2024-123. In memoriam : Monseigneur François Ducaud-Bourget.

12 juin,
Fête de Saint Jean de Saint-Facond (cf. > ici) ;
Mémoire de Saint Léon III, pape et confesseur ;
Mémoire des Saints Basilide, Cyrin, Nabor et Nazaire, martyrs ;
Anniversaire du rappel à Dieu de Monseigneur François Ducaud-Bourget (12 juin 1984).

Mgr François Ducaud-Bourget - blogue

Monseigneur François Ducaud-Bourget (1897-1984)

   Fils de Jean-Maurice Ducaud et de Marie-Louise Bourget, Germain Joseph Pierre Marie Maurice Ducaud, dit François Ducaud-Bourget, est né à Bordeaux le 24 novembre 1897. Après sa formation générale, chez les Frères des Ecoles Chrétiennes, il fut en école supérieure de commerce.
Brancardier volontaire en 1914, il est appelé sous les drapeaux en 1917 (
7ème régiment d’infanterie coloniale à Bordeaux) et passera un bref temps dans les Balkans en 1918.
Rendu à la vie civile, il entre en 1919 au séminaire de Saint-Sulpice, à Paris.

   Ordonné prêtre le 28 juin 1924, il enchaîne les postes de vicaire dans plusieurs paroisses de l’archidiocèse de Paris. En 1942, il prend une part active à la Résistance, ce qui lui vaudra la médaille de la Résistance et la Croix de Guerre. En 1944, il est vicaire à Saint-Germain l’Auxerrois, puis, en 1945, devient Chapelain de l’Ordre de Malte, ce qui lui vaut le titre de Monseigneur.
Il passe trois années à Haïti – secrétaire particulier et vicaire général de l’archevêque de Port-au-Prince qui avait voulu l’avoir auprès de lui -, revient en Europe pour raison de santé, puis est finalement nommé aumônier de l’Hôpital Laënnec en 1961, poste qu’il conserve jusqu’en 1971.

Chapelle de l'Hôpital Laënnec à Paris

(nota bene : ces dernières années, la chapelle a été désaffectée et vandalisée)

   Monseigneur Ducaud-Bourget voit arriver les réformes consécutives au second concile du Vatican : simplifications apportées à la Messe traditionnelle, introduction de la langue vernaculaire, puis, en 1969 un nouvel Ordo missae

« Après le Concile, on a commencé à nous expliquer qu’il ne fallait plus dire le Judica me du début de la messe. Evidemment, cela ne faisait pas partie intégrante de la messe, c’étaient des prières que le prêtre faisait en allant en procession de la sacristie jusqu’à l’autel. Par conséquent (…) ce n’était pas un drame ; si on tenait au Judica me, on pouvait le dire avant, et, à l’autel, on commençait directement par le Adjutorium nostrum, et la messe continuait.
Mais voilà qu’ensuite on nous a dit qu’il fallait supprimer le dernier Evangile. Bon. Le dernier Evangile, c’est encore une partie qui a été rajoutée à la messe, pour répondre au désir de la foule. Donc, ça ne fait pas partie intégrante du sacrifice ; c’était une dévotion vénérable, respectable ; mais enfin, puisqu’on nous disait de la supprimer, on pouvait la supprimer.
Et puis, progressivement, on a commencé à toucher à l’offertoire. Or, l’offertoire, lui, est partie intégrante du sacrifice. Alors, quand j’ai vu cela, j’ai dit : dans ces conditions, je reprends tout comme autrefois ».
(Cité par André Figuéras, in « Saint-Nicolas du Chardonnet – le combat de Mgr Ducaud-Bourget », éd. de Chiré 1977 pp. 43-44)

   Et à propos du formulaire que le cardinal-archevêque de Paris lui demanda de signer, où se trouvait l’affirmation que la messe de Paul VI n’est ni hérétique ni équivoque :

