Archive pour la catégorie 'Commentaires d’actualité & humeurs'

2022-55. Réponse de Sa Majesté le Roi aux vœux reçus à l’occasion de son anniversaire.

Mardi 26 avril 2022 ;
Fête de Notre-Dame du Bon Conseil (cf. > ici).

Ce mardi 26 avril, en milieu de journée, Monseigneur le prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XX, a tenu à remercier – par le moyen des réseaux sociaux – toutes les personnes qui, ce 25 avril, à l’occasion de l’anniversaire de sa naissance, lui ont adressé des messages d’amitié, d’affection, de loyale et sincère dilection, contenant très souvent l’expression de leur fidélité et de leur espérance.

La réponse donnée aujourd’hui par Sa Majesté est pleine de sagesse et, en quelques mots sobres, est encore une fois lourde de graves et belles leçons, politiques autant que spirituelles.  

Louis XX

Je vous remercie chaleureusement pour les nombreux messages que j’ai reçus à l’occasion de mon anniversaire hier.

Comme vous le savez sans doute, je suis né exactement 760 ans, jour pour jour, après Saint Louis, modèle des gouvernants.

Au quotidien, nous voyons tous combien en politique, et plus largement pour toute action humaine, sans la transcendance et le regard tourné vers Dieu, ce qu’avait incarné en son temps Louis IX et qui lui a valu d’être canonisé, il est bien difficile de « raison garder ».
Sans rendre à Dieu ce que l’on rend aussi à César, il est difficile de trouver le bien commun. Les égoïsmes des individualismes des uns et des autres ont tôt fait de faire perdre à la société ses finalités. Nous le voyons trop actuellement avec notre monde qui a oublié nombre de ses repères traditionnels, préférant le relativisme à la Vérité.

Armes de France & Navarre

 

2022-54. De la condition du pape et du roi.

Lettre mensuelle aux membres et amis de la
Confrérie Royale

- 25 avril 2022 -

armoiries confrérie royale

De la condition du pape et du roi

            Il fut un temps, heureux temps, où le chrétien pouvait s’appuyer sur les deux piliers du pape et du roi, non point qu’il eût constamment les yeux rivés vers deux personnages dont il ne savait que peu de chose, mais il savait qu’il pouvait faire confiance à leur autorité, dans leur domaine respectif, car toute autorité devait rendre des comptes à Dieu directement. Le Vicaire du Christ et le Lieutenant du Christ, même parfois opposés violemment, avaient bien conscience que leur parole n’aurait de prix que si obéissant à Celui qui les avait revêtus d’une puissance passagère et d’une autorité qui ne relevait point de leurs vertus.

Ce que saint Thomas d’Aquin écrivit au sujet de la royauté s’applique aussi, avec quelques nuances, à la papauté car chacun de ces princes ont la charge d’une partie de l’humain mais pour l’élever plus haut. Il souligne bien que la voie de la béatitude doit être dégagée de ses obstacles par l’enseignement de l’Église, mais que le roi, à l’image de la royauté décrite dans le Livre du Deutéronome (XVII. 18-19), doit recevoir et méditer chaque jour la loi divine pour gouverner et mener le peuple dans la droiture et la vérité : « Instruit donc par la loi divine, le roi doit principalement se préoccuper de la manière dont la multitude qui lui est soumise mènera une vie bonne. Cette préoccupation se divise en trois points : premièrement, instituer la vie bonne dans la multitude qui lui est soumise ; deuxièmement, celle-ci instituée, la conserver ; troisièmement, celle-ci conservée, la conduire vers une plus haute perfection. » (La Royauté, Livre II, Chapitre 4, a. 4) Ce triple et unique souci doit être partagé aussi par le pape, à un niveau encore plus haut puisqu’il s’agit de la vie intérieure et de foi, mais la préoccupation est similaire et une identique fidélité à cette mission est exigée de lui comme du roi, chacun dans son ordre. Si l’une ou l’autre autorité vient à manquer, l’édifice est ébranlé ; si les deux sont défaillantes et ne répondent plus à leur charge, tout risque bien de s’écrouler, et bien des âmes sont victimes de cette faiblesse. Deux conditions sont donc nécessaires pour mener une vie bonne : agir selon la vertu, comme le disait déjà Pierre Lombard : « La vertu est en effet ce par quoi on vit bien » (Sententiæ, II, d. 27, c. 1) ; et, secondairement, puisque cette condition est instrumentale : posséder des biens corporels suffisants pour pouvoir mettre en pratique des actions vertueuses, comme l’indiquait déjà Aristote dans son Éthique à Nicomaque (I, 9, 1098-1099). Pour que cette vie bonne de la multitude puisse être instituée, il est nécessaire que règne l’unité de la paix, ensuite que l’ensemble soit dirigé vers l’action bonne, et enfin, que le souverain veille à ce qui est suffisant, dans tous les ordres, pour une vie bonne. Après l’institution, premier devoir des dirigeants, vient le temps de la conservation. Le Docteur angélique signale qu’il y a trois obstacles à la permanence du bien public : le bien ne doit pas être ponctuel mais permanent, autant que faire se peut, car les hommes ne durent pas et leur constance est inégale tout au long de leur vie ; le deuxième obstacle provient de la perversité de la volonté qui néglige ce qui est nécessaire ou même qui nuit directement à la paix de la multitude ; enfin le troisième obstacle provient de l’adversité extérieure lorsque la paix est détruite par des invasions, des guerres, des destructions. Face à ces périls, le roi, ou le pape, prendra un triple soin : bien choisir les hommes et veiller à leur remplacement pour les différents offices du bien commun ; édicter des lois, des règlements, des récompenses, des punitions qui empêchent de commettre l’iniquité et qui encourage aux actes vertueux ; et protéger des ennemis extérieurs. Quant à la troisième préoccupation des souverains, elle sera celle de veiller au progrès en corrigeant les erreurs, les désordres, le but étant de toujours parfaire ce qui existe dans ce domaine. Nous renvoyons pour le détail à ce beau traité de saint Thomas.

            Comme nous le précisions, ce qui s’applique au roi temporel est d’autant plus valable pour le souverain pontife,  et  nous comprenons aisément que la responsabilité qui incombe au successeur de Pierre met en jeu son propre salut. Saint Bernard, écrivant à son ancien moine devenu le pape Eugène III, le mettait en face de ses devoirs écrasants : « Vous avez été élevé par la Providence à un poste bien plus haut que celui où vous étiez, mais non pas plus sûr. C’est quelque chose de terrible que ce lieu-ci : oui le lieu où vous êtes est une terre toute sainte. C’est la place de Pierre, c’est la place du Prince des Apôtres, de celui que le Seigneur a établi maître de sa maison et intendant de tous ses biens. Si par malheur vous venez à vous écarter de la voie du Seigneur, souvenez-vous que celui dont vous tenez la place a été enseveli dans le même lieu afin de s’élever et de servir de témoin contre vous. » (Lettres, CCXXXVII) Le même saint Bernard indiquera ailleurs que l’humilité doit être la pierre précieuse la plus brillante parmi les ornements pontificaux car l’humilité doit s’élever en qualité au même titre que l’élévation dans la dignité, la domination mondaine étant interdite aux Apôtres ( De consideratione, Livre II, Chapitre 6). Il invite aussi le pape à une grande sagesse de gouvernement, lui conseillant une immense réserve et donc la modération dans ses propos et ses déclarations, à partir de ce principe : « Il y a plusieurs choses que vous ne devez pas savoir. Il y en a encore plus que vous devez dissimuler, et il y en a quelques-unes dont vous ne devez point vous souvenir. » (De consideratione, Livre IV, Chapitre 6) Le grand moine ne manque pas non plus déloges lorsque le pontife est digne du trône qu’il occupe sans abus de sa part : « C’est le Grand Prêtre, le Pontife souverain, le Chef des Évêques, le successeur des Apôtres ; c’est un autre Abel par la primauté, un autre Noé par le droit de gouverner l’Arche, un autre Melkisédech par le rang qu’il tient entre les Prêtres du Dieu vivant, un autre Abraham par la qualité de Patriarche. Il réunit en sa personne la dignité d’Aaron, l’autorité de moïse, la judicature de Samuel, la puissance de Pierre, l’onction de Jésus-Christ. Enfin, c’est le Pasteur universel, non seulement des brebis, mais des Pasteurs mêmes. » (De consideratione, Livre II, Chapitre 8)  

            Ces quelques rappels sont proposés pour nous aider à garder la paix intérieure lorsque, d’aventure, nous sommes soudain orphelins ou amputés à cause de la faillite de telle ou telle autorité. L’édification de la cité terrestre ne va pas sans heurts, et notre pays souffre aujourd’hui d’erreurs au moins deux fois centenaires. L’Église n’est pas en bonne santé car elle ne répond pas pleinement à sa mission. Il n’empêche que tous les éléments sont encore en place et disponibles pour que les princes des deux ordres, chacun en son domaine, retrouvent un zèle et une foi indéracinables. Notre Seigneur a vaincu. Ne nous laissons pas abattre par des pensées tristes et par le découragement humain.

