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2024-136. Nous ne cesserons de le dire et le redire : notre attachement à la Sainte Messe latine traditionnelle n’est pas une question de goûts, mais il est lié à la défense de l’intégrité de la foi catholique.

25 juin,
Fête de Saint Prosper d’Aquitaine, confesseur et docteur de l’Eglise (cf. ici) ;
Mémoire de Saint Guillaume, abbé et confesseur ;
Mémoire du 2ème jour dans l’octave de Saint Jean-Baptiste ;
9ème jour du Jeûne des Apôtres (cf. ici) ;
Anniversaire de la mort de d’Artagnan (cf. ici) ;
Anniversaire de l’exécution de Georges Cadoudal (cf. ici).

Exaltation du Missel traditionnel - blogue

       S’il y a un point sur lequel nous devons sans cesse insister pour rectifier – à temps et à contretemps – une idée fausse (que certains « tradis » eux-mêmes contribuent malheureusement parfois à véhiculer), point qui, par ailleurs, revient presque constamment dans l’argumentaire de ceux qui veulent minimiser ou occulter les raisons profondes de notre attachement à la Sainte Messe latine traditionnelle, c’est que l’essence de celui-ci ne repose pas sur l’esthétisme (même si ce peut-être, très légitimement, un motif secondaire de cet attachement), ni sur des goûts personnels, ni sur une certaine « nostalgie du passé », ni sur un effet de « mode vintage ».
En bref, il ne s’agit pas d’un problème de « sensibilité » ; ce n’est pas une question de soutane, de latin, de chant grégorien, de beauté des ornements ou de je ne sais quoi encore dans les formes extérieures (qui ne sont toutefois pas négligeables dans la mesure où elles sont l’expression d’une réalité ontologique), mais c’est une question de foi.

   Que l’on ne me fasse pas dire, ce que je ne dis pas, n’écris pas et ne pense pas, à savoir que les fidèles qui assistent à la célébration de la Messe selon l’ordo missae issu de la réforme de Paul VI ainsi que les prêtres qui la célèbrent auraient tous fait naufrage dans la foi, et ne seraient plus catholiques ; mais je constate – parce que je ne suis ni sourd ni aveugle -, qu’un grand nombre de fidèles dans les paroisses où ce rite est célébré, et qu’un nombre trop important de prêtres qui le célèbrent, n’adhèrent plus fermement aux vérités de foi de la Sainte Eglise catholique, ou les réinterprètent, ou les édulcorent, ou les relativisent.

missel et colombe - vignette

   Je ne dis pas que c’est la « Messe de Paul VI » (disons ainsi pour faire plus simple) qui est LA cause de cette perte ou de cet amoindrissement de la foi, car ce serait d’un simplisme qui confinerait à la malhonnêteté intellectuelle, je constate seulement que, partout où elle est célébrée, si les prêtres et les fidèles n’y font pas un effort continu pour demeurer chaque jour entés sur les vérités fondamentales du dogme catholique, on assiste au développement et à la progression quasi inéluctable de toutes les erreurs et hérésies liés au modernisme condamné par Saint Pie X.
Et, de ce fait, je ne crains pas d’affirmer, ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de le dire et de l’écrire, que l’ordo missae de 1969 ne constitue habituellement pas un rempart contre les erreurs doctrinales, de même qu’il ne garantit pas la croissance dans l’amour fervent des vérités de la foi révélée.

   Je ne dis pas non plus que toutes les Messes célébrées selon le « missel de Paul VI » sont invalides : si un prêtre, validement ordonné, ayant la volonté d’accomplir ce que veut faire la Sainte Eglise (et le strict et quasi scrupuleux respect des rites et des rubriques est la manifestation extérieure de cette volonté), réalise les gestes sacramentels et prononce les paroles prescrites qui les doivent accompagner, la consécration sera valide.
Mais j’ajoute que, d’une part, cela n’ôtera pas les graves imperfections et les ambigüités de ce rite, et que, d’autre part, nous ne savons que trop – hélas ! – que beaucoup de prêtres, depuis l’instauration de ce nouvel ordo missae, et cela va de pair avec une formation sacerdotale indigente ou erronée liée à une crise doctrinale généralisée, ne remplissent plus les conditions requises pour la validité de la Messe.

   Ce dernier constat a une conséquence pratique directe : à moins de très bien connaître le célébrant et ses intentions au point d’avoir une confiance objective absolue, le reste du temps, en de très (trop) nombreuses occasions, en raison même de ce que l’on voit et entend, on est pour ainsi dire forcé de douter de la validité de ces Messes célébrées communément dans les églises de la Chrétienté en ruines.

missel et colombe - vignette

   Nous connaissons plutôt bien les cas de ces prêtres diocésains qui portent la soutane, qui « remettent du latin » dans la célébration (en particulier avec le chant du kyriale et du Credo), qui officient avec sérieux et piété, qui parfois même ont plaisir à célébrer « ad orientem » - car rien ne s’y oppose, tout au contraire – la « Messe de Paul VI » : d’une certaine manière nous pouvons affirmer que c’est plutôt bien, puisqu’ils ré-instaurent dans les paroisses des éléments qui appartiennent à la Tradition multiséculaire de l’Eglise latine, et qu’ils habituent à nouveau les fidèles à autre chose qu’au misérabilisme et aux fantaisies multiformes des liturgies paroissiales qui ont prévalu à la suite de la réforme liturgique…
Mais cela suffit-il ?

   En plus de cinq décennies de pratique, le novus ordo a donné d’innombrables preuves de son caractère équivoque, selon le mot très juste et très exact de feu Monseigneur Ducaud-Bourget (cf. ici).
Or indépendamment de la louable bonne volonté d’une partie non négligeable des nouvelles générations du clergé, générations souvent moins idéologues que celles des révolutionnaires de l’après-concile et de l’après-68, la célébration du « Missel de Paul VI » dans des formes plus traditionnelles, si elle constitue un pis-aller, ne sera jamais une solution.

   Le novus ordo est par trop de points définitivement équivoque et sous-entend des doctrines hétérodoxes que ne corrige pas un aspect plus traditionnel donné à la forme de la célébration : c’est comme si l’on collait une étiquette portant le mot « médicament » sur un flacon contenant du poison, sans vider le liquide nocif qui se trouve à l’intérieur et sans le rincer très soigneusement.
Il ne suffit pas de changer l’étiquette ou l’aspect du flacon, il faut changer le contenu !  

missel et colombe - vignette

   La liturgie latine traditionnelle garantit, de la meilleure manière possible, la transmission de la foi catholique (ce qui, en rigueur, nous le savons, ne signifie par pour autant que son célébrant soit parfaitement orthodoxe), alors que pour ce qui concerne le novus ordo il n’y a finalement rien à rajouter de plus que ce qu’affirmaient Leurs Eminences Messieurs les Cardinaux Ottaviani et Biacci dans le fameux « Bref examen critique » : ce nouveau rite de la messe s’éloigne de manière impressionnante de la doctrine du Saint-Sacrifice, de l’Eucharistie et du Sacerdoce telle qu’elle a été précisée par le saint concile de Trente.
C’est tout !

   Nous ne cesserons donc de le dire et de le redire : notre attachement à la Sainte Messe latine traditionnelle n’est pas une question de goûts ou de sensibilité, mais il est lié à la défense de l’intégrité de la foi catholique ; notre attachement au rite latin traditionnel n’est pas lié à des formes extérieures mais il est ordonné au combat pour l’orthodoxie doctrinale.

Voilà pourquoi ce n’est pas négociable !

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur

Sainte Messe : élévation

2024-135. De la Primauté de Pierre.

Lettre mensuelle aux membres et amis

de la

Confrérie Royale

- 25 juin 2024 -

La Primauté de Pierre

« Et moi, je te dis que tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle. Et je te donnerai les clefs du royaume des cieux : tout ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux. »*

Chers Amis,

       Que nous regardions la société, la politique ou même l’Église, nous pourrions avoir la tentation de penser que notre époque est la plus noire qui puisse être. Il nous faut pourtant savoir apprécier les petites perles d’espérance que le Seigneur nous accorde. L’une d’elle brille dans le bourbier politique des futures élections législatives : le projet de loi sur l’euthanasie est désormais repoussé aux calendes grecques. Même s’il reviendra probablement sur la table, nous avons gagné quelques temps de répit. De même, en bon péroniste qu’il est, le Souverain Pontife, tout en faisant le contraire avec James Martin, a dénoncé par deux fois les « tarlouzes » et la culture gay qui s’épanouissent dans les séminaires ou dans la Curie Romaine. Le Pape chéri des médias perd en côte de popularité en dénonçant les dérives qu’il n’est pas politiquement correct de dénoncer. Cherchons ces perles rares et sachons les apprécier, même si leur beauté est éphémère. N’oublions pas cette belle vertu théologale de l’Espérance qui est si souvent délaissée aujourd’hui en faveur d’un fatalisme pessimiste.

