2023-123. Où la vie de Pierre Le Gouvello de Kériolet manifeste de façon éclatante de quelle manière, par l’intercession de Notre-Dame, la grâce peut surabonder là où le péché avait abondé.
8 octobre,
Fête de Sainte Brigitte de Suède, veuve, fondatrice, co-patronne de l’Europe (cf. > ici) ;
Mémoire de Sainte Pélagie, pénitente ;
Anniversaire de la mort de l’abbé Pierre Le Gouvello de Kériolet.

Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,
L’histoire que je veux vous conter aujourd’hui m’a enthousiasmé lorsque Frère Maximilien-Marie m’en a fait le récit, et j’espère qu’elle vous plaira à vous aussi : il faut dire que le personnage qui en est le héros fait partie, depuis le temps de son noviciat, des « chouchous » de mon papa-moine. Sans doute est-ce la raison pour laquelle il en parle avec flamme.
Il s’agit de l’histoire de l’abbé Pierre Le Gouvello de Kériolet, mort en odeur de sainteté le 8 octobre 1660.
Mais avant d’arriver au degré de très haute vertu qui font qu’on espère un jour son élévation sur les autels, Pierre de Kériolet aura une vie pleine de rebondissements, dont toutes les phases ne sont pas exactement à admirer ou à imiter !
La seigneurie de Kerlois a été achetée en 1607 par Olivier Le Gouvello, père de Pierre, qui y passa son enfance,
et qui, après sa conversion, y accueillit pauvres et misérables
Issu d’une vieille famille de la noblesse bretonne, Pierre Le Gouvello de Kériolet est né à Auray le 14 juillet 1602. Bien qu’ayant reçu une éducation soignée, en particulier au collège des jésuites de Rennes, le jeune homme, au grand désespoir de ses parents, auxquels il vola une somme considérable avant de s’enfuir du manoir paternel pour mener une vie de désordres et d’aventure, devint bientôt célèbre pour sa vie scandaleuse : vols, débauches, duels, impiété, blasphèmes…
A l’âge de 26 ans, après la mort de son père, il acheta une charge de conseiller au Parlement de Bretagne. On observe néanmoins que, malgré sa vie dissolue, il s’acquittait de sa charge avec justice et impartialité.
Avec une patience infinie, Dieu cherchait à reconquérir ce cœur livré aux vices. Ainsi, un jour d’orage, alors qu’il chevauchait pour rentrer en son manoir de Kerlois, à Pluvigner, près du tout jeune sanctuaire de Saint-Anne d’Auray (Note : les apparitions à Yvon Nicolazic eurent lieu de 1623 à 1625, et la première chapelle fut bénite en juillet 1628, c’est-à-dire l’année où Kériolet acheta sa charge au Parlement de Bretagne), la foudre abattit un arbre juste derrière lui : il vomit alors mille blasphèmes puis, étant monté dans sa chambre, fit apporter ses armes et, ouvrant les fenêtres, il tira contre le ciel en se moquant de Dieu. Fier de cet attentat comme d’une victoire, il se mit au lit. Un nouveau coup de foudre mit le feu à l’une des colonnes de son lit. Il demeura insensible à cet avertissement mais, à quelque temps de là, dans un songe, Dieu lui imposa la vision de l’enfer cinq heures durant…
Effrayé, Pierre de Kériolet fit pénitence pendant quelques mois et demanda à entrer à la Chartreuse d’Auray.
Cette première conversion était très imparfaite, fondée uniquement sur la peur des châtiments divins, et le jeune homme fut bientôt rattrapé par ses vices et sortit du monastère plus enragé qu’auparavant contre la foi et contre l’Eglise. Sa vie de désordres, de débauches et de scandales reprit de plus belle (on devrait d’ailleurs plutôt dire : de plus laide !).

Nous voici en 1636, et on parle beaucoup des cas de possession diabolique dont sont affligées les Ursulines de Loudun, en Poitou.
L’affaire des Possédées de Loudun dure depuis des années : aux phénomènes préternaturels se mêlent d’ailleurs d’autres éléments qui font de cet épisode quelque chose de complexe. Depuis 1634, c’est le Rd. Père Jean-Joseph Surin, jésuite, qui pratique les exorcismes solennels, et ceux-ci sont publics. On va parfois, d’ailleurs, assister aux exorcismes comme on irait au spectacle. Par curiosité, Monsieur de Kériolet se rendit à Loudun et entra dans l’église où se pratiquaient les exorcismes.
