2022-16. « Grâces mystiques », « visions » et « apparitions » : devons-nous les désirer ?
9 février,
Fête de Saint Cyrille d’Alexandrie, évêque et confesseur, docteur de l’Eglise (cf. > ici, et > ici) ;
Mémoire de Sainte Apolline d’Alexandrie, vierge et martyre ;
Dans l’Ordre de Saint Augustin, mémoire de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerich, vierge de notre Ordre.
La Bienheureuse Anne-Catherine Emmerich, dont nous faisons aujourd’hui mémoire, est célèbre pour avoir bénéficié de nombreuses grâces mystiques de tout premier ordre. Que l’anniversaire de sa naissance au ciel (+ 9 février 1824), nous soit l’occasion de rappeler quelques vérités importantes au sujet des visions, apparitions et autres grâces mystiques…
Gian-Lorenzo Bernini, dit Le Bernin (1598-1680) :
La transverbération de Sainte Thérèse
(Rome, église Sainte-Marie de la Victoire)
L’une des caractéristiques des périodes troublées – très spécialement lorsque les représentants de l’Eglise enseignante sont déficients, mal formés ou déviants, et que les bons conseillers spirituels font défaut -, est de voir se multiplier les annonces, publications et diffusions de messages présentés comme émanant de personnes favorisées de « grâces mystiques » ou d’ « apparitions ».
S’il peut parfois y en avoir d’authentiques, il arrive malheureusement bien plus fréquemment qu’il s’agisse de faux mystiques ou de fausses apparitions.
Les « grâces mystiques » (qu’il s’agisse d’apparitions, de locutions célestes, de visions, d’illuminations intérieures, de stigmates… etc.) existent, c’est indubitable : toute l’histoire de l’Eglise et la vie des saints en sont une démonstration.
Il y a déjà plusieurs années, nous avions publié dans les pages de ce blogue, un extrait de l’homélie prononcée par Monseigneur Pie, évêque de Poitiers et futur cardinal, le 3 juillet 1876, à l’occasion du couronnement solennel de la statue de Notre-Dame de Lourdes, traitant de ces sujets, homélie chaleureusement approuvée par le Bienheureux Pie IX, puisque c’est un résumé lumineux de la doctrine catholique traditionnelle (voir > ici).
En outre, ces phénomènes sont beaucoup moins rares que ne se l’imaginent nos contemporains, plus ou moins marqués par l’incrédulité et le rationalisme, mais ils demeurent néanmoins des phénomènes d’exception, qui doivent toujours être soumis au discernement d’au moins un conseiller spirituel éclairé et prudent, si ce n’est de plusieurs.
Puis, s’il s’agit d’en diffuser quelque chose, ce doit toujours être fait sous le contrôle des pasteurs de la Sainte Eglise et dans la plus grande réserve.
Quant à la personne qui penserait en être favorisée, elle doit toujours être extrêmement défiante envers elle-même et envers ce qu’il lui semble « recevoir ».
En effet, le démon, dont Saint Paul nous dit qu’il se déguise en ange de lumière (2 Cor. XI, 14), est tout-à-fait capable de provoquer des « apparitions », des « visions » ou des « locutions » intérieures présentant des caractères pouvant passer pour authentiques.
Que ne tenterait-il pas pour égarer les âmes ?
Lui, « menteur et père du mensonge » (Joan. VIII, 44), est même parfaitement capable de dire 100% de vérité, dans de prétendues apparitions ou phénomènes mystiques, pour pouvoir ensuite entraîner ne serait-ce qu’une seule âme dans l’illusion sur elle-même et dans une espèce d’autosatisfaction spirituelle néfaste.
Il est aussi capable de dire 99,99% de vérité pour faire gober 0,01% d’erreur.