   Notre-Seigneur, dans le passage cité plus haut, nous donne un motif d’espérance : les portes de l’Enfer ne prévaudront jamais sur Son Église. Comment concilier ces paroles du Verbe et la situation actuelle de l’Église et de l’Office Pétrinien ? Quelle attitude adopter quand les actes du Souverain Pontife contredisent la Tradition et le Magistère de l’Église ? Entre ultramontanisme et sedevacantisme l’adage In medio stat virtus est, encore une fois, gage d’une sainte réflexion.

clefs de l'Eglise - vignette

L’ultramontanisme ou l’omnipotence papale

   La captation de nombreux pouvoirs temporels et spirituels par la papauté n’est pas une nouveauté contemporaine qui serait apparue au concile Vatican I [1]. La primauté papale divise déjà les Chrétiens depuis avant le Grand Schisme d’Orient [2]. Certains considèrent que le pape n’est qu’un évêque parmi d’autres avec seulement un honneur particulier conféré par le Patriarcat de Rome, siège du Prince des Apôtres, saint Pierre. La position catholique est que le pape, en tant que successeur de saint Pierre, l’est aussi bien sur le siège épiscopal de Rome que comme chef du collège épiscopal. Cela veut dire que le Pontife exerce « un pouvoir ordinaire, suprême, plénier, immédiat et universel que [il] peut exercer librement [3] ». Ce pouvoir est dit ordinaire, car il est exercé habituellement et pas seulement dans des circonstances exceptionnelles ; suprême, car il n’y a pas d’instance au-dessus de l’évêque de Rome à laquelle avoir recours ; plénier, car il touche à tous les aspects de la vie de l’Église ; immédiat, car il le détient directement de Dieu lui-même ; universel car il s’exerce sur l’ensemble de l’Église et de ses membres ainsi que sur toutes les Églises particulières et leurs regroupements ; enfin il est libre dans la mesure où il est indépendant de toute autorité humaine, séculière ou religieuse.

   Certains vont interpréter cette définition en présentant le pape comme un « super-évêque » qui peut, tel un potentat séculier, décider de ce qui lui plaît. « Majesté, vos désirs sont des ordres ». Le pape pourrait donc faire ce qui bon lui semble, changer le catéchisme, l’interprétation de la Révélation selon ses propres interprétations subjectives. Une telle ligne de pensée est absurde : le pape, ainsi que les évêques, sont les gardiens de la Tradition, les Traditionis custodes. Malheureusement pour cette ligne de pensée, la Tradition est sa propre autorité : ce que l’Église fait sienne depuis des siècles unanimement et universellement est la vérité. La promulgation d’un nouveau dogme n’est pas une invention du pape mais un développement théologique déjà contenu dans la Révélation. Comme pour le dogme de l’Assomption, proclamé par Pie XII en 1950, se fonde sur une vérité étant présente dans la Sainte Écriture (même de manière obscure) partout, de tout temps et par tous. Le pape n’invente rien. Au contraire il affermi ses frères dans la foi.

   Quand un pape parle, ce qui sort de sa bouche n’est pas parole divine. Ce ne sont, souvent, que les paroles d’un homme pécheur comme les autres. Pourtant comment devons-nous prendre des paroles et des actes qui semblent être contraires à la Tradition catholique ? Devons-nous les accepter en invoquant l’obéissance comme justification à ce qui se passe ? La réponse est simple : Non.

   En effet l’obéissance n’est pas, contrairement à ce qui est souvent présenté, la vertu par excellence, elle est une fille de la justice à laquelle elle est soumise. Il est juste de se soumettre à la loi divine même si par obéissance on nous dit de faire le contraire. L’obéissance disparaît lorsque ce qui est demandé est contraire à la foi et aux mœurs. En justice il nous faut choisir les commandements de Dieu face aux demandes des hommes.

   Si nous poussons cette ligne de questionnement plus loin, nous arrivons à celle, cruciale, de ce qu’est l’autorité. Est-ce que l’autorité invente la réalité et la vérité ou doit-elle être à leur service ? Dit différemment : une loi positive est-elle vraie ontologiquement et doit-on toujours la suivre ? Ou bien est-elle subordonnée à des biens supérieurs ? Quand une l’autorité est abusée et commande des choses contre la loi divine ou naturelle, doit-on lui obéir ?

   Doit-on alors rejeter toute autorité si la personne qui l’exerce en abuse ?

Pierre-Etienne Monnot - statue de Saint Pierre - basilique du Latran

Le sedevacantisme : une solution ou un problème en plus ?

   Peut-on considérer que la mauvaise utilisation d’une autorité suffit à ce que cette autorité soit automatiquement enlevée à celui qui l’exerce ? Un mauvais pape – voire un pape hérétique – peut-il perdre la papauté si son enseignement contredit la doctrine et la Tradition de l’Église ?

   L’histoire nous montre que non. Durant sa longue histoire l’Église eût de mauvais, et même de très mauvais Pontifes, et pourtant les portes de l’Enfer n’ont pas prévalu contre elle. De même, tous les rois de France ne furent pas des saints et firent parfois des erreurs de gouvernement ou de jugement. Dans ces cas il faut, tel un roseau ou un chêne, attendre que l’orage passe, car il passera. Considérons que Dieu, dans Sa prévoyance éternelle, permet que nous vivions une telle crise politique et religieuse. Pourquoi laisse-t-Il faire ? Que devons-nous faire ?

   La réponse encore une fois est simple : poursuivre comme l’Église l’a toujours fait en suivant les pasteurs qui sont sains. Nous avons plusieurs exemples : les Cardinaux Sarah, Burke, Müller, Branmüller ou encore Monseigneur Schneider. Certes les voix sont peu nombreuses mais lorsque saint Athanase combattit l’arianisme, il était presque seul face aux hérétiques. Il ne faut pas perdre espoir et rejeter l’Église car sinon nous ne faisons que créer des problèmes encore plus nombreux qu’il serait impossible de régler et qui, finalement, seraient des indications que l’Église n’est plus.

   La Tradition est sa propre autorité. Ceux qui la suivent ne font que confirmer leurs frères dans la foi. Ceux qui la contredisent se condamnent eux-mêmes par leurs propres actes et paroles. Il est donc important d’être formé mais également de se lier, au moins moralement pour les fidèles et ecclésiastiquement (autant que cela est possible) pour les clercs, avec une autorité saine.

   Les exemples plus récents de Monseigneur Lebfevre ou encore de Dom Gérard Calvet montrent qu’il est parfois nécessaire de faire un pas en arrière afin de survivre avant que l’autorité, assainie au moins pour un temps, reconnaisse le bienfondé des actes de « désobéissance » matérielle.

   La media via est donc la communion avec l’autorité, même exercée d’une mauvaise manière, tout en « désobéissant » si elle demande des choses contraires à la foi et aux mœurs. Le plus important est de garder et de cultiver la vertu d’espérance. Nous pouvons, et devons, par charité, prier et faire des sacrifices pour tous les pasteurs ; pour leur courage ou leur conversion. Implorons le Très-Haut qu’Il daigne abréger cette crise et redonner à Son Épouse sa splendeur et sa sainteté visible dans ce monde qui en a tant besoin.

clefs de l'Eglise - vignette

   En guise de conclusion, nous pouvons méditer ces mots de Léon XIII :

   « À qui veut régénérer une société quelconque en décadence, on prescrit avec raison de la ramener à ses origines. La perfection de toute société consiste, en effet, à poursuivre et à atteindre la fin en vue de laquelle elle a été fondée, en sorte que tous les mouvements et tous les actes de la vie sociale naissent du même principe d’où est née la société. Aussi, s’écarter de la fin, c’est aller à la mort ; y revenir, c’est reprendre vie [4] ».

   Voilà ce qui assainira l’Église : le retour à la Tradition car si nous somme coupée d’elle :

   « Nous voyons cette approche non seulement dans la théologie morale, mais aussi dans la liturgie. Des traditions sacrées qui ont bien servi l’Église pendant des centaines d’années sont maintenant présentées comme dangereuses. L’accent mis sur l’horizontal repousse le vertical, comme si Dieu était une expérience plutôt qu’une réalité ontologique [5] ».

   Soyons donc fort et pleins d’espérance pour aller de l’avant : Duc in altum !

+ G.     

* Mat. 16, 17-18.

[1] 1869 – suspendu sine die en 1870
[2] 1054

[3] CDC 1983, LII, I, 1, art. 1.
[4] Léon XIII, Encyclique Rerum novarum
[5] Conférence de SER card. Sarah donnée le 14 juin 2024 au NAPA Institute.

