2015-76. Bref exposé des Lois Fondamentales du Royaume de France concernant la dévolution de la Couronne.
Henri Charles Ferdinand Marie Dieudonné d’Artois, Duc de Bordeaux, Comte de Chambord,
de jure Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Henri V
(29 septembre 1820 – 24 août 1883)
Le 24 août 1883 s’éteignit, en exil, Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Henri V de France, communément désigné par son « titre de courtoisie » : le Comte de Chambord.
Il est relativement fréquent de lire que ce Prince – dernier descendant légitime en ligne masculine directe de Leurs Majestés les Rois Louis XV et Charles X – est « mort sans héritier », et que sa disparition a « ouvert une querelle dynastique ».
S’il est exact que le Comte de Chambord est mort sans postérité, en revanche il est absolument faux de dire qu’il est « mort sans héritier » (ou plus exactement sans successeur) : en effet, comme lors des morts des derniers Rois Capétiens directs (Jean 1er le Posthume, Philippe V le Long et Charles IV le Bel) et des Rois Valois (Charles VIII, Louis XII, François II, Charles IX et Henri III) – tous décédés sans descendance mâle – , il y a toujours un successeur légitime pour la couronne de France : ce successeur est le plus proche parent mâle dynaste du Souverain défunt.
Ainsi, un arbre généalogique dûment établi suffit-il à trouver ce parent mâle dynaste : frère, oncle, ou cousin le plus proche.
Et les prétendues « querelles dynastiques » ne sont-elles jamais que l’expression des ambitieuses prétentions (la prétention n’est-elle pas le propre des prétendants ?) de Princes qui veulent nier ou occulter la réalité généalogique.
En ce 24 août 1883, le plus proche parent mâle dynaste du Comte de Chambord était son cousin Jean de Bourbon (1822-1887) dit Comte de Montizon, descendant direct de Louis XIV et désormais aîné des Capétiens.
Le testament du Comte de Chambord est d’ailleurs sans ambiguïté et, après le décès de son époux, la Comtesse de Chambord soutint les légitimistes français qui reconnurent Jean de Bourbon comme leur souverain de droit : Jean III de France.
La qualité de dynaste est réglée par les lois successorales (lesquelles peuvent varier d’un royaume à l’autre).
En France, les règles de succession sont contenues dans ce que l’on appelle traditionnellement les « Lois fondamentales du Royaume de France » : ce sont des règles coutumières qui ont été précisées au cours des âges afin de résoudre des situations concrètes graves ; quoique non écrites, elles n’en ont pas moins de force et elles ont toujours été observées, assurant ainsi la continuité de l’Etat et garantissant au mieux l’ordre et la paix civile.
Bien qu’il soit aisé à quiconque veut bien s’en donner la peine, de retrouver l’énoncé et l’explication des « Lois fondamentales du Royaume », il m’a paru opportun, en cet anniversaire du rappel à Dieu de Monseigneur le Comte de Chambord, de publier ci-dessous un résumé de celles qui concernent les règles de dévolution de la Couronne, tout en invitant mes lecteurs à se reporter à des études plus développées et approfondies (par exemple les publications de l’excellent site « Vive le Roy » géré par l’Union des Cercles Légitimistes de France > ici).
Lully.
Trône réalisé en 1873 pour Monseigneur le Comte de Chambord.
Lois Fondamentales du Royaume de France :
1) La succession à la Couronne est héréditaire de mâle en mâle par ordre de primogéniture :
En l’absence d’une descendance directe mâle du souverain défunt, la Couronne est dévolue, à l’infini, à l’aîné de la branche collatérale la plus proche (qui devient la nouvelle branche aînée).
Pourquoi la masculinité ?
Lors de la cérémonie du Sacre, le Roi de France est oint avec le Saint Chrême (les autres souverains chrétiens sacrés reçoivent leurs onctions avec une autre huile, bénite et non consacrée : seul le Roi de France a le privilège d’être oint avec le Saint Chrême, comme le sont les évêques). Le Sacre, qui n’est pas un simple couronnement, est un sacramental (il a même parfois été assimilé à un huitième sacrement) : il fait du Roi un lieu-tenant du Christ, parfois appelé « l’évêque du dehors ». En effet, si elle n’appartient pas à la hiérarchie de l’Eglise, toutefois la royauté sacrée propre à la France possède un caractère quasi-sacerdotal ; or seul les hommes peuvent être appelés au sacerdoce.
La règle de masculinité empêche non seulement la dévolution de la couronne à une femme, mais aussi à la descendance mâle d’une fille de souverain français : cela empêche que le Royaume de France ne passe sous la domination d’un souverain étranger ayant épousé une princesse française ou descendant d’une princesse française mariée à un souverain étranger.
2) La Couronne de France est indisponible :
Le Roi régnant ne peut en rien changer l’ordre de succession. Il ne peut ni abdiquer, ni exhéréder (c’est-à-dire exclure de la succession), ni faire renoncer à ses droits un Prince dynaste.
La succession royale n’est pas patrimoniale, mais elle est dite « statutaire ». Le statut coutumier du Royaume est hors de portée des volontés humaines : la volonté du Roi, comme celle de son successeur ou de tout autre successible.
Par conséquent, le Roi (de fait ou de droit) ne peut renoncer à la Couronne en abdiquant, ni limiter les prérogatives de ses successurs, ni porter atteinte à l’ordre de succession ; il n’a pas le pouvoir de faire renoncer à ses droits un successible, et les éventuelles « renonciations » sont donc, de plein droit, nulles.
