2015-75. Du cardinal François de Joyeuse, grand serviteur de la Sainte Eglise et de la Couronne de France.
- 23 août 1615 -
Anniversaire du rappel à Dieu
de
Son Eminence Révérendissime le cardinal François de Joyeuse.
François, cardinal de Joyeuse (portrait par Thierry Bellangé).
A chaque 23 août, au Mesnil-Marie, nous rappelons la pieuse mémoire du cardinal François de Joyeuse.
Vous ne le connaissez pas ou pas beaucoup ? Alors permettez-moi donc d’évoquer plus au long, en votre aimable compagnie, ce très grand serviteur de la Sainte Eglise et de la Couronne de France.
J’ai déjà eu le plaisir de présenter, dans les pages de ce blogue, la famille de Joyeuse, à propos du très fameux Père Ange de Joyeuse (1563-1608), qui fut successivement archi-mignon du Roi Henri III, gouverneur de provinces, religieux capucin dès son veuvage et prêtre, contraint de quitter son ordre pour prendre les armes et devenir le troisième duc de Joyeuse, lieutenant du Roi Henri IV pour le Languedoc, maréchal de France, puis à nouveau capucin (cf. > ici).
Cet extraordinaire Père Ange de Joyeuse, comme j’avais eu l’occasion de le préciser alors, était le troisième garçon d’une fratrie de sept. François - dont je vais aujourd’hui vous entretenir – était le deuxième des sept fils.
Il naquit à Carcassonne, en la fête de Saint Jean-Baptiste, le 24 juin 1562.
Son frère aîné, Anne de Joyeuse, étant destiné à la carrière militaire, François fut dès son enfance destiné à l’Eglise par ses très pieux et fervents parents.
Avec ses deux frères puinés, Henri (futur Père Ange) et Scipion, après ses études à Toulouse, il fut envoyé au très réputé Collège de Navarre, à Paris.
Il passera ensuite un doctorat in utroque jure (c’est-à-dire en droit civil et en droit ecclésiastique) à l’université d’Orléans.
Très appréciée de Sa Majesté le Roi Henri III, spécialement en raison de sa ferveur catholique et de son engagement contre les protestants, la famille de Joyeuse est comblée d’honneur : Anne est fait amiral, puis la vicomté de Joyeuse (en Vivarais) est élevée pour lui au rang de duché-pairie (1581) ; Henri devient grand-maître de la garde-robe du Roi ; Scipion, chevalier de Malte, est promu Grand Prieur de Toulouse ; quant à François, n’étant encore que diacre, il est élu, à l’âge de dix-neuf ans (1581) à l’archevêché de Narbonne, puis élevé au cardinalat (consistoire du 12 décembre 1583).
Armoiries du cardinal François de Joyeuse.
François se rend à Rome : il n’y est pas encore pour le conclave qui élit Sixte Quint, le 24 avril 1585, mais c’est des mains de ce dernier qu’il reçoit son chapeau avec le titre de cardinal-prêtre de Saint-Sylvestre au Champ de Mars (San Silvestro in Capite), le 20 mai 1585.
Il reçoit la consécration épiscopale l’année suivante (1586 : il a 24 ans), puis, en 1587, il est nommé « cardinal protecteur des affaires de France en cour de Rome » (à ce titre, il représente les intérêts des sujets français établis à Rome, ainsi que les intérêts du Roi de France auprès du Saint-Siège), et son siège cardinalice est transféré à la Trinité-des-Monts.
L’année 1588 le voit promu commandeur de l’Ordre du Saint-Esprit (institué dix ans plus tôt par Henri III), et il est transféré à l’archevêché de Toulouse.
A la mort d’Henri III (2 août 1589), le cardinal de Joyeuse, avec son jeune frère Scipion (deuxième duc de Joyeuse, puisque l’aîné, Anne, est mort au combat en 1587), prend une part active aux combats de la Ligue, qui refuse l’accession d’un souverain non catholique au trône de France.
