2025-8. De l’Ordre de Saint Paul premier ermite.
15 janvier,
Fête de Saint Paul de Thèbes, premier ermite (cf. > ici) ;
Mémoire de Sainte Tarsitie, Fille de France, vierge et ermite (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Maur, abbé et confesseur.
Saint Paul de Thèbes
[anonyme napolitain milieu du XVIIème siècle - collection privée]
La célébration de la fête de Saint Paul du désert nous incite à faire mention aujourd’hui d’un Ordre religieux qui appartient à la famille augustinienne, qui s’est trouvé implanté ou se trouve encore implanté dans plusieurs pays voisins de la France, mais qui – en l’état actuel de nos connaissances du moins – n’a pas de maisons religieuses dans notre pays.
L’ « Ordo Sancti Pauli Primi Eremitae : Ordre de Saint Paul Premier Ermite » (en abrégé : OSPPE), c’est son nom officiel, est plus connu ordinairement comme celui des Pères Paulins.
La fondation de cet Ordre fut accomplie en 1250, en Hongrie, lorsque un chanoine d’Esztergom, issu d’une noble famille et prénommé Eusèbe, désireux de vivre une vie religieuse plus parfaite et plus radicale sur le modèle des premiers pères du désert, s’étant établi sur le Mont Pilis – entre Budapest et Esztergom – avec quelques disciples, fut gratifié d’une communication divine lui enjoignant de réunir en une seule congrégation ses propres disciples et une communauté d’ermites qui avait été constituée quelques décennies auparavant par l’évêque Barthélémy de Pecs.
Eusèbe de Strigonie (c’est ainsi que l’on nommait autrefois Esztergom d’après son nom latin) mourut le 20 janvier 1270, et il bénéficie d’un culte immémorial en Hongrie, alors qu’il est inconnu de la plupart des collections de vies de saints en France.
Saint Eusèbe de Strigonie était lié d’amitié avec Saint Thomas d’Aquin, et la tradition de l’Ordre veut que ce soit ce dernier qui recommanda la nouvelle fondation au pape Urbain IV en 1262 (et on rapporte que l’habit de couleur blanche serait une forme d’hommage à l’habit blanc de Saint Thomas) ; certains écrivent même que l’Aquinate serait le rédacteur des Constitutions primitives de l’Ordre, qui fut définitivement approuvé par Clément V en 1308-1309 comme une Congrégation de Chanoines Réguliers de Saint Augustin.
Blason de l’Ordre de Saint Paul premier ermite,
dont la devise est : « Solus cum Deo solo » (seul avec Dieu seul)
Depuis la Hongrie, où plusieurs monastères furent fondés dès la deuxième moitié du XIIIème siècle, l’Ordre eut une diffusion rapide dans les royaumes voisins : Croatie (où l’on compta rapidement une cinquantaine de communautés), Pologne (les Paulins s’implantèrent à Częstochowa en 1382, et s’y trouvent toujours), Etats du Saint-Empire germanique (jusqu’en Bavière), Autriche, péninsule balkanique, puis l’Italie, l’Espagne et le Portugal, d’où se fit un essaimage aussi dans les Amériques lors de leur première évangélisation.
Les Pères Paulins, en effet, au cours des XIVème et XVème siècles, passèrent du statut de religieux strictement contemplatifs à celui de la vie dite mixte (c’est-à-dire contemplation et apostolat), d’abord en ouvrant des écoles (ils dirigèrent même une université), puis en se consacrant à diverses tâches missionnaires.
Le Roi Louis 1er de Hongrie (1326-1382), dit le Grand, de la branche capétienne d’Anjou-Sicile, qui était fort dévot à Saint Paul de Thèbes, favorisa grandement l’Ordre, obtint des Vénitiens, en 1381, une partie des reliques de Saint Paul de Thèbes (les Vénitiens les avaient prises à Constantinople, évidemment), qu’il confia à la maison-mère de l’Ordre.
A son apogée, au XVIème siècle, l’Ordre compta quelque trois-cents monastères répartis en huit provinces dans toute l’Europe, et même en Palestine et en Egypte.
La grande défaite de Mohács (29 août 1526), au cours de laquelle le Roi Louis II fut défait par les troupes de Soliman le Magnifique, entraîna une partition du royaume de Hongrie entre l’Empire ottoman, les Habsbourg d’Autriche et la principauté de Transylvanie, qui eut aussi de dramatiques conséquences pour l’Ordre : des dizaines de monastères furent pillés et détruits, leurs archives et leurs bibliothèques réduites en cendres, et un grand nombre de moines subirent le martyre.
Quelques années après, la prétendue « Réforme » entraînera de nouvelles dévastations, si bien que le monastère de Jasna Góra à Częstochowa, en Pologne, va devenir – par déplacement – le grand centre de l’Ordre, puis devenir la capitale spirituelle des Polonais, haut-lieu de la fidélité à la religion et la patrie, et abbaye-mère d’un grand nombre d’autres maisons religieuses (jusqu’à 80 monastères en Pologne au XVIIIème siècle).
Le monastère fortifié des Pères Paulins
à Jasna Góra (Częstochowa, Pologne)
Les partages successifs de la Pologne à partir de la seconde moitié du XVIIIème siècle, furent eux aussi dramatique pour les monastères paulins : il ne subsista finalement que les deux maisons de Jasna Góra et de Cracovie, qui durent survivre en étant juridiquement indépendantes.
Lorsque la Pologne retrouva son indépendance, ces deux communautés de Jasna Góra et de Cracovie se réunirent à nouveau comme deux monastères d’un même Ordre, en 1920. Un chapitre général put être convoqué, un abbé général fut élu, et, les vocations affluant, de nouveaux essaimages et fondations reprirent.
La seconde guerre mondiale et la domination soviétique sur les pays d’au-delà du « rideau de fer » furent un nouveau coup d’arrêt. Malgré tout, depuis Jasna Góra, Maison généralice, l’Ordre Paulin continua à vivre, à résister, et à rayonner.
Si bien qu’après l’effondrement du bloc soviétique une nouvelle expansion se fit, restaurant d’anciens monastères en Pologne ; ressuscitant des communautés en Hongrie, Croatie, Slovaquie, Ukraine, Biélorussie, Bohème et Allemagne ; ouvrant des missions en Afrique du Sud et au Cameroun, revivifiant les anciennes communautés qui s’étaient maintenues aux Etats-Unis, en Australie, en Espagne, en Italie et en Belgique.
Actuellement, l’Ordre des Chanoines réguliers augustiniens de Saint Paul premier ermite compte quelque cinq-cents religieux (frères et prêtres) répartis dans septante-et-un monastères (qui, malheureusement, ne pratiquent pas la liturgie traditionnelle).
Pères Paulins en procession dans la basilique de Jasna Góra, à Częstochowa

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Très intéressant article qui nous fait connaître, au-delà de la dévotion à Saint Paul premier ermite, la constitution de cet ordre des Pères Paulins que j’ignorais absolument!