                                               P. Jean-François Thomas s.j.
                                               Samedi saint
                                               16 avril 2022

Mosaïque du Triclinum Leoninum VIIIeSiecle - ancien palais du Latran

Détail de la mosaïque de l’abside du « Triclinum leoninum » (VIIIème siècle) dans l’ancien palais pontifical au Latran :
Le Christ remet à Saint Sylvestre 1er les clefs de Saint Pierre, et le labarum à l’empereur Saint Constantin 1er le grand.

2022-53. Message de Sa Majesté le Roi après l’attentat contre un prêtre à Nice ce dimanche 24 avril 2022.

Dimanche de Quasimodo 24 avril 2022.

Ce dimanche matin 24 avril 2022, dans l’église Saint-Pierre d’Arène, à Nice, au moment de la célébration de la Messe paroissiale, un individu d’une trentaine d’années a porté un assez grand nombre de coups de couteau au thorax du vicaire d’origine polonaise, le Père Krzyzstof (Christophe) Rudzinski ; une vierge consacrée de la paroisse, Sœur Marie-Claude, qui a tenté de s’interposer, a elle aussi été blessée, à la main, mais sans trop de gravité. Le prêtre a été transporté au CHU Pasteur, de Nice. Dans l’après-midi il a été annoncé que le pronostic vital du prêtre n’est pas engagé. Quant à l’agresseur, il s’est rendu aux forces de l’ordre sans que ces dernières n’aient eu besoin de faire usage de leurs armes ; il a été placé en garde à vue. On parle de troubles bipolaires et de déséquilibre psychique. D’après une source policière, l’homme aurait spontanément déclaré à la Police qu’il est de confession juive et que, en ce jour d’élections, il voulait tuer Emmanuel Macron, mais qu’il s’était finalement rabattu sur une église…

Eglise Saint-Pierre d'Arène Nice 24 avril 2022

Secours et forces de police autour de l’église Saint-Pierre d’Arène, à Nice,
ce dimanche de Quasimodo 24 avril 2022 après l’attentat contre le Père Krzyzstof Rudzinski.

Après avoir appris cet attentat sacrilège contre l’ecclésiastique, Monseigneur le prince Louis de Bourbon, duc d’Anjou, de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XX, a aussitôt publié ce communiqué par l’intermédiaire des réseaux sociaux :

Je viens d’apprendre avec une immense tristesse qu’un prêtre et qu’une religieuse ont été poignardés à plusieurs reprises dans l’église Saint-Pierre d’Arène de Nice.

J’adresse mes pensées et mes prières pour le Père Christophe et la Sœur Marie-Claude qui ont été pris en charge par les pompiers, leurs proches et toute la communauté catholique.

Grandes armes de France

2022-50. Quelques réflexions sur le thème de la vocation (3ème partie) : où l’on commence à parler des avortoirs de vocations.

Mardi saint.

Pierre-Antoine Novelli - ordination sacerdotale

Pierre-Antoine Novelli (1729-1804) : ordination sacerdotale

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

   Profitant de la proximité du Jeudi Saint, je voudrais continuer avec vous les réflexions sur le thème de la vocation que j’avais commencées il y a déjà plusieurs mois (cf. > ici et > ici).
Je les dédie spécialement à tous mes amis prêtres, qui ont très souvent dû soutenir d’âpres et longues luttes pour arriver à l’ordination, ainsi qu’aux séminaristes que j’ai l’honneur autant que la joie d’accompagner dans leur formation.

   Ecrivant à tous les séminaristes de l’Eglise catholique romaine le 18 octobre 2010 (cf. > ici), Sa Sainteté le Pape Benoît XVI commençait sa lettre par cette anecdote : « En décembre 1944, lorsque je fus appelé au service militaire, le commandant de la compagnie demanda à chacun de nous quelle profession il envisageait pour son avenir. Je répondis que je voulais devenir prêtre catholique. Le sous-lieutenant me répondit : Alors vous devrez chercher quelque chose d’autre. Dans la nouvelle Allemagne, il n’y a plus besoin de prêtres. Je savais que cette « nouvelle Allemagne » était déjà sur le déclin, et qu’après les énormes dévastations apportées par cette folie dans le pays, il y aurait plus que jamais besoin de prêtres ».

   Puis, le Pape ajoutait aussitôt : « Aujourd’hui, la situation est complètement différente. Mais, de diverses façons, beaucoup aujourd’hui aussi pensent que le sacerdoce catholique n’est pas une « profession » d’avenir, mais qu’elle appartient plutôt au passé. Vous, chers amis, vous vous êtes décidés à entrer au séminaire, et vous vous êtes donc mis en chemin vers le ministère sacerdotal dans l’Église catholique, à l’encontre de telles objections et opinions. Vous avez bien fait d’agir ainsi. Car les hommes auront toujours besoin de Dieu, même à l’époque de la domination technique du monde et de la mondialisation : de Dieu qui s’est rendu visible en Jésus Christ et qui nous rassemble dans l’Église universelle pour apprendre avec lui et par lui la vraie vie et pour tenir présents et rendre efficaces les critères de l’humanité véritable. Là où l’homme ne perçoit plus Dieu, la vie devient vide ; tout est insuffisant. L’homme cherche alors refuge dans la griserie ou dans la violence qui menacent toujours plus particulièrement la jeunesse. Dieu est vivant. Il a créé chacun de nous et nous connaît donc tous. Il est si grand qu’il a du temps pour nos petites choses : « Les cheveux de votre tête sont tous comptés ». Dieu est vivant, et il a besoin d’hommes qui vivent pour lui et qui le portent aux autres. Oui, cela a du sens de devenir prêtre : le monde a besoin de prêtres, de pasteurs, aujourd’hui, demain et toujours, tant qu’il existera ».

   Nous ne sommes certes plus dans le contexte si particulier de l’Allemagne dominée par le parti nazi, pour lequel (l’histoire contemporaine fait mine de l’oublier et tend à laisser croire qu’il n’y aurait qu’une seule partie de l’humanité qui aurait été persécutée) l’Eglise catholique et son clergé étaient tout aussi indésirables et tout autant à éradiquer que les Israélites. En ce sens, oui, « la situation est complètement différente ». Mais, le Pape Benoît le laissait finalement bien entendre, si elle est différente dans ses formes, l’opposition des idéologies dominantes à la vocation religieuse et sacerdotale n’a absolument pas désarmé : à l’idéologie nazie ont succédé celles d’un matérialisme pratique triomphant, de l’hédonisme, du libéralisme, du laxisme moral, et – à l’intérieur même de la Sainte Eglise – du modernisme de type progressiste qui, pour dépeupler les séminaires et faire dégringoler de manière spectaculaire les vocations s’est en définitive révélé bien plus efficace que les persécutions extérieures ! De fait, déjà affaiblies depuis la fin de la seconde guerre mondiale, les structures ecclésiastiques au sein desquelles étaient reçues et formées les vocations religieuses et sacerdotales (scolasticats, juvénats, noviciats et séminaires) se sont rapidement vidées et écroulées comme des châteaux de carte sous l’effet d’un courant d’air dans les années qui ont suivi ce fameux concile qui se faisait fort de constituer les prémices d’un nouveau « printemps de l’Eglise » et prétendait fermer péremptoirement le bec aux « prophètes de malheur » !

   Je ne détaillerai pas ici les innombrables scandales dont, en Occident, ces séminaires, diocésains ou interdiocésains, sont devenus les cadres. Mais il faut dire et redire qu’un très grand nombre d’entre eux sont devenus les repaires de supérieurs vicieux et les bauges de prétendues vocations adonnées à d’infames turpitudes, accomplissant sans plus aucune vergogne ce que la Très Sainte Mère de Dieu en pleurs avait annoncé à La Salette : « (…) On verra l’abomination dans les lieux saints ; dans les couvents, les fleurs de l’Eglise seront putréfiées et le Démon se rendra comme le roi des cœurs. Que ceux qui sont à la tête des communautés religieuses se tiennent en garde pour les personnes qu’ils doivent recevoir, parce que le Démon usera de toute sa malice pour introduire dans les ordres religieux des personnes adonnées au péché, car les désordres et l’amour des plaisirs charnels seront répandus par toute la Terre (…) » (cf. > ici).
Je pourrais – malheureusement ! – citer une multitude de témoignages directs de jeunes gens qui sont passés dans ces pépinières du nouveau clergé et qui m’ont confié des faits indubitables de la perversion introduite dans ces maisons, jadis fondées pour être des écoles de pureté, d’humilité et de piété autant que des sanctuaires de la saine doctrine catholique, auxquels s’appliquent encore une fois les paroles prophétiques de Notre-Dame de La Salette : « (…) les lieux saints sont dans la corruption : beaucoup de couvents ne sont plus les maisons de Dieu, mais les pâturages d’Asmodée et des siens (…) ».
Je confesse sans aucune contrition que, depuis de très nombreuses années déjà, je ne m’afflige en aucune manière lorsque j’apprends que tel ou tel séminaire de France ferme ses portes : je considère qu’il s’agit tout simplement d’une forme de miséricorde du Dieu trois fois saint pour Son Eglise !
Certes, quelques prêtres encore pieux et vertueux peuvent en sortir, malgré les efforts conjugués de l’enfer et des supérieurs ou professeurs progressistes qui y font la loi, souvent parce que, en cachette de ces derniers, ces séminaristes vont chercher ailleurs les antidotes au modernisme théologique et spirituel qui règne en ces nids d’hérésies, en même temps qu’ils trouvent discrètement en d’autres lieux le soutien et les conseils pour ne pas se laisser gagner par la pourriture des maisons de formation officielles. Là encore, je pourrais citer de nombreux cas.

