2014-66. Des fêtes de précepte dans l’Eglise universelle et en France.
Savez-vous, chers Amis, quelles sont les fêtes liturgiques qui, selon le code de droit canonique actuellement en vigueur, sont – pour toute l’Eglise catholique – des fêtes de précepte (dites aussi fêtes d’obligation), c’est-à-dire des fêtes auxquelles les fidèles sont tenus, par une obligation grave (c’est-à-dire sous peine de péché), de participer à la Messe et de s’abstenir de travaux serviles comme pour les dimanches ?
Beaucoup d’entre vous me diront sans doute : Noël, l’Ascension, l’Assomption et la Toussaint.
Ce sont en effet les quatre fêtes dont la célébration n’est pas fixée à un dimanche et qui sont actuellement chômées en France.
Néanmoins, si cette réponse est juste, elle est loin d’être complète car, depuis 1802, le nombre des fêtes de précepte en France est inférieur à celui qui est normalement en vigueur dans toute l’Eglise, et ma question était : « Quelles sont les fêtes liturgiques qui, selon le code de droit canonique actuellement en vigueur, sont – pour toute l’Eglise catholique – des fêtes de précepte ? »
Jugez-en par vous-mêmes :
Selon le canon 1246, § 1 « Le dimanche où, de par la tradition apostolique, est célébré le mystère pascal doit être observé dans l’Eglise tout entière comme le principal jour de fête de précepte. Et de même doivent être observés les jours de la Nativité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de l’Epiphanie, de l’Ascension et du Très Saint Corps et Sang du Christ, le jour de Sainte Marie Mère de Dieu, de son Immaculée Conception et de son Assomption, de saint Joseph, des saints Apôtres Pierre et Paul et enfin de tous les Saints. »
Dans le code de droit canonique de 1917, précédemment en vigueur, sous le numéro 1247 § 1, la liste des fêtes de précepte pour l’Eglise universelle était rigoureusement la même, si ce n’est que « le jour de Sainte Marie Mère de Dieu », c’est-à-dire le 1er janvier où dans le calendrier liturgique issu de la réforme de 1969 a été placée cette célébration en l’honneur de la Maternité divine de Notre-Dame, y était appelé « fête de la Circoncision de Notre-Seigneur » conformément au calendrier liturgique antérieur.
Les fêtes de précepte qui doivent être sanctifiées par l’assistance à la Messe et l’abstention de tout travail servile sont donc au nombre de dix pour l’Eglise universelle, et – avec seulement la différence de dénomination pour celle du 1er janvier – elles correspondent aux mêmes dates dans les calendriers liturgiques de l’une ou l’autre formes du rite romain :
1 - le 25 décembre : Noël.
2 - le 1er janvier : Circoncision ou Sainte Marie Mère de Dieu.
3 - le 6 janvier : Epiphanie.
4 - le 19 mars : Saint Joseph.
5 - le jeudi de l’Ascension (quarante jours après le dimanche de Pâques).
6 - le jeudi de la Fête du Saint-Sacrement (Fête-Dieu), soit le jeudi qui suit le dimanche de la Très Sainte Trinité.
7 - le 29 juin : fête des Saints Pierre et Paul.
8 - le 15 août : Assomption de Notre-Dame.
9 - le 1er novembre : Toussaint.
10 – le 8 décembre : Immaculée Conception.
Ajoutons à cela qu’il existe des fêtes de précepte locales, particulières aux diocèses, aux Congrégations et aux paroisses, qui sont :
- la fête du saint Patron du diocèse,
- celle(s) du ou des saint(s) Patron(s) de la paroisse,
- l’anniversaire de la dédicace de la cathédrale et de
- la fête de dédicace de l’église paroissiale (si elle est consacrée),
- dans les Congrégations, la fête du ou des saint(s) Fondateur (s) et des saints patrons de la Congrégation et du monastère ou couvent où l’on se trouve…
Le second paragraphe du canon 1246 du code de droit canonique actuellement en vigueur précise néanmoins :
« Cependant, la conférence des Evêques peut, avec l’approbation préalable du Saint-Siège, supprimer certaines fêtes de précepte ou les reporter au dimanche. »
De fait, avec cet accord préalable du Saint-Siège, les conférences épiscopales – poussées par des nécessités que nous pouvons qualifier de politiques, puisque c’est souvent sous la contrainte de gouvernements de plus en plus laïcistes qui ne veulent plus accorder que ces jours de fêtes religieuses soient chômés – ont supprimé ou reporté au dimanche certaines fêtes de précepte.
