2015-4. Métaphysique des vœux (2ème partie).

2ème partie :
« Comme si, en l’instant fugace de la jonction de deux cycles,
le passé et l’avenir se faisaient plus présents à la conscience »

frise

Maître-Chat Lully en méditation métaphysique

Maître-Chat Lully en pleine méditation métaphysique

Vendredi 2 janvier 2015 au soir ;
Dans l’Ordre de Saint Augustin, fête de Saint Fulgence de Ruspe.


   Dans ma première partie (cf. > ici), je vous invitais à vous arrêter sur cette question : qu’est-ce donc que cette « bonne année » que l’on se souhaite ? … et, avant même de parler de « bonne année », qu’est ce donc réellement qu’une « année » ?
Si nous le savons pas, en effet, comment pourrons-nous souhaiter qu’elle soit « bonne » ?
Poursuivons donc nos réflexions et interrogations.

   Nous avons établi qu’une année est un instrument et une unité de mesure dans un déroulement, celui du temps : une mesure qui est repérable par la conscience de chacun, une mesure conventionnelle dans la représentation que nous nous faisons du temps.

   On peut bien sûr se demander qui a réellement autorité pour instituer le calendrier, pour décider que l’année commencera tel jour plutôt que tel autre, et pour imposer cette pratique à un groupe plus ou moins important de personnes, mais nous nous éloignerions considérablement de mon propos initial, et il nous faut bien, en définitive, nous contenter des faits tels que nous les avons hérités de l’histoire.

   Je voudrais toutefois au passage faire remarquer que, alors même que le temps est conçu comme quelque chose qui se déroule et ne revient pas - « Nul Homme ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve car, la seconde fois, ce n’est plus le même fleuve et ce n’est plus le même homme », ainsi que le remarquait Héraclite d’Ephèse - , l’ « année », elle, est construite sur un mode de représentation cyclique, qui peut donner l’illusion de l’éternel retour…
Pour expliquer de quelle manière ces deux représentations du temps, apparemment contradictoires, se peuvent harmoniser, la seule image qui me vient à l’esprit est celle de la bicyclette : les rayons de ses roues font-ils autre chose, à chaque tour de roue, que revenir sans cesse dans la même position ? Et cependant, c’est en accomplissant cette espèce d’éternel retour, que la bicyclette avance sur la route et ne reste pas au même lieu.

   Le fait d’avoir affirmé qu’il y a quelque chose de conventionnel – et donc d’un peu artificiel – dans la manière dont l’année est définie, signifie-t-il que la mise en place de tels jalons ne soit pas utile ni nécessaire ?
Certes, l’homme qui vivrait sur une île déserte, sans relation avec quiconque, aurait – en droit comme en fait – toute latitude et liberté pour établir un calendrier qui lui soit strictement propre, qui correspondrait à ses seuls besoins et à sa manière de vivre exclusivement personnelle.
Dès lors cependant que l’homme vit en société, il devient pratiquement indispensable de disposer d’une manière commune de compter l’écoulement du temps.

   Cela n’empêche pas, par ailleurs, de conserver en parallèle, à titre personnel ou pour l’usage d’une communauté spécifique, un calendrier propre : les peuples asiatiques, les Juifs et les mahométans ont un calendrier lunaire, avec un compte des années totalement différent de celui que nous employons ; au sein même de la Chrétienté, si une majorité suit le calendrier grégorien, il existe des communautés chrétiennes qui suivent toujours le calendrier julien (voir ce que j’avais déjà expliqué ici > années bisextiles) ; l’Eglise catholique romaine elle-même, tout en ayant favorisé l’institution et la généralisation d’une année civile qui commence au premier janvier, adopte néanmoins pour sa liturgie un autre calendrier dont le premier jour se situe au dimanche le plus proche de la fête de Saint André, dans une fourchette qui varie – d’une année à l’autre – entre les derniers jours de novembre et les premiers de décembre ; la révolution française de son côté avait promulgué son propre calendrier en dehors de toute référence chrétienne, et dont le « jour de l’an » n’était pas le 1er janvier… etc.

   Je pourrais également parler ici des vœux d’anniversaire : que sont-ils donc en effet sinon eux aussi des vœux de « bonne année » ? N’interviennent-ils pas à la fin d’un cycle d’une année et au commencement d’un autre cycle d’une année : une année qui vous est rigoureusement personnelle, puisque son « jour de l’an » est celui de l’anniversaire de votre naissance à vous et non pas celle de votre voisin (sauf bien sûr si votre voisin est votre frère jumeau) ?

   Cela dit, rien ne vous empêche de « souhaiter la bonne année » à plusieurs reprises dans le cadre d’une année civile ordinaire : « la bonne année » liturgique à vos amis catholiques le premier dimanche de l’Avent, la « bonne année », civile, le 1er janvier selon le calendrier grégorien, puis, quelque douze jours plus tard, encore une fois « la bonne année » au 1er janvier du calendrier julien (n’avez-vous pas quelques russes parmi vos connaissances ?), viendraient ensuite « la bonne année » selon le calendrier chinois, « la bonne année » selon le calendrier mahométan, « la bonne année » selon le calendrier juif, « la bonne année » selon le calendrier révolutionnaire… et j’en passe.
Ne serait-ce finalement pas une magnifique opportunité que de multiplier de la sorte les occasions de présenter des vœux plus fréquemment à notre entourage et à la terre entière ?

   Mais sans doute aussi cette multiplication entraînerait-elle une forme de routine et de dévalorisation.
« souhaiter la bonne année » à tout bout de champ, la lassitude née de l’habitude finirait-elle par avoir raison de ce qu’il y a de meilleur dans la coutume des vœux !

   En conclusion de cette deuxième partie de mes réflexions, je voudrais faire ressortir combien, quelque conventionnel et artificiel que puisse être le fait de « souhaiter la bonne année » à un jour précis ou dans un laps de temps bien circonscrit, ce fait est inscrit dans une sorte d’imaginaire collectif qui lui donne une signification qui va bien au-delà des simples formules par lesquelles il s’exprime.

   En effet, le franchissement d’un jalon du calendrier, chez beaucoup d’hommes encore – malgré qu’on fasse tout pour les empêcher de réfléchir – , s’accompagne de réflexions sur le temps écoulé et sur le temps qu’il reste à parcourir, sur les accomplissements (ou les non-accomplissements) de notre vie, sur les projets en cours, sur les espoirs que l’on nourrit… etc.
La fin d’un cycle et le commencement d’un nouveau sont toujours propices aux bilans et aux réajustements nécessaires.
C’est comme si, en l’instant fugace de la jonction de ces deux cycles, le passé et l’avenir se faisaient plus présents à la conscience des hommes.

Lully.

(à suivre, ici > 3ème partie)

anges chats d'après Raphaël

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1 Commentaire Commenter.

  1. le 4 janvier 2015 à 10 h 18 min Surfingmoune écrit:

    Les voeux sont une tradition que beaucoup de personnes ne veulent oublier sous peine d’être traités d’impolies.
    Mais comme souvent ils sont prononcés de façon machinale pour moi ils n’ont aucun sens.
    Seuls ceux qui viennent vraiment du coeur ont de l’importance.
    Bonne journée
    Bises pluvieuses
    Surfingmoune

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