   De la même manière qu’il existe des avortoirs pour mettre fin à des vies humaines en gestation, il existe des avortoirs de vocations. Nombre de séminaires ou de maisons religieuses prétendument dédiées à la formation ont joué ce rôle depuis soixante ans.
Certes, il y a bien quelques sujets qui sont arrivés à devenir prêtres :
- les uns en gobant les poisons qu’on leur a inoculés ; pour la plupart on se demande alors souvent s’ils sont vraiment des prêtres catholiques compte-tenu de la manière dont ils sont vêtus, dont ils se comportent, dont ils enseignent et dont ils célèbrent ;
- les autres en « faisant FOMEC », comme on dit à l’armée, c’est-à-dire en se fondant dans le paysage ecclésiastique même s’ils n’adhèrent pas vraiment à ce qui leur a été inculqué, en raison d’une espèce de résistance intérieure non manifeste, dans l’attente du moment où ils pourront prudemment et progressivement se montrer plus catholiques et plus traditionnels que ce qu’on eût voulu qu’ils fussent. Mais ceux qui ont agi ainsi n’en sont jamais sortis sans de profondes blessures spirituelles et psychologiques.
En dehors de ces deux types de prêtres sortis des séminaires « conciliaires », on trouve des centaines et des centaines de jeunes gens qui, présentant pourtant des signes relativement certains de vocation religieuse ou sacerdotale, ont été poussés vers la sortie par les idéologues qui dirigeaient (dirigent encore) ces maisons de formation, parce qu’ils n’avaient « pas le profil des prêtres que l’Eglise souhaite pour le monde d’aujourd’hui » (sic) – ce que l’on peut souvent traduire par : « sujet trop traditionnel, trop pieux, pas assez perméable à la nouvelle théologie ou aux nouvelles formes de la pastorale » -, ou bien se sont découragés et sont retournés dans le monde en abandonnant toute idée de plus haut service.

   Je ne doute pas que Notre-Seigneur ne se lasse pas d’appeler à Lui ; je ne doute absolument pas qu’il y a toujours des jeunes gens qui sont appelés par Lui au sacerdoce et à la vie religieuse ; je ne doute en aucune manière que la plupart de ceux qui entendent cet appel (quand ils sont dans les conditions psychologiques et spirituelles pour l’entendre) portent en eux les capacités de générosité et d’enthousiasme de leur jeunesse pour y répondre… En revanche je doute fortement de l’aptitude de l’écrasante majorité des maisons de formation « conciliaires » à permettre à ces vocations de se fortifier, de s’épanouir et de parvenir à leur plénitude en leur assurant un enseignement strictement catholique pour ce qui concerne la doctrine, comme pour tout ce qui touche à la rigueur spirituelle et les bonnes mœurs.
Même si – hélas ! – ils ne sont pas totalement à l’abri de recevoir des brebis galeuses ou des loups rapaces déguisés en brebis, les maisons de formation et séminaires des instituts et fraternités traditionnels, échappent dans l’ensemble assez heureusement à cette contagion issue du modernisme (sans s’en trouver totalement à l’abri, car le démon s’acharne aussi à les détruire de toutes les manières). 

   A l’occasion du Jeudi Saint, fête du Sacerdoce catholique, il y a un devoir impérieux de prier non seulement pour nos prêtres, dont c’est la fête, mais aussi une véritable urgence de prier pour les futurs prêtres, séminaristes et religieux, afin que leur vocation s’épanouisse et se fortifie saintement dans les cadres les plus adéquats à une formation doctrinale et spirituelle qui fera d’eux en vérité des prêtres selon le Cœur de Jésus, en sorte que leur futur et très précieux ministère de sainteté et de sanctification permette le relèvement de notre pauvre Eglise en crise.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

Calice & Sacré-Coeur

2022-48. Sacrilège ! Sacrilège ! Sacrilège !

Jeudi de la Passion 7 avril 2022.

Christ aux outrages du Mesnil-Marie

Visage de l’ « Ecce Homo » conservé au Mesnil-Marie.

nika

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

   Il ne se passe pratiquement pas une semaine, sans qu’on nous apprenne quelque nouveau sacrilège ou quelque nouvelle profanation. C’est presque chaque jour que nous parviennent des annonces rapportant que telle église a été vandalisée, ou que ses murs ont été couverts d’inscriptions insultantes, haineuses ou blasphématoires, ou encore que des statues ou croix ont été souillées, brisées ou abimées… Ce sont encore des tentatives d’incendie, des tabernacles fracturés, des ciboires volés, des saintes Hosties jetées à terre et piétinées, quand elles ne sont pas dérobées pour servir à des messes noires ou cérémonies sataniques. Et il y a les blasphèmes courants et – si j’ose dire – « ordinaires » que distillent à foison de prétendus humoristes, des acteurs et des journalistes, pour lesquels l’insulte ou la moquerie contre le christianisme est quasi un lieu commun, gage de succès.
De toutes parts, Notre-Seigneur, Sa Sainte Mère, Son Eglise, Ses consacrés sont vilipendés, sont tournés en dérision, font l’objet de plaisanteries ou la vulgarité et l’obscénité rivalisent de bassesse…
Sur le monde occidental qui fut jadis la Chrétienté règne l’impiété la plus sordide.
Ne nous étonnons pas si Dieu abandonne ce monde aux conséquences de cette impiété et n’exerce plus sur lui les délicates attentions de Sa Providence paternelle.

   « Mais ce qui m’est encore le plus sensible est que ce sont des cœurs qui me sont consacrés qui en usent ainsi ! ».
La douloureuse plainte de Notre-Seigneur à Sainte Marguerite-Marie (cf. > ici) est toujours d’une cruelle actualité. Car, après tout, que des personnes qui se glorifient d’être les héritières de « l’esprit des lumières » et des séditieux de la grande révolution (toutes les espèces de républicains, de socialistes, de marxistes, de maçons, et autres prétendus « modernes ») soient en révolte contre Dieu, Sa Révélation et Ses lois, c’est on ne peut plus logique – que pourrait-on attendre d’autre de leur part ? – ; mais ce qui est plus incompréhensible et plus affreux, c’est que l’impiété, le blasphème et le sacrilège ont établi leur règne diabolique dans l’âme et dans l’esprit de nombreux baptisés, de nombreux religieux, de nombreux prêtres et prélats !
Qu’on se souvienne ici des graves avertissements et plaintes de la Très Sainte Mère de Dieu en pleurs à la Salette (cf. > ici) : « Les prêtres, ministres de mon Fils, les prêtres, par leur mauvaise vie, par leurs irrévérences et leur impiété à célébrer les Saints Mystères, par l’amour de l’argent, l’amour de l’honneur et des plaisirs, les prêtres sont devenus des cloaques d’impureté. Oui, les prêtres demandent vengeance, et la vengeance est suspendue sur leurs têtes. Malheur aux prêtres et aux personnes consacrées à Dieu, lesquelles, par leurs infidélités et leur mauvaise vie, crucifient de nouveau mon Fils ! Les péchés des personnes consacrées à Dieu crient vers le Ciel et appellent vengeance, et voilà que la vengeance est à leur porte, car il ne se trouve plus personne pour implorer miséricorde et pardon pour le peuple… »

   En France, il y a eu trois grandes périodes d’iconoclasme et de destruction du patrimoine religieux. Les deux premières sont le fait des ennemis de la foi et de l’Eglise catholiques : les protestants au XVIème siècle et les révolutionnaires à la fin du XVIIIème siècle : la troisième est le fait d’hommes d’Eglise et de clercs à la suite du concile vaticandeux.
Ce sont aussi trois périodes de multiplication des sacrilèges et profanations : les sectateurs de Calvin et les « patriotes » se sont acharnés contre les statues des saints, contre leurs reliques, contre les calvaires et les croix, et contre les saints tabernacles ; les modernistes et progressistes d’après « le » concile n’ont pas grand chose à leur envier dans leur acharnement à dépouiller les églises – sous le fallacieux prétexte du retour à la pureté originelle -, à briser ou mutiler les autels, à envoyer aux oubliettes ou aux décharges les reliquaires, à désacraliser la liturgie, et à imposer la « communion dans la main » cause d’innombrables sacrilèges !
J’aurais beaucoup, beaucoup, beaucoup à écrire à ce sujet, rien qu’en narrant ce dont j’ai été témoin depuis mon enfance, puisque je suis contemporain de ce prétendu « renouveau conciliaire de l’Eglise », et que j’ai vu de mes propres yeux horrifiés un trop grand nombre de ces impiétés épiscopales et sacerdotales.

