2014-76. Du bon Père Rouville et de ses compagnons martyrisés à Privas le 5 août 1794 (1ère partie).
Le promeneur qui flane dans les ruelles de Privas ne manque pas d’apprécier le charme de cette petite place que les Privadois appellent depuis des siècles « la Placette » : habituellement calme, bien ombragée, elle est bordée de quelques façades anciennes assez bien restaurées, parmi lesquelles la fameuse « tour Diane de Poitiers » (belle tourelle d’escalier du XVème siècle de l’hôtel particulier des comtes de Valentinois).
Une fontaine y fait entendre le doux murmure de l’eau : cette fontaine excentrée sur le côté le plus élevé de la place, porte en son centre une espèce d’obélisque surmonté d’un buste de « Marianne », car si les anciens Privadois continuent de parler de « la Placette », le nom officiel est « place de la république ».
Il est bien peu de passants qui prêtent réellement attention à ce buste haut perché, et il en est encore bien moins qui soupçonnent que cette paisible fontaine a été édifiée sur l’emplacement de la sanglante guillotine, par le couperet de laquelle furent martyrisés, le 5 août 1794, cinq prêtres et trois religieuses mis à mort en haine de l’Eglise et de la foi catholiques.
En ce deux-cent-vingtième anniversaire de leur martyre, voici résumée l’histoire de ces héroïques confesseurs de la foi dont le sang versé, à n’en pas douter, a obtenu au diocèse de Viviers des grâces abondantes de renouveau après la tourmente révolutionnaire.
Privas, « la Placette » :
Tour Diane de Poitiers et fontaine marquant l’emplacement de la guillotine.
1ère partie – Le « bon Père » Rouville :
François-Augustin Roubaud, né et baptisé le 29 août 1734 à Aix-en-Provence, était entré dans la Compagnie de Jésus et avait été professeur au collège de Billom, en Auvergne.
Dans les années 1761-1762, les jansénistes et les « philosophes » obtinrent du parlement de Paris la fermeture des collèges jésuites, puis, malgré l’opposition de Sa Majesté le Roi Louis XV, le banissement du Royaume de la Compagnie, en 1764.
Le Révérend Père Roubaud, vint alors à Aubenas où, après l’expulsion des jésuites, le maire voulait maintenir le collège et cherchait des professeurs. Pour échapper aux décrets qui interdisaient l’enseignement aux anciens jésuites, le Père Roubaud changea alors son nom en Rouville, et c’est le nom sous lequel il est passé à la postérité.
Pendant plus de vingt ans, le Père Rouville fit l’édification non seulement des autres professeurs et des élèves du collège, mais aussi de toute la ville d’Aubenas : sa modestie, sa douceur, sa piété, sa bonté et sa charité étaient connues de tous, et il répondait volontiers à l’invitation des curés de la ville ou des environs pour prêcher et confesser dans les paroisses où ses vertus rappelaient celles de Saint Jean-François Régis.
Le temps qu’il ne passait pas à prier, à enseigner, à prêcher et à confesser, il le consacrait à la visite des pauvres et des malades. Les fidèles ne parlaient de lui que comme « le bon Père Rouville ».
En 1791, réfractaire au serment constitutionnel imposé par la révolution, le Père Rouville entra dans la clandestinité : caché chez des chrétiens fidèles et courageux, il continua à exercer son ministère, jusqu’à ce que, le 12 juillet 1794, alors qu’il revenait de porter les secours de la religion à un moribond, malgré son déguisement, il fut reconnu et livré par deux misérables dont la convoitise était excitée par la somme promise à qui le dénoncerait.
Il comparut devant les officiers municipaux d’Aubenas et, pour ne pas compromettre ceux qui l’avaient caché, s’efforça de ne donner que des réponses vagues aux questions dont on l’assaillait :
- Qui vous a nourri ?
- La Providence !
- Qui vous cachait ?
- L’amitié !
- Qui fréquentiez-vous ?
- Des gens de bien !
- Pourquoi avez-vous refusé le serment aux nouvelles lois ?
- Parce qu’il est contraires aux principes de la Religion et à la discipline de l’Eglise.
- Sachant qu’il vous est interdit d’exercer votre ministère, pourquoi l’exerciez-vous ?
- J’en tiens le pouvoir de Dieu : Dieu seul peut me l’ôter.
Les dénonicateurs du Père Rouville étaient le citoyen Meynier Cartier et sa femme : ils reçurent cinquante francs pour prix de leur trahison.
Or, peu de temps après la mort du saint prêtre, les Albenassiens furent les témoins de la vengeance divine sur ces deux apostats : lui fut frappé de paralysie de tout le côté droit, et elle, qui avait été très belle et très fière de sa beauté, fut défigurée par un rictus déformant qui la rendait horrible à voir. Dans la rue, les enfants les poursuivaient en leur criant : « vendeurs de chrétiens », et ils n’eurent de repos qu’après avoir fait une longue pénitence.
Le 14 juillet 1794, le Père Rouville fut transféré à Privas.
Dès le lendemain, il comparut devant le tribunal révolutionnaire qui siégeait dans l’ancienne chapelle des Récollets : l’accusateur public – dont nous reparlerons – se nommait Marcon.
On posa au « bon Père » le même type de questions qu’à Aubenas, auxquelles il fit le même genre de réponses.
Il fut condamné à la peine capitale, mais on allait surseoir pendant trois semaines à son exécution. Dans les geôles privadoises, il rejoignait quatre autres prêtres héroïques et trois religieuses dont nous parlerons plus loin.
Le Révérend Père François-Augustin Rouville arrivait au terme de sa soixantième année au moment de son martyre.
A suivre > ici
Privas, l’ancienne chapelle des Récollets dans laquelle siégeait le tribunal révolutionnaire.
Vous pouvez laisser une réponse.
Belle réponse du Père Rouville, ce qui ne doit pas être évident en pareille circonstance.
Pourquoi nos prêtres actuels n’ont plus de courage ?
L’orgueil, la bêtise, la méchanceté… toujours à l’affut!
Seigneur, pardonnez-leur.
Prions.
En définitive ce qui compte ne se calcule pas.
Qu’importe qui tu es ou n’es pas, tes amis ou ennemis, tes adversaires ou tes alliés, tes victoires ou tes défaites : ce qui compte c’est la régularité, car elle est l’éternité qu’engendre l’Esprit Saint.
Merci de nous avoir permis de marcher sur la trace de ces martyrs!
Un rigoureux témoignage historique comblé de dévotion.
Merci!
Marcon hier, Macron aujourd hui ; décidément, la rep a toujours un visage aussi hideux.
Pourquoi nos prêtres actuels n’ont plus ce courage ? se sont-ils éloignés de DIEU ?
J’ai lu ce début d’histoire avec un grand intérêt…
Je ne connaissais le révérend père Rouville que par maman qui ne manquait pas de lui adresser des prières…
Merci Frère.