Vitrail Saint-Esprit Basilique Vaticane

2024-129. Devons-nous nous attendre à de nouvelles mesures contre la Messe latine traditionnelle ?

Mardi 18 juin 2024,
Fête de Saint Ephrem de Nisibe, diacre et docteur de l’Eglise (cf. > ici) ;
Mémoire des Saints Marc et Marcellien, martyrs ;
Dans l’Ordre de Saint Augustin, mémoire de la Bienheureuse Marine de Spolète ;
Deuxième jour du Jeûne des Apôtres (cf. > ici) ;
Anniversaire de la victoire de Patay (18 juin 1429 – cf. > ici) ;
Anniversaire de la mort de Michel-Richard de Lalande.

Messe traditionnelle

       Dans un article daté de ce 17 juin, le site anglophone « Rorate cœli », généralement bien informé, a publié une véritable alerte sous ce titre : Rumeurs grandissantes sur une « solution finale » pour la messe latine traditionnelle. C’est à lire > ici. Même les personnes qui, comme moi, sont absolument incapables de lire un texte en langue anglaise peuvent néanmoins faire un « clic » droit sur la page indiquée ci-dessus et activer « traduire en français » pour en prendre connaissance.

   En résumé : en rappelant la fiabilité des sources qui informent de ce genre d’événements à venir la rédaction de « Rorate cœli », cet article fait état de manigances acharnées et incessantes des ennemis de la Messe catholique, bien installés à la Curie, qui chercheraient par tous les moyens, en sus de toutes les mesures restrictives à sa célébration déjà publiées pendant l’actuel pontificat, à l’éradiquer totalement et définitivement.
Ils voudraient pour cela la publication la plus rapide possible, d’un document du Saint-Siège.

   Malgré le caractère urgent et très alarmiste de cet article, j’ai toutefois envie de commenter par un « nihil novi sub sole », sans trouble ni inquiétude véritables : je n’ai en effet jamais imaginé le moins du monde que ceux qui sont à la manœuvre dans l’ombre – mal cachés sous la soutane transparente de l’actuel occupant du trône pontifical – en resteraient là.
Qu’un énième document, quelque forme qu’il prenne, vienne encore restreindre de manière plus ou moins drastique la célébration publique et officielle de la Sainte Messe latine traditionnelle (ou tout, pour parler encore plus simplement, de la Sainte Messe catholique, pour la distinguer de la « Messe équivoque » que dénonçait feu Monseigneur Ducaud-Bourget cf. > ici), c’est dans la logique la plus évidente de cette pitoyable fin de règne.

   Mais j’entends déjà la question : « Mais, si cela arrive, et qu’un nouveau document vient carrément interdire la Messe traditionnelle, qu’allez-vous faire ? »
La réponse est très simple, absolument sereine, et sans l’ombre d’une hésitation : « Nous ferons ce que nous avons toujours fait : nous résisterons ! »

   Nonobstant une éventuelle « absolue interdiction », et n’en déplaise à tous ceux qui prêcheront « l’humble soumission » à des mesures qui ne seront qu’un abus de pouvoir supplémentaire, il ne manquera jamais de prêtres authentiquement catholiques qui, compte-tenu du caractère abusif et contraire à toute la Tradition liturgique et canonique d’une telle mesure, continuerons de célébrer la Messe latine traditionnelle, même s’il leur faut pour cela entrer en clandestinité ou passer pour « schismatiques ».
Et il ne manquera jamais de lieux non plus pour permettre au rite multiséculaire et sans équivoque d’être célébré, même s’il nous faut pour cela parcourir encore davantage de kilomètres.

   Je l’écris en toute tranquillité d’âme et je n’en fais pas mystère : nous résisterons… et nous patienterons.
Les papes ne sont pas éternels, leurs règnes ont toujours une fin : une grande partie de la solution de toute crise est toujours d’ordre biologique.
Il suffit d’attendre paisiblement.

   Aux heures difficiles, il faut toujours se souvenir que Dieu nous aime et que Sa vérité finit toujours par triompher.
A côté de cela, quelque pénibles que puissent être les agitations des méchants, et quelque douloureuses que puissent être les épreuves qu’ils nous infligent et infligeront encore, elles n’ont en réalité pas beaucoup de consistance et les promesses de la vie éternelle ne leur ont pas été assurées.  

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur

Missel traditionnel - vignette blogue

2024-127. D’un très beau dessin que nous avons reçu et qui illustre admirablement les principales dévotions de notre Mesnil-Marie.

17 juin,
Au Mesnil-Marie, fête (transférée) de Sainte Lutgarde de Tongres, vierge ;
Mémoire de Saint Grégoire Barbarigo, évêque et confesseur ;
Anniversaire du martyre de l’abbé Jean-Baptiste Abeillon (cf. > ici).

autel des dévotions du Mesnil-Marie

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Laissez-moi aujourd’hui vous présenter un cadeau qui nous a été fait par l’un de nos amis : cela a été une surprise pour Frère Maximilien-Marie, qui l’a reçu vendredi dernier, 14 juin, par la Poste. Avec quelques reliques de Bienheureux, destinées à notre chapelle, il y avait ce dessin original dont vous avez la photographie ci-dessus : l’ensemble a constitué une très belle surprise pour notre Frère, qui ne s’y attendait absolument pas, et dont je puis vous témoigner de la joie en ouvrant ce paquet.
Que l’ami de notre Mesnil-Marie qui a eu cette délicate attention, et qui se reconnaîtra, soit ici publiquement et chaleureusement remercié !

   Notre ami M. a fait représenter par un talentueux dessinateur de sa connaissance, une sorte de synthèse des principales dévotions (mais pas toutes !) qui se trouvent mises en valeur en notre Mesnil-Marie, à la manière d’un splendide autel baroque, tel que nous les aimons : les belles proportions de l’ensemble et la fine précisions des détails nous ont enchantés.
Nous serions évidemment plus que très heureux si nous avions ici une chapelle avec un tel autel !

   Ce dessin a été réalisé sur une feuille à dessin de 33 cm de largeur sur 24 cm de hauteur, et j’ai résolu d’en isoler pour vous quelques détails. Voici tout d’abord l’autel lui-même avec son tabernacle monumental.

l'autel et le tabernacle

   Puis – du premier coup d’œil, je n’en doute pas -, vous avez identifié, dominant l’ensemble, au centre, et en arrière de la croix d’autel qui est, elle et elle seule, posée sur le saint tabernacle, la statue de Notre-Dame de Compassion, notre céleste protectrice, avec les sept glaives symbolisant ses douleurs.

Vierge des Douleurs

   Sur les gradins supérieurs de l’autel sont placés les bustes des saints patrons en second du Refuge Notre-Dame de Compassion : notre très chère Sainte Philomène, notre intercessrice de prédilection, et Saint Gabriel dell’Addolorata (cf. > ici), modèle de la dévotion aux douleurs de la Mère de Dieu.

Saints patrons en second

   Enfin deux grandes statues en pied encadrent l’autel représentant, du côté de l’épître, notre Bienheureux Père Saint Augustin – dont nous suivons la Règle -, et du côté de l’Evangile, Saint Maximilien-Marie Kolbe, premier des saints patrons de profession religieuse de mon papa-moine.

Saint Augustin et Saint Maximilien-Marie Kolbe

   Voilà donc, chers Amis, une brève présentation de ce dessin qui nous enchante, et qui nous fait rêver d’avoir un jour une chapelle où un semblable autel de marbres variés et de bronzes pourrait trouver sa réalisation, pour la plus grande gloire de Dieu et la sublimation de notre chère et sublime liturgie traditionnelle…

Patte de chat Tolbiac.

2024-123. In memoriam : Monseigneur François Ducaud-Bourget.

12 juin,
Fête de Saint Jean de Saint-Facond (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Léon III, pape et confesseur ;
Mémoire des Saints Basilide, Cyrin, Nabor et Nazaire, martyrs ;
Anniversaire du rappel à Dieu de Monseigneur François Ducaud-Bourget (12 juin 1984).

Mgr François Ducaud-Bourget - blogue

Monseigneur François Ducaud-Bourget (1897-1984)

   Fils de Jean-Maurice Ducaud et de Marie-Louise Bourget, Germain Joseph Pierre Marie Maurice Ducaud, dit François Ducaud-Bourget, est né à Bordeaux le 24 novembre 1897. Après sa formation générale, chez les Frères des Ecoles Chrétiennes, il fut en école supérieure de commerce.
Brancardier volontaire en 1914, il est appelé sous les drapeaux en 1917 (
7ème régiment d’infanterie coloniale à Bordeaux) et passera un bref temps dans les Balkans en 1918.
Rendu à la vie civile, il entre en 1919 au séminaire de Saint-Sulpice, à Paris.

