2022-50. Quelques réflexions sur le thème de la vocation (3ème partie) : où l’on commence à parler des avortoirs de vocations.
Mardi saint.
Pierre-Antoine Novelli (1729-1804) : ordination sacerdotale
Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,
Profitant de la proximité du Jeudi Saint, je voudrais continuer avec vous les réflexions sur le thème de la vocation que j’avais commencées il y a déjà plusieurs mois (cf. > ici et > ici).
Je les dédie spécialement à tous mes amis prêtres, qui ont très souvent dû soutenir d’âpres et longues luttes pour arriver à l’ordination, ainsi qu’aux séminaristes que j’ai l’honneur autant que la joie d’accompagner dans leur formation.
Ecrivant à tous les séminaristes de l’Eglise catholique romaine le 18 octobre 2010 (cf. > ici), Sa Sainteté le Pape Benoît XVI commençait sa lettre par cette anecdote : « En décembre 1944, lorsque je fus appelé au service militaire, le commandant de la compagnie demanda à chacun de nous quelle profession il envisageait pour son avenir. Je répondis que je voulais devenir prêtre catholique. Le sous-lieutenant me répondit : Alors vous devrez chercher quelque chose d’autre. Dans la nouvelle Allemagne, il n’y a plus besoin de prêtres. Je savais que cette « nouvelle Allemagne » était déjà sur le déclin, et qu’après les énormes dévastations apportées par cette folie dans le pays, il y aurait plus que jamais besoin de prêtres ».
Puis, le Pape ajoutait aussitôt : « Aujourd’hui, la situation est complètement différente. Mais, de diverses façons, beaucoup aujourd’hui aussi pensent que le sacerdoce catholique n’est pas une « profession » d’avenir, mais qu’elle appartient plutôt au passé. Vous, chers amis, vous vous êtes décidés à entrer au séminaire, et vous vous êtes donc mis en chemin vers le ministère sacerdotal dans l’Église catholique, à l’encontre de telles objections et opinions. Vous avez bien fait d’agir ainsi. Car les hommes auront toujours besoin de Dieu, même à l’époque de la domination technique du monde et de la mondialisation : de Dieu qui s’est rendu visible en Jésus Christ et qui nous rassemble dans l’Église universelle pour apprendre avec lui et par lui la vraie vie et pour tenir présents et rendre efficaces les critères de l’humanité véritable. Là où l’homme ne perçoit plus Dieu, la vie devient vide ; tout est insuffisant. L’homme cherche alors refuge dans la griserie ou dans la violence qui menacent toujours plus particulièrement la jeunesse. Dieu est vivant. Il a créé chacun de nous et nous connaît donc tous. Il est si grand qu’il a du temps pour nos petites choses : « Les cheveux de votre tête sont tous comptés ». Dieu est vivant, et il a besoin d’hommes qui vivent pour lui et qui le portent aux autres. Oui, cela a du sens de devenir prêtre : le monde a besoin de prêtres, de pasteurs, aujourd’hui, demain et toujours, tant qu’il existera ».
Nous ne sommes certes plus dans le contexte si particulier de l’Allemagne dominée par le parti nazi, pour lequel (l’histoire contemporaine fait mine de l’oublier et tend à laisser croire qu’il n’y aurait qu’une seule partie de l’humanité qui aurait été persécutée) l’Eglise catholique et son clergé étaient tout aussi indésirables et tout autant à éradiquer que les Israélites. En ce sens, oui, « la situation est complètement différente ». Mais, le Pape Benoît le laissait finalement bien entendre, si elle est différente dans ses formes, l’opposition des idéologies dominantes à la vocation religieuse et sacerdotale n’a absolument pas désarmé : à l’idéologie nazie ont succédé celles d’un matérialisme pratique triomphant, de l’hédonisme, du libéralisme, du laxisme moral, et – à l’intérieur même de la Sainte Eglise – du modernisme de type progressiste qui, pour dépeupler les séminaires et faire dégringoler de manière spectaculaire les vocations s’est en définitive révélé bien plus efficace que les persécutions extérieures ! De fait, déjà affaiblies depuis la fin de la seconde guerre mondiale, les structures ecclésiastiques au sein desquelles étaient reçues et formées les vocations religieuses et sacerdotales (scolasticats, juvénats, noviciats et séminaires) se sont rapidement vidées et écroulées comme des châteaux de carte sous l’effet d’un courant d’air dans les années qui ont suivi ce fameux concile qui se faisait fort de constituer les prémices d’un nouveau « printemps de l’Eglise » et prétendait fermer péremptoirement le bec aux « prophètes de malheur » !
Je ne détaillerai pas ici les innombrables scandales dont, en Occident, ces séminaires, diocésains ou interdiocésains, sont devenus les cadres. Mais il faut dire et redire qu’un très grand nombre d’entre eux sont devenus les repaires de supérieurs vicieux et les bauges de prétendues vocations adonnées à d’infames turpitudes, accomplissant sans plus aucune vergogne ce que la Très Sainte Mère de Dieu en pleurs avait annoncé à La Salette : « (…) On verra l’abomination dans les lieux saints ; dans les couvents, les fleurs de l’Eglise seront putréfiées et le Démon se rendra comme le roi des cœurs. Que ceux qui sont à la tête des communautés religieuses se tiennent en garde pour les personnes qu’ils doivent recevoir, parce que le Démon usera de toute sa malice pour introduire dans les ordres religieux des personnes adonnées au péché, car les désordres et l’amour des plaisirs charnels seront répandus par toute la Terre (…) » (cf. > ici).
