2024-115. De Saint Germain de Paris, évêque et confesseur, dont on célèbre la fête le 28 mai.

28 mai,
Fête de Saint Germain de Paris, évêque et confesseur ;
Mémoire de Saint Augustin de Cantorbéry, évêque et confesseur ;
Anniversaire du massacre de Bédoin (28 mai 1794 – cf  > ici) ;
Anniversaire de la naissance de Monseigneur le Dauphin et de Monseigneur le Duc de Berry (cf. > ici).

Saint Germain de Paris

       Singulier début d’existence que celui de ce futur Saint Germain de Paris (qu’il ne faut pas confondre avec Saint Germain d’Auxerre, mort une cinquantaine d’années avant sa naissance), puisque sa mère, quoique catholique, encouragée par son époux et sa belle-mère, avait décidé d’avorter de cet enfant de trop dont la naissance entamerait les parts d’héritage de ses aînés. Rien n’y fit : elle ne parvint pas à éliminer l’enfant et dût poursuivre sa grossesse.
Ce dernier-né d’une famille de l’aristocratie gallo-romaine naquit donc en 496, à Autun, mais fut le souffre-douleur des siens. Sa mère ne lui témoigna jamais la moindre affection, le laissant dans un quasi abandon : il grandit familier des coups, brimades et mauvais traitements.

   Comble de la déconvenue pour ses parents, ses aînés moururent de maladies infantiles. Pas lui.
Cela n’adoucit pas pour autant ses proches. Resté seul héritier de la fortune familiale, avec un cousin prénommé Stratidius qu’idolâtrait leur commune grand’mère paternelle, celle-ci décida froidement de recourir à l’assassinat pour que son favori demeurât seul héritier. Après les abortifs offerts à sa bru pendant sa grossesse dans l’espoir de “faire passer l’enfant”, elle se procura du poison et en versa une dose copieuse dans un flacon de vin qu’elle fit porter à Germain. Mais pour que l’on ne soupçonnât rien, elle fit porter en même temps à Stratidius un flacon identique puisé à la même amphore, mais sans ajout de poison.
Les manigances de la grand’mère assassine n’aboutirent pas : la servante de confiance à laquelle elle avait confié la mission de porter les flacons les intervertit par mégarde ! Stratidius, empoisonné, ne mourra cependant pas, mais il en gardera de lourdes séquelles.

   L’affaire avait pris de telles proportions qu’un oncle, du nom de Scopilio, homme pieux qui avait quitté le monde pour devenir prêtre et vivre dans la prière et la solitude, en un lieu qui pourrait être Luzy (dans l’actuel département de la Nièvre) ou Laizy (dans l’actuel département de Saône-et-Loire) ou Lucey (dans l’actuel département de la Côte-d’Or), vint chercher Germain pour l’emmener avec lui.
Scopilio inculqua à l’adolescent (il devait avoir entre 15 et 18 ans lorsqu’il le prit avec lui) de véritables habitudes de piété informées par l’amour divin, étayées par les pratiques de la pénitence et d’une discipline rigoureuse, si bien qu’au bout de quelques années, Saint Agrippin, évêque d’Autun (de 533 à 538), vint se rendre compte par lui-même des vertus du jeune solitaire et lui conféra les saints ordres : il avait 34 ans lorsqu’il fut ordonné prêtre.

   Le successeur de Saint Agrippin, Saint Nectaire (évêque de 540 à 549), demanda à Germain de prendre la direction de l’abbaye de Saint-Symphorien, à Autun. Cette abbaye, fondée au milieu du Vème siècle, sous la Règle de Lérins, connaissait alors un fléchissement dans la ferveur et la discipline. Germain, devenu abbé, s’employa à la réformer… ce dont les moines ne furent pas toujours enchantés ; ils murmurèrent en particulier contre leur abbé qui donnait leur pain aux pauvres. Et d’ailleurs l’évêque successeur de Saint Nectaire sur le siège d’Autun, se retourna quelquefois contre lui, car l’austérité de Germain lui était un reproche vivant en continu !

Childebert 1er - musée du Louvre - blogue

Statue de Childebert 1er
provenant de l’abbaye de Saint-Germain des Prés
(musée du Louvre)

   Germain devint célèbre – et recherché – en raison de ses dons de thaumaturge : il guérissait malades et infirmes, délivrait les possédés, était doté du don de prophétie. Il lutta contre l’esclavage et le paganisme, et surtout se montra d’une charité sans limite (d’où les murmures de certains moines, nous l’avons vu) envers les pauvres et les voyageurs. Animé d’un zèle sans concession pour sa propre perfection et pour celle de tous les membres de sa communauté, on ne lui connaissait en définitive qu’un seul défaut – qu’il gardera jusqu’à sa mort – : très austère pour lui-même, il exigeait que les autres le fussent tout autant !

   C’est alors que le Roi Childebert 1er, premier des fils de Clovis et de Sainte Clotilde, comprit que, dans l’intérêt de son royaume, il serait bon de faire nommer Germain évêque de Paris, sa capitale. Germain déclina d’abord cet honneur, mais surnaturellement averti qu’il devait obéir, il quitta à regret son abbaye et fut sacré évêque vers 555, à l’âge de 60 ans.

   Il maintiendra au maximum ses habitudes monastiques, vivra dans la prière, et se dépensera à la prédication et aux œuvres de charité. Sa renommée de thaumaturge s’étant répandue au loin, on se servait de tout objet qu’il avait béni ou seulement touché, pour l’envoyer à ceux qui étaient éprouvés, et, par la grâce de Dieu, ils étaient délivrés de leurs maux.