   Ordonné prêtre le 28 juin 1924, il enchaîne les postes de vicaire dans plusieurs paroisses de l’archidiocèse de Paris. En 1942, il prend une part active à la Résistance, ce qui lui vaudra la médaille de la Résistance et la Croix de Guerre. En 1944, il est vicaire à Saint-Germain l’Auxerrois, puis, en 1945, devient Chapelain de l’Ordre de Malte, ce qui lui vaut le titre de Monseigneur.
Il passe trois années à Haïti – secrétaire particulier et vicaire général de l’archevêque de Port-au-Prince qui avait voulu l’avoir auprès de lui -, revient en Europe pour raison de santé, puis est finalement nommé aumônier de l’Hôpital Laënnec en 1961, poste qu’il conserve jusqu’en 1971.

Chapelle de l'Hôpital Laënnec à Paris

(nota bene : ces dernières années, la chapelle a été désaffectée et vandalisée)

   Monseigneur Ducaud-Bourget voit arriver les réformes consécutives au second concile du Vatican : simplifications apportées à la Messe traditionnelle, introduction de la langue vernaculaire, puis, en 1969 un nouvel Ordo missae

« Après le Concile, on a commencé à nous expliquer qu’il ne fallait plus dire le Judica me du début de la messe. Evidemment, cela ne faisait pas partie intégrante de la messe, c’étaient des prières que le prêtre faisait en allant en procession de la sacristie jusqu’à l’autel. Par conséquent (…) ce n’était pas un drame ; si on tenait au Judica me, on pouvait le dire avant, et, à l’autel, on commençait directement par le Adjutorium nostrum, et la messe continuait.
Mais voilà qu’ensuite on nous a dit qu’il fallait supprimer le dernier Evangile. Bon. Le dernier Evangile, c’est encore une partie qui a été rajoutée à la messe, pour répondre au désir de la foule. Donc, ça ne fait pas partie intégrante du sacrifice ; c’était une dévotion vénérable, respectable ; mais enfin, puisqu’on nous disait de la supprimer, on pouvait la supprimer.
Et puis, progressivement, on a commencé à toucher à l’offertoire. Or, l’offertoire, lui, est partie intégrante du sacrifice. Alors, quand j’ai vu cela, j’ai dit : dans ces conditions, je reprends tout comme autrefois ».
(Cité par André Figuéras, in « Saint-Nicolas du Chardonnet – le combat de Mgr Ducaud-Bourget », éd. de Chiré 1977 pp. 43-44)

   Et à propos du formulaire que le cardinal-archevêque de Paris lui demanda de signer, où se trouvait l’affirmation que la messe de Paul VI n’est ni hérétique ni équivoque :

   « (…) Hérétique, je n’en sais rien. Si elle l’était, ce serait moins dangereux, ça se verrait. Mais, pour ce qui est d’être équivoque, la messe de Paul VI l’est incontestablement (…).
Ils ne veulent pas admettre que leur messe est équivoque. Moi je dis ceci : lorsque la même messe peut être dite par des pasteurs protestants et par des prêtres catholiques [note : Mgr Ducaud-Bourget fait ici référence à une affirmation de Paul VI lui-même qui déclara avoir voulu une messe que les protestants puissent célébrer sans que cela leur posât de problème], est-ce qu’elle est protestante, est-ce qu’elle est catholique ?
Réponse : elle est équivoque. Qu’est-ce que c’est, selon le dictionnaire, que d’être équivoque ? C’est d’avoir deux sens. Alors, si la messe de Paul VI n’est pas équivoque, c’est que nous ne parlons plus français.
Je le répète : cette messe qui peut-être dite par la Confession d’Augsbourg, par les pasteurs anglicans, et par les curés catholiques, c’est bien évidemment une messe équivoque. En effet, elle peut être entendue de façon différente par ceux qui la disent identiquement, puisque les protestants ne croient pas au sacrifice de Jésus-Christ perpétué, alors que nous y croyons. Alors, la question est la suivante : est-ce que cette messe-là est un sacrifice, ou est-ce qu’elle ne l’est pas ? »
(Ibid. pp. 44-45).

Salle Wagram - haut lieu du combat pour la Messe traditionnelle

La Salle Wagram (état actuel) qui devint un lieu de célébration de la Messe traditionnelle
après l’expulsion de Mgr Ducaud-Bourget de Laënnec

   Monseigneur Ducaud-Bourget continuant donc à célébrer la messe de son ordination – la Messe latine traditionnelle, la Messe catholique sans équivoque -, la chapelle de l’Hôpital Laënnec devint le lieu où de plus en plus de fidèles, fuyant leurs paroisses, affluèrent par centaines : faisant appel au concours de plusieurs autres prêtres, eux aussi réfractaires à l’équivoque, il y eut bientôt quatre messes dominicales à Laënnec pour quelque 1500 fidèles.

   L’archevêché multiplia les pressions, mais d’autres instances manœuvrèrent elles aussi. Ce fut un véritable feuilleton à suspens où l’on vit intervenir un syndicat – la CFDT pour ne pas la nommer -, qui se plaignit à la direction de l’Assistance Publique du manque de « neutralité » de l’aumônier. L’Assistance Publique demanda à l’archevêché de faire cesser une activité qui « troublait la bonne marche des services hospitaliers » (sic), et, en 1971, Monseigneur Ducaud-Bourget, âgé de 74 ans, fut démis de ses fonctions, et la chapelle de l’Hôpital Laënnec fut interdite d’accès aux fidèles traditionnels.

   C’est alors que commencèrent les années d’errance à la recherche d’une hospitalité liturgique (mais les communautés pressenties se virent interdire par l’archevêché d’accueillir les exclus de Laënnec), de locaux à aménager ou de salles à louer, tandis que le nombre des fidèles ne cessait d’augmenter…
Enfin fût trouvé un arrangement avec le directeur de la Salle Wagram et une véritable communauté stable de type paroissial put continuer à vivre et à se développer autour de ce lieu pour le moins original où la Messe catholique dominicale prenait la suite des combats de boxe et autres bals musette du samedi soir !
Jusqu’à ce dimanche 27 février 1977, dont nous avons déjà parlé dans les pages de ce blogue (cf. > ici), où la sainte audace de Monseigneur Ducaud-Bourget et de ses amis prêtres et laïcs fervents rendit une véritable église, une église historique au centre de Paris, au culte catholique pour lequel elle avait été édifiée : Saint-Nicolas du Chardonnet !

église Saint-Nicolas du Chardonnet façade principale

Eglise Saint-Nicolas du Chardonnet

   Pendant sept ans, Monseigneur Ducaud-Bourget fera vivre, par la force de sa foi, cette église devenue célèbre dans le monde entier : au cœur de la capitale, la célébration de la liturgie traditionnelle dans un cadre qui lui est approprié, et malgré, dans les premières années, des alertes régulières faisant craindre une expulsion, est devenue une sorte de source vive où des milliers d’âmes sont venues puiser les grâces incommensurables et à nulle autres pareilles qui sont liées à la Messe authentiquement catholique.
Des centaines de vocations religieuses et sacerdotales ont été suscitées et se sont épanouies en conséquence de l’aplomb, de la fermeté, du courage, de la hardiesse et même – disons-le – du culot de ce prêtre exemplaire, qui ne manquait pas d’humour, et dont à juste titre Son Excellence Monseigneur Lefebvre a déclaré : 

« L’Eglise catholique en France peut l’inscrire à la suite de ses prêtres les plus célèbres, les plus fidèles et les plus zélés… »
(Message d’hommage publié le 14 juin 1984 après l’annonce de la mort de Monseigneur Ducaud-Bourget).

   En septembre 1983, à l’approche de son quatre-vingt sixième anniversaire, Monseigneur Ducaud-Bourget organisa sa « succession » et remit à l’abbé Philippe Laguérie, alors membre de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, le soin de continuer l’œuvre qu’il avait initiée à Saint-Nicolas du Chardonnet (on trouvera l’enregistrement des sermons qu’il prononça pour son quatre-vingt-sixième anniversaire et à l’occasion de sa dernière Messe à Saint-Nicolas du Chardonnet > ici).

   Victime d’un infarctus du myocarde, ce saint prêtre fut rappelé à Dieu dans la nuit du lundi 11 au mardi 12 juin 1984, dans une clinique de Saint-Cloud : il était dans sa quatre-vingt-septième année et la soixantième année de son sacerdoce.
Il a été inhumé dans le déambulatoire de Saint-Nicolas du Chardonnet.

   Pour la petite histoire, en terminant l’évocation de cette vie admirable, pour laquelle nous rendons à Dieu de vives actions de grâces, je puis bien vous confier que nous possédons en notre Mesnil-Marie un authentique souvenir de Monseigneur Ducaud-Bourget, une quasi relique : sa canne-siège, dont voici ci-dessous une photographie.