Je pourrais – malheureusement ! – citer une multitude de témoignages directs de jeunes gens qui sont passés dans ces pépinières du nouveau clergé et qui m’ont confié des faits indubitables de la perversion introduite dans ces maisons, jadis fondées pour être des écoles de pureté, d’humilité et de piété autant que des sanctuaires de la saine doctrine catholique, auxquels s’appliquent encore une fois les paroles prophétiques de Notre-Dame de La Salette : « (…) les lieux saints sont dans la corruption : beaucoup de couvents ne sont plus les maisons de Dieu, mais les pâturages d’Asmodée et des siens (…) ».
Je confesse sans aucune contrition que, depuis de très nombreuses années déjà, je ne m’afflige en aucune manière lorsque j’apprends que tel ou tel séminaire de France ferme ses portes : je considère qu’il s’agit tout simplement d’une forme de miséricorde du Dieu trois fois saint pour Son Eglise !
Certes, quelques prêtres encore pieux et vertueux peuvent en sortir, malgré les efforts conjugués de l’enfer et des supérieurs ou professeurs progressistes qui y font la loi, souvent parce que, en cachette de ces derniers, ces séminaristes vont chercher ailleurs les antidotes au modernisme théologique et spirituel qui règne en ces nids d’hérésies, en même temps qu’ils trouvent discrètement en d’autres lieux le soutien et les conseils pour ne pas se laisser gagner par la pourriture des maisons de formation officielles. Là encore, je pourrais citer de nombreux cas.
De la même manière qu’il existe des avortoirs pour mettre fin à des vies humaines en gestation, il existe des avortoirs de vocations. Nombre de séminaires ou de maisons religieuses prétendument dédiées à la formation ont joué ce rôle depuis soixante ans.
Certes, il y a bien quelques sujets qui sont arrivés à devenir prêtres :
- les uns en gobant les poisons qu’on leur a inoculés ; pour la plupart on se demande alors souvent s’ils sont vraiment des prêtres catholiques compte-tenu de la manière dont ils sont vêtus, dont ils se comportent, dont ils enseignent et dont ils célèbrent ;
- les autres en « faisant FOMEC », comme on dit à l’armée, c’est-à-dire en se fondant dans le paysage ecclésiastique même s’ils n’adhèrent pas vraiment à ce qui leur a été inculqué, en raison d’une espèce de résistance intérieure non manifeste, dans l’attente du moment où ils pourront prudemment et progressivement se montrer plus catholiques et plus traditionnels que ce qu’on eût voulu qu’ils fussent. Mais ceux qui ont agi ainsi n’en sont jamais sortis sans de profondes blessures spirituelles et psychologiques.
En dehors de ces deux types de prêtres sortis des séminaires « conciliaires », on trouve des centaines et des centaines de jeunes gens qui, présentant pourtant des signes relativement certains de vocation religieuse ou sacerdotale, ont été poussés vers la sortie par les idéologues qui dirigeaient (dirigent encore) ces maisons de formation, parce qu’ils n’avaient « pas le profil des prêtres que l’Eglise souhaite pour le monde d’aujourd’hui » (sic) – ce que l’on peut souvent traduire par : « sujet trop traditionnel, trop pieux, pas assez perméable à la nouvelle théologie ou aux nouvelles formes de la pastorale » -, ou bien se sont découragés et sont retournés dans le monde en abandonnant toute idée de plus haut service.
Je ne doute pas que Notre-Seigneur ne se lasse pas d’appeler à Lui ; je ne doute absolument pas qu’il y a toujours des jeunes gens qui sont appelés par Lui au sacerdoce et à la vie religieuse ; je ne doute en aucune manière que la plupart de ceux qui entendent cet appel (quand ils sont dans les conditions psychologiques et spirituelles pour l’entendre) portent en eux les capacités de générosité et d’enthousiasme de leur jeunesse pour y répondre… En revanche je doute fortement de l’aptitude de l’écrasante majorité des maisons de formation « conciliaires » à permettre à ces vocations de se fortifier, de s’épanouir et de parvenir à leur plénitude en leur assurant un enseignement strictement catholique pour ce qui concerne la doctrine, comme pour tout ce qui touche à la rigueur spirituelle et les bonnes mœurs.
Même si – hélas ! – ils ne sont pas totalement à l’abri de recevoir des brebis galeuses ou des loups rapaces déguisés en brebis, les maisons de formation et séminaires des instituts et fraternités traditionnels, échappent dans l’ensemble assez heureusement à cette contagion issue du modernisme (sans s’en trouver totalement à l’abri, car le démon s’acharne aussi à les détruire de toutes les manières).
A l’occasion du Jeudi Saint, fête du Sacerdoce catholique, il y a un devoir impérieux de prier non seulement pour nos prêtres, dont c’est la fête, mais aussi une véritable urgence de prier pour les futurs prêtres, séminaristes et religieux, afin que leur vocation s’épanouisse et se fortifie saintement dans les cadres les plus adéquats à une formation doctrinale et spirituelle qui fera d’eux en vérité des prêtres selon le Cœur de Jésus, en sorte que leur futur et très précieux ministère de sainteté et de sanctification permette le relèvement de notre pauvre Eglise en crise.
Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

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