Période troublée et pleine de rebondissements qui ne l’empêche cependant pas de participer aux deux conclaves qui vont se succéder, à Rome, au cours des années 1591 et 1592 (élections d’Innocent IX puis de Clément VIII).
A la mort de Scipion (10 septembre 1592), avec le clergé, la noblesse et le peuple de Toulouse, François intervient auprès de son seul frère survivant, le Père Ange, pour qu’il sorte de chez les capucins et prenne la tête des armées de la Ligue en Languedoc : le cardinal de Joyeuse agit donc rapidement auprès du Pape pour que les vœux de religion du Père Ange soient transférés dans l’Ordre de Malte.
C’est ainsi que le Père Ange - par obéissance à ses supérieurs ecclésiastiques – redevient Henri, qu’il succède à ses deux frères trépassés comme troisième duc de Joyeuse, et qu’il troque la bure contre la cuirasse !
Le 25 juillet 1593, à Saint-Denis, Henri IV abjure solennellement le protestantisme (cf. > ici) : l’obstacle qui l’empêchait d’accéder au trône est levé, et François de Joyeuse se range sans tarder sous son obédience.
La mort du cardinal-archevêque de Reims, Nicolas de Pellevé (28 mars 1594), va faire de lui le principal prélat de l’Eglise de France. Transféré au siège cardinalice de Saint-Pierre aux Liens, il va maintenant s’employer à obtenir du Pape Clément VIII la levée des sanctions canoniques qui pèsent sur Henri IV : l’absolution du Roi par le Pape est enfin prononcée le 17 septembre 1595.
Le cardinal de Joyeuse a donc, dans son rôle et ses compétences de Prince de l’Eglise, joué un rôle prépondérant pour la pacification et la réunification du Royaume.
Henri IV le confirme alors dans sa mission de « protecteur des affaires de France en cour de Rome ».
En septembre 1598, le Roi Bourbon qui est dans sa quarante-cinquième année et qui n’a pas de descendance de Marguerite de Valois (épousée le 18 août 1572), lui demande d’œuvrer pour obtenir du Saint-Siège la déclaration de nullité de ce mariage, contracté sous une contrainte certaine.
Une fois de plus la mission de François de Joyeuse est couronnée de succès : le 17 décembre 1599, le mariage avec Marguerite de Valois est déclaré nul par le Pape. Henri IV peut donc, en toute régularité canonique, contracter un véritable mariage (puisque le précédent n’en était donc pas un).
Le 9 décembre 1600, Marie de Médicis débarque à Marseille : le cardinal François de Joyeuse l’y attend et l’accueille. Il l’accompagne à Lyon, où les noces, déjà célébrées par procuration, font l’objet de nouvelles cérémonies (17 décembre 1600).
L’année suivante, la Reine Marie met au monde un fils, le futur Louis XIII : l’avenir de la Couronne est assuré !
Ainsi, non content d’avoir joué un rôle prépondérant pour la pacification et la réunification du Royaume, le cardinal François de Joyeuse, toujours dans son rôle et ses compétences de Prince de l’Eglise, a-t-il également pris une part non négligeable à la pérennité de la dynastie des Bourbons.
Pierre-Paul Rubens : sacre de Marie de Médicis à Saint-Denis, le 13 mai 1610.
En 1604, il est promu cardinal-évêque de Sabine et il est ensuite transféré à l’archevêché de Rouen. A Rome, il participe aux deux conclaves de l’année 1605 qui élisent Léon XI puis Paul V.
Ce dernier le choisit en 1607 pour une mission diplomatique délicate auprès de la république de Venise, sur laquelle le Pape avait jeté l’interdit : le cardinal de Joyeuse permettra la réconciliation de la Sérénissime avec le Saint-Siège.
Paul V fera encore de lui son légat aux cérémonies du baptême du futur Louis XIII (né le 27 septembre 1601, il a juste été ondoyé à la naissance et les cérémonies solennelles du baptême sont célébrées le 17 juillet 1606).