   Et cela continue ! Je n’en citerai qu’un unique exemple, très récent.
Il y a quelques semaines, en ce mois de mars 2022, faisant visiter à deux séminaristes la cathédrale de Viviers – au début je voulais taire le nom du lieu, mais j’ai finalement choisi devant Dieu de le citer, quelque désagrément que j’en puisse subir de la part du clergé de ce diocèse en pleine décadence -, nous voulûmes y chanter les vêpres. Nous nous rendîmes dans la « chapelle Saint Jean », édifiée sur le côté sud de la cathédrale avec laquelle elle communique. C’était naguère le chœur d’hiver du vénérable chapitre cathédral, et c’est là que se trouve le Très Saint Sacrement.
Quelle ne fut pas ma douleur en apercevant, sur le marchepied de l’autel, une hostie, gisant au sol !
Cette hostie était-elle consacrée ?
Mes cours de théologie m’ont appris que pour tout ce qui touche aux sacrements il faut être « tutioriste », c’est-à-dire qu’il convient toujours de prendre le parti le plus sûr lorsqu’il peut y avoir une hésitation.
Si, en effet, on peut – malheureusement ! – avoir des doutes légitimes sur la validité de la consécration en de très nombreux cas de célébration de la messe selon la liturgie réformée (défaut d’intention du prêtre, pains d’autel non conformes, indigence des rites célébrées… etc.), n’étant pas doté, comme certains saints, de la faculté de reconnaître un pain d’autel non consacré d’une hostie consacrée, je me devais, prenant le parti le plus sûr, d’agir comme s’il s’agissait d’une hostie consacrée.
Ici, tout portait à penser que, à l’occasion de l’une des très rares messes (selon le rite réformé évidemment) célébrées à la cathédrale, un prêtre (ou un laïc) l’avait laissée choir en rapportant au tabernacle les hosties qui n’avaient pas été consommées lors de la communion : c’est très « facile » – si j’ose dire – d’une part parce que dans la liturgie réformée on porte avec désinvolture le Saint Sacrement sans le couvrir dans des espèces de grandes et larges coupes peu profondes, et d’autre part parce que l’usage d’aubes à très grandes manches entraine souvent qu’un prêtre qui n’y porte pas une extrême attention accroche une hostie avec sa manche lorsqu’il passe le bras au-dessus de ces coupes, et la laisse ensuite tomber au sol lorsqu’il baisse le bras.
Bref ! en l’absence de prêtre, je n’avais qu’une seule chose à faire : consommer cette hostie.
Je me suis donc agenouillé au pied de l’autel, j’ai fait des actes de foi (« Mon Dieu, si Vous êtes présent dans cette hostie, je Vous y adore de toute mon âme et avec tout mon pauvre amour… ») et récité le confiteor comme on le fait avant la sainte communion, puis m’inclinant jusqu’à ce que je puisse atteindre cette hostie avec ma langue (pour ne pas la prendre avec la main), je l’ai consommée.
Je suis resté quelques instants en silence, produisant des actes de réparation, et mon action de grâces s’est prolongée dans le chant des vêpres auquel nous pûmes alors nous livrer avec les deux séminaristes, selon notre dessein initial.

   Loin de moi l’idée de me mettre en valeur à travers ce récit : je me serais très volontiers passé d’avoir à faire cela et, le faisant, je n’ai accompli que mon devoir de serviteur de Sa Divine Majesté. Mon propos n’a pour but que de rappeler – hélas ! trois fois hélas ! – l’actualité des plaintes de Notre-Seigneur : « Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes, qu’il n’a rien épargné jusqu’à s’épuiser et se consommer pour leur témoigner son amour ; et pour reconnaissance je ne reçois de la plupart que des ingratitudes, par leurs irrévérences et leurs sacrilèges, et par les froideurs et les mépris qu’ils ont pour moi dans ce sacrement d’amour. Mais ce qui m’est encore le plus sensible est que ce sont des cœurs qui me sont consacrés qui en usent ainsi… ».
Et l’actualité des graves avertissements et des larmes de Notre-Dame en plusieurs de ses apparitions.

   La liturgie réformée postérieurement au concile vaticandeux a été la cause et l’occasion d’une impressionnante édulcoration ou même perte de la foi, pour ce qui concerne la Sainte Eucharistie et le Saint Sacrifice de la Messe : même en n’assistant jamais aux célébrations de la « nouvelle messe », nous le savons bien et en recevons les tristes échos.
A huit jours du Jeudi Saint, que cela nous porte avec toujours davantage de zèle à prier avec ferveur, à offrir des sacrifices et des pénitences avec générosité, à nous livrer toujours davantage à l’amour pour réparer autant qu’il est en notre pouvoir de le faire.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

Christ aux outrages du Mesnil-Marie

« Ecce Homo » du Mesnil-Marie

frise

2022-39. Consécration au Cœur immaculé de Notre-Dame pour ce 25 mars 2022.

Jeudi 24 mars 2022,
Fête de Saint Gabriel, archange (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Siméon de Trente, enfant martyr.

Notre-Dame de Fatima

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

Cent-cinq ans après les apparitions de Notre-Dame à Fatima (1917-2022), et après moultes guerres et catastrophes, François, actuel occupant officiel du trône pontifical, vient d’annoncer qu’il consacrera solennellement la Russie et l’Ukraine au Cœur Immaculé de Marie, demain vendredi 25 mars. On trouve le texte qu’il prononcera > ici.
Il a appelé tous les évêques à s’unir à lui ; les prêtres et les fidèles sont eux aussi fortement incités à s’associer à cet acte. Voilà pourquoi je vous invite à vous y unir vous aussi par la prière, par exemple par la récitation d’un chapelet, et autant que possible en groupe, suivi par la récitation d’un acte de consécration en union avec toute l’Eglise.
Ce peut être, ce vendredi 25 mars en même temps que la cérémonie pénitentielle qui sera célébrée à partir de 17 h dans la basilique vaticane (François récitant l’acte de consécration à 18 h 30 en simultané avec son aumônier au sanctuaire de Fatima), ou bien – si vous n’êtes pas disponible en fin d’après-midi – à un autre moment de la journée (à la fin de la Messe si vous avez la possibilité d’y assister, ou en conclusion du Chemin de Croix…) ; de préférence dans une église ou une chapelle, ou encore dans l’oratoire familial.

Nous avons tous conscience de l’importance et de l’actualité du message de Fatima pour obtenir la conversion de la Russie et des pécheurs, ainsi que la paix pour l’Église et le monde. L’acte décidé par François pour demain est attendu par le peuple chrétien fidèle depuis près d’un siècle.

Malheureusement, il manque à cet acte de consécration des éléments expressément demandés par la Très Sainte Vierge ; profitons toutefois d’un événement si exceptionnel pour nous y associer, quitte à le compléter par la formule que le Prévôt du Chapitre de Saint Remi a adaptée avec M. Yves de Lassus, spécialiste des apparitions de Fatima, et en lien avec le R.P. Jean-François Thomas, sj, prieur de la Confrérie Royale, qui la soutient et l’encourage parfaitement : explications et formule  ici
Rien n’empêche, si vous organisez une réunion de prières, de prononcer les deux actes, l’un au début, l’autre à la fin. Voici le lien des deux textes de consécrations > iciIl vous suffit de cliquer sur ce lien et d’imprimer le pdf qui s’ouvre.

En ce moment si solennel pour l’Église et pour le monde, en cette fête où « le Verbe S’est fait chair » (Verbum caro factum est) dans le sein très pur de Notre-Dame Immaculée, nous vous souhaitons une très sainte fête de l’Annonciation et Incarnation du Seigneur, sous la protection de l’Archange Saint Michel, de son collègue Saint Gabriel (célébré aujourd’hui 24 mars), de Saint Joseph (le mois de mars lui est consacré) et du Bon Larron Saint Dismas (fêté le 25 mars).

 Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, miserere nobis et dona nobis pacem !

Bonne, fervente et sainte fête de l’Annonciation de Notre-Dame.

Coeur douloureux et immaculé de Marie

2022-36. L’engagement d’ecclésiastiques pour la royauté chrétienne est-il donc si incongru et si difficile à comprendre ?

Saint Bernard prêche la croisade - Vézelay 31 mars 1146 - Emile Signol

Saint Bernard de Clairvaux prêchant la croisade à Vézelay le Saint Jour de Pâques 31 mars 1146
en présence du Roi Louis VII et de la Reine Aliénor
Tableau d’Emile Signol (1804-1892)

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Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,

   A plusieurs reprises, des prêtres ou des religieux, avec lesquels j’ai des relations sinon cordiales du moins bienveillamment urbaines, m’ont exprimé des réserves ou des remarques teintées de reproche au sujet de mes engagements et de mon militantisme légitimistes. Souvent, alors qu’eux-mêmes au for interne ont des sympathies royalistes, ils se faisaient les échos polis de critiques entendues. En définitive, à les entendre, un ecclésiastique se devant « être tout à tous », selon l’expression de Saint Paul (cf. 1 Cor. IX, 22), ne pourrait pas être connu pour ses « opinions politiques » : « Mon Frère, vos convictions très tranchées et, à l’occasion, votre prosélytisme – par vos écrits, par vos conférences et par beaucoup de vos actions – peuvent avoir quelque chose de carrément choquant pour nombre de personnes, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Eglise catholique. Celle-ci reconnaît désormais la république et a tourné la page de la royauté, avec laquelle elle a été jadis très (trop) liée. Léon XIII a prôné le « ralliement » : la sagesse de notre Eglise et de nos chefs spirituels nous demande de nous soumettre à cette attitude pragmatique, quelque légitimes que puissent par ailleurs être votre sensibilité et vos aspirations… »
En ces quelques phrases, j’ai résumé ce que j’ai entendu en d’assez nombreuses occasions.

