2014-8. «O mon peuple, que vous ai-je donc fait ? »
Complainte
Chaque année, à l’approche du 21 janvier, triste anniversaire du martyre de Sa Majesté le Roi Louis XVI, je publie quelque texte en rapport avec ce monarque ou avec sa passion.
Cette année, j’ai choisi ce chant, intitulé « Complainte de Louis XVI aux Français », que sans doute beaucoup d’entre vous connaissent déjà.
On ne connaît pas l’auteur des paroles de cette complainte, mais il est certain qu’elle fut écrite dans le temps même du procès de l’infortuné monarque.
La citation qui lui est mise en exergue, est constituée par les premiers mots des Impropères, ce chant de la liturgie du Vendredi Saint dans lequel le Christ Sauveur adresse des reproches au peuple d’Israël, lequel, en échange de tous les bienfaits reçus de Dieu au cours de son histoire, Lui a infligé les ignominies de la Passion.
C’est une manière non équivoque de rappeler que le Roi de France est un « christ » – mot qui signifie « oint » – , puisqu’il a reçu l’onction sainte du Sacre (cf. notre publication sur la sainte Ampoule > ici).
Par cette onction, le Souverain est devenu un personnage sacré, le lieu-tenant de Dieu dans l’ordre temporel pour le gouvernement du Royaume de France.
La révolution, par les ignominies qu’elle a infligées au Roi Très Chrétien, a encore davantage identifié le Roi Louis XVI au Christ Sauveur : comme Lui, le Prince innocent a été trahi, abandonné, emprisonné, iniquement jugé, condamné au mépris de la justice, alors qu’il n’avait fait que du bien…
La première publication de cette complainte que j’ai trouvée, est aux pages 257 et 258 dans le tome premier du « Dernier tableau de Paris, ou récit historique de la révolution du 10 août 1792 , des causes qui l’ont produite, des évènements qui l’ont précédée, et des crimes qui l’ont suivie », publié à Londres par J. Peltier en septembre 1793.
Voici la photographie de la note qui introduit le texte de cette complainte :
« La romance qui suit a été distribuée par milliers, et chantée publiquement à Paris,
le jour même que la défense du Roi a été prononcée. Cela prouve bien clairement que c’est la faction, et non la nation, qui accuse son Roi. »
J’ai ensuite retrouvé le texte de cette complainte dans « l’Almanach des gens de bien pour l’année 1797 », publié à Paris par le fameux polémiste monarchiste Christophe Félix Louis Ventre de La Touloubre, dit Galart de Montjoie.
Après quoi, tout au long du XIXe siècle et jusqu’à nos jours, on la retrouve dans nombre de publications monarchistes, jusqu’à avoir même été chantée dans une émission de télévision : c’est l’enregistrement que l’on trouvera ci-après, lequel, toutefois, n’est pas exactement conforme, en ce qui concerne les reprises, avec le premier texte publié par J. Peltier, qui est celui que je reproduis textuellement ci-dessous (j’en ai seulement modernisé la graphie, mais conservé scrupuleusement la ponctuation).
Lully.
O mon peuple ! que vous ai-je donc fait ?
J’aimais la vertu, la justice ;
Votre bonheur fut mon unique objet ;
Et vous me traînez au supplice ! (bis)
Français, Français, n’est-ce pas parmi vous
Que Louis reçut la naissance ?
Le même ciel nous a vu naître tous ;
J’étais enfant dans votre enfance.
O mon peuple, ai-je donc mérité
Tant de tourments et tant de peines !
Quand je vous ai donné la liberté,
Pourquoi me chargez vous de chaînes ? (bis)
Tout jeune, encor, tous les Français en moi
Voyaient leur appui tutélaire ;
Je n’étais pas encore votre Roi,
Et déjà j’étais votre père.
O mon peuple ! Que vous ai-je donc fait.. etc.
Quand je montai sur ce Trône éclatant
Que me destina ma naissance,
Mon premier pas dans ce poste brillant
Fut un Edit de bienfaisance.
O mon peuple ! Ai-je donc mérité… etc.
Le bon Henry, longtemps cher à vos cœurs,
Eut cependant quelques faiblesses ;
Mais Louis XVI, ami des bonnes mœurs,
N’eut ni favoris, ni maîtresses.
O mon peuple ! Que vous ai-je donc fait… etc.
Nommez les donc, nommez moi les sujets
Dont ma main signa la sentence !