   « (…) Hérétique, je n’en sais rien. Si elle l’était, ce serait moins dangereux, ça se verrait. Mais, pour ce qui est d’être équivoque, la messe de Paul VI l’est incontestablement (…).
Ils ne veulent pas admettre que leur messe est équivoque. Moi je dis ceci : lorsque la même messe peut être dite par des pasteurs protestants et par des prêtres catholiques [note : Mgr Ducaud-Bourget fait ici référence à une affirmation de Paul VI lui-même qui déclara avoir voulu une messe que les protestants puissent célébrer sans que cela leur posât de problème], est-ce qu’elle est protestante, est-ce qu’elle est catholique ?
Réponse : elle est équivoque. Qu’est-ce que c’est, selon le dictionnaire, que d’être équivoque ? C’est d’avoir deux sens. Alors, si la messe de Paul VI n’est pas équivoque, c’est que nous ne parlons plus français.
Je le répète : cette messe qui peut-être dite par la Confession d’Augsbourg, par les pasteurs anglicans, et par les curés catholiques, c’est bien évidemment une messe équivoque. En effet, elle peut être entendue de façon différente par ceux qui la disent identiquement, puisque les protestants ne croient pas au sacrifice de Jésus-Christ perpétué, alors que nous y croyons. Alors, la question est la suivante : est-ce que cette messe-là est un sacrifice, ou est-ce qu’elle ne l’est pas ? »
(Ibid. pp. 44-45).

Salle Wagram - haut lieu du combat pour la Messe traditionnelle

La Salle Wagram (état actuel) qui devint un lieu de célébration de la Messe traditionnelle
après l’expulsion de Mgr Ducaud-Bourget de Laënnec

   Monseigneur Ducaud-Bourget continuant donc à célébrer la messe de son ordination – la Messe latine traditionnelle, la Messe catholique sans équivoque -, la chapelle de l’Hôpital Laënnec devint le lieu où de plus en plus de fidèles, fuyant leurs paroisses, affluèrent par centaines : faisant appel au concours de plusieurs autres prêtres, eux aussi réfractaires à l’équivoque, il y eut bientôt quatre messes dominicales à Laënnec pour quelque 1500 fidèles.

   L’archevêché multiplia les pressions, mais d’autres instances manœuvrèrent elles aussi. Ce fut un véritable feuilleton à suspens où l’on vit intervenir un syndicat – la CFDT pour ne pas la nommer -, qui se plaignit à la direction de l’Assistance Publique du manque de « neutralité » de l’aumônier. L’Assistance Publique demanda à l’archevêché de faire cesser une activité qui « troublait la bonne marche des services hospitaliers » (sic), et, en 1971, Monseigneur Ducaud-Bourget, âgé de 74 ans, fut démis de ses fonctions, et la chapelle de l’Hôpital Laënnec fut interdite d’accès aux fidèles traditionnels.

   C’est alors que commencèrent les années d’errance à la recherche d’une hospitalité liturgique (mais les communautés pressenties se virent interdire par l’archevêché d’accueillir les exclus de Laënnec), de locaux à aménager ou de salles à louer, tandis que le nombre des fidèles ne cessait d’augmenter…
Enfin fût trouvé un arrangement avec le directeur de la Salle Wagram et une véritable communauté stable de type paroissial put continuer à vivre et à se développer autour de ce lieu pour le moins original où la Messe catholique dominicale prenait la suite des combats de boxe et autres bals musette du samedi soir !
Jusqu’à ce dimanche 27 février 1977, dont nous avons déjà parlé dans les pages de ce blogue (cf. > ici), où la sainte audace de Monseigneur Ducaud-Bourget et de ses amis prêtres et laïcs fervents rendit une véritable église, une église historique au centre de Paris, au culte catholique pour lequel elle avait été édifiée : Saint-Nicolas du Chardonnet !

