, désormais, contre toute loi naturelle.

   Alors quelle réponse en présence de tant d’ignominies accumulées maintenant depuis plus de deux siècles, sinon le témoignage sans fin du juste persécuté, comme le rapporte déjà Isaïe ? « Il a été offert parce que lui-même l’a voulu, et il n’a pas ouvert la bouche ; comme une brebis qu’on mène à la boucherie, comme un agneau devant celui qui le tond, il a gardé le silence. Il a été enlevé par l’angoisse et le jugement. » (LIII. 7-8) Le terrible Marat sera un instant ébranlé par la patience héroïque du roi durant l’interrogatoire du 11 décembre 1792 : « Il s’est entendu appeler Louis sans montrer la moindre humeur, lui qui n’avait jamais entendu résonner à son oreille que le nom de Majesté ; il n’a pas témoigné la moindre impatience tout le temps qu’on l’a tenu debout, lui devant qui aucun homme n’avait le droit de s’asseoir. Innocent, qu’il eût été grand à mes yeux dans cette humiliation ! » (Journal de la République française par l’Ami du peuple, 12 décembre 1792) Bien des esprits contemporains, loin d’ignorer Louis XVI, continuent de le détester, les mêmes qui blasphèment contre le vrai Dieu et qui ironisent, à l’instar des témoins de la Crucifixion : « Il a sauvé les autres et Il ne peut se sauver lui-même ; s’Il est le Roi d’Israël, qu’Il descende maintenant de la Croix et nous croirons en lui. » (Matthieu, XXVII. 42) Les tambours qui battirent pour couvrir la voix du roi juste avant son exécution continuent follement de retentir afin d’empêcher la proclamation de la Vérité, et les hommes de pouvoir refusent d’être des pères car ils repoussent la paternité divine. Le sacrifice de Louis XVI n’est pas vain car il permettra peut-être à la France de s’agenouiller de nouveau un jour, de recouvrer son honneur, de pleurer son péché qui, par la décapitation d’un roi, l’a conduit à renier son héritage. Nous sommes exsangues, à bout de souffle, mais encore persistant dans l’erreur et dans l’orgueil. Que le silence qui nous accable ne soit pas le signe de notre malédiction mais l’annonce de notre résurrection. Ainsi soit-il.

Au Nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.

                                    P. Jean-François Thomas s.j.
31 décembre 2023
Dimanche dans l’Octave de la Nativité

Louis XVI au Temple instruisant son fils - gravure exposée au musée de la révolution à Vizille - blogue

Dans la prison du Temple, Louis XVI assurant l’éducation du Dauphin
[détail d'une gravure d'époque - présentée au musée de la révolution à Vizille]

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