2022-109. Hommage à la Révérende Mère Geneviève Gallois qui, par une « Simple Question », m’a ouvert des perspectives spirituelles infinies…
19 octobre,
Fête de Saint Théofrède de Carméri (cf. > ici) ;
Mémoire de la Bienheureuse Agnès de Jésus (cf. > ici et > ici) ;
Mémoire de Saint Pierre d’Alcantara ;
Anniversaire du rappel à Dieu de S.M. la Reine Marie-Thérèse de France (cf. > ici) ;
Anniversaire du rappel à Dieu de la Révérende Mère Geneviève Gallois, osb.
Bédoin (Comtat Venaissin) : chapelle de la Madeleine
Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,
A l’heure où je vous écris – l’heure où « le soir étend sur la terre son grand manteau de velours » -, en ce 18 octobre 2022, cela fait exactement quarante-cinq ans un mois et onze jours, que, en conclusion de la fête de la Nativité de Notre-Dame, le jeudi 8 septembre 1977, je descendais de voiture sur l’aire de stationnement aménagée au chevet d’une toute petite chapelle romane du XIème siècle édifiée sur l’un des contreforts méridionaux du Mont Ventoux, au débouché de la « Combe obscure », en contrebas de la route départementale qui vient de Malaucène et se dirige vers le village de Bédoin (nota bene : nous avons déjà évoqué ce village dans les pages de ce blogue, à propos du massacre des catholiques auquel les révolutionnaires se livrèrent le 28 mai 1794 – cf. > ici).
Cette chapelle, dite de la Madeleine (ou de la Madelène selon la graphie héritée du provençal), était alors le siège du « Prieuré Sainte Madeleine » fondé par Dom Gérard Calvet (1927-2008), et j’y venais assister à la prise d’habit d’un ami, condisciple de lycée pendant l’année scolaire précédente, qui, sitôt l’obtention du baccalauréat, avait rejoint la jeune et dynamique communauté bénédictine traditionnelle, dont les moines, en raison de l’exigüité des lieux, vivaient dans des caravanes devenues légendaires !
L’ami à la prise d’habit duquel je venais assister était plus âgé que moi. En cette fin d’été 1977 je venais juste d’avoir 15 ans, j’entrais en classe de première, et, depuis une année (il y avait eu « l’été chaud » 1976 où avait éclaté « l’affaire Lefebvre », puis, en février 1977, la libération de Saint-Nicolas du Chardonnet… etc) la découverte de l’existence et de la vitalité du mouvement traditionnel avait provoqué en moi un sursaut salutaire : feu le Maître-Chat Lully a déjà eu l’occasion d’en parler dans les pages de ce blogue (cf. > ici), et il avait justement cité cette soirée au Prieuré Sainte Madeleine et l’électrochoc spirituel que j’y ai reçu…
carte postale datant de l’époque où la communauté fondée par Dom Gérard Calvet occupait l’ancien Prieuré de la Madeleine à Bédoin,
avant la construction de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux
Mais il y a un détail que je n’avais pas mentionné dans l’interrogatoire que Monseigneur le Maître-Chat Lully m’avait alors fait subir et dont je veux parler ce soir : ce soir spécialement parce que ce 19 octobre 2022 marque le soixantième anniversaire du rappel à Dieu d’une moniale bénédictine qui, sans l’avoir jamais rencontrée (puisqu’elle est morte le 19 octobre 1962, je n’avais que trois mois et demi à cette date !), a exercé sur moi une influence durable : Mère Geneviève Gallois.
En effet, aux murs de la pièce d’accueil où nous avions pu rencontrer les moines, se trouvaient accrochés quelques cadres : je suis bien incapable de dire ce qu’ils représentaient, sauf pour l’un d’eux qui m’a marqué pour la vie et qui montrait exactement ceci :
Le trait, caricatural mais tellement éloquent, et surtout la légende de la scène, eurent sur mon âme un effet percutant.
Je n’eus pas alors le loisir de poser des questions au sujet de ce cadre, mais à quelque temps de là, écrivant à mon ami novice, je lui demandais s’il pouvait m’en recopier le texte et surtout s’il pouvait me dire d’où provenait cette image.
Il me répondit que c’était la reproduction d’une page d’un ouvrage un peu inclassable d’une bénédictine, Mère Geneviève Gallois, qui s’intitulait « La vie du Petit Saint Placide » et que, bien que sa première publication datât de 1953, on pouvait encore le trouver en librairie.
Je fonçai aussitôt chez un libraire et commandai l’ouvrage…
Je ne le lus pas : je le dévorai !
Pas une fois, mais plusieurs à la suite.