Un seul jour vit périr plus de Français
Que les vingt ans de ma puissance !
O mon peuple ! Ai-je donc mérité… etc.
Si ma mort peut faire votre bonheur,
Prenez mes jours, je vous les donne.
Votre bon Roi, déplorant votre erreur,
Meurt innocent et vous pardonne.
O mon peuple ! recevez mes adieux ;
Soyez heureux, je meurs sans peine.
Puisse mon sang, en coulant sous vos yeux,
Dans vos coeurs éteindre la haine. (bis)
Pour entendre l’enregistrement faire un clic droit sur l’image ci-dessous puis « ouvrir dans un nouvel onglet »
On trouvera aussi dans ce blogue :
Le discours du Pape Pie VI proclamant que Louis XVI est un martyr > ici
Le récit des dernières heures du Roi martyr > ici
Le testament de Louis XVI > ici
Le voeu de Louis XVI au Sacré-Coeur de Jésus > ici
Des Maximes écrites par le Roi Louis XVI > ici
La Messe de Requiem composée par Cherubini
pour le service funèbre à la mémoire de Louis XVI > ici

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Bonjour ! C’était courant à l’époque d’utiliser la mélodie d’une chanson pour en créer une autre, ou même en musique de reprendre des portées d’un autre compositeur, démarche pudiquement nommée « hommage »…
Je viens de découvrir ce texte qui est cité dans l’ouvrage de Claire Colombi. j’en ignorai tout à fait l’existence et ce n’est pas à l’école que j’aurais pu l’apprendre ! quelle émotion ! j’aimerais tellement en avoir une copie pour l’afficher chez moi et le faire connaitre davantage. il n’y aura à mon sens plus de retour d’un Roi, la simple évocation de cette période ne soulève plus que des haussements d’épaules et des rires, l’école maçonnique est passée par là et a rincé les âmes. le « peuple » ne rêve plus que de possession, de loisir, d’individualisme, il n’y a même plus de peuple français aujourd’hui nos gouvernements le répètent sans cesse pour bien nous en persuader.
La musique de cette (fort belle) complainte me semble bien proche du fameux « Pauvre Jacques » (https://www.youtube.com/watch?v=5t3S-9TYgdo), n’est-il pas ?
J’espère qu’il sera possible d’obtenir plus de précision, par avance merci.
Réponse :
Oui, c’est la même mélodie (c’est écrit en toutes lettres et en français sur la reproduction de l’entête du chant qui est dans cet article).
La romance « Pauvre Jacques » attribuée à la marquise de Travanet a été composée en 1789, les paroles sont rapidement devenues un « message codé » de fidélité à la famille royale. Rien d’étonnant donc à ce que cette mélodie, très connue dans les milieux loyalistes, aient été reprise pour ces « impropères royaux ».
Magnifique complainte. A méditer.
On se rend compte que le roi aimait son peuple.
C’est pourquoi il n’a pas fait tirer sur la foule même en colère, ce que lui reprochent certains. On ignore ce que cela aurait donné …
En attentant au Roi son lieu-tenant c’est au Christ-Roi que l’on porte atteinte!
Le Roi étant le Fils aîné de l’Eglise, c’est l’Eglise que l’on attaque.
Je comprends tout le sens et l’importance du Christ-Roi et du retour obligatoire du Roi en France.
Je trouve terrible que le peuple de France n’ai pas encore pris entièrement conscience du « pardon » de son Roi!
La réconciliation fut immédiate et la faute lavée lui permet de se relever promptement, évitant la coupure fratricide (droite/gauche) qui nuit tant à la France.
Je forme le voeu de l’unité retrouvée en son Roi!
Merci, cher frère, de nous avoir livré cette Complainte de Louis XVI.
Merci pour tout le travail, certes, passionnant, mais qui représente un grand labeur tout de même, dont vous nous faites bénéficier, à travers vos recherches tous azimuts.
« Je ne porterai pas la main sur mon seigneur le roi, qui a été consacré par l’onction du Seigneur. » (Samuel I, 24). Ainsi parle David tenant Saül à sa merci.
Ce que David n’osa faire, quoiqu’il fut en état de légitime défense, la nation française le fit.
Qu’arriva-t-il ?
La terreur, des exécutions, des guerres, des massacres, une persécution, un génocide, plus encore, une semence pour les révolutions à venir.