2013-86. Comparés aux réprouvés, les élus sont en petit nombre.
Extrait d’un sermon
de
notre glorieux Père Saint Augustin
sur
le nombre des élus.
Nous recopions ici la partie la plus importante d’un sermon que notre glorieux Père Saint Augustin prononça devant les fidèles de Carthage, après la lecture de cette péricope évangélique : « (Jésus) dit encore : « A quoi comparerai-je le Royaume de Dieu ? Il est semblable à du levain qu’une femme a pris et caché dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que tout ait fermenté ». Et il allait par les villes et les villages, enseignant, et faisant son chemin vers Jérusalem. Or quelqu’un lui demanda : « Seigneur, n’y en aura-t-il que peu qui soient sauvés ? » Il leur répondit : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite ; car beaucoup, je vous le dis, chercheront à entrer et ne le pourront pas ! » (Luc XIII, 20-24).
Roger van der Weyden : la pesée des âmes (détail du triptyque du Jugement dernier – Beaune)
Comparés aux réprouvés, les élus sont en petit nombre.
Résumé : Les trois mesures de farine dont parle Notre-Seigneur, désignent le genre humain tout entier, mais cela ne signifie pas que tous les hommes seront sauvés. Cela apparaît clairement dans les versets qui suivent la parabole. Car si en d’autres passages la Sainte Ecriture nous dit que le nombre des élus sera très grand – et il sera réellement considérable – , si on examine bien les textes il demeure qu’il sera inférieur à celui de la multitude des réprouvés.
« Les trois mesures de farine dont vient de nous parler le Seigneur, désignent le genre humain.
Rappelez-vous le déluge ; il n’y survécut que trois hommes pour repeupler la terre, car Noé eut trois fils qui furent les souches de l’humanité nouvelle.
Quant à cette sainte femme qui cacha son levain, elle figure la sagesse, qui fait crier partout, au sein de l’Eglise de Dieu : « Je sais que le Seigneur est grand » (Ps. CXXXIV, 5).
Assurément les élus sont peu nombreux.
Vous vous rappelez la question qui vient de nous être rappelée dans l’Evangile : « Seigneur, y est-il dit, est-ce que les élus sont peu nombreux ? »
Que répond le Seigneur ? Il ne dit pas qu’au contraire les élus sont en grand nombre, non ! mais après avoir entendu cette question : « Est-ce que les élus sont peu nombreux ? », il réplique : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite ».
N’est-ce pas confirmer dans l’idée du petit nombre des élus ? Il dit encore ailleurs : « étroite et resserrée est la voie qui mène à la vie, et il y en a peu pour y marcher ; tandis que la voie qui mène à la perdition est large et spacieuse, et il y en a beaucoup pour la suivre » (Mat. VII, 13, 14).
Pourquoi donc chercher notre joie dans les multitudes ?
Vous qui êtes en petit nombre, écoutez-moi. Beaucoup en effet prêtent l’oreille, et peu sont dociles. Je vois une aire et mes yeux y cherchent le grain. On l’aperçoit difficilement tant qu’il est sous le fléau, mais viendra le moment de le vanner.
C’est ainsi que comparés aux réprouvés, les élus sont en petit nombre ; tandis que considérés en eux-mêmes, ils formeront une quantité considérable lorsque le Vanneur viendra, le van à la main, nettoyer son aire, serrer le froment au grenier et brûler la paille au feu inextinguible (Luc, III, 17).
Que la paille ne se rie pas du bon grain : cet oracle est véritable, Dieu ne trompe personne.
Soyez nombreux au sein des nombreux élus, et toutefois vous ne serez qu’en petit nombre ; comparés à une grande multitude. De l’aire du Seigneur doit sortir une telle quantité de bons grains, qu’ils rempliront les greniers célestes.
Le Christ effectivement ne saurait se contredire. S’il a dit qu’il y en a peu pour entrer par la porte étroite et beaucoup pour périr en suivant la voie large ; ailleurs il a dit aussi : « Beaucoup viendront de l’Orient et de l’Occident » (Matt. VIII,11.). C’est que ceux-ci sont aussi en petit nombre ; ils sont à la fois nombreux et peu nombreux.
Les nombreux et les peu nombreux seraient-ils différents les uns des autres ? Non. Les mêmes sont en même temps nombreux et peu nombreux ; peu nombreux comparativement aux réprouvés, et nombreux absolument dans la société des Anges.
Ecoutez, mes bien-aimés, voici ce qu’on lit dans l’Apocalypse : « Je vis venir ensuite, avec des robes blanches et des palmes, des élus de toute langue, de toute race et de toute tribu ; c’était une multitude que personne ne saurait compter » (Apoc. VII, 9). Cette multitude est la grande assemblée des saints.