Inlassablement, je reprenais ma lecture au début dès que j’arrivais à la fin !
Avec une avidité spirituelle qui croissait à chaque relecture, je réfléchissais à ces leçons que je découvrais à travers ces dessins tellement improbables et expressifs : j’interrogeais ce prêtre érudit – mon professeur de grec – dont j’ai parlé dans le récit des souvenirs sus mentionné (cf. > ici), et je réfléchissais encore, et encore, et encore…
En fait, je disais que je « réfléchissais » mais je crois que c’est par cet ouvrage que je suis alors entré, sans le savoir, dans les voies de la méditation.
Ce que Marcelle Auclair a écrit dans la préface se vérifiait : « La Vie du Petit Saint Placide est un exquis traité d’oraison par l’image (…) Les images de Mère Geneviève tendent à notre futilité un piège subtil. On feuillette, et on est pris ; l’œil est distrait, mais l’esprit, de traits de plume en traits de lumière, se recueille. Et le divin tour est joué, ou plutôt ce que Mère Geneviève appelle : « ce drame poignant qui se joue entre l’âme et Dieu ». Notre cœur est tout entier « aspiré comme par un siphon » : c’est ainsi que le petit saint Placide fut aspiré par Dieu ».
« La Vie du Petit Saint Placide » ne me quitta pas de toute l’année de première ; elle était toujours dans la sacoche qui me tenait lieu de cartable, afin de l’avoir partout avec moi et de pouvoir m’y replonger à tout moment : pendant les études où je m’ennuyais, et pendant les cours qui m’ennuyaient (et dont, en définitive, les professeurs, résignés, préféraient que je fusse absorbé par un livre – alors pourquoi pas un livre avec des caricatures de moines réalisées par une bonne sœur ! – plutôt que je dissipasse tout le reste de la classe).
J’étais totalement « accro ».
Et je le suis resté.
« La Vie du Petit Saint Placide » est un ouvrage qui m’accompagne depuis quarante-cinq ans. Dans mon bureau, toujours à portée de main, à côté des ouvrages de Gustave Thibon. Dans tous mes déménagements, toujours dans un carton spécial : celui dont on sort le contenu en priorité.
Bien sûr, j’ai voulu savoir qui était cette Mère Geneviève Gallois, qui avait quitté cette terre alors que je venais d’y entrer. J’ai été étonné du « parcours » de cette jeune artiste inclassable qui, convertie par la liturgie grégorienne des Bénédictines de la Rue Monsieur, entra chez elles en 1917, mais dut attendre vingt-deux ans pour être admise à la profession solennelle, tant son tempérament original et fort déroutaient ses supérieures !
J’ai été émerveillé du travail de la grâce dans cette âme dont les dessins, franchement moches – osons le mot -, sont porteurs d’une telle force et fécondité spirituelles !
Je me suis souvent posé cette question : si Mère Geneviève Gallois, au lieu de s’éteindre à 74 ans le 19 octobre 1962, avait connu les soubresauts du concile vaticandeux et la période de folie qui l’a suivi, n’aurait-elle pas eu quelques coups de crayons bien sentis, pour traduire en images suréloquentes la vérité pérenne et paisible découlant du bon sens spirituel et de l’authentique vie intérieure en des temps qui, dans la Sainte Eglise, en ont cruellement manqué ?
Quoi qu’il en soit, à titre personnel, au jour anniversaire de sa mort, je ne peux que rendre à Dieu de très ferventes actions de grâces pour tout ce qu’elle a fait pour moi à travers son Petit Saint Placide !
Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur
« Mais, mon cher Père, la leçon de la guerre n’a pas porté !
Le monde ne se convertit pas ! etc. etc… »
Petit Placide réfléchissait :
Et les Bons Pères, est-ce qu’ils se convertissent ?
Et Moi ? Ce Moi qui est le seul pays de Mission sur lequel j’ai pouvoir,
et dont j’aurai à rendre compte.

Vous pouvez laisser une réponse.
Grazie. « Il Piccolo Placido » per me è un libro di alta spiritualità !
Vaticandeux… quelle affaire ! Que se passe t-il à l’intérieur de l’église ?
Oh ! Frère, nous avons vraiment beaucoup de lieux en commun !
Bédoin : le lendemain du baptême de notre premier né, Benoît. Il portait ce prénom car mes chers parents étaient oblats de la Pierre-qui-vire (et notre enfance a de nombreux souvenirs dans ce lieu). Bref ! A Bédoin ce fut un bonheur de retrouver de vrais moines, pas nombreux certes, mais chantant ce grégorien si beau.
J’ai aussi « La vie du Petit Saint Placide ».
Merci pour tout, et gloire à DIEU.