Son frère puiné, Henri, redevenu le Père Ange, meurt en odeur de sainteté le 28 septembre 1608, et François devient alors le quatrième duc de Joyeuse (lorsqu’il mourra, le duché échoira à sa nièce Henriette-Catherine, fille d’Henri, après laquelle il passera à la maison de Guise).
Le 13 mai 1610, à Saint-Denis, c’est lui qui préside la cérémonie du sacre de la Reine Marie (Marie de Médicis fut la dernière Reine de France à recevoir le sacre).
Le lendemain, 14 mai, le Bon Roi Henri était assassiné dans les circonstances que l’on sait.
Le cardinal de Joyeuse couronnant Marie de Médicis à Saint-Denis le 13 mai 1610
(détail du grand tableau de Rubens)
Cinq mois plus tard, le 17 octobre 1610, le cardinal François de Joyeuse célèbre le sacre du jeune Louis XIII dans la cathédrale de Reims : en effet, l’archevêque de Reims Louis III de Guise n’a qu’une quinzaine d’années et, n’étant donc pas encore consacré, ne peut officier.
Quelques mois plus tard, le 17 août 1611, le Pape Paul V le nomme doyen du Sacré-Collège, titre auquel est traditionnellement attaché le titre de cardinal-évêque d’Ostie : pour la quatrième fois donc François de Joyeuse change de titulature cardinalice.
Il est âgé seulement de cinquante-et-un ans, mais il a déjà trente-deux ans de carrière ecclésiastique, trente-deux ans d’une vie des plus actives dans une période de l’histoire de l’Eglise et de la France particulièrement dense et tourmentée : en cette année 1613, le cardinal-duc de Joyeuse subit une attaque cérébrale dont il va garder des séquelles.
Cela ne l’empêche pas toutefois de tenir encore une place prépondérante lors des Etats Généraux qui s’ouvrent à Paris le 27 octobre 1614, après un jeûne public de trois jours et une procession solennelle.
François de Joyeuse y préside la Chambre du Clergé, et son influence détermine l’adoption des décrets du Concile de Trente dans le Royaume.
C’est alors qu’il est à nouveau en route pour la Ville Eternelle que le cardinal-duc François de Joyeuse est atteint par la dysenterie qui va l’emporter : il doit interrompre son voyage et s’arrêter au collège des Jésuites d’Avignon. C’est là qu’il rend son âme à Dieu, le 23 août 1615 : il était âgé de cinquante-trois ans et deux mois.
Son corps d’abord inhumé dans la chapelle du collège des Jésuites de Pontoise fut ensuite transporté dans la chapelle Saint-Louis du collège des Jésuites de Rouen (actuel lycée Corneille) ; son cœur est resté dans la chapelle du collège des Jésuites d’Avignon.
Ce très grand serviteur de la Sainte Eglise et de la Couronne de France ne méritait-il pas que l’on célébrât aujourd’hui sa pieuse mémoire, et que l’on rappelât ses très méritoires actions pour l’honneur de l’une et de l’autre, et pour l’exaltation de l’une par l’autre ?
Lully.
François cardinal de Joyeuse conférant les onctions du sacre au jeune Louis XIII, le 17 octobre 1610, à Reims
(détail d’une gravure légendée publiée après l’événement).
Vous pouvez laisser une réponse.
Nous ignorons sur quelles sources se fonde une telle assertion…
De notre côté, dans nos lectures, nous n’avons rien trouvé qui permette de l’affirmer.
Est-ce le Cardinal de Joyeuse qui a mis au point L’ÉDIT DE NANTES comme le dit la visite théâtralisée de la ville de Joyeuse ?
Merci.
Rappel de notre histoire et de ses serviteurs toujours très apprécié.
Grand MERCI, Lully… et le papa-moine.
Bel hommage rendu au Cardinal François de Joyeuse.
Petite pensée d’un lointain cousin de François (c’est d’ailleurs mon 3ème prénom) : nous descendons tous les deux de Dragonnet de Joyeuse (1270 1308).
Un bel hommage rendu à ce cardinal François de Joyeuse.
Bien cha(t)micalement.
Béa kimcat