Convaincu de ne pas être le seul à avoir dû faire face à de semblables objections, j’en parle aujourd’hui à seule fin de permettre à ceux auxquels on a fait le même genre de remarques de connaître les réponses que j’y donne : les fidèles laïcs eux-mêmes, me semble-t-il, y trouveront d’ailleurs aussi des arguments expliquant leur conduite, ou leur permettant de défendre les ecclésiastiques légitimistes qu’ils connaissent et dont, en leur présence, on critiquerait la conduite. 

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1) Nul ne trouve inconvenant ou déplacé qu’un prêtre ou un religieux parle de morale et rappelle les principes de celle-ci.
Or la morale n’est pas seulement une affaire individuelle : l’homme étant « un animal social et politique », la morale a nécessairement une dimension politique. La morale naturelle (accessible par la raison seule), qui étudie les comportements humains dans leur recherche du bonheur, a pour fondement la quête du bien commun. La morale personnelle et la morale familiale sont ordonnées à la politique.
Dans leur mission d’enseigner et de guider les âmes, les ecclésiastiques ont donc un vrai devoir d’éducation politique, non seulement en faisant connaître et en expliquant les préceptes de la morale surnaturelle (celle que Dieu a fait connaître par la Révélation), mais aussi en transmettant les fondements de la morale naturelle : en saine théologie, le surnaturel, comme l’indique son nom, vient se greffer sur l’ordre naturel qu’il complète et transcende. Si les fondements naturels font défaut, l’édifice surnaturel sera fragile et bancal.
« Vouloir tirer une ligne de séparation entre la religion et la vie, entre le surnaturel et le naturel, entre l’Église et le monde comme si l’un n’avait rien à faire avec l’autre, comme si les droits de Dieu ne s’appliquaient pas à toute la réalité multiforme de la vie quotidienne, humaine et sociale, est parfaitement contraire à la pensée chrétienne, et c’est nettement antichrétien », enseignait le Vénérable Pie XII (22 janvier 1947), et l’on pourrait multiplier les citations du Magistère authentique déclinant cette affirmation et ses conséquences.
Il n’y a donc rien d’inconvenant, tout au contraire, à ce que les prêtres et les religieux soient actifs et zélés pour rappeler et enseigner les bases et les règles d’une politique sainement ordonnée à la fin naturelle et surnaturelle de l’homme.
Comme le disait le Pape Saint Pie X : « Nous ne nous cachons pas que nous choquerons quelques personnes en disant que nous nous occupons de politique. Mais… le Souverain Pontife, investi par Dieu d’un magistère suprême, n’a pas le droit d’arracher les affaires politiques du domaine de la foi et des mœurs » (allocution Primum vos, du 9 novembre 1903). Cela est vrai aussi, en conséquence, des ecclésiastiques qui veulent être fidèles au mandat divin de l’Eglise catholique.

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2) « Mais, me direz-vous, cela ne signifie pas qu’il faille prôner un modèle politique particulier, en l’occurrence celui de la monarchie traditionnelle de droit divin, ainsi que vous le faites ! »
« Non, il faut le rappeler énergiquement dans ces temps d’anarchie sociale et intellectuelle, où chacun se pose en docteur et en législateur, on ne bâtira pas la cité autrement que Dieu ne l’a bâtie ; on n’édifiera pas la société, si l’Église n’en jette les bases et ne dirige les travaux ; non, la civilisation n’est plus à inventer ni la cité nouvelle à bâtir dans les nuées. Elle a été, elle est ; c’est la civilisation chrétienne, c’est la cité catholique. Il ne s’agit que de l’instaurer et de la restaurer sans cesse sur ses fondements naturels et divins contre les attaques toujours renaissantes de l’utopie malsaine, de la révolte et l’impiété : omnia instaurare in Christo » (Saint Pie X, lettre « Notre charge apostolique », du 25 août 1910).
Or en France la civilisation chrétienne a été fondée et s’est développée sur l’alliance établie dans les fonts baptismaux de Reims au baptême de Clovis.
Véritablement, l’établissement de la royauté chrétienne en France a été voulu et suscité par la divine Providence, et l’ordre social chrétien s’est épanoui sous une monarchie qui est arrivée à sa plénitude avec les Capétiens.
Tout ce qui est arrivé ensuite, avec et à partir de la révolution, n’a été fait qu’en opposition avec l’alliance de Reims, en opposition avec l’ordre social chrétien.
Certes, toutes les institutions terrestres et toutes les sociétés ont leurs imperfections, et leurs dirigeants ne sont pas toujours exemplaires en tout (même dans l’Eglise). Cependant ce ne sont pas les imperfections de l’Ancien Régime que les révolutions de 1789 et de 1830 ont combattu, mais tout au contraire elles ont abattu et combattu jusqu’en ses fondations ce qui rapprochait le plus sa société de la perfection morale naturelle et surnaturelle à laquelle elle tendait, malgré les imperfections des hommes.
Ainsi que l’écrit encore Saint Pie X : « Qu’ils soient persuadés que la question sociale et la science sociale ne sont pas nées d’hier ; que de tous temps l’Église et l’État, heureusement concertés, ont suscité dans ce but des organisations fécondes ; que l’Église, qui n’a jamais trahi le bonheur du peuple par des alliances compromettantes, n’a pas à se dégager du passé et qu’il lui suffit de reprendre, avec le concours des vrais ouvriers de la restauration sociale, les organismes brisés par la Révolution et de les adapter, dans le même esprit chrétien qui les a inspirés, au nouveau milieu créé par l’évolution matérielle de la société contemporaine : car les vrais amis du peuple ne sont ni révolutionnaires, ni novateurs, mais traditionnalistes » (lettre « Notre charge apostolique », du 25 août 1910). 

Blogue vœux 2022 14

3) Ayant la conviction profonde, selon l’enseignement des Saintes Ecritures (cf. Jac. I, 17), que lorsque Dieu veut et établit quelque chose Il le fait selon des desseins immuables, nous avons la certitude qu’Il ne change pas – par caprice ou par simple amour de la variété – Ses plans sur les nations et les peuples, qui, ainsi que le rappelait le futur Pie XII le 13 juillet 1937 dans la chaire de Notre-Dame de Paris : « (…) les peuples, comme les individus, ont aussi leur vocation providentielle ; comme les individus, ils sont prospères ou misérables, ils rayonnent ou demeurent obscurément stériles, selon qu’ils sont dociles ou rebelles à leur vocation » (Discours sur la vocation de la France – voir > ici).
Il n’est absolument pas possible de voir dans la révolution de 1789 et dans toutes ses conséquences (dont fait partie l’avènement d’une république laïciste dirigée – quels que soient les partis au pouvoir et la couleur des gouvernements qui se succèdent – par la franc-maçonnerie) une correspondance et une continuité avec les plans de Dieu sur la France tels qu’ils ont été manifestés depuis le baptême de Clovis, et à travers la « gesta Dei per Francos ».
La légitimité d’un régime ne lui est pas conférée par le fait qu’il dure depuis quelque deux siècles : elle lui est donnée par sa conformité à l’ordre moral naturel et surnaturel, et par les circonstances historiques à travers lesquelles Dieu a clairement manifesté Ses volontés.
En France, la république est le fait d’une usurpation qui perdure et qui s’aggrave avec les années : elle est illégitime ! Ses principes sont blasphématoires et impies ; ses fondations sont la révolte contre Dieu et Ses desseins ; ses fruits sont une cascade de sacrilèges et d’abominations, de lois injustes et de pratiques immorales.
Il faut une dose impressionnante d’incohérence et de confusion pour prétendre à une continuité entre le baptême de Clovis, la haute stature de Saint Charlemagne, la politique de Hugues Capet et de ses successeurs, le rayonnement universel de Saint Louis, l’épopée de Sainte Jeanne d’Arc, l’action réconciliatrice d’Henri IV et l’apogée de civilisation atteinte sous l’impulsion de Louis XIV d’une part, et les prétendus « immortels principes de 89″, la boursouflure napoléonienne, l’engrenage de désordres et d’injustices semés par la France républicaine dans le monde entier au cours des XIXe et XXe siècles, et encore en ce début de XXIe siècle !