A lire aussi :
- La lettre ouverte des intellectuels français à Paul VI en faveur de la Messe traditionnelle (1976) > ici
- Le magnifique récit de la libération de Saint-Nicolas du Chardonnet par André Figuéras > ici

canne-siège de Monseigneur Ducaud-Bourget

Canne-siège de Monseigneur Ducaud-Bourget
que nous conservons précieusement au Mesnil-Marie

2024-122. Le Royaume est-il un paradis terrestre ?

11 juin,
Fête de Saint Barnabé, apôtre ;
Anniversaire du Sacre de S.M. le Roi Louis XVI (11 juin 1775).

Serments de Louis XVI à son Sacre - Jean-Michel Moreau - blogue

« Serments de Louis XVI à son Sacre » gravure de Jean-Michel Moreau

Vignette Lys - blogue

   A l’occasion de l’anniversaire du Sacre de Sa Majesté le Roi Louis XVI (dimanche 11 juin 1775), nous proposons à votre lecture, et à votre réflexion, une lettre aux membres et amis de la Confrérie Royale qui avait été publiée le 25 janvier 2017, et dont la teneur mérite qu’on la relise et approfondisse…

Le Royaume est-il un paradis terrestre ?

Le meilleur n’est pas le parfait…

       « Il était une fois, dans un royaume très lointain… » Tous les contes, pour ainsi dire, commencent de cette façon, et il n’y est question que de rois et de princesses. Pourquoi, d’instinct, l’univers de nos rêves se situe-t-il d’emblée dans un royaume ? Serait-ce la nostalgie d’un passé lointain et ancré dans la mémoire collective ?

   « Dans un royaume lointain… » :

« Par cette formule familière, analyse un site internet [1]le narrateur situe d’emblée le récit dans un monde imaginaire où les repères spatio-temporels demeurent flous. Le merveilleux permet de donner une dimension universelle au récit et crée une distance rassurante entre l’enfant et les thèmes abordés. L’enfant peut alors apprivoiser ses peurs et se sentir moins seul, plus fort face à elles ».

   La sagesse populaire nous transmet donc à sa façon l’idéal du gouvernement dans lequel l’enfant peut se construire : un royaume, parce qu’il est le plus naturel à l’homme. La République, à côté, est un système en pratique beaucoup plus artificiel et en théorie beaucoup moins idéal ! Vous ne trouverez donc pas de président ni de médiateur de la République dans nos belles histoires pour enfants… seulement dans les « histoires à dormir debout » que se fabriquent les adultes en perte d’innocence !

   Mais tous les royaumes ne sont pas imaginaires, et ils sont ce que nous en faisons. Tout homme aspire au bonheur, mais peu en trouvent le chemin ; la plupart se jettent éperdument dans des bonheurs apparents et − il est vrai − séduisants, mais il n’est qu’à évaluer le moral ambiant de nos contemporains pour se rendre compte que les promesses matérialistes n’ont pas été à la hauteur.

   Venons-en à cette assertion que nous prouve l’histoire des sociétés : tous les régimes désirant instaurer un paradis terrestre se transforment inévitablement en un véritable enfer. Les exemples historiques ne manquent pas : les goulags du communisme, les camps de concentration du national-socialisme, les persécutions religieuses de la république athée (IIIeme République en France, croisade des Cristeros au Mexique…) et toutes les révolutions « libératrices » (1789, 1830, 1848, 1870, 1917, 1968). L’idéalisme est du ressort des rêves, pas de l’action ; l’espoir fait vivre, l’idéalisme tue (au sens propre comme au figuré !).

grille d'honneur - Versailles

Les grilles dorées d’un paradis terrestre ? 

   Pourquoi tant d’échecs de ces si belles pensées et − quelquefois − bonnes intentions ? Parce que c’est oublier que depuis le péché originel, l’homme est une créature déchue, les portes du Paradis lui ont été fermées. Dès lors, le Paradis tient du domaine à la fois de la nostalgie d’un passé perdu, et à la fois de notre espérance chrétienne d’une promesse désirée, mais il ne sera jamais vécu ici-bas ! Le Christ nous a rouvert les portes et Il nous promet certes, comme au bon Larron, son Royaume, mais qui « n’est pas de ce monde » (Jn 18, 36).

   Alors pourquoi croire en un régime − osons le mot de nos contemporains – passéiste, du moins suranné ? Parce que tous les bonheurs sans Dieu que l’on nous promet se transforment toujours en déception. Seul Dieu peut nous apporter le vrai bonheur, puisqu’Il est le Bien absolu, et seul un régime en accord avec la loi de Dieu peut nous apporter une réelle prospérité, qui n’exclut toutefois pas les épreuves. Régime passéiste ? Pas tant que cela, puisque selon un sondage de 2013 [2], 54 % des Français seraient favorables à un retour à une monarchie.

   Les fortes paroles de S. Pie X sont toujours d’actualité :

   « Non, Vénérables Frères − il faut le rappeler énergiquement dans ces temps d’anarchie sociale et intellectuelle, où chacun se pose en docteur et en législateur −, on ne bâtira pas la société autrement que Dieu l’a bâtie ; on n’édifiera pas la société, si l’Église n’en jette les bases et ne dirige les travaux ; non, la civilisation n’est plus à inventer ni la cité nouvelle à bâtir dans les nuées. Elle a été, elle est ; c’est la civilisation chrétienne, c’est la cité catholique. Il ne s’agit que de l’instaurer et la restaurer sans cesse sur ses fondements naturels et divins contre les attaques toujours renaissantes de l’utopie malsaine, de la révolte et de l’impiété : omnia instaurare in Christo » [3]. 
   Et Faoudel de poser la question [4] : « Quelle cité catholique non bâtie dans les nuées le saint pape évoque-t-il quand il s’adresse à notre pays, si ce n’est celle de notre monarchie traditionnelle ? ».

   « L’utopie est mère de toutes les dictatures » a dit, horresco referens, Jacques Attali. Quant à nous, nous voulons être réalistes ; de cette adhérence au réel qui a valu à S. Thomas d’Aquin de devenir « le maître dans l’art de bien penser » (Paul VI [5]), ce réalisme qui nous fait savoir que l’homme ici-bas n’échappe pas et n’échappera jamais à la souffrance, malgré tous les charlatans qui lui vendent du rêve. Cette vérité nous est connue à la fois par l’expérience et par la Révélation, le rachat de l’homme déchu étant la raison-même de l’Incarnation de Dieu.

   Saint Thomas en vient à s’interroger sur la notion de meilleur régime [6], c’est-à-dire celui le plus apte à conduire la multitude vers le Bien commun, qui est le maintien de l’unité et de la paix. Il défend alors avec des arguments percutants le système monarchique comme le plus naturel, à l’image de ce qu’est le Paradis de Dieu : un Royaume où Dieu commande seul [7]. Le monarque devient le dépositaire temporel de cette souveraineté divine.

   Mais dire qu’un gouvernement est le meilleur ne veut pas dire pour autant qu’il est parfait : il est le plus raisonnable, le plus naturel, ce qui n’est déjà pas si mal. C’est lui qui est le plus ordonné au plan de Dieu, et là où il y a bon ordre, il y a paix [8]. Ce n’est pas le pied qui gouverne le corps mais le « chef » (le bien-nommé), c’est-à-dire la tête. De même, la société ne peut être gouvernée par la base : le peuple. La démocratie, en ce sens [9], est plus qu’une aberration : c’est une supercherie. Le Bx Pie IX a dit pour résumer : « Suffrage universel, mensonge universel ! » [10].

   Un régime de bon sens et de bonne foi ne promet pas LE bonheur assuré aux habitants de la Cité, mais il promet de leur apporter son meilleur soutien. Notre-Seigneur n’est pas venu abolir la souffrance, mais lui donner un sens. « Je ne suis pas venu abolir la loi mais l’accomplir » (Mt 5, 17) nous annonce le Christ, et la souffrance est la loi de l’humanité : on ne trouvera personne qui ne fasse exception à cette règle, pas même Notre-Dame, la Virgo dolorosa comme nous la célébrons le 15 septembre : la Vierge des douleurs.

   Toutes les sectes et les fausses religions vous promettront le contraire, du ventripotent Bouddha au non moins opulent (financièrement cette fois-ci) « révérend » Moon ; seul Jésus dépouillé, nu sur la Croix, nous apporte la vraie réponse, et la plus consolante aussi. Lui seul peut affirmer en toute vérité qu’Il est venu accomplir cette loi universelle de la souffrance, parce que chaque goutte versée l’a été pour chacun de nous.

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Le Bouddha bien-en-chair face au Dieu-fait-chair dépouillé : un saisissant contraste ! 

