2024-54. De Sainte Colette de Corbie, vierge, réformatrice de l’Ordre séraphique, que nous fêtons le 6 mars.

6 mars,
Fête de Sainte Colette de Corbie, vierge ;
Mémoire des Saintes Perpétue et Félicité, martyres ;
Mémoire de Saint Chrodegang, évêque de Metz et confesseur ;
En Carême, mémoire de la férie.

Abbaye royale de Corbie sur un plan de 1677 - blogue

L’abbaye royale de Corbie sur un plan de 1677

       Colette Boëllet est née le 13 janvier 1381 à Corbie, en Picardie.
Son père, Robert Boëllet, était maître-charpentier au service de l’illustre abbaye royale Saint-Pierre de Corbie, fondée au VIIème siècle par Sainte Bathilde (cf. > ici). Sa mère, Marguerite Moyon, vivait intensément de la spiritualité franciscaine en se dévouant aux pauvres et en méditant quotidiennement la Passion du Christ.
Pour ces deux fervents chrétiens la naissance d’une fille fut de l’ordre du miracle : leur union était restée stérile pendant de très longues années, et Marguerite était sexagénaire lorsque son sein devint fécond.
Comme ils avaient ardemment prié Saint Nicolas de leur donner une descendance, ils donnèrent à cette petite fille inespérée le prénom de Nicolette, en reconnaissance au saint thaumaturge. Et Nicolette deviendra par la suite Colette.

   Les témoins de son enfance ont rapporté que très tôt Colette fut attirée par la solitude, afin de prier, qu’elle redistribuait ses repas aux pauvres, qu’elle aimait assister aux longs offices des bénédictins, bien souvent même de nuit à l’insu de ses parents.
Quand elle atteignit l’âge de 18 ans, sa mère étant déjà décédée, son père, avant de mourir, la confia au Révérend Père Jean Bassand, de l’Ordre des Célestins, prieur du monastère Saint-Benoît d’Amiens, qui devint alors son tuteur.
Elle refusa plusieurs demandes en mariage, et, à 19 ans, elle prononça le vœu de virginité.

   Eprise d’absolue et soucieuse d’une certaine radicalité, Colette cherche sa voie : elle fait trois expériences de vie religieuse. D’abord chez les Béguines de Corbie, pendant une année ; ensuite comme converse chez les Bénédictines ; et enfin comme servante chez les Clarisses urbanistes près de Senlis. Mais aucune de ces tentatives ne la satisfait. Il faut dire qu’en ces dernières années du XIVème siècle et premières du XVème, le relâchement s’est introduit en plusieurs communautés ; or Colette a soif d’une pauvreté radicale.
Elle revient à Corbie et rencontre alors le Père Jean Pinet, supérieur du couvent franciscain de Hesdin, qui, va finalement lui proposer de vivre en recluse sous la règle du tiers-ordre franciscain.

Sainte Colette recluse - blogue

   Le 17 septembre 1402, à l’âge de 21 ans, Colette entre en réclusion perpétuelle dans une cellule adossée à l’église Notre-Dame de Corbie (église qui sera plus tard appelée Saint-Etienne). La cérémonie est présidée par le Révérendissime Raoul de Roye, abbé de Corbie, entre les mains duquel elle prononce les vœux de pauvreté, chasteté et clôture perpétuelle. La prédication est assurée par le Révérend Père Jean Pinet. Colette est ensuite conduite à son reclusoir et y est emmurée.

   Pendant quatre ans, Colette mène là une vie pénitente : « se vêtant d’une haire (note : chemise de crin ou de poil de chèvre, très rude sur la peau). Elle dormait sur la terre nue, avec sous la tête pour oreiller un dur bloc de bois ».
La recluse est très respectée, soutenue par les fidèles qui lui apportent sa maigre pitance. Surtout, elle acquiert assez rapidement une réputation d’âme privilégiée à laquelle Dieu Se communique. On vient solliciter ses prières, et on lui demande conseil : sans aucune prétention, Colette devient pourtant une « directrice spirituelle » expérimentée.