Il peut même arriver que, ayant conservé les extraordinaires capacités de déduction et de compréhension de son intelligence angélique, il puisse énoncer des prédictions qui se réaliseront mais n’auront de « prophéties » que l’apparence…
Les faux mystiques sont innombrables – bien plus nombreux que les véritables, hélas ! – : il peut arriver que certains d’entre eux soient « de bonne foi », victimes d’illusions ; d’autres sont des affabulateurs pathologiques ou des personnes atteintes de troubles psychiatriques ; d’autres fois ce sont des manipulateurs en quête de notoriété ; d’autres enfin peuvent, en toute conscience et responsabilité, avoir partie liée au démon…
Tous les cas de figure sont envisageables.
Certains de ces faux mystiques peuvent abuser des théologiens et des hommes d’Eglise sagaces.
Ainsi lit-on dans la vie de Saint Jean de la Croix le cas d’une religieuse qui avait des « visions » et était favorisée de « grâces mystiques » dont tous les plus doctes théologiens de cette époque en Espagne avaient conclu à l’authenticité. Saint Jean de la Croix démontra que tout cela était illusions diaboliques et fausseté.
Un catholique, s’il est vraiment humble et spirituel, n’aspire pas à être favorisé de « grâces particulières » et de « phénomènes mystiques » : ce désir n’est habituellement pas le signe d’une bonne santé spirituelle !
Le désir d’avoir des apparitions, visions, locutions… etc. est bien souvent dû au fait que l’on se fait beaucoup d’illusions sur la qualité de sa propre vie spirituelle et sur ses propres vertus ; il témoigne en revanche d’un « complexe d’excellence » bien prononcé.
Il semble même qu’une âme qui penserait cela sous-entendrait qu’elle est convaincue que, considérant son « avancement » dans les voies de la perfection, le Bon Dieu lui serait redevable de grâces extraordinaires !!!
Un fidèle authentiquement humble et spirituel ne demandera pas ces « grâces particulières » et, s’il lui arrivait d’en éprouver quelqu’une, il devrait avant tout et par-dessus tout craindre d’être le jouet 1) de son imagination, 2) de sa sensibilité égarée, ou 3) des ruses du démon. Il lui faudrait alors recourir au plus tôt aux lumières d’un conseiller spirituel très bien formé, versé dans la connaissance de la théologie mystique, et par dessus tout prudent, voire prudentissime !
Un catholique véritablement humble et fidèle ne fera pas des « grâces mystiques » le critère selon lequel il pourrait juger lui-même de sa perfection spirituelle et de son avancement dans les voies de la vertu ; mais il sera de plus en plus persuadé que c’est dans l’aridité intérieure et la nuit de la foi, dans la sécheresse d’une espérance purement surnaturelle et dans l’absence des consolations sensibles, dans la pratique austère de la mortification de sa sensibilité, et dans l’observance quotidienne de la pénitence et des sacrifices, qu’il prouvera à Dieu qu’il L’aime en vérité, bien davantage que dans toutes les « impressions » sensibles, « consolations » et « joies » spirituelles qu’il pourrait ressentir dans la prière !
Ma petite expérience de plus de quarante années, soit comme formateur de jeunes religieux soit comme témoin direct de la vie interne de nombreuses communautés de type paroissial ou religieuses, m’a montré par de multiples exemples (qui peuvent arriver jusqu’à de dramatiques dénouements parfois), qu’en tout ce qui concerne le domaine des « apparitions » et des « phénomènes mystiques », il convient de s’en tenir strictement à ce que la Tradition nous fait connaître (par exemple dans les vies des saints) et que le Magistère authentique a reconnu comme digne de créance.
Ici plus encore qu’en tout autre domaine, il convient et s’impose de se méfier de toute « nouveauté ».
Frère Maximilien-Marie du Sacré-Cœur.

Vous pouvez laisser une réponse.
C’est vraiment une opportunité que d’informer ainsi de ces déviations mystiques, quand tant d’âmes se croient investies de missions, attirant des chrétiens en mal d’Eglise dans leurs filets.
Ah, une fois de plus, je suis ravie d’avoir un tel enseignement.
J’ai moi aussi vu, dans un groupe charismatique, comment se passaient ce genre de choses, visions, prophéties …etc., j’en suis sortie très blessée et écœurée : j’ai vite senti l’exaltation et l’excitation nerveuse des gens. Cela ne m’a pas plu.