   Le Royaume de Dieu est d’en haut, et nous sommes déjà constitués « héritiers [de ce] Royaume qu’Il a promis à ceux qui L’aiment » (Jc 2, 5) ; mais il commence déjà ici-bas. « Le règne de Dieu est déjà présent au milieu de nous » nous dit S. Paul (Rm 12, 8) et le Pater nous fait demander à Dieu l’avènement de son règne sur la terre comme au Ciel. Mais rassurez-vous, ô Hérodes modernes qui craignez pour vos trônes, l’admirable hymne des Vêpres de l’Épiphanie vous annonce : Non eripit mortalia, Qui regna dat cælestia : « Il ne retire pas les royaumes terrestres Celui qui nous donne le Royaume céleste » ! Le Christ-Roi ne vient prendre la place de personne, Il est déjà de droit le Roi des rois, que les Mages viennent proclamer en venant L’adorer dans la crèche.

   Les primaires électorales nous renvoient la question du « candidat idéal », voire d’un Sauveur de la Nation qui nous relèvera du marasme et de la décadence ambiants dans lesquels nous sommes enlisés depuis si longtemps. Nous, nous vous disons en toute vérité : ce candidat n’existe pas, il n’y a pas de super-héros à espérer, mais la fonction idéale existe et s’incarne bien en un homme, qui n’a pas de super-pouvoirs mais qui est, par son sacre, revêtu de la grâce divine, onction qui s’écoulera sur tout le corps social que constituent les Français, à l’image de l’huile sainte répandue sur la tête d’Aaron, frère de Moïse et premier grand-prêtre d’Israël, et qui « coulait sur sa barbe et jusque sur les bords de ses vêtements » (Ps. 133, 2).

   Cet écoulement « capital » (i.e. depuis la tête) de la grâce se vérifie dans la vie sacramentelle : le sacrement de baptême purifie ainsi l’âme tout entière lorsque l’eau coule sur le sommet du crâne du baptisé. Il se vérifie en outre dans les hiérarchies angéliques, dans lesquelles l’illumination des anges s’effectue de chœur en chœur, des supérieurs aux inférieurs, selon l’admirable sagesse de Dieu qui « a tout réglé avec ordre, poids et mesure » (Sg 11, 20). Dieu est cette fontaine inépuisable qui déverse ses grâces de haut en bas, selon la loi de la « pesanteur spirituelle », si l’on peut dire !

   Revenons donc au bon sens, à la loi naturelle, à la raison éclairée ! Dieu nous donne un Chef, comme Il nous donne des parents que nous n’avons pas choisis. Mais attention : c’est un homme qu’Il nous désigne, pas un ange qu’Il nous envoie et encore moins Lui-même ! Voilà pourquoi nous disons que la mission divine s’incarne proprement en un homme, que nous pouvons appeler en toute vérité « providentiel » car sa destinée s’inscrit dans le plan de Dieu.

   Vous connaissez peut-être des prêtres qui vous ont blessés ou scandalisés : cela est malheureusement possible parce que le prêtre demeure un homme avant tout ; son ordination sacerdotale ne l’a pas « angélisé » ! Le Roi que Dieu nous donne a sans doute ses défauts, il n’est sans doute pas expert dans tous les domaines (d’où la nécessité de bien s’entourer…) et le Sacre pour lequel nous prions tous les jours ne le rendra ni surhomme, ni prince charmant, ni gourou, ni Dieu sur terre, mais le lieu-tenant de Dieu, aidé et voulu par Lui pour maintenir les Français dans la vertu et les conduire vers le Bien. Si nous avions le Royaume parfait ici-bas, pourquoi espérerions-nous encore le Royaume à venir ?

   Célébrant aujourd’hui la Conversion de S. Paul [note : cette lettre, comme nous l’avons dit en commençant, a initialement été publiée un 25 janvier], comment ne pas rappeler ici la prophétique prière de S. Pie X [11] comparant la France à l’ex-persécuteur de Chrétiens ? « Un jour viendra, et nous espérons qu’il n’est pas très éloigné, où la France, comme Saül sur le chemin de Damas, sera enveloppée d’une Lumière Céleste et entendra une voix qui lui répètera : ‘‘Ma Fille, pourquoi Me persécutes-tu ?’’. Et, sur sa réponse : ‘‘Qui es-tu, Seigneur ?’’, la voix répliquera : ‘‘Je suis Jésus, que tu persécutes. Il t’est dur de regimber contre l’aiguillon, parce que, dans ton obstination, tu te ruines toi-même’’. Et elle, tremblante, étonnée, dira : ‘‘Seigneur, que voulez-vous que je fasse ?’’. Et Lui : ‘‘Lève-toi, lave-toi des souillures qui t’ont défigurée, réveille dans ton sein les sentiments assoupis et le pacte de notre alliance, et va, fille aînée de l’Église, nation prédestinée, vase d’élection, va porter, comme par le passé, Mon Nom devant tous les peuples et devant les rois de la Terre’’ ».

       Chers Membres de la Confrérie, tout le programme d’action est contenu ici : celui de la France comme le nôtre !

Père Clément de Sainte-Thérèse +


[1] http://www.histoires-a-partager.com/73+il-etait-une-fois-dans-un-royaume-lointain.html 
[2] Selon https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2013/07/24/la-monarchie-est-de-plus-en-plus-a-la-mode-en-france-rmc-y-a-meme-consacre-un-debat.
[3] Lettre sur le Sillon Notre charge apostolique du 25 août 1910.
[4] http://www.viveleroy.fr/Principe-du-moteur-de-la,71#nb36
[5] Lettre Lumen Ecclesiae (1974) § 1-2 et Allocution au Congrès sur S. Thomas d’Aquin à l’occasion du VIIe centenaire de sa mort, Doc.Cath. n° 1654 (1974) p. 456.

[6] Cf. son De Regno, inspiré de La Politique d’Aristote.
[7] « Toutes les patries ici-bas doivent être le signe de la Patrie céleste (…). Tout homme à naître dans ce monde aspire à s’épanouir au sein d’une société harmonieuse et unie, dès cette vie et dans l’autre. Il relève du gouvernement divin sur l’humanité et nul ne peut l’abroger. La patrie est d’institution divine » (Frère Luc-Marie Perrier, Patrie céleste et patries terrestres, revue Maîtrises Scouts d’Europe n° 182, p. 19).
[8] « La paix est la tranquillité de l’ordre », selon la définition qu’en donne S. Augustin (Bibliothèque augustinienne, chap. 37, p. 740). Il nous livre à l’occasion sa belle « charte de la Paix » : « La paix du corps, c’est l’agencement harmonieux de ses parties. La paix de l’âme sans raison, c’est le repos bien réglé de ses appétits. La paix de l’âme raisonnable, c’est l’accord bien ordonné de la pensée et de l’action. La paix de l’âme et du corps, c’est la vie et la santé bien ordonnées de l’être animé. La paix de l’homme mortel avec Dieu, c’est l’obéissance bien ordonnée dans la foi sous la loi éternelle. La paix des hommes, c’est leur concorde bien ordonnée. La paix de la maison, c’est la concorde bien ordonnée de ses habitants dans le commandement et l’obéissance. La paix de la cité, c’est la concorde bien ordonnée des citoyens dans le commandement et l’obéissance. La paix de la cité céleste, c’est la communauté parfaitement ordonnée et parfaitement harmonieuse dans la jouissance de Dieu et dans la jouissance mutuelle en Dieu. La paix de toutes choses, c’est la tranquillité de l’ordre. L’ordre, c’est la disposition des êtres égaux et inégaux, désignant à chacun la place qui lui convient ».
[9] Nous ne parlons pas ici de la conception antique de la démocratie, comme à Athènes, mais de la démocratie libérale.
[10] Discours aux pèlerins français du 5 mai 1874.
[11] Discours du 29 novembre 1911 lors d’un Consistoire.

Vignette Lys - blogue

2024-111. Message de Sa Majesté à la suite de sa participation au pèlerinage Notre-Dame de Chrétienté à Chartres (Pentecôte 2024).

Mardi de Pentecôte 21 mai 2024.

Monogramme Prince Louis de Bourbon - Louis XX

       Ce mardi de Pentecôte 21 mai 2024, Monseigneur le Prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XX, consécutivement à Sa participation au pèlerinage Notre-Dame de Chrétienté, a publié sur les réseaux sociaux la photographie et le communiqué suivants :

Louis XX au pèlerinage ND de Chrétienté Pentecôte 2024

Sa Majesté au milieu des pèlerins du chapitre Notre-Dame de l’Assomption

       Hier, alors que la colonne du pèlerinage de Notre-Dame de Chrétienté s’ébranlait pour sa dernière étape, afin de parcourir les quelques kilomètres qui la séparaient encore de la cathédrale de Chartres, j’ai eu la grande joie de pouvoir me joindre aux milliers de pèlerins. Je tenais à être en communion avec cette jeunesse ardente qui prie et qui marche pour la France et pour l’Église universelle toute entière.
Magnifique leçon pour chacun d’entre nous de voir que l’Espérance, loin de mourir, habite et vivifie ceux qui sont inéluctablement appelés à être le futur de notre pays.