église Saint-Nicolas du Chardonnet façade principale

Eglise Saint-Nicolas du Chardonnet

   Pendant sept ans, Monseigneur Ducaud-Bourget fera vivre, par la force de sa foi, cette église devenue célèbre dans le monde entier : au cœur de la capitale, la célébration de la liturgie traditionnelle dans un cadre qui lui est approprié, et malgré, dans les premières années, des alertes régulières faisant craindre une expulsion, est devenue une sorte de source vive où des milliers d’âmes sont venues puiser les grâces incommensurables et à nulle autres pareilles qui sont liées à la Messe authentiquement catholique.
Des centaines de vocations religieuses et sacerdotales ont été suscitées et se sont épanouies en conséquence de l’aplomb, de la fermeté, du courage, de la hardiesse et même – disons-le – du culot de ce prêtre exemplaire, qui ne manquait pas d’humour, et dont à juste titre Son Excellence Monseigneur Lefebvre a déclaré : 

« L’Eglise catholique en France peut l’inscrire à la suite de ses prêtres les plus célèbres, les plus fidèles et les plus zélés… »
(Message d’hommage publié le 14 juin 1984 après l’annonce de la mort de Monseigneur Ducaud-Bourget).

   En septembre 1983, à l’approche de son quatre-vingt sixième anniversaire, Monseigneur Ducaud-Bourget organisa sa « succession » et remit à l’abbé Philippe Laguérie, alors membre de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, le soin de continuer l’œuvre qu’il avait initiée à Saint-Nicolas du Chardonnet (on trouvera l’enregistrement des sermons qu’il prononça pour son quatre-vingt-sixième anniversaire et à l’occasion de sa dernière Messe à Saint-Nicolas du Chardonnet > ici).

   Victime d’un infarctus du myocarde, ce saint prêtre fut rappelé à Dieu dans la nuit du lundi 11 au mardi 12 juin 1984, dans une clinique de Saint-Cloud : il était dans sa quatre-vingt-septième année et la soixantième année de son sacerdoce.
Il a été inhumé dans le déambulatoire de Saint-Nicolas du Chardonnet.

   Pour la petite histoire, en terminant l’évocation de cette vie admirable, pour laquelle nous rendons à Dieu de vives actions de grâces, je puis bien vous confier que nous possédons en notre Mesnil-Marie un authentique souvenir de Monseigneur Ducaud-Bourget, une quasi relique : sa canne-siège, dont voici ci-dessous une photographie.

A lire aussi :
- La lettre ouverte des intellectuels français à Paul VI en faveur de la Messe traditionnelle (1976) > ici
- Le magnifique récit de la libération de Saint-Nicolas du Chardonnet par André Figuéras > ici

canne-siège de Monseigneur Ducaud-Bourget

Canne-siège de Monseigneur Ducaud-Bourget
que nous conservons précieusement au Mesnil-Marie

Vous pouvez laisser une réponse.

3 Commentaires Commenter.

  1. le 21 juin 2024 à 9 h 38 min Josiane B.V. écrit:

    Merci infiniment de m’avoir permis de retourner dans mon passé. Ma grande Amie Maître Yvonne D.M. me parlait très souvent de Monseigneur François DUCAUD-BOURGET au point que j’étais sûre de l’avoir connu personnellement !!!
    Mon Amie a écrit un livre sur Monseigneur DUCAUD-BOURGET et me l’avait offert.
    Merci pour cette parution.

  2. le 12 juin 2024 à 11 h 49 min Goës écrit:

    Voilà où nous en sommes à l’intérieur de l’Eglise.
    Monseigneur Ducaud-Bourget a tenu grâce à la force de sa foi.

  3. le 12 juin 2024 à 6 h 02 min Abbé Jean-Louis D. écrit:

    Merci, cher frère, d’avoir retracé brièvement la vie de ce saint prélat, dont j’entendais si souvent parler et que j’ai eu la grâce de rencontrer dans la librairie de Notre-Dame des Victoires, où je savais trouver de bons livres dans la tourmente révolutionnaire de l’Eglise moderniste.

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