Quand donc l’aire sera vannée ; quand cette multitude sera séparée de la foule des impies, des chrétiens mauvais et hypocrites ; quand seront jetés aux feux éternels ces hommes perdus qui pressent Jésus-Christ sans le toucher – car l’hémorrhoïsse touchait la frange du Christ tandis que la foule le pressait à l’importuner (Luc, VIII, 44, 42) – ; quand enfin tous les réprouvés seront éloignés, et que debout à la droite du Sauveur, la masse purifiée des élus ne craindra plus ni le mélange d’aucun homme méchant, ni la perte d’aucun homme de bien et qu’elle commencera à régner avec le Christ, quel éclat et quelle force ne prendra point sa voix et avec quelle confiance ne s’écriera-t-elle pas : « Je sais que le Seigneur est grand » !
Par conséquent, mes frères, si j’ai ici de bons grains devant moi, s’ils comprennent ce que je dis et sont prédestinés à l’éternelle vie, qu’ils s’expriment par leurs oeuvres plutôt que par des applaudissements (cf. note *) ».
Roger van der Weyden : les damnés marchant vers l’enfer
(détail du triptyque du jugement dernier – Beaune)
Note * : on voit ici que Saint Augustin n’approuve pas cette déplorable coutume qu’ont les fidèles d’applaudir dans les églises lorsqu’ils sont touchés par la prédication qu’ils ont entendue, et il les exhorte donc à montrer qu’ils ont aimé l’enseignement qui leur a été dispensé non par des manifestations bruyantes mais par la pratique de ce qui leur a été prêché.

Vous pouvez laisser une réponse.
Par ailleurs je vous retourne votre argument : « j’espère que votre Credo n’est pas : « je crois de foi ferme et définitive » ce que Lacordaire, Monsabré, Faber, « L’ami du clergé » et les autres sus-cités dans votre argumentaire, ont exprimé comme opinions théologiques, à l’encontre de l’enseignement d’un Docteur de l’Eglise tel que Saint Augustin ! »
Je sais bien tout cela !
Et justement ce n’est pas parce que Jansenius et ses disciples ont déformé la pensée de notre Bienheureux Père Saint Augustin qu’il faut « jeter le bébé avec l’eau du bain » comme justement l’ont fait un certain nombre de théologiens postérieurs… entraînant la désaffection ou la méconnaissance des textes et de la théologie authentique de notre Bienheureux Père.
Saint Augustin est le grand théologien et docteur de l’Occident qui façonne la pensée, théologique et politique des âges de foi, il est même « LE » Docteur pour Saint Thomas d’Aquin qui le cite et commente à tout bout de champ.
La doctrine du petit nombre des élus s’appuie sur le Saint Evangile lui-même et les paroles de NSJC qui sont sans ambigüité : » (…) Lata est porta, et spatiosa via est quae ducit ad perditionem, et multi sunt qui intrant in eam. Quam angusta porta et arcta via est quae ducit ad vitam, et pauci sunt qui inveniunt eam ! » (Matth. VII, 14).
Tous les théologiens que vous citez, à la suite du DTC, sont des théologiens tardifs, marqués par une certaine forme de « romantisme » et de « sentimentalisme », fort pieux sans nul doute, mais non conforme à la croyance générale des 17 premiers siècles.
Ces théçologiens sont sans doute respectables, mais fort peu réalistes quant à l’état concret du monde, de l’Eglise et des âmes : je ne suis donc pas leurs opinions qui ne restent jamais que des opinions.
Par ailleurs, et même si Dieu dans son infinie miséricorde – à laquelle je crois fermement – a d’autres moyens connus de Lui seul pour se révéler aux âmes et les convertir en moins d’un quart de seconde in articulo mortis, ou « entre le parapet du pont et l’eau » pour reprendre un exemple de la vie du Saint Curé d’Ars, il est difficile d’envisager que, sur l’ensemble des hommes, au nombre desquels se trouve toujours une minorité de baptisés (et le baptême est le seul moyen que nous a donné le Bon Dieu pour obtenir la vie éternelle : cf. question posée au début du sacrement de baptême et entretien de NSJC avec Nicodème), et dans le nombre de ces baptisés si peu d’âmes qui soient en état de grâce, qui soient cohérentes avec leur foi, et qui soient dans une compréhension réelle et profonde du salut et des mystères de la communion avec Dieu… etc. il y ait une majorité de sauvés.
Dans nos pays jadis chrétiens si peu de personnes meurent en ayant reçu les sacrements, dans l’ensemble de la société si peu de personnes qui se soucient de la vie éternelle, parce qu’elles sont strictement bornées aux contingences de la vie terrestre… etc.
Alors je vous pose cette question :
En toute logique, Dieu, qui a créé la liberté de l’homme et qui la respecte si scrupuleusement, va-t-il « imposer » à des âmes qui n’ont rien à fiche de Lui, rien à fiche de Ses commandements, rien à fiche des exigences de leur baptême, rien à fiche de Ses appels à la conversion et au repentir, rien à fiche de la pratique fervente des sacrements qui purifient et sanctifient… bref qui n’ont pas voulu L’aimer, Le louer et Le servir ici-bas, Dieu donc va-t-Il leur « imposer » de vivre avec Lui dans Son Amour et Sa louange pour l’éternité alors qu’elles s’en sont éperdûment fichu sur cette terre ?