   J’ai porté dans mes prières les joies et les souffrances de la France et de chaque Français et je les ai déposées aux pieds de la Vierge, dans la cathédrale de Notre-Dame de Chartres.

   Je tiens à remercier tout spécialement Son Éminence le Cardinal Müller pour la Messe qu’il a accepté de célébrer pour nous à Chartres.

Que saint Louis nous protège et nous garde tous.

Armes de France & Navarre

2024-100. Où Son Altesse Félinissime le Prince Tolbiac met à profit les inconvénients d’une journée de pluie pour se livrer à des confidences sur sa vie au Mesnil-Marie et termine par une anecdote familiale…

Mercredi 1er mai 2024,
Fête des Saints Apôtres Philippe et Jacques le Mineur.

Tolbiac le 1er mai 2024

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

       Aujourd’hui, Frère Maximilien-Marie chante : « C’est le mois de Marie, c’est le mois le plus beau… », et je comprends tout-à-fait que d’un point de vue spirituel ces paroles soient parfaitement justes, mais d’un point de vue météorologique ce n’est pas la même chose, puisqu’il pleut, il pleut, il pleut… et il pleut encore !

   Il en a été ainsi presque tous les jours depuis le début de la lunaison, et il y a fort à craindre qu’il en soit encore ainsi jusqu’à la nouvelle lune.
Sans doute est-ce bénéfique pour les nappes phréatiques et la végétation (parce que j’essaie de voir le côté positif des choses, ainsi que me le recommande mon papa-moine), mais je reste un chat, et point n’est besoin, je pense, de vous rappeler en quelle estime les chats tiennent la pluie !

   A la vérité, derrière la fenêtre, je suis à l’affût de la moindre accalmie, et m’empresse alors de demander à mon moine portier de m’ouvrir l’huis ou la croisée.
A ce propos, je dois bien reconnaître qu’il se montre assez obéissant à mes désirs princiers, et je suis plein de gratitude envers mon illustre prédécesseur, feu le Maître-Chat Lully, de l’avoir bien éduqué.
D’ailleurs, aujourd’hui, il a profité de la même accalmie que moi pour sortir lui-aussi, dûment chaussé de bottes, afin de faire quelques photographies, que je lui ai demandées pour les archives du Mesnil-Marie. Il ne faut pas négliger, en effet, de faire régulièrement des clichés qui permettent de garder en mémoire l’état des lieux à diverses étapes.

   De fait, cela me permet aussi de vous en faire profiter, car il faut bien dire que, même quand il y a de la pluie, notre thébaïde est un lieu où il fait bon demeurer et poursuivre sereinement sa vie monastico-féline.

Le Mesnil-Marie 1er mai 2024 1

   Ainsi que vous le constatez, certains arbres prennent leurs feuilles seulement ces jours-ci. Les lilas commencent juste leur floraison. Les jonquilles, chez nous, ont terminé la leur, mais sur les hauts plateaux proches, au-dessus de 1200 m d’altitude, les prairies sont encore resplendissantes de leur parure jaune d’or.
Rien que de très normal en tout cela : n’oubliez pas que notre Mesnil-Marie se trouve à 720 m d’altitude et que nous sommes entourés de sommets qui dépassent largement les 1000 m.
 

Le Mesnil-Marie 1er mai 2024 2

   Depuis hier, Frère Maximilien-Marie a décidé de cesser de garnir le poêle, néanmoins nous devons maintenir un chauffage électrique d’appoint dans la pièce principale, pour que l’humidité ne s’installe pas.

   Après avoir pris les photographies, mon moine de compagnie est rentré : il avait du bréviaire à dire.
Je suis resté dehors encore un petit moment, à inspecter minutieusement nos terres, espérant y débusquer quelque mulot bien dodu ou quelque autre proie qui eût pu réjouir mes papilles, mais – évidemment ! – une autre averse n’a pas tardé à mouiller mon pelage et je me suis précipité à la fenêtre du bureau pour me la faire ouvrir.

Tolbiac à la fenêtre 1er mai 2024

   Mon moine majordome ne m’a point fait attendre et, comme à l’accoutumée, il a déplié une grande serviette dans laquelle je me suis précipité. C’est mon rituel de séchage : une fois que je suis bien posé en sphynx au milieu de la serviette, mon papa-moine la replie de tous côtés autour de moi, n’en laissant émerger que mon museau, puis il me frictionne, avec un mélange parfaitement équilibré de force et de douceur qui me porte à ronronner très fort. Vraiment, je raffole de ce moment.

   Evidemment, j’ai ensuite grignoté quelques croquettes, puis je suis allé méditer dans mon « ermitage dans l’ermitage » au sommet du secrétaire…

Tolbiac dans son ermitage 1er mai 2024

   J’ai condescendu à une dernière prise de vue pour que vous vous rendiez compte par vous-mêmes que c’est un endroit tout-à-fait convenable pour ma double condition princière et monastique. Frère Maximilien-Marie voulait adjoindre un campanile au pignon de cette cabane toute douce qui m’a été offerte par des amis, mais je l’en ai dissuadé, parce que je n’ai nulle envie qu’on vienne me distraire de mes oraisons en tirant sur la corde d’une clochette : la plupart des humains ne savent pas se maîtriser lorsqu’ils voient la chaîne ou la corde d’une cloche.
J’ai justement à ce sujet une anecdote très authentique à vous rapporter…

   Frère Maximilien-Marie m’a en effet raconté que son propre papa, lorsqu’il avait une dizaine d’années (donc aux alentours de 1944), habitait dans une petite ville où des Sœurs de la Charité de Saint Vincent de Paul (vous savez, celles avec les grandes cornettes si populaires) avaient une petite communauté et tenaient un dispensaire de premiers secours. Il y avait une courette pavée devant chez elles, fermée sur la rue par un haut portail, et une cloche était accrochée sur l’un des piliers du portail, pour appeler les Sœurs en cas d’urgence.
Bien évidemment, les enfants espiègles – au nombre desquels se trouvait le papa de Frère Maximilien-Marie, prénommé Jean – étaient tentés de manière récurrente de tirer sur la chaîne de la cloche, chaque fois qu’ils passaient devant la maison des religieuses, et de s’enfuir en courant avant que les Sœurs n’arrivassent.
Mais le jeune Jean, avait fini par se faire prendre : son papa et même Monsieur le Curé, auquel il servait la messe matinale avant d’aller à l’école, l’avaient grondé à plusieurs reprises… parce qu’il avait recommencé.
L’attrait de la cloche interdite était cependant si fort… Comment répondre à la malicieuse invitation de sa chaîne sans plus risquer de se faire vertement tancer et corriger ?
Jean ne manquait pas d’ingéniosité : il avait demandé un os au boucher, l’avait attaché à l’une des extrémités d’une corde dont il avait solidement noué l’autre bout à la poignée de la cloche des Sœurs.
Je vous laisse imaginer le tintamarre qu’occasionna le passage d’un chien errant qui voulut emporter l’os, la colère (assez justifiée, il faut bien le reconnaître) des religieuses, l’amusement de Jean – caché à proximité -, et le châtiment qu’il reçut ensuite (parce que les soupçons se portèrent très rapidement sur lui) de la part de son père, qui ne tolérait pas que l’on manquât de respect aux religieuses ni que l’on récidivât quand on avait déjà été puni pour une semblable sottise !!!
J’avoue toutefois que cette histoire m’a beaucoup amusé.

le chien, l'os et la cloche

   Mais c’est l’heure du chapelet : je vous laisse…
Toutefois pas sans vous recommander, avec une vraie gravité, de ne pas vous comporter en ingénieux galopins sonneurs de cloches !!!

Tolbiac.

Chat gif en marche

2024-97. « N’attendons pas passivement une renaissance monarchique, grâce à un homme providentiel, qui nous serait accordée sans effort moral de notre part.»

30 avril,
fête de Sainte Hildegarde de Vintzgau, reine des Francs (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Eutrope, premier évêque de Saintes et martyr ;
Mémoire de la vigile des Saints Apôtres Philippe et Jacques.