   C’est alors qu’un événement va la contraindre à changer de vie. Dans une vision, Colette reçoit la mission de réformer les trois branches de l’Ordre franciscain. Elle lutte d’abord contre cette inspiration, la prenant pour une illusion diabolique afin de lui faire abandonner sa réclusion. Elle s’en ouvre à plusieurs religieux de bon jugement, et tous concluent à l’authenticité de cet appel et l’engagent à y répondre.
Il lui faut d’abord obtenir la dispense de son vœu de réclusion, qui lui est accordée par l’évêque d’Amiens le 1er août 1406. Le lendemain, 2 août, fête de Notre-Dame des Anges, si importante pour l’Ordre séraphique (cf. > ici), avec le soutien non seulement de son confesseur, Henri de Baume, mais aussi de quelques membres influents de la noblesse, parmi lesquels la Baronne de Brissay, Colette se met en route pour Nice. 

Sainte Colette aux pieds de Benoît XIII - blogue

Sainte Colette aux pieds de Sa Sainteté le Pape Benoît XIII
(miniature de la vie de Sainte Colette dit manuscrit de Gand – milieu du XVe siècle)

   Pourquoi Nice ? Parce que c’est près de là, à Cimiez très exactement, que se trouve en ces temps de grands troubles la cour pontificale autour de Sa Sainteté le Pape Benoît XIII, que Colette rencontre le 14 octobre 1406.
Ce saint pontife a été prévenu par plusieurs rapports élogieux sur la jeune femme. Après l’avoir entendue, après avoir lui-même, dans sa prière, été gratifié de lumières à son sujet, après avoir aussi reçu l’avis favorable de ses cardinaux, le Pape Benoît XIII remet l’habit de clarisse et le voile noir de professe à celle qui va, dans l’instant, devenir Mère Colette, puisque le Souverain Pontife confirme sa mission et la nomme Mère et Abbesse de toutes les religieuses qui devaient venir à la réforme de l’Ordre séraphique. Il scelle aussi les bulles qui l’autorisent à fonder un monastère selon la Règle primitive de Sainte Claire.

   Mère Colette revient à Corbie désirant fonder son premier monastère dans sa ville natale. Mais elle y est très mal accueillie : les Corbéens n’ont pas compris son départ et lui sont devenus hostiles.
Pendant un temps, l’Abbesse réformatrice, autour de laquelle des jeunes filles commencent à se regrouper, est hébergée par la comtesse Blanche de Genève, jusqu’à ce que, e
n janvier 1409, le Pape Benoît XIII confie à Colette le monastère des Clarisses urbanistes de Besançon : il ne s’y trouve plus que deux religieuses, dont l’une va embrasser la réforme (l’autre va préférer entrer chez les Bénédictines).
A partir du moment où Colette y restaure la stricte pauvreté de la Règle de Sainte Claire, les vocations affluent.

   De 1410 à 1447, Colette va fonder seize monastères et en refonder deux. Des couvents franciscains s’agrègent à la réforme colettine. Des familles nobles se lient d’amitié avec elle et l’aident dans ses nombreuses fondations.
En 1430, elle écrit ses propres Constitutions, approuvées quatre ans plus tard par le Ministre général de l’Ordre, Guillaume de Casal : elle y reprend la Règle de Sainte Claire avec la pratique d’une pauvreté stricte, et aux vœux de pauvreté, chasteté et obéissance, elle ajoute le vœu de clôture. Autre particularité, elle ne désire pas de sœurs converses.
Pour les offices liturgiques, elle établit un mode de psalmodie lente et suppliante qui deviendra une caractéristique des moniales colettines.
Elle insère également dans ses Constitutions la pratique de la Sainte Communion hebdomadaire, contrairement aux sept réceptions annuelles inscrites dans la Règle de Sainte Claire. Elle-même a été autorisée par ses directeurs à communier fréquemment, parfois quotidiennement, usage tout-à-fait inhabituel pour l’époque.