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4) « Mais le régime républicain est un fait, et nous sommes bien obligés d’en tenir compte et d’agir avec… »
Oui, c’est un fait ! Mais un fait comparable à celui du péché…
Lorsqu’un prêtre reçoit au confessional des pénitents qui viennent égrener la liste de leurs manquements aux commandements de Dieu et de l’Eglise, et leurs fautes contre les vertus, il ne part pas du principe que, les faits étant là, le pragmatisme lui impose de les accepter tels quels et de ne rien tenter pour que cela change. Au contraire, avec l’absolution qu’il donne (si les dispositions du pénitent lui permettent de la recevoir), il prodigue conseils et recommandations pratiques pour que ce pécheur sorte des voies du péché, n’y retombe pas, en fuie les occasions, et fasse des progrès dans la vertu… etc.
Par ailleurs, prêtres et religieux ont une grave obligation morale, par leur vie et leurs enseignements, à travailler à la conversion des pécheurs, des impies, des hérétiques et des païens. Cette obligation incombe également à tous les fidèles, en conformité avec leur état de vie et leur situation individuelle.
Ces choses-là tombent sous le sens pour tous ceux qui veulent obéir à l’ordre donné par Notre-Seigneur Jésus-Christ avant de quitter cette terre : « Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, leur apprenant à garder tout ce que Je vous ai commandé… » (Matth. XXVIII, 19). Notez au passage que Notre-Seigneur ne parle pas d’individus dans leur sphère privée, mais bien de nations.
Il ne saurait donc en être autrement avec les sociétés malades et pécheresses qu’avec les pauvres pécheurs : il faut travailler à leur conversion, il faut œuvrer pour les amener à Dieu, il faut se livrer avec zèle et générosité à leur conformité avec l’ordre social chrétien et à la fidélité à leur vocation particulière.
Nul ne reproche à un ecclésiastique de ne pas « être tout à tous » lorsqu’il combat le péché. Alors pourquoi faudrait-il le lui reprocher lorsqu’il s’oppose au péché et à l’apostasie des nations, et qu’il œuvre pour les ramener à leur vocation ?
La république, qui, en France, se manifeste comme un régime d’impiété et de révolte contre les lois naturelles et contre les préceptes de Dieu, doit être non pas reçue et acceptée comme une « institution légitime », mais combattue ainsi que l’on doit combattre toute structure de péché. La seule manière dont nous devons en « tenir compte » et « agir avec » est celle du prêtre qui montre les voies de la pénitence et du retour à l’ordre juste et légitime, celle du missionnaire qui dénonce haut et fort le péché et enseigne l’obéissance aux préceptes divins, celle de l’apôtre qui convertit pour amener à la conformité à la vocation naturelle et surnaturelle des peuples comme des individus.

L’engagement d’ecclésiastiques, prêtres et religieux, en faveur de la royauté chrétienne n’a donc, en vérité et toute saine logique, rien de si incongru et de si difficile à comprendre.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

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Pour approfondir :
- Discours du Cardinal Eugenio Pacelli sur la vocation de la France > ici
- Réflexions sur les conditions d’une authentique et solide restauration royale > ici
- « Dieu Lui-même est légitimiste » > ici
- « Du Royaume occupé » > ici

- « Etre offert pour la victoire » (abbé Christian-Philippe Chanut) > ici
- « Notre résolution : la contre-révolution » > ici
- « La république en France n’est pas autre chose que la révolution institutionnalisée » > ici
- Actualité du Comte de Chambord > ici

Ingres : le voeu de Louis XIII

Jean-Dominique Ingres : Le vœu de Louis XIII
(cathédrale de Montauban)

2022-33. On ne peut en aucun cas considérer le péché comme une norme de vie, comme une simple variation du comportement humain.

Samedi 12 mars 2022,
Fête de Saint Grégoire le Grand (cf. > ici) ;
Fête et millénaire de Saint Syméon le Nouveau Théologien (cf. > ici et > ici) ;
Samedi des Quatre-Temps de printemps.

Patriarche Cyrille de Moscou

Sa Sainteté le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie

Bien chers Amis,

Dimanche dernier, 6 mars 2022, à l’occasion du « dimanche du pardon » (dimanche qui précède l’entrée en carême dans la liturgie byzantine), Sa Sainteté le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a célébré la Divine Liturgie dans la cathédrale du Christ Sauveur à Moscou. A la fin du service divin, le Primat de l’Eglise orthodoxe russe a prononcé un sermon dont nous vous retranscrivons ci-dessous l’intégralité, dans une traduction en français que j’espère ne pas être trop fautive.

Il me paraît important de la porter à votre connaissance pour plusieurs raisons :
1) d’abord parce qu’il en a été publié plusieurs commentaires qui ne donnaient que quelques citations extraites de leur contexte et réinterprétées selon le prisme des journalistes occidentaux, dont on connaît l’impartialité et l’objectivité…
2) ensuite parce qu’il faut rétablir la vérité et qu’il ne s’agit pas, comme l’ont écrit certains, d’un soutien inconditionnel à la politique de Monsieur Vladimir Poutine transformant sans discernement toutes les actions militaires russes en « guerre sainte » ;
3) enfin, je ne crains pas de l’écrire en toutes lettres quelles que soient les conséquences que je doive en subir, parce que je souscris entièrement aux propos du Patriarche Cyrille qui nous livre ici une lecture métaphysique des événements actuels.

Le péché contre-nature – ce péché dont Saint Paul écrit qu’il ne faut même pas le nommer et qu’il n’évoque lui-même qu’en termes pudiques mais suggestifs (cf. 1 Cor. VI, 9-10) – crie vengeance vers le Ciel et en exclut ceux qui le commettent du Royaume des Cieux. Or la société anti-chrétienne veut aujourd’hui en faire une norme et en favoriser les pratiques, les banaliser, et amener à les faire considérer comme égales à ce qui est inscrit dans la loi naturelle. Or c’est bien l’un des véritables buts de la « politique » de l’Union Européenne, des USA et d’une manière générale de tous les pays « libéraux » et « démocratiques ».
L’actuel occupant du trône pontifical a lui-même sur ce sujet des propos et comportements dans lesquels on est très loin de trouver l’affirmation claire et nette des principes authentiquement chrétiens et l’écho sans ambigüité des paroles de la Révélation… hélas !

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

PS : Nous mettons en caractères gras certaines des affirmations du Patriarche Cyrille en raison de leur importance.

Le Patriarche Cyrille de Moscou

nika

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

A vous tous, mes chers Seigneurs, Pères, Frères et Sœurs, je vous félicite de tout cœur en ce dimanche, dimanche du Pardon, dernier dimanche avant le début de la Quadragésime, le grand Carême !
De nombreux ascètes considèrent le carême comme un printemps spirituel. Il coïncide avec le printemps de la vie physique et est en même temps considéré par la conscience de l’Église comme un printemps spirituel. Et qu’est-ce que le printemps ? Le printemps est la renaissance de la vie, le renouveau, une nouvelle force. Nous savons que c’est au printemps que la sève puissante éclate à dix, vingt, cent pieds de haut, donnant vie à l’arbre. C’est en effet un étonnant miracle de Dieu, un miracle de la vie. Le printemps est la renaissance de la vie, un certain grand symbole de la vie. Et c’est pourquoi ce n’est pas tout à fait par hasard que la principale fête de printemps est la Pâque du Seigneur, qui est aussi un signe, un gage, un symbole de la vie éternelle. Et nous croyons qu’il en est ainsi, et cela signifie que toute la foi chrétienne, que nous partageons avec vous, est la foi qui affirme la vie, qui est contre la mort, contre la destruction, qui affirme la nécessité de suivre les lois de Dieu pour vivre, pour ne pas périr dans ce monde, ni dans l’autre.

Mais nous savons que ce printemps est assombri par de graves événements liés à la détérioration de la situation politique dans le Donbass, presque le début des hostilités. Je voudrais dire quelque chose à ce sujet.
Depuis huit ans, on tente de détruire ce qui existe dans le Donbass. Et dans le Donbass, il y a un rejet, un rejet fondamental des soi-disant valeurs qui sont proposées aujourd’hui par ceux qui prétendent au pouvoir mondial.

Aujourd’hui, il existe un test de loyauté envers ce pouvoir, une sorte de laissez-passer vers ce monde « heureux », un monde de consommation excessive, un monde de « liberté » apparente. Savez-vous ce qu’est ce test ? Le test est très simple et en même temps terrifiant : il s’agit d’une parade de la gay pride. La demande de nombreux pays d’organiser une gay pride est un test de loyauté envers ce monde très puissant ; et nous savons que si des personnes ou des pays rejettent ces demandes, ils ne font pas partie de ce monde, ils en deviennent des étrangers.
Mais nous savons ce qu’est ce péché, qui est promu par les soi-disant « marches de la fierté » (gay pride). C’est un péché qui est condamné par la Parole de Dieu – tant l’Ancien que le Nouveau Testament. Et Dieu, en condamnant le péché, ne condamne pas le pécheur. Il l’appelle seulement à la repentance, mais ne fait en aucun cas du péché une norme de vie, une variation du comportement humain – respectée et tolérée – par l’homme pécheur et son comportement.

Si l’humanité accepte que le péché n’est pas une violation de la loi de Dieu, si l’humanité accepte que le péché est une variation du comportement humain, alors la civilisation humaine s’arrêtera là. Et les gay pride sont censées démontrer que le péché est une variante du comportement humain. C’est pourquoi, pour entrer dans le club de ces pays, il faut organiser une gay pride. Pas pour faire une déclaration politique « nous sommes avec vous », pas pour signer des accords, mais pour organiser une parade de la gay pride. Nous savons comment les gens résistent à ces demandes et comment cette résistance est réprimée par la force. Il s’agit donc d’imposer par la force le péché qui est condamné par la loi de Dieu, c’est-à-dire d’imposer par la force aux gens la négation de Dieu et de sa vérité.
Par conséquent, ce qui se passe aujourd’hui dans la sphère des relations internationales ne relève pas uniquement de la politique. Il s’agit de quelque chose d’autre et de bien plus important que la politique. Il s’agit du Salut de l’homme, de la place qu’il occupera à droite ou à gauche de Dieu le Sauveur, qui vient dans le monde en tant que Juge et Créateur de la création. Beaucoup aujourd’hui, par faiblesse, par bêtise, par ignorance, et le plus souvent parce qu’ils ne veulent pas résister, vont là, du côté gauche.
Et tout ce qui a trait à la justification du péché condamné dans la Bible est aujourd’hui le test de notre fidélité au Seigneur, de notre capacité à confesser la foi en notre Sauveur.