       Nous publions ci-dessous un texte important du Révérend Père Jean-François Thomas sj. , texte qui a déjà été publié une première fois en février 2017, non pas dans ce blogue, mais comme lettre mensuelle à l’adresse des membres et amis de la Confrérie Royale. Il nous semble plus que judicieux de le faire remonter à la surface de la mémoire de ceux qui l’avaient lu alors, et encore plus que nécessaire de le porter à la connaissance de ceux qui ne le connaissaient pas jusqu’à ce jour-ci. Ici, en effet, sont énoncées les conditions morales indispensables pour une authentique et solide restauration monarchique.

couronne sur coussin et lys au naturel - blogue

Un sujet vertueux

       Lorsque la nostalgie est le seul mouvement qui guide l’esprit vers l’attachement à la monarchie, le regard est biaisé et la direction prise complètement erronée. Certains se mettront alors à rêver d’un roi pieux et vertueux pour résoudre les problèmes du temps, sans jamais se regarder eux-mêmes et se demander si œuvre de conversion n’est pas aussi nécessaire pour mériter un tel prince.
La monarchie est un système complexe de relations entre un chef sacré par Dieu et des sujets mettant tout en œuvre pour être conformes, eux aussi - chacun à son degré - à cette élection surnaturelle. Il est possible que Dieu nous ait retiré, si violemment, le roi si vertueux Louis XVI, parce que nous ne correspondions plus à notre vocation éminente de sujets vertueux.
Un pays n’a pas simplement besoin d’un souverain au-delà de tout reproche, il repose aussi sur des âmes qui doivent partager cette même et unique grâce. Ce n’est pas simplement la tête qui doit être fidèle aux promesses du baptême reçu par Clovis, mais tous les sujets de France et de Navarre.

   A partir du moment où les Français ont voulu s’émanciper de cet appel commun à la sainteté, ils ont abandonné leur statut de sujets vertueux pour devenir des citoyens soucieux de leur liberté, pourtant très surveillée. La quête de la liberté, mal comprise, a remplacé celle de la vertu. Or les grands siècles chrétiens de notre histoire sont une lutte constante et individuelle pour grandir dans l’exercice des vertus, surtout les XIIème-XIVème siècles et le XVIIème siècle. Etre vertueux ne signifie pas être immaculé et sans péché, mais être un pécheur domptant sans cesse ses faiblesses avec la grâce de Dieu et dévoilant ainsi sa force. Lorsque tout un peuple, et pas simplement le prince, s’applique à cet exercice, le résultat est celui de la grandeur, même si les hommes demeurent toujours imparfaits.

   René Schwob, dans Ni grec ni juif, écrit : « La faiblesse qui se croit forte est impotente et vaine. La faiblesse qui se sachant telle, consent à son effacement, s’exalte d’autant. Dieu n’y résiste pas. Il s’y engouffre. Il la déborde. Il l’inonde, jusque dans ses souffrances, des grâces de la lumière et de l’indubitable joie. Il faut donc, sinon prêcher la faiblesse, la confesser et la vivre. » Telle est la véritable vertu de force, celle qui renverse des montagnes avec humilité.

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Cathédrale de Strasbourg : les vertus terrassant les vices

   L’homme de 1789 a oublié cette vérité pour s’engouffrer dans l’orgueil bien vain d’une autonomie réclamée en tout domaine. L’homme du Moyen-Age et du Grand Siècle, beaucoup plus libre, ne l’était que par son obéissance au réel et son adhésion à son statut de sujet aimé de Dieu et protégé par le prince. L’important n’est pas de savoir si des chefs très chrétiens ont failli à leur mission, ce qui est inévitable humainement, mais de juger de la capacité d’un peuple à grandir dans la foi et la vertu car conscient de son élection particulière. Les scandales et les crimes politiques qui parsèment l’histoire de nos républiques successives montrent bien que sans le guide de la vertu évangélique, rien de bon ne peut être accompli. Les hommes d’aujourd’hui ne sont pas essentiellement plus pécheurs que leurs ancêtres, mais ils sont moins vertueux car naviguant à vue et sans boussole, ceci par refus conscient et volontaire.

   Certes, pour reprendre une expression de Claudel, « le combat spirituel est aussi   brutal que la bataille d’hommes », mais il fut un temps, celui du royaume terrestre de France, où les sujets étaient quotidiennement aidés dans cette lutte par la contemplation de ce à quoi ils étaient appelés. Ils savaient qu’ils pouvaient atteindre ce qui semblait être trop haut à première vue. Les habitants de Paris ou d’Amiens, passant chaque jour devant leur cathédrale, n’avaient pas à lever les yeux vers le ciel pour deviner les statues des vertus.

   Elles trônaient, comme des jeunes filles chastes et simples, à portée de main, et la poussière soulevée par l’activité incessante de la cité les enveloppait. Ces vertus sont en lutte avec les vices. Depuis Tertullien et son De Spectaculis, chaque baptisé connaissait la forme concrète de la lutte intérieure de l’homme dont parle sans cesse l’Evangile. Tertullien avait donné figure à ces vertus et à ces vices, et les artistes chrétiens mettront en images ce vers quoi un sujet fidèle devait tendre. Emile Mâle, dans L’Histoire de l’art religieux au XIIIème siècle, souligne très justement : « Le christianisme n’a point apporté la paix au monde, mais la guerre ; l’âme est devenue un champ de bataille. L’harmonie que les anciens sages, dans    leur ignorance de la vraie nature de l’homme, avaient voulu faire régner en eux, n’est pas de ce monde : tant que nous vivons, les deux hommes qui sont en nous combattent. »
L’homme de la révolution, déjà tout pétri des idées de Rousseau et persuadé que l’homme était naturellement bon, n’a plus besoin d’être un sujet vertueux constamment dans la mêlée de cette tension de sa conscience et de son âme. Il se déclare maître de lui-même et les pires catastrophes le guettent. Le poète antique Prudence, – au nom si providentiel -, avait pourtant, avant le christianisme, perçu et analysé ce combat dans sa Psychomachie qui inspirera aussi tant d’artistes, déjà dans les fresques des catacombes.
Ainsi, au portail de la cathédrale de Strasbourg, nous pouvons contempler les vertus virginales qui achèvent à coup de lance les vices tombés à terre. Tous les grands sanctuaires présentent peu à peu, sur le verre ou dans la pierre, la bataille acharnée entre les vertus et les vices, ceci toujours dans le même ordre et avec une liste identique : la Foi et l’Idolâtrie, l’Espérance et le Désespoir, la Charité et l’Avarice, la Chasteté et la Luxure, la Prudence et la Folie, l’Humilité et l’Orgueil, la Force et la Lâcheté, la Patience et la Colère, la Douceur et la Dureté, la Concorde et la Discorde, l’Obéissance et la Rébellion, la Persévérance et l’Inconstance. Sans toujours un rapport direct avec la description des vertus et des vices dans les grandes oeuvres théologiques de saint Augustin, d’Isidore de Séville, de saint Thomas d’Aquin ou de Guillaume d’Auvergne, ces représentations, en statues ou en bas-reliefs, ont façonné la conscience morale des sujets vertueux pendant des générations.

cathédrale de Strasbourg détail des vices terrassés par les vertus

Cathédrale de Strasbourg : détail des vices que terrassent les vertus

   Aujourd’hui, même les âmes les plus pieuses ne portent qu’un regard distrait sur les œuvres léguées par nos pères dans la foi ou bien n’éprouvent qu’un intérêt esthétique, somme toute très superficiel. Si nous voulons retrouver notre vocation de sujets vertueux, nous devons renouer aussi avec les méthodes éprouvées au cours des temps pour grandir dans la vertu et gagner de plus en plus de batailles. Nous sommes loin du christianisme mou trop couramment prêché depuis que les chaires ont été désertées. Le sujet vertueux sait que l’Esprit Saint est prêt à fondre sur lui comme une cataracte de feu à chaque instant, d’où son souci de demeurer dans la disposition la moins indigne possible pour L’accueillir.

   N’attendons pas passivement une renaissance monarchique, grâce à un homme providentiel, qui nous serait accordée sans effort moral de notre part. La restauration, qui sera une renaissance, doit jaillir d’abord dans chaque cœur soucieux du bien, du beau et du vrai. Sinon la monarchie ne serait qu’un décor de théâtre, comme elle l’est d’ailleurs encore en certains pays. Si nous voulons que le royaume de France ressuscite, il est nécessaire de devenir des sujets vertueux pour accueillir un prince qui sera fidèle aux mêmes commandements et exigences évangéliques. Tout le reste n’est que rêve politique inutile et condamné à l’échec. Ne nous lassons pas de contempler les vierges sages et les vierges folles aux portails des cathédrales et demandons-nous ce que nous mettons en œuvre pour aider les premières à vaincre les secondes.

Père Jean-François Thomas s.j.
(lettre mensuelle de la Confrérie Royale envoyée le 25 février 2017)

vertus et vices - Notre-Dame de Paris

Vertus et vices sculptés au portail occidental de Notre-Dame de Paris

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