2023-171. 13 décembre 1553 : « Ma Brebis a enfanté un lion ! »
13 décembre,
Fête de Sainte Lucie de Syracuse, vierge et martyre ;
Mémoire de Sainte Odile de Hohenbourg, vierge et abbesse (cf. > ici) ;
Mémoire du 6ème jour dans l’octave de l’Immaculée Conception (cf. > ici) ;
Mémoire de la férie de l’Avent ;
Anniversaire de la naissance de SMTC le Roi Henri IV.
Eugène Devéria (1805-1865) : la naissance d’Henri IV au château de Pau le 13 décembre 1553
[musée du Louvre]
Ce grand tableau (484 x 392 cm) achevé et présenté pour la première fois au Salon de Paris en 1827
y fit « l’effet d’un coup de tonnerre » et Sa Majesté le Roi Charles X l’acheta pour le Palais du Luxembourg ;
Eugène Devéria en réalisa lui-même une copie pour le château de Pau dans les mois qui suivirent.
Fils d’Antoine de Bourbon (1518-1562), premier Prince du Sang, descendant de Saint Louis à la neuvième génération en lignée masculine, et de Jeanne d’Albret (1528-1572), fille unique du Roi de Navarre Henri II (1503-1555) et nièce du Roi de France François 1er, Henri de Bourbon, qui deviendra notre premier Roi Bourbon sur le trône de France sous le nom d’Henri IV, est né au château de Pau dans la nuit du 12 au 13 décembre 1553.
Il est le deuxième enfant né de l’union d’Antoine de Bourbon et de Jeanne d’Albret : son frère aîné, prénommé lui aussi Henri et titré duc de Beaumont, meurt accidentellement, asphyxié par ses langes, âgé de moins de 2 ans. Jeanne d’Albret vient alors juste de ressentir les premiers tressaillements de sa deuxième grossesse.
Henri d’Albret, Roi de Navarre, qui ne règne en réalité que sur la Basse Navarre, puisque la Haute Navarre – outre Pyrénées – lui a été usurpée en 1512 par Ferdinand d’Aragon, espérait ardemment que sa fille unique lui donnât un héritier : il y allait de la survie de sa maison, de la survie de son royaume.
A la naissance de Jeanne, en 1528, les Espagnols, par allusion aux armes de Béarn qui portent deux vaches de gueules en champ d’or, avaient en effet raillé, disant que « la vache avait enfanté une brebis », signifiant par là qu’ils pensaient n’avoir plus rien à craindre de la Maison d’Albret…
Voilà pourquoi, lorsqu’il apprît que sa fille se trouvait à nouveau grosse, Henri II de Navarre lui ordonna de lui confier l’éducation du nouveau-né qu’elle devait à l’avenir et à la gloire de sa Maison.
Il voulait, disait-il, apprendre à son petit-fils la vengeance qu’il fallait tirer des Espagnols, usurpateurs du royaume de Navarre, et il s’engagea, vis-à-vis de sa fille, à lui montrer le contenu de son testament aussitôt qu’elle lui montrerait ce que contenait son ventre.
Il exigea aussi d’elle une humeur égale et joyeuse durant cette grossesse, lui enjoignit fermement d’accoucher en Béarn… et il lui fit promettre de chanter une chanson pendant les douleurs de l’enfantement, afin qu’elle n’eût pas un enfant « pleureur et rechigné ».
Jeanne d’Albret ne se pressa toutefois pas de revenir se confiner dans la petite cour de Navarre, qui ne lui offrait, à son goût, aucune distraction agréable, au contraire du tourbillon de fêtes, bals et tournois que lui offrait la cour de France. Il est vrai qu’Henri II de Navarre était un homme plutôt austère et simple dans ses goûts, préférant la philosophie aux mondanités.
C’est seulement au temps où il lui sembla que le terme de sa grossesse était proche que Jeanne retourna en Béarn.
Elle arriva à Pau neuf jours seulement avant la naissance !
A l’heure des couches, toutes les portes de son appartement étant grandes ouvertes, chacun put entendre une voix ferme, qui chantait ce noël en langue basque : « Notre-Dame du Bout-du-Pont, aidez-moi à cette heure ! »
Henri d’Albret était là, bien sûr, impatient de connaître le succès de ses vœux ; il reçut dans ses bras l’enfant, dont il constata la virilité, et exulta.