En France, à la suite du concordat signé entre le Saint-Siège et le premier consul Bonaparte en 1801, le cardinal Jean-Baptiste Caprara, légat a latere du pape Pie VII auprès du gouvernement français pour la négociation du dit concordat, promulgua, le 9 avril 1802, un « Indult pour la réduction des fêtes » qui – compte-tenu de la diminution des fêtes religieuses chômées imposée par la république (par exemple avant la révolution, la plupart des fêtes « de première classe », comme l’Annonciation, mais aussi la Saint Louis et la Saint Etienne, les Jeudi et Vendredi Saints, ainsi que toutes les fêtes des Apôtres étaient obligatoirement chômées) – règle cette question pratique des fêtes de précepte.
Ce « décret Caprara », ainsi qu’il est couramment appelé, est toujours en vigueur actuellement. Nous lisons en effet dans le Bulletin Officiel de la Conférence des Evêques de France n°30, en date du 28 janvier 1986 : « La conférence des évêques maintient le statu quo pour les fêtes d’obligation en France, en vigueur depuis le décret du cardinal Caprara en 1802 ».
Donc, en attendant le jour où un régime plus respectueux des fêtes de l’Eglise permettra qu’elles soient à nouveau chômées, il faut célébrer le dimanche des « solennités reportées » pour les fêtes de l’Epiphanie, de la Fête-Dieu, des saints Apôtres Pierre et Paul, des saints Patrons du diocèse et de la paroisse, et de la dédicace.
Pour ce qui est du 1er janvier, bien qu’il soit férié en France, je suis toujours étonné que les évêques et les prêtres ne rappellent cependant plus, aujourd’hui, qu’il s’agit d’une fête de précepte.
Quant au 19 mars et au 8 décembre, il n’y a guère que dans les communautés religieuses traditionnelles qu’on y applique la règle des fêtes de précepte ; ailleurs ce ne sont que des fêtes de dévotion plus ou moins marquées…
Voici le texte de cet « Indult pour la réduction des fêtes » que je recopie intégralement ci-dessous, parce que j’ai eu moi-même du mal à le trouver en entier et que j’ai pensé qu’il serait peut-être utile ou agréable à certains d’entre vous de le connaître :
« Nous, Jean-Baptiste Caprara, Cardinal-Prêtre de la sainte Eglise Romaine, du titre de Saint-Onuphre, Archevêque, Evêque d’Iesi, Légat a latere de notre très-saint Père le Pape Pie VII, et du S.Siège Apostolique, auprès du premier Consul de la République française.
Le devoir du Siège Apostolique qui a été chargé par Notre-Seigneur Jésus-Christ du soin de toutes les Eglises, est de modérer l’observance de la discipline ecclésiastique avec tant de douceur et de sagesse, qu’elle puisse convenir aux différentes circonstances des temps et des lieux. Notre très-saint Père le Pape Pie VII, par la divine Providence, souverain Pontife, avait devant les yeux ce devoir, lorsqu’il a mis au nombre des soins qui l’occupent à l’égard de l’Eglise de France, celui de réfléchir sur ce qu’il devait statuer touchant la célébration des fêtes dans ce nouvel ordre des choses. Sa Sainteté savait parfaitement que dans la vaste étendue des pays qu’embrasse le territoire de la République française, on n’avait pas suivi partout les mêmes coutumes ; mais que dans les divers diocèses, des jours de fêtes différents avaient été observés. Sa Sainteté observait de plus que les peuples soumis au Gouvernement de la même République, avaient le plus grand besoin, après tant d’événements et tant de guerres, de réparer les pertes qu’ils avaient faites pour le commerce et pour les autres choses nécessaires à la vie, ce qui devenait difficile par l’interdiction du travail aux jours de fêtes, si le nombre de ces jours n’était diminué. Enfin elle voyait, et ce n’était point sans une grande douleur, elle voyait que, dans ce pays, les fêtes jusqu’à ce jour n’avaient pas été observées partout avec la même piété ; d’où il résultait en plusieurs lieux un grave scandale pour les âmes pieuses et fidèles.