Tout ce que je dis a plus qu’une simple signification théorique et plus qu’une simple signification spirituelle. Il y a une véritable guerre autour de ce sujet aujourd’hui. Qui s’attaque aujourd’hui à l’Ukraine, où huit années de répression et d’extermination de la population du Donbass, huit années de souffrance, et le monde entier se tait – qu’est-ce que cela signifie ?

Mais nous savons que nos frères et sœurs souffrent réellement ; de plus, ils peuvent souffrir pour leur loyauté envers l’Église. Et donc, aujourd’hui, en ce dimanche du pardon, moi, d’une part, en tant que votre berger, j’appelle tout le monde à pardonner les péchés et les offenses, y compris là où il est très difficile de le faire, là où les gens se battent entre eux.
Mais le pardon sans la justice est une capitulation et une faiblesse. Le pardon doit donc s’accompagner du droit indispensable de se placer du côté de la lumière, du côté de la vérité de Dieu, du côté des commandements divins, du côté de ce qui nous révèle la lumière du Christ, sa Parole, son Évangile, ses plus grandes alliances données au genre humain.

Tout cela dit, nous sommes engagés dans une lutte qui n’a pas une signification physique mais métaphysique.
Je sais comment, malheureusement, les orthodoxes, les croyants, choisissant dans cette guerre la voie de la moindre résistance, ne réfléchissent pas à tout ce sur quoi nous réfléchissons aujourd’hui, mais suivent docilement la voie qui leur est indiquée par les pouvoirs en place.

Nous ne condamnons personne, nous n’invitons personne à monter sur la croix, nous nous disons simplement : nous serons fidèles à la parole de Dieu, nous serons fidèles à sa loi, nous serons fidèles à la loi de l’amour et de la justice, et si nous voyons des violations de cette loi, nous ne supporterons jamais ceux qui détruisent cette loi, en effaçant la ligne de démarcation entre la sainteté et le péché, et surtout ceux qui promeuvent le péché comme modèle ou comme modèle de comportement humain.

Aujourd’hui, nos frères du Donbass, les orthodoxes, souffrent sans aucun doute, et nous ne pouvons qu’être avec eux – avant tout dans la prière.
Nous devons prier pour que le Seigneur les aide à préserver leur foi orthodoxe et à ne pas succomber aux tentations.
Dans le même temps, nous devons prier pour que la paix revienne au plus vite, pour que le sang de nos frères et sœurs cesse de couler, pour que le Seigneur accorde sa grâce à la terre du Donbass, qui souffre depuis huit ans et qui porte l’empreinte douloureuse du péché et de la haine humaine.

Alors que nous entrons dans la saison du Carême, essayons de pardonner à tout le monde.
Qu’est-ce que le pardon ?
Lorsque vous demandez pardon à quelqu’un qui a enfreint la loi ou vous a fait du mal et injustement, vous ne justifiez pas son comportement mais vous cessez simplement de le haïr. Il cesse d’être votre ennemi, ce qui signifie que par votre pardon vous le livrez au jugement de Dieu. C’est la véritable signification du pardon mutuel pour nos péchés et nos erreurs.
Nous pardonnons, nous renonçons à la haine et à l’esprit de vengeance, mais nous ne pouvons pas effacer la faute humaine au ciel ; c’est pourquoi, par notre pardon, nous remettons les fautifs entre les mains de Dieu, afin que le jugement et la miséricorde de Dieu s’exercent sur eux. Pour que notre attitude chrétienne à l’égard des péchés, des torts et des offenses des hommes ne soit pas la cause de leur ruine, mais que le juste jugement de Dieu s’accomplisse sur tous, y compris sur ceux qui prennent sur eux la plus lourde responsabilité, creusant le fossé entre les frères, le remplissant de haine, de malice et de mort.

Que le Seigneur miséricordieux exécute son juste jugement sur nous tous. Et de peur qu’à la suite de ce jugement, nous nous retrouvions du côté gauche du Sauveur venu dans le monde, nous devons nous repentir de nos propres péchés.
Aborder notre vie avec une analyse très profonde et dépassionnée, se demander ce qui est bon et ce qui est mauvais, et en aucun cas se justifier en disant : « J’ai eu une dispute avec ceci ou cela, parce qu’ils avaient tort ». C’est un faux argument, c’est une mauvaise approche. Vous devez toujours demander devant Dieu : Seigneur, qu’ai-je fait de mal ? Et si Dieu nous aide à prendre conscience de notre propre iniquité, nous devons nous repentir de cette iniquité.

Aujourd’hui, à l’occasion du dimanche du Pardon, nous devons accomplir l’exploit de renoncer à nos propres péchés et injustices, l’exploit de nous remettre entre les mains de Dieu et l’acte le plus important – le pardon de ceux qui nous ont offensés.

Que le Seigneur nous aide tous à traverser les jours du Carême de telle sorte que nous puissions entrer dignement dans la joie de la Résurrection du Christ. Et prions pour que tous ceux qui combattent aujourd’hui, qui versent le sang, qui souffrent, entrent aussi dans cette joie de la Résurrection dans la paix et la tranquillité. Quelle joie y a-t-il si les uns sont dans la paix et les autres dans la puissance du mal et dans la douleur des luttes intestines ?

Que le Seigneur nous aide tous à entrer dans le chemin du Saint Carême de telle manière, et pas autrement, qu’Il puisse sauver nos âmes et favoriser la multiplication du bien dans notre monde pécheur et souvent terriblement erroné, afin que la vérité de Dieu puisse régner et diriger le genre humain.

Amen.

Sa Sainteté le Patriarche Cyrille de Moscou

nika

2022-20. « Quoniam lingua Latina est lingua Ecclesiae viva : parce que le latin est la langue vivante de l’Eglise ! »

22 février 2022,
Fête de la Chaire de Saint Pierre à Antioche (cf. > ici, > ici, > ici et encore > ici) ;
Mémoire de Sainte Marguerite de Cortone.

Ce 22 février 2022 – qui est une date palindrome : 22 02 2022 – marque le soixantième anniversaire de la signature solennelle de la Constitution Apostolique « Veterum Sapientia » par Jean XXIII (deuxième du nom).
Il y a tout juste dix ans, pour le cinquantième anniversaire, nous avions publié la traduction française de ce texte (cf. > ici), ainsi que quelques commentaires – qui n’ont rien perdu de leur pertinence et de leur actualité – auxquels je me permets de vous renvoyer (cf. > ici).
Aujourd’hui, de manière presque pratico-pratique, nous avons choisi de publier une sorte de synthèse des réponses aux questions qui nous sont parfois posées, réponses qui nous semblent faire ressortir les raisons fondamentales de l’importance du maintien de la langue latine dans la liturgie pour les Eglises de rite latin.

Missel romain traditionnel

« L’emploi de la langue latine […] est une protection efficace contre toute corruption de doctrine ».
(Pie XII, encyclique « Mediator Dei »)

Depuis que le latin, parce que ce n’est plus une langue de la vie courante des peuples et qui serait de ce fait soumise à des évolutions continues, a acquis un statut de langue « savante », son vocabulaire et ses formulations sont assez rigoureusement fixés et laissent moins de place à des interprétations hasardeuses.
La liturgie est l’une des formes les plus hautes de la foi, et donc des dogmes auxquels adhèrent fermement les catholiques.
Or les dogmes sont rigoureusement et très précisément définis : il ne peut pas y avoir de place à l’à-peu-près dans leur formulation. C’est ainsi que, malheureusement, pendant quelque cinquante années la traduction officielle en français du symbole de Nicée-Constantinople, en raison d’une mauvaise traduction, a fait professer une hérésie contraire aux définitions des premiers conciles de l’Eglise aux catholiques qui assistaient à la messe réformée en langue française (cf. > ici).
Monseigneur Gaston de Ségur a résumé ceci en ces termes : « A des dogmes immuables, il faut une langue immuable qui garantisse de toute altération la formulation même de ces dogmes. (…) Les protestants et tous les ennemis de l’Eglise catholique lui ont toujours durement reproché le latin. Ils sentent que l’immobilité de cette cuirasse défend merveilleusement de toute altération ces antiques traditions chrétiennes dont le témoignage les écrase. Ils voudraient briser la forme pour atteindre le fond. L’erreur parle volontiers une langue variable et changeante ».
C’est, à nos yeux, la première et la plus importante des raisons qui nous font maintenir fermement la langue latine pour la liturgie des rites latins. 

Peut-on parler de « langue sacrée » ?