Extase de Sainte Colette alors qu'elle est en déplacement - blogue

Extase de Sainte Colette alors qu’elle est montée sur une mule, en déplacement pour une fondation
[vitrail XIXème siècle du Monastère des Clarisses du Puy-en-Velay, fondé par Sainte Colette en 1425)

   Dans chacun des monastères qu’elle fonde, Mère Colette se fait construire une cellule avec un oratoire donnant directement sur la chapelle par une petite ouverture munie de grilles. Ainsi peut-elle, comme au temps de sa réclusion à Corbie, suivre la Sainte Messe en privé, afin de préserver une certaine discrétion autour de sa vie mystique et des phénomènes extraordinaires qui l’accompagnent.
Bien qu’elle doive voyager beaucoup pour établir ses fondations, les visiter, mais aussi rencontrer des prélats et des grands de ce monde, la sainte réformatrice unit parfaitement Marthe et Marie en sa personne.
Gratifiée du don des miracles en plusieurs occasions, Mère Colette est aussi la sujette d’extases, de lévitations ; son corps répand des effluves odoriférants, et ce qu’elle touche se retrouve imprégné d’odeurs célestes ; il lui fut donné de voir l’enfer, de connaître l’état des âmes après la mort (si elles étaient damnées, ou admises au Ciel, ou encore languissantes dans le Purgatoire). En maintes occasions elle fut dotée de dons de clairvoyance et de prophétie.

   Le 6 décembre 1446, Mère Colette arrive au monastère de Bethléem, à Gand, dans la Flandre orientale. Trois mois plus tard, le 6 mars 1447, à l’âge de 66 ans, elle y meurt entourée de ses sœurs et de ses frères colettins.
A sa demande, elle est enterrée dans le cimetière du monastère, à même la terre, sans cercueil ni linceul. Mais des miracles se produisent sur sa tombe, et dès 1471 l’évêque de Tournai diligente une enquête : on se rend alors compte que d’autres miracles ont lieu en d’autres endroits. Sa béatification est célébrée en 1625 par le Pape Urbain VIII, mais sa canonisation fut retardée, en particulier par la crise joséphiste (note : du nom de l’empereur Joseph II, adepte des idées jansénistes, lequel imposa un joug pesant à l’Eglise dans ses Etats, diminuant en particulier le nombre des couvents et des monastères), qui a pour conséquence, en 1783, la translation du corps de Sainte Colette au monastère de Poligny, en Franche-Comté, où il se trouve toujours, puisque – une fois n’est pas coutume ! – il fut préservé de la profanation et de la destruction durant la grande révolution.
Enfin, le 24 mai 1807, la Bienheureuse Colette fut canonisée par le Pape Pie VII.

   En 1952, en France, sur 54 monastères de Clarisses, 34 étaient issus de la Règle de Sainte Colette ; et en Belgique, sur les 39 monastères, 38 étaient des Clarisses colettines… Mais, à la suite du concile vaticandeux les Clarisses colettines ont abandonné les Constitutions de Sainte Colette pour – comme tous les autres monastères de « pauvres Dames » – adopter une Règle de Claire soumise à « l’aggiornamento », ou prétendu tel, qui dans les décennies suivantes a entraîné la fermeture d’un grand nombre de monastères.

Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

Sommet de la châsse de Sainte Colette à Poligny représentant Sainte Colette confirmée dans sa mission par le Pape Benoît XIII

Monastère Sainte-Claire de Poligny
Sculpture d’orfèvrerie au sommet de la châsse de Sainte Colette
représentant la réformatrice confirmée dans sa vocation par Sa Sainteté le Pape Benoît XIII
et nommée Mère et Abbesse de la réforme de l’Ordre séraphique

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2 Commentaires Commenter.

  1. le 8 mars 2024 à 18 h 19 min Thizy écrit:

    Très longue histoire que je connaissais pas.
    Merci !

  2. le 5 mars 2024 à 7 h 11 min Abbé Jean-Louis D. écrit:

    Sainte Colette! Il m’a fallu attendre ce jour pour connaître sa vie!
    Quelle richesse que ce blogue!

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