A son arrivée, par la bouche de l’une des possédées, le démon se mit à parler de lui, et répondit même avec exactitude aux questions que lui-même posa sur des faits de sa vie que la possédée ne pouvait connaître de science naturelle. Ainsi, à propos de la foudre qui l’avait finalement épargné, le démon rugit : « Sans la Vierge Marie et le chérubin, ton ange gardien, je t’aurais emporté ! »
Bouleversé, Pierre de Kériolet laisse enfin la grâce le pénétrer en profondeur et prépare une bonne, sincère et complète confession… Réconcilié avec Dieu, il revient le lendemain dans l’église où se font les exorcismes, et cette fois, le démon s’écrie : « Tiens ! Voilà ton monsieur d’hier ! Il est dans un tel état que, s’il continue, il sera aussi haut dans le ciel qu’il a été bas en enfer avec nous ! Elle a mis les bras dans la fange jusqu’aux coudes pour le retirer de ses ordures, parce qu’il a eu un peu de dévotion pour Elle ! »
Monsieur de Kériolet était alors âgé de 34 ans : l’année suivante (28 mars 1637) il était ordonné prêtre par Sa Grandeur Monseigneur Sébastien de Rosmadec, évêque de Vannes, et sa vie sera désormais toute consacrée à la prière et à la pénitence : il pratiquait des mortifications volontaires sévères, accomplit des pèlerinages à pied dans des conditions héroïques, et lorsqu’il résidait en son manoir de Kerlois, il se rendait très souvent, toujours à pied, à la chapelle de Sainte-Anne d’Auray.
Vitrail de l’église de Pluvigner représentant Pierre de Kériolet au service des pauvres
Il avait, évidemment, vendu sa charge de conseiller au Parlement de Bretagne, s’adonna aussi à toutes les œuvres de miséricorde, accueillant, nourrissant et soignant en son manoir des dizaines de nécessiteux. Il fonda aussi un hospice à Sainte-Anne d’Auray et œuvra (mais il ne le verra pas de son vivant) pour que les Augustines viennent y continuer sa sollicitude pour les misérables.
Comme cela arrivera plus tard avec le Saint Curé d’Ars, le démon le harcèlera, ne le laissera pas en répit, et, parfois même, cherchera à attenter à sa vie, ce qui ne contribuera qu’à renforcer sa détermination et à ne rien relâcher de ses austérités.
Il rendit son âme à Dieu le 8 octobre 1660. On rapporte que plusieurs malades ont retrouvé la santé sur sa tombe. Lors de la construction de l’actuelle basilique de Sainte Anne d’Auray, sa dépouille terrestre y fut transportée – dans la première chapelle latérale du bas-côté gauche, en face de celle d’Yvon Nicolazic -, et sa statue fut placée au-dessus du porche gauche de la façade, accueillant, bras ouverts, les pèlerins dans le sanctuaire de la mère de la plus pure des Vierges, que l’on invoque comme « Refuge des pécheurs » et « Espérance des désespérés ».
Chapelle de la basilique de Sainte-Anne d’Auray dans laquelle est inhumé Pierre Le Gouvello de Kériolet
Je dois vous donner maintenant la clef de cette histoire authentique.
Qu’a donc voulu dire le démon lorsqu’il a lâché ces mots : « Il a eu un peu de dévotion pour Elle » ?
Tout simplement que, depuis son enfance, par un acte d’attachement qu’il avait appris de sa mère, Kériolet, même au plus fort de sa vie de désordre, ne passa jamais un jour sans réciter un « Ave Maria ».
Tolbiac.
Vitrail de l’église de Pluvigner représentant la sincère dévotion mariale de Pierre de Kériolet
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Rien n’est impossible à Dieu.
Je ne cesse de louer ce Blogue pour tant de richesses qui remplissent notre esprit de connaissances que nous n’aurions pas eues autrement.
Merci pour cette vie de l’Abbé Pierre Le Gouvello de Kériolet.
Merci, Tolbiac, pour ce récit de la conversion extraordinaire de Pierre de Kériolet, et de « sa vie qui sera désormais toute consacrée à la prière et à la pénitence ».