   Le Roi Childebert, qu’il guérit d’une grave maladie, appréciait ses conseils, mais Germain eut fort à faire avec tous ces fils et petits-fils de Clovis qui, bien que baptisés, étaient encore parfois bien loin d’être évangélisés en profondeur, et se comportèrent en plus d’une occasion en vrais barbares : qu’on se souvienne de l’assassinat des fils de Clodomir (sauf le futur Saint Clodoald – voir > ici) et des luttes qui désolèrent la descendance de Clovis.
Germain consacra une partie de son zèle à la tâche de modérateur des fils de notre premier roi chrétien et de leurs successeurs : à force de charité et de patientes exhortations, avec le poids des miracles dont Dieu lui avait accordé le don, il opéra de véritables conversions intérieures et œuvra à de plus sincères attachements à Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Le cœur des princes mérovingiens et de leurs grands officiers devenant plus profondément chrétien, Germain saura utiliser ces dispositions pour alimenter ses inépuisables charités envers les nécessiteux.

   On peut donc dire de Saint Germain de Paris qu’il a dominé les troubles et les violences de son époque par sa force spirituelle, et que cela a fait de lui l’une des plus grandes figures de la France mérovingienne et de l’Eglise gallicane.

Consécration de l'abbatiale de Saint-Germain des Prés édifiée par Childebert - blogue

Consécration de l’église abbatiale dédiée à la Sainte-Croix et à Saint-Vincent édifiée par Childebert 1er,
future abbatiale Saint-Germain des Près
[Chronique des Rois de France, XIIIème et XIVème siècles - Musée Condé à Chantilly]

   Saint Germain fut lié d’amitié avec Sainte Radegonde (cf. > ici), qu’il soutint dans sa résolution de quitter la cour pour aller fonder l’abbaye de Sainte-Croix, à Poitiers, et avec Saint Venance Fortunat (cf. > ici) qui sera un jour son biographe. 

   Le vingtième évêque de Paris est également connu pour sa participation et ses interventions lors de plusieurs conciles ou événements importants des Eglises des Gaules en ce VIème siècle : il convoqua les troisième et quatrième conciles de Paris, en 557 et 573, dont les archives sont malheureusement perdues, et participa au deuxième concile de Tours, en 566, où l’on traita notamment de liturgie (introduction des hymnes ambrosiennes et organisation du psautier), de la protection des plus démunis (le canon 28 fulmine l’excommunication des personnes ayant assassiné des pauvres) et de la cohésion du clergé.
Parfait connaisseur de la Tradition ecclésiastique et émule de saint Martin, Saint Germain veilla avec soin sur la paix et l’unité des Eglises des Gaules. 

   Bâtisseur, Germain est en outre l’artisan spirituel de la fondation, à Paris même, d’une des plus célèbres abbayes de la France Royale : l’abbaye placée sous le vocable de la Sainte Croix et de Saint-Vincent de Saragosse, construite grâce aux libéralités de Childebert 1er (qui fit venir pour elle des reliques de Saint Vincent, diacre et martyr, à Valence, dans les Espagnes), qui par la suite sera appelée Saint-Germain-des-Prés.

   La communauté monastique fut placée sous la Règle de Lérins (elle adoptera plus tard la Règle de Saint Benoît) et il fit venir, pour y commencer la vie religieuse, certains des meilleurs éléments de l’abbaye Saint-Symphorien d’Autun, dont Saint Droctovée, son disciple et ami, qui en fut le premier abbé.
Il en consacra lui-même l’abbatiale, le 23 décembre 558 : fait inédit et unique jusqu’à ce jour, Childebert ayant rendu son âme à Dieu âgé de moins de 60 ans au jour fixé pour la dédicace, celle-ci ne fut point reportée, mais on célébra en une même cérémonie la dédicace de l’abbatiale et la sépulture royale.
Childebert fut inhumé dans le chœur des moines ; il y sera rejoint par Chilpéric 1er en 584, Frédégonde en 598, Clotaire II en 628, Childéric II en 673 et son épouse Bilichilde en 679.

Ainsi, après la basilique des Saints Apôtres érigée par Clovis (qui deviendra Sainte-Geneviève du Mont), et avant la basilique de Saint-Denis, la basilique royale Sainte-Croix et Saint-Vincent (future église Saint-Germain des Prés) fut la deuxième de nos nécropoles royales.

   Saint Germain s’éteignit le 28 mai 576, à l’âge de 80 ans. Il fut inhumé dans la chapelle Saint-Symphorien qu’il avait faite construire dans l’atrium de cette église Sainte-Croix-et-Saint-Vincent qu’il avait fondée avec Childebert.

   En 585, lors de l’incendie de Paris, il apparut pour libérer de leurs chaînes les prisonniers qui se réfugièrent auprès de son tombeau.
Le 25 juillet 756, en présence du Roi Pépin, dit le Bref, et de ses deux fils, Carloman et Charles (futur Saint Charlemagne, alors âgé de 12 ans), le corps de Saint Germain fut transféré de cette chapelle de l’atrium jusque dans le chœur, derrière l’autel majeur. C’est depuis cette translation solennelle que le vocable de Saint Germain a supplanté celui de la Sainte Croix et de Saint Vincent.

Saint Germain de Paris - peinture de Jean-Dominique Ingres - Louvre - blogue

Jean-Dominique Ingres (1780-1867) : Saint Germain de Paris (1844)
[Musée du Louvre]

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2 Commentaires Commenter.

  1. le 28 mai 2024 à 7 h 57 min Abbé Jean-Louis D. écrit:

    Merveilleuse vie de Saint Germain ! Très heureux de l’avoir découverte ! Merci !

  2. le 28 mai 2024 à 7 h 10 min Goës écrit:

    Aujourd’hui l’homme se prétend « homme-dieu », et pourtant il y a bien une volonté autre au-dessus de lui.

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