2014-59. Mandement par lequel le Prince-évêque de Liège Robert de Thourotte institua la Fête-Dieu dans son diocèse en 1246.

       En complément de la biographie de Sainte Julienne du Mont-Cornillon et de l’histoire de l’institution, à Liège, de la première fête du Très Saint-Sacrement (cf. > ici), il m’a semblé intéressant de mettre à la disposition de mes fidèles lecteurs le texte complet du décret par lequel le Prince-évêque Robert de Thourotte institua la Fête-Dieu dans son diocèse.
Selon plusieurs historiens, à la demande de Robert de Thourotte, ce serait Jacques Pantaléon - son archidiacre et futur pape Urbain IV – qui aurait préparé le texte de ce mandement.

On remarquera avec le plus grand intérêt que ce mandement assigne à cette fête du Très Saint-Sacrement un caractère réparateur certain : il y a même une étonnante parenté de termes avec ceux que Notre-Seigneur Jésus-Christ Lui-même emploiera en s’adressant à Sainte Marguerite-Marie, lorsqu’Il lui demandera d’œuvrer pour faire instituer la fête du Sacré-Cœur, quatre-cent-vingt-et-un ans plus tard (voir > ici).

Enfin, je me permettrai de déplorer que les évêques de notre malheureuse époque ne sachent plus écrire de semblables textes, tant par leur teneur spirituelle et doctrinale que par la forme, tout à la fois élégante et sobre de ce décret…

Lully.  

Image commémorative du 7e centenaire de la première Fête-Dieu - Liège 1946

Image commémorative éditée à Liège en 1946
pour commémorer les célébrations du
septième centenaire de la première Fête-Dieu.

       « Robert, par la grâce de Dieu évêque de Liège, à nos chers fils en Jésus-Christ, les abbés, prieurs, doyens, prêtres et autres ecclésiastiques, salut et plénitude de grâces.

   Entre plusieurs merveilles que le Seigneur notre Dieu, toujours adorable dans les oeuvres qu’Il a opérées, celle qui est au dessus de toutes, et qui, par sa sublimité mérite le plus notre admiration, est le sacrement ineffable de Son Sacré Corps. C’est là qu’Il se donne Lui-même en nourriture et qu’Il nous a laissé un mémorial précieux de Sa Passion, autant que de l’amour infini qu’Il nous porte. David, le roi-prophète, entré dans l’abîme des secrets divins, nous en a félicités longtemps auparavant par ces paroles : « Dieu infiniment bon et miséricordieux a éternisé le souvenir de Ses merveilles, Il S’est donné en nourriture à ceux qui Le craignent ».
Et si Dieu Lui-même, qui n’oubliera pas dans toute l’éternité les merveilles de Sa toute-puissance, a fait annoncer celle-ci avant son institution et si, après l’avoir saintement établie, Il S’en est encore souvenu en disant : « Toutes les fois que vous ferez ceci, faites-le en mémoire de Moi » peut-on trouver répréhensible que nous statuions, pour confondre la perversité des hérétiques, qu’outre la mémoire que l’on fait quotidiennement à la messe, on rappelle une fois par an, à tous les fidèles, le mémorial précieux de ce véritable et ineffable sacrement par une fête spéciale et plus solennelle.

   Nous croyons d’autant plus digne, plus juste, plus équitable et plus salutaire de l’ordonner ainsi, que nous voyons l’Eglise assigner aux saints qu’elle invoque journellement dans les litanies, les messes et les oraisons, une fête à certain jour de l’année ; n’est-il donc pas très juste que le Saint des saints, la Source de toute douceur, ait sur la terre une solennité consacrée à Lui rendre de spéciales actions de grâces, comme au Seigneur notre Dieu, qui, par un effet de Sa charité très pure, immense, inénarrable, descend chaque jour sur nos autels ? C’est dans cette représentation admirable qu’Il ne cesse et ne cessera d’accomplir Sa promesse : « Et voici que Je suis avec vous jusqu’à la consommation des siècles », en souvenir de cette autre parole : « Mes délices sont d’être avec les enfants des hommes ».
Dans cette solennité on pourra avec soin et dévotion suppléer aux manquements, irrévérences et omissions que l’on commet journellement, par imprudence et manque de zèle, dans la célébration de cet adorable Mystère. Et qui révoquerait en doute que cette fête ne tende à la gloire de Dieu, à l’accroissement de la Foi, de l’Espérance, de la Charité et des autres vertus, ainsi qu’au profit des élus de Notre-Seigneur Jésus-Christ ?

   Désirant donc faire jouir de ces avantages le troupeau confié à nos soins, exciter la faiblesse humaine à rendre au Seigneur les actions de grâces qui Lui sont dues, nous statuons et ordonnons que chaque année, le jeudi après l’octave de la Sainte Trinité (*), vous observiez la fête solennelle du Très Saint-Sacrement et que vous récitiez son Office de neuf leçons : les répons, versets et antiennes propres dont nous enverrons copie.

   Cette fête sera chômée invariablement et gardée à perpétuité, au jour désigné, dans toutes les églises de notre diocèse de Liège ; on s’y abstiendra de toute oeuvre servile comme au jour du dimanche. En outre, vous avertirez chaque année vos sujets de jeûner dévotement la veille, pour obtenir la rémission de leurs péchés ; vous les exhorterez à s’y préparer par la prière, l’aumône et autres bonnes oeuvres, afin de se rendre dignes de participer aux Saints Mystères. Toutefois, nous ne faisons pas de cette communion un acte d’obligation, mais seulement de conseil.

   Nous espérons qu’en vue de cette fête, dieu et Jésus-Christ Son Fils Se laisseront fléchir par les sacrifices d’expiation et qu’Ils daigneront ouvrir les trésors de Leur clémence au monde entier menacé d’un prochain naufrage.

   Vous prendrez copie des présentes lettres et les garderez fidèlement.
Donné l’an du Seigneur 1246. »

(*) Voir la note 1 en bas de texte > ici

Armoiries de Robert de Thourotte, prévot de Liège, évêque-duc de Langres & pair de france puis prince-évêque de Liège

Armoiries de Robert de Thourotte :
d’abord prévôt de Liège, puis Evêque-duc de Langres et pair de France,
enfin Prince-évêque de Liège (+ 16 octobre 1254).

à suivre :
- le miracle de Bolsena > ici
- l’institution de la Fête-Dieu par Urbain IV et Jean XXII > ici

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1 Commentaire Commenter.

  1. le 15 juin 2022 à 12 h 58 min Rachel écrit:

    Admirable ! On reste muet devant l’amour et la révérence de ce saint Prince-évêque pour le Très Saint Sacrement.

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