Alors, jetant sur le lit de l’accouchée une boîte d’or qui renfermait son testament, il déclara en enveloppant le poupon dans un pan de sa houppelande : « Ma fille, voilà ce qui est à vous, et ceci est à moi ! ».
Il brandit le nouveau-né devant tous ses sujets présents et cria, de manière quasi prophétique, autant à leur adresse qu’à celle des Espagnols : « Voyez, ma brebis vient d’enfanter un lion ! »
A ces mots, il emporta l’enfant qui le regardait fixement, sans pousser un seul cri, et avant de le remettre aux soins des nourrices, qu’il avait choisies parmi les paysannes, il lui frotta les lèvres avec une gousse d’ail et lui fit sucer du Jurançon, dans sa coupe d’or : « Tu seras un vrai Béarnais ! ».
Ce « baptême béarnais » était, semble-t-il, une pratique courante avec les nouveaux-nés, dans un but de prévention des maladies, et comme une sorte d’avant-goût du régime fortifiant auquel serait soumis l’héritier de la Couronne de Navarre : il fut titré prince de Viane, et reçut en guise de berceau une carapace de tortue, gage de longévité, puisque certaines d’entre elles deviennent centenaires.
La carapace berceau d’Henri IV au château de Pau
Ondoyé à la naissance, comme cela se faisait de manière quasi systématique à cette époque, le jeune Prince de Viane fut baptisé dans la religion catholique (Jeanne d’Albret n’introduira le calvinisme en Béarn qu’en 1557 et n’apostasiera officiellement le catholicisme qu’en 1560), le 6 mars 1554, dans la chapelle du château de Pau, au cours d’une fastueuse cérémonie.
Ses parrains étaient les Rois Henri II de Navarre (son grand-père) et Henri II de France, dont il reçut le prénom commun à l’un et à l’autre, et ses marraines la Reine Catherine de Médicis ainsi que sa grand-tante Isabeau d’Albret, veuve de René 1er, 18ème vicomte de Rohan.
L’officiant était Georges d’Armagnac (1501-1585), dit le Cardinal d’Armagnac ; le Roi Henri II de France était représenté par le Cardinal de Vendôme, Charles 1er de Bourbon (1523-1590), frère cadet d’Antoine de Bourbon, son oncle donc.
C’est cet oncle du nouveau baptisé qui, à la mort d’Henri III de France (+ 2 août 1589), sera proclamé Roi sous le nom de Charles X par les Ligueurs, refusant de reconnaître l’accession d’Henri III de Navarre au trône de France du fait que ce premier successible n’était alors plus catholique…
Mais ces événements n’arriveront que 35 ans plus tard !
On prétend toutefois qu’Henri II de Navarre aurait dit à sa fille : « Mignonne des Rois (ainsi surnommait-on Jeanne d’Albret en raison de la tendresse pour elle des Rois de France François 1er et Henri II), notre petit Béarnais est séparé de la couronne de France par neuf Princes du Sang, tous jeunes et bien portants ; mais j’augure que les plus grands obstacles du monde terrestre ne retarderont pas les décrets du ciel. Henri sera un vaillant homme de guerre, un clément pacificateur, un roi tout-puissant… »
Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur
Lire aussi à l’occasion de ce 13 décembre :
- La Messe « pro felici ac prospero statu Galliae » célébrée au Latran à l’occasion de l’anniversaire de la naissance d’Henri IV > ici ;
- La statue d’Henri IV au Latran érigée en action de grâces par le Chapitre de l’archibasilique > ici ;
Et d’une manière générale pour ce qui concerne Henri IV :
- 25 juillet : anniversaire de son abjuration et sincérité de sa conversion > ici ;
- 27 février 1594 : son Sacre à Chartres > ici ;
- 25 août 1818 : le rétablissement de sa statue au Pont-Neuf à Paris > ici.
Vous pouvez laisser une réponse.
Henri IV, Roi d’Amour, fut en effet un vaillant homme de guerre, un clément pacificateur, un Roi tout-puissant.
La saint Henri se fête le 15 juillet.