Il est évident que lorsque les premières générations des chrétiens de Rome célébraient leur liturgie en langue latine, cette dernière n’avait pas le statut de « langue sacrée ». Mais très rapidement, alors que la langue parlée évoluait, jusqu’à arriver à former les langues modernes, la langue de la liturgie restait le latin des premiers siècles de notre ère et n’était pas atteinte par les vicissitudes du langage ordinaire. Cela n’est pas vrai seulement pour le latin mais également pour le grec dans les Eglises d’Orient qui célèbrent dans cette langue, tout comme dans les Eglises russes c’est le slavon et non le russe moderne qui est la langue liturgique. Le même phénomène existe aussi en de nombreuses religions non chrétiennes : dans le judaïsme, à l’époque de Notre-Seigneur, l’hébreu restait la langue de la liturgie alors que l’araméen l’avait supplanté dans la vie courante ; et chez les mahométans le coran est lu en arabe littéraire, différent de l’arabe moderne.
Ces langues anciennes qui perdurent dans l’action liturgique et la prière, ont ainsi acquis le statut de « langues sacrées », non par une institution divine directe, mais parce que l’homme a naturellement la compréhension que ce qui est sacré ne peut être pollué par ce qui est profane, et qu’il lui faut manifester que la prière et la liturgie sont des œuvres à part qu’il n’a pas le droit de bouleverser, qu’elles sont si importantes qu’il n’est pas convenable qu’on s’y exprime avec le langage de la rue, que la langue vulgaire est impropre à l’expression du divin et de ce qui lui permet d’entrer en communion avec lui, que le culte de Dieu ne dépend pas de l’homme mais qu’on doit le transmettre tel qu’on l’a reçu…
De la même manière que, de manière habituelle, on s’habille autrement que pour aller travailler – on s’endimanche – quand on va à l’église, il est tout aussi normal finalement que l’on utilise une autre langue que celle de la vie profane pour célébrer le culte du Très-Haut. 

Le latin est-il un obstacle à la compréhension des fidèles ?

Ici, j’ai bien envie de renverser la question : la langue vernaculaire est-elle un gage de véritable compréhension de ce qu’exprime la liturgie ?
L’expérience me prouve par une multitude d’exemples, dont j’ai été le témoin direct en plus de quatre décennies de vie religieuse, que la liturgie célébrée dans la langue de tous les jours ne donne bien souvent l’impression de la compréhension que d’une manière très superficielle et illusoire, d’autant que nous sommes dans une société où les hommes sont saturés par des flots de paroles qui leur glissent dessus : la liturgie dans la langue natale des fidèles ne vient qu’ajouter un flot supplémentaire à ceux que déversent continûment sur eux les médias et les réseaux sociaux, et encourt finalement le risque d’être perçue de la même manière qu’eux.
L’usage d’une « langue sacrée » au contraire produit nécessairement une séparation salutaire avec le domaine profane et empêche de rabaisser le culte divin au niveau humain.
Les fidèles disposent de missels ou de feuilles avec lesquelles ils ont accès au texte latin et à sa traduction dans leur propre langue : l’effort d’attention nécessaire pour suivre la liturgie favorise de fait une véritable participation des fidèles – une participation active de l’intelligence et de la volonté -, tandis que la langue vernaculaire risque, au contraire, d’encourager à la passivité voire à la paresse !
Enfin, les textes de la liturgie ne sont finalement pas très compliqués : si le néophyte est un peu perdu au début, il apprend très rapidement les prières usuelles et même s’il n’est pas capable d’en faire une traduction littéraire il en acquiert très vite une compréhension profonde du sens. Je me souviens de cette réflexion que me faisait un vieux chanoine de la cathédrale de Chartres qui avait été curé d’une paroisse rurale « avant le concile » : « Lorsque, le saint jour de Pâques, les chantres entonnaient le Haec dies, mes bons paysans de Beauce se levaient tous comme un seul homme non parce qu’ils auraient été capables de me donner une traduction mot à mot de ce qu’ils entendaient depuis des années au point qu’ils n’avaient plus besoin d’en suivre le texte dans leurs missels, mais parce que les paroles latines – même s’ils les écorchaient un peu parfois quand ils les récitaient – étaient devenues des éléments vivants de leur foi, des éléments vivants de leurs personnes, et qu’éveillaient en leurs âmes la joie profonde et inexprimable de ce Jour d’allégresse que leur Seigneur et Sauveur leur donnait dans cette fête de Pâques ! » 

Raphaël - la Messe de Bolsena - détail

Raffaello Sanzio : la messe de Bolsena (détail)
Fresque de la « chambre d’Héliodore » dans les palais apostoliques du Vatican

Une plus grande transcendance :

La Messe accomplit des mystères ineffables qu’aucun homme ne peut comprendre parfaitement.
Certes, le saint concile de Trente fait au prêtre une obligation de prêcher souvent sur la Messe et d’en expliquer les rites aux fidèles, mais malgré cela le mystère ne sera jamais épuisé. L’utilisation d’une langue sacrée, avec son caractère un peu « mystérieux », est un rappel constant de la transcendance de Dieu et de ce qu’Il a accompli dans la mort, la résurrection et la glorieuse ascension de Son Fils, commémorées et réactualisées à chaque Messe. L’emploi du latin dans la liturgie entretient le sens du mystère même chez ceux qui connaissent cette langue. Le seul fait qu’il s’agisse d’une langue spéciale, distincte de la langue natale et de la langue de la rue – une langue qui, de soi, n’est pas immédiatement comprise par tous, même si, de fait, on la comprend – suffit à donner un certain recul, qui favorise le respect.
En bref, l’utilisation d’une langue sacrée nous tire vers le haut, tandis que l’utilisation de la langue vernaculaire, au contraire, parce qu’elle donne l’impression superficielle d’une compréhension qui, en réalité, n’existe pas, conduit peu à peu à la perte de la sacralité des rites eux-mêmes. Redisons-le : les gens s’imaginent comprendre la Messe, parce qu’elle est célébrée dans leur langue natale, alors qu’en fait, la plupart du temps, avec l’usage de la langue vulgaire, ils perdent le sens de ce qu’est le saint sacrifice.
II ne s’agit évidemment pas d’édifier un mur opaque qui masquerait tout, mais, au contraire, de mieux faire apprécier les perspectives. Il faut, pour cela, maintenir une certaine distance. Pour pénétrer un peu dans le mystère de la Messe, la première condition est de reconnaître humblement qu’il s’agit, effectivement, d’un mystère, quelque chose qui nous dépasse.
 

L’expression de l’unité de l’Eglise :

Comme nous le disions au début, la foi immuable requiert, comme instrument proportionné, une langue qui soit la plus immuable possible, et puisse ainsi servir de référence. Or le latin, qui n’est plus une langue courante, ne change plus (ou presque plus). Dans une langue courante, au contraire, les mots peuvent subir assez rapidement des changements notables de signification ou de registre (ils peuvent prendre une connotation péjorative ou ridicule qu’ils n’avaient pas auparavant). L’usage d’une telle langue peut donc facilement entraîner des erreurs ou des ambiguïtés, tandis que l’usage du latin préserve à la fois la dignité et l’orthodoxie de la liturgie.
Employée dans la liturgie pendant près de deux mille ans, la langue latine en a été comme sanctifiée.
Il y a quelque chose de particulièrement réconfortant de pouvoir prier avec les mêmes mots que nos ancêtres, avec les mêmes mots que tous les saints des siècles précédents : cela nous fait éprouver d’une manière quasi charnelle et extrêmement concrète la continuité de l’Eglise à travers le temps, en unissant notre prière à celle de toutes les générations avant nous, par l’utilisation des mêmes mots et des mêmes formules, comme en faisant se rejoindre le temps et l’éternité.
Le latin ne manifeste pas seulement l’unité de l’Eglise à travers le temps, mais aussi à travers l’espace : « L’emploi de la langue latine, en usage dans une grande partie de l’Église, est un signe d’unité manifeste et éclatant (…) » (Pie XII, encyclique « Mediator Dei »). Avant le concile vaticandeux, la Messe selon le rite romain était partout célébrée de la même manière, langue et rites, et sur tous les continents les fidèles retrouvaient la même Messe qu’en leur paroisse. Aujourd’hui, cette unité est brisée : la liturgie postconciliaire en langue vulgaire, avec en outre les innombrables adaptations et fantaisies qu’elle autorise, fragmente presque jusqu’à l’infini le culte catholique, au point que celui qui y assiste dans une langue qu’il ne connaît pas a beaucoup de mal même à en repérer les parties principales !

Notre Eglise est une, sainte, catholique, et apostolique.
La langue latine contribue, à sa façon, à chacune de ces caractéristiques. Par son génie propre (langue impériale), son caractère hiératique (langue « fixée ») ; par son usage universel et supranational (elle n’est plus la langue d’aucun peuple), elle en manifeste la catholicité ; par son lien vivant avec la Rome de Saint Pierre, et avec tant de Pères et docteurs de l’Eglise qui furent à la fois l’écho des Apôtres et les artisans du latin liturgique (ils forgèrent non seulement ses oraisons, hymnes et répons, mais le latin chrétien lui-même, qui est, par beaucoup de traits, un complet renouvellement du latin classique), elle est la garante de son apostolicité ; par son emploi officiel, enfin, qui en fait la langue de référence tant du magistère que du droit canon ou de la liturgie, elle concourt efficacement à la triple unité de l’Eglise : unité de foi, unité de gouvernement et unité de culte : « En effet, dès lors qu’elle groupe en son sein toutes les nations, qu’elle est destinée à vivre jusqu’à la consommation des siècles, et qu’elle exclut totalement de son gouvernement les simples fidèles, l’Église, de par sa nature même, a besoin d’une langue universelle, définitivement fixée, qui ne soit pas une langue vulgaire » (Pie XI, lettre apostolique « Officiorum omnium », 1er août 1922).

C’est donc bien avec raison que la Constitution Apostolique « Veterum Sapientia » proclame que « le latin est la langue vivante de l’Eglise : lingua Latina est lingua Ecclesiae viva » !

Messe latine traditionnelle dans la chapelle de l'ancienne Visitation du Puy en Velay

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