2023-150. Sur la perfection des actions ordinaires.

17 novembre,
Fête de Saint Grégoire de Tours, premier historien de la France chrétienne, évêque et confesseur ;
Mémoire de Saint Aignan, évêque d’Orléans et confesseur ;
Mémoire de Saint Grégoire le Thaumaturge, évêque de Néocésarée et confesseur ;
Anniversaire de l’exécution, à Lyon, de Dominique Allier, chef chouan (+ 17 nov. 1798 – cf. > ici) ;
Pieuse mémoire du Rd. Père Michel André, prêtre résistant au modernisme (+ 17 nov. 2000 – cf. > ici) ;
Pieuse mémoire de Dom Marie-Grégoire Girard osb, ermite (+ 17 nov. 2013 – cf. > ici).

       A l’occasion de l’anniversaire du rappel à Dieu du Révérend Père Michel André (dont nous avions donné une esquisse biographique > ici), nous sommes heureux de vous proposer ci-dessous un texte qui est la retranscription d’extraits substantiels de l’un de ses entretiens spirituels et rappelle des vérités d’une grande utilité pour la vie chrétienne : nous ne sommes pas ici dans une pseudo mystique à la guimauve, ni dans les « phénomènes extraordinaires », mais dans la réalité très prosaïque de la vie ordinaire. C’est du concret, du solide ; mais c’est une voie sûre et infaillible.

Le Rd. Père Michel André

* * * * * * *

Sur la perfection des actions ordinaires :

       « Dans sa première lettre aux Thessaloniciens (IV, 3), Saint Paul rappelle ce précepte du Seigneur, que nous devons tous tendre à la sainteté, à une vraie sainteté ; précepte inculqué déjà dans l’Ancien Testament et exprimé plusieurs fois par Notre-Seigneur Lui-même [...].
Comment peut-on vraiment devenir des saints ? En imitant Notre-Seigneur, non pas dans Ses miracles, mais dans Sa vie ordinaire.
La foule l’avait remarqué : « Il fait bien toutes choses », disait-elle en parlant de Jésus. Nous devons donc tendre comme Lui à faire bien toutes nos actions, même les plus ordinaires, de chaque jour [...].

- Quel motif avons-nous de bien faire nos actions ordinaires ?

- D’abord, nos actions sont l’exercice des facultés que Dieu a données à notre corps et à notre âme. Et ces facultés, en soi, sont bonnes et nobles.
- Ensuite, Dieu nous aide sans cesse à les bien accomplir, c’est-à-dire d’une manière chrétienne.
- Et ainsi, si nous sommes fidèles à ces grâces, ces actions ordinaires, communes, sont des actes de vertu, des trésors qui nous enrichissent de mérites pour le Ciel.

   Considérées dans leur ensemble, ces actions ordinaires – telles que faire la cuisine, faire des achats en ville, faire le ménage, coudre, manger, dormir, se promener, que sais-je ? -, toutes ces actions constituent la portion la plus considérable de notre vie.
Les actions extraordinaires sont rares, très rares. Une vie entière peut se passer sans avoir l’occasion d’en rencontrer (par exemple, sauver un homme qui se noie, ranimer un blessé par la respiration artificielle, empêcher un camarade de se droguer ou de se suicider…) [...].
C’est dans et par nos actions ordinaires de la vie de tous les jours que nous devons nous sanctifier et ainsi mériter le Ciel !
Négliger de bien faire ces actions ordinaires, c’est abuser de la grâce, c’est déplaire à Dieu qui a proféré, dans l’Apocalypse (III, 16), cette terrible parole que rapporte Saint Jean : « Parce que tu es tiède, ni chaud ni froid, Je vais te vomir de Ma bouche », autrement dit, te rejeter loin de Ma face [...].

   Soyons donc fervents, en essayant de bien faire notre devoir de chaque jour, quelle qu’en soit l’insignifiance apparente. Rien n’est petit aux yeux de Dieu de ce qui est fait par amour pour Lui [...].

