2015-7. « Yver, vous n’estes qu’un villain ».

1465 – 5 janvier – 2015

550 ème anniversaire de la mort de Charles d’Orléans

Charles d'Orléans et Marie de Clèves tapisserie du XVe s. - musée des arts décoratifs Paris

Charles d’Orléans et Marie de Clèves, sa troisième épouse
(tapisserie du milieu du XVe s. – Paris, musée des arts décoratifs)

Lundi 5 janvier 2015.

Je ne peux pas ne pas marquer en ce jour le cinq-cent-cinquantième anniversaire de la mort de Charles d’Orléans, prince et poète.

Petit fils de Sa Majesté le Roi Charles V le Sage, Charles d’Orléans est né probablement en 1394 (d’autres disent 1391 et d’autres encore 1393).
Son père était Louis 1er d’Orléans, frère puiné du Roi Charles VI, et sa mère Valentine Visconti, fille du duc de Milan et petite-fille du Roi de France Jean II le Bon.
Il reçut une éducation raffinée, ses parents étant l’un et l’autre épris d’art et de lettres.

Marié une première fois à 17 ans avec sa cousine germaine, Isabelle de Valois, qui meurt en couche trois ans plus tard, il épousera en secondes noces Bonne d’Armagnac (en 1410) puis Marie de Clèves (en 1440) qui lui donnera en 1462 un fils prénommé Louis, lequel deviendra Louis XII à la mort de Charles VIII (en 1498).

Charles 1er d’Orléans est âgé d’à peine quatorze ans lorsque son père est assassiné (23 novembre 1407) et qu’il devient chef de maison. Sa mère meurt l’année suivante.
En cette époque troublée (c’est la guerre dite de cent ans), Charles est, par la force des choses, l’une des têtes du parti des Armagnacs ; il est aussi chef de la chevalerie française, en 1415, à la tristement célèbre défaite d’Azincourt, où il est fait prisonnier.

Charles restera captif en Angleterre pendant vingt-cinq ans.
Libéré en novembre 1440 grâce au versement en rançon d’une partie de la dot de Marie de Clèves qu’il épouse en troisièmes noces (elle a 14 ans, il en a 49), il vivra dès lors principalement sur ses terres – Blois, sa résidence préférée, Amboise,  ou Tours… – entouré d’artistes et de poètes (dont pendant un temps François Villon).

Il meurt très probablement le 5 janvier 1465 (bien que certains avancent aussi la date de 1463, et que d’autres parlent du 4 janvier).  
Charles d’Orléans a laissé une oeuvre poétique considérable (pas moins de 131 chansons, 102 ballades, 7 complaintes et plus de 400 rondeaux) qui tombera cependant dans l’oubli pour n’être redécouverte qu’en 1740.
Cette production littéraire est bien sériée en deux parties : l’oeuvre de la captivité et celle écrite après sa libération.
Son style est élégant, fleuri, léger sans miévrerie, illustré par de belles images empruntées à la nature, souvent allégorique.

Amateur de belles lettres et épris de la magnifique et glorieuse culture française, pouvais-je laisser passer cet anniversaire ? 
La température qui a atteint moins 6° ce matin et la forte gelée blanche m’incitent à vous recopier ici, pour terminer, le rondeau « Yver, vous n’estes qu’un villain » dont vous trouverez d’abord le texte originel puis au-dessous la transcription en français contemporain.

Lully.

l'hiver, manuscrit des très riches heures du duc de Berry (février)

L’hiver
(Très riches heures du duc de Berry – mois de février)

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Yver, vous n’estes qu’un villain (1),
Esté est plaisant et gentil,
En tesmoing de May et d’Avril
Qui l’acompaignent soir et main.

Esté revest champs, bois et fleurs,
De sa livrée de verdure
Et de maintes autres couleurs,
Par l’ordonnance de Nature.

Mais vous, Yver, trop estes plain
De nege, vent pluye et grezil ;
On vous deust banie en essil.
Sans point flater, je parle plain (2),
Yver, vous n’estes qu’un villain (1)!

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Graphie moderne :

Hiver vous n’êtes qu’un vilain (1).
Eté est plaisant et gentil,
En témoignent Mai et Avril
Qui l’accompagnent soir et ma(t)in.

Eté revêt champs, bois et fleurs
De sa livrée de verdure
Et de maintes autres couleurs
Par l’ordonnance de Nature.

Mais vous, Hiver, trop êtes plein
De neige, vent, pluie et grésil ;
On vous doit bannir en exil.
Sans point flatter, je parle plain (2),
Hiver vous n’êtes qu’un vilain (1) !

(1) vilain = rustre (paysan)
(2) plain = juste (droit)

détail - le chat près du foyer

Le chat près du foyer – détail de « février »
dans les Très riches heures du duc de Berry.

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Publié dans : Lectures & relectures, Memento |le 2 janvier, 2015 |Pas de Commentaires »

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