Après avoir examiné et pesé mûrement toutes ces choses, il a paru qu’il serait avantageux pour le bien de la Religion et de l’Etat, de fixer un certain nombre de jours de fêtes, le plus petit possible, qui seraient gardées dans tout le territoire de la République, de manière que tous ceux qui sont régis par les mêmes lois fussent également soumis partout à la même discipline ; que la réduction de ces jours vint au secours d’un grand nombre de personnes, et que l’observation des fêtes conservées en devint plus facile.
En conséquence, et en même temps pour se rendre aux désirs et aux demandes du premier Consul de la République à cet égard, Sa Sainteté nous a enjoint, en notre qualité de son Légat a latere, de déclarer, en vertu de la plénitude de la puissance apostolique, que le nombre des jours de fêtes, autres que les dimanches, sera réduit aux jours marqués dans le tableau que nous mettons au bas de cet Indult, de manière qu’à l’avenir, tous les habitants de la même République soient censés exempts, et que réellement ils soient entièrement déliés, non seulement de l’obligation d’entendre la Messe, et de s’abstenir des oeuvres servils aux autres jours de fêtes, mais encore de l’obligation du jeûne aux veilles de ces mêmes jours. Elle a voulu cependant que dans aucune église rien ne fut innové dans l’ordre et le rit des offices et des cérémonies qu’on avait coutume d’observer aux fêtes maintenant supprimées et aux veilles qui les précèdent, mais que tout soit entièrement fait comme on a eu coutume de faire jusqu’au moment présent, exceptant néanmoins la fête de l’Epiphanie de Notre-Seigneur, la Fête-Dieu, celle des Apôtres Saint Pierre et Saint Paul, et celle des Saints Patrons de chaque diocèse et de chaque paroisse, qui se célèbreront partout le dimanche le plus proche de chaque Fête.
En l’honneur des saints Apôtres et des saints Martyrs, Sa Sainteté ordonne que dans la récitation, soit publique, soit privée des heures canoniales, tous ceux qui sont obligés à l’office divin, soient tenus de faire dans la solennité des Apôtres saint Pierre et saint Paul, mémoire de tous les saints Apôtres, et dans la fête de saint Etienne, premier martyr, mémoire de tous les saints Martyrs ; on fera aussi ces mémoires dans toutes les messes qui se célébreront ces jours-là.
Sa Sainteté ordonne encore que l’anniversaire de la Dédicace de tous les temples, érigés sur le territoire de la République, soit célébré dans toutes les églises de France, le dimanche qui suivra immédiatement l’octave de la Toussaint.
Quoiqu’il fut convenable de laisser subsister l’obligation d’entendre la messe aux jours des fêtes qui viennent d’être supprimées, néanmoins Sa Sainteté, afin de donner de plus en plus de témoignages de sa condescendance envers la Nation française, se contente d’exhorter ceux principalement qui ne sont point obligés de vivre du travail des mains, à ne pas négliger d’assister ces jours-là au saint sacrifice de la messe.
Enfin, Sa Sainteté attend de la religion et de la piété des Français, que plus le nombre des jours de fêtes et des jours de jeûnes sera diminué, plus ils observeront avec soin, zèle et ferveur, le petit nombre de ceux qui restent, rappelant sans cesse dans leur esprit, que celui-là est indigne du nom chrétien, qui ne garde pas comme il le doit les commandements de Jésus-Christ et de son Eglise ; car, comme l’enseigne l’Apôtre saint Jean : Quiconque dit qu’il connaît Dieu, et n’observe pas ses commandements, est un menteur, et la vérité n’est pas en lui.
Les jours de fête qui seront célébrés en France, outre les dimanches, sont :
La Naissance de Notre-Seigneur Jésus-Christ.
L’Ascension.
L’Assomption de la Très Sainte Vierge.
La fête de tous les Saints.
Donné à Paris, en la maison de notre résidence, ce jourd’hui 9 avril 1802.
J.B. card. Caprara, Légat.
J.A. Sala, Secrétaire de la Légation Apostolique.
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Merci, frère Maximilien-Marie, de nous apprendre ou de nous rappeler les fêtes de précepte. C’est à classer précieusement, avec l’Indult pour la réduction des fêtes.
Vous nous enrichissez!