   Si les Saints ont pu faire des actes héroïques, qui nous stupéfient, c’est qu’ils s’étaient exercés à bien faire les actions les plus ordinaires de leur vie, en union avec Notre-Seigneur.
Pour nous y aider, voyons l’exemple de Notre-Seigneur Lui-même. Qu’a-t-il fait durant les trente premières années ?
Il n’a fait que des actions ordinaires, celles que faisaient les enfants ou les jeunes gens de son âge. Mais Il les a faites très bien, sans ostentation toutefois, si bien que personne à Nazareth ne s’en est aperçu, sauf bien sûr Marie et Joseph.
Et pourtant, Il a glorifié ainsi Son Père, autant que par les merveilles de Sa vie publique.

   Et la Très Sainte Vierge et Saint Joseph, dont nous ne connaissons aucune parole, et tous les autres Saints, comment se sont-ils sanctifiés ? Comment ont-ils atteint un si haut degré de gloire au Ciel ? Parce qu’ils ont fait d’une manière parfaite toutes leurs actions les plus ordinaires. 

* * * * * * *

   Demandons-nous maintenant en quoi consiste cette perfection des actions ordinaires. Qu’est-ce qui en constitue le mérite ?

- Deux choses essentielles :

       1) Faire tout ce que Dieu veut !
Ce fut toute la vie de Jésus sur terre. Il l’a affirmé plusieurs fois, comme par exemple : « Ce qui plaît à Mon Père, Je le fais toujours » (Jean VII, 29) ou : « Oui, Père, parce que tel a été Votre bon plaisir » (Matth. XI, 26).

   Il est clair que faire ce que Dieu veut exclut tout acte coupable volontaire dont on a conscience qu’il soit mauvais.
Ensuite, quand on a des supérieurs, comme les enfants, les religieux, les employés, …etc. faire ce que Dieu veut exige d’obéir aux ordres légitimes des supérieurs.
Pour tous, c’est le devoir d’état qui indique cette volonté de Dieu [...].

   Mais alors, me direz-vous, dans les choses indifférentes et libres, qu’est-ce que Dieu veut ?
il faut choisir ce qui semble le mieux ; ce qui peut procurer plus de gloire à Dieu ; ce qui peut aider le prochain… etc.
Il faut se demander ce que ferait Notre-Seigneur, ou les Saints, à notre place.

       2) Mais il faut aussi bien faire ce que Dieu veut. C’est-à-dire qu’il faut essayer de remplir trois conditions :
- D’abord, être en état de grâce bien évidemment. Sinon, nos meilleures actions seraient sans valeur pour le Ciel.
- Avec pureté d’intention, c’est-à-dire agir pour plaire à Dieu, pour Sa gloire, non par vanité [...]. Si on agit par vanité, recherche de soi, ou par sensualité, notre travail est perdu pour le Ciel. Tâchons d’agir toujours par charité, c’est-à-dire par amour pour Dieu et le prochain. C’est l’amour qui donne du prix à nos actions [...].
- Encore un conseil, que nous rappelait un cantique de notre enfance : « Agir toujours sous l’œil de Dieu ! » Se rappeler que Dieu nous voit, Il voit nos actes et nos pensées ! [...]

   Si nos actions ordinaires sont ainsi bien faites, avec pureté d’intention et amour de Dieu, elles seront faites en union avec Notre-Seigneur [...].

* * * * * * *

   La conclusion de cette méditation est donc qu’il faut nous sanctifier chaque jour, selon la Volonté de Dieu, en faisant bien toutes nos actions ordinaires. Notre sort éternel en dépend !
Pour nous aider dans ce travail de sanctification il est indispensable de prier, et de prier beaucoup. Rappelons-nous que la plus grande des prières, la plus sainte et la plus efficace, c’est la Messe. Tâchons d’y assister avec ferveur, non seulement le dimanche, mais même en semaine ; et alors nous pourrons dire avec Saint Paul : « Je vis ; mais ce n’est plus moi qui vit. C’est le Christ qui vit en moi » (Gal. II, 20).

Rd. Père Michel André,
extraits de « Sur la perfection des actions ordinaires »,
dans le bulletin « Introibo » n° 194 (oct.-nov.-déc. 2021), pp. 8-9

Tethart Philipp Christian Haag (1737-1812) : la sainte famille dans l’atelier de Saint Joseph