En France, le Royaume n’est pas la propriété du souverain : celui-ci exerce une fonction – la fonction royale – qui le dépasse et dont il est en quelque sorte le serviteur plus que le maître.
3) La succession est instantanée : « Le Roi est mort, vive le Roi ! ».
Les ordonnances de Charles VI, en 1403 et 1407, règlent que le Roi est tel dès la mort de son prédécesseur, instantanément et quel que soit son âge, selon l’ancien adage juridique : « le mort saisit le vif ».
Le Sacre n’est pas constitutif de la royauté : ce n’est pas le Sacre qui fait le Roi, mais la force de la coutume. Le Sacre est seulement dit « déclaratif » : il consacre, par les prières et les onctions de l’Eglise, un Prince qui est déjà le Roi légitime et qui peut exercer sa royauté quand bien même il ne pourrait recevoir le Sacre.
Cette instantanéité de la succession fait dire que « en France, le Roi ne meurt jamais ».
4) La règle de catholicité :
« Fils aîné de la Sainte Eglise catholique romaine », le Roi de France doit être né d’un mariage catholique (ou canoniquement réputé tel au moment de la naissance lors même qu’un jugement de l’autorité ecclésiastique reconnaîtrait plus tard que ce mariage était nul), et doit être lui-même de confession catholique.
Cela ne signifie toutefois pas que ses sujets aient l’obligation d’embrasser la foi catholique.
Vous pouvez laisser une réponse.
Pardonnez-moi, mais non, il n’y avait pas d’oubli de notre côté : la règle de catholicité était bien dans le texte lorsque vous avez ajouté ce commentaire : le Roi doit être issu d’un mariage catholique…
Néanmoins votre observation nous a permis d’y ajouter une précision, celle entre parenthèses, qui n’est pas inutile.
Il manque une loi fondamentale : le Roi doit être issu d’un mariage catholique et canonique.
Plus sévère que le Droit canon, la loi de succession au trône de France n’admet pas la légitimation subséquente. C’est ce qu’explique l’adage : « On naît prince du sang, on ne le devient pas. » C’est la raison pour laquelle le Parlement de Paris cassera le testament de Louis XIV, qui avait voulu légitimer ses bâtards et les rendre successibles à la Couronne de France. Il convient donc de ne pas oublier cette très importante loi fondamentale !
Réponses à « Alphonse Ratisbonne » :
1) il est vrai que, en de nombreuses occasions, Sainte Jeanne d’Arc a employé l’expression « Gentil Dauphin » pour s’adresser à Charles VII avant son sacre. Mais il est absolument FAUX qu’elle ne l’ait appelé QUE « Gentil Dauphin » avant ledit sacre : ainsi, dès la rencontre à Chinon, lorsqu’elle le prend à part elle lui affirme qu’il est « bien Roi et fils de Roi », ou encore lorsqu’elle fait procéder à la « triple donation » (cf. > http://leblogdumesnil.unblog.fr/2019/06/20/2019-52-de-la-triple-donation-de-la-france/) le 21 juin 1429, c’est-à-dire presque un mois avant le sacre, elle manifeste clairement tant par la manière dont elle le nomme (Elle lui dit : « Sire »), que par l’acte qu’elle requiert de lui, que Charles VII est bien déjà Roi.
2) L’affirmation selon laquelle « c’est le sacre qui fait le Roi » n’appartient pas à la tradition royale française, elle n’est le fait que de l’imagination tardive de personnes ignorantes de la vraie nature de la royauté.
3) Faire de tous les propos de Jeanne des espèces d’ « oracles » au prétexte qu’elle a eu Saint Michel comme conseiller (et aussi les Saintes Catherine et Marguerite, ne les oubliez pas) est totalement abusif : en ce cas pourquoi ne dirait-on pas aussi que son « reniement » lors de la terrible séance du cimetière de saint-Ouen, ou l’expression de sa frayeur à la perspective du bûcher lui étaient inspirés par Saint Michel ???
4) Si c’était le sacre qui faisait le Roi, vous pourriez rayer de la liste des Rois tous les Mérovingiens qui ont succédé à Clovis parce qu’ils n’ont pas été sacrés, ainsi que plusieurs Carolingiens ; de même les Rois Jean 1er le Posthume et Louis XVIII, qui furent bien rois réellement mais n’ont point pu être sacrés : le premier n’étant Roi que pendant 4 jours seulement, et le second Roi pendant 29 ans : depuis la mort de Louis XVII le 8 juin 1795 jusqu’à sa propre mort.
Les coutumes (puisque c’est – selon l’expression des juristes royaux – « la force de la coutume » qui fait le Roi) ont bien fait d’eux des rois véritables puisque les rois qui sont venus plus tard et ont porté le même prénom portent les « numéros » de Jean II, puis de Louis XIX.
Note complémentaire :
Le terme « gentil » ici utilisé ne signifie pas « affable », « aimable », « bon »… comme dans notre français contemporain, mais dérive du latin gens, -ntis (comme lorsque dans le Nouveau Testament Saint Paul emploie le terme « gentils » pour désigner les païens – mais alors dans une autre acception du mot « gens »), qui signifie « de race », « de souche » (sous-entendu « royale »).
Mais sainte Jeanne d’Arc n’a-t-elle pas appelé Charles VII le « gentil dauphin » jusqu’à s’il soit couronné à Reims, et alors, elle l’appela roi à partir de ce moment ? ?
C’était bien pour nous rappeler que c’est le sacre qui fait le roi !
Certes elle n’est pas infaillible mais elle était bien missionnée par le Ciel ! Et avait comme conseiller st Michel…