2012-44. Simples réflexions à propos du 10 août.
Vendredi 10 août 2012.
Chers Amis du Refuge Notre-Dame de Compassion,
La date du 10 août est particulièrement riche en célébrations et commémorations.
Sans prétendre, ni même vouloir, tout épuiser, je m’autorise à vous rejoindre pour partager avec vous quelques réflexions qui me sont venues aujourd’hui à partir de mes lectures et des échanges que j’ai eus avec mon papa-moine.
A – De la fête de Saint Laurent et de la cohérence des fidèles.
Au calendrier liturgique, nous fêtons aujourd’hui Saint Laurent, proto-diacre et martyr.
C’est même l’un des plus célèbres martyrs de Rome : il est d’ailleurs devenu l’un des célestes protecteurs de la Ville Eternelle, et la basilique qui a été élevée sur son tombeau est au nombre des « sept basiliques » auxquelles les pèlerins se rendent traditionnellement.
Le martyre de Saint Laurent (Pierre de Cortone – 1626)
Je ne peux résister à la tentation de vous recopier quelques phrases d’un sermon que notre glorieux Père Saint Augustin a consacré à Saint Laurent :
« C’est aujourd’hui, à Rome, un grand jour de fête, que célèbre une grande affluence de peuple. Unissons-nous à ce peuple : absents de corps, soyons néanmoins par l’esprit avec nos frères, en un même corps, et sous un même chef. La mémoire de ses mérites ne se borne point, pour notre martyr, à la terre où est le sépulcre de son corps. Partout on lui doit un saint respect. La chair n’occupe qu’un seul endroit, mais l’âme victorieuse est avec Celui qui est partout.
(…) L’Eglise, a établi ces anniversaires des glorieux martyrs, afin d’amener par la foi à les imiter, ceux qui ne les ont point vus souffrir, de les stimuler par ces solennités (…). A chaque solennité d’un martyr, préparons notre coeur à le fêter, de manière à n’être jamais sans l’imiter.
C’était un homme, et nous sommes des hommes. Celui qui l’a créé nous a créés aussi ; et nous sommes rachetés au même prix qu’il a été racheté. Nul homme chrétien dès lors ne saurait dire : Pourquoi moi? Encore moins, doit-il dire : Pour moi non. Mais bien : Pourquoi pas moi ? (…)
Dès lors, mes frères bien-aimés, puisque jamais nous ne sommes sans persécution, comme nous l’avons dit, et que le diable, ou nous tend des embûches, ou nous fait violence, nous devons être toujours prêts, ayant le coeur fixé en Dieu, et autant qu’il nous est possible, au milieu de ces embarras, de ces tribulations, de ces épreuves, demander la force au Seigneur, puisque de nous-mêmes nous sommes si faibles, nous ne pouvons rien (…) » (Saint Augustin, homélie pour la fête de Saint Laurent)
En un temps où, très spécialement en France, l’anti-christianisme se fait de plus en plus agressif, la célébration des fêtes des martyrs ne doit-elle pas nous stimuler et nous encourager ?
L’Apôtre Saint Paul ne s’adressait pas qu’aux chrétiens de Rome du premier siècle lorsqu’il leur écrivait : « Nolite conformare huic saeculo : ne vous conformez pas à ce monde, mais réformez-vous par le renouvellement de votre esprit, afin que vous reconnaissiez combien la volonté de Dieu est bonne, agréable et parfaite » (Rom. XII, 2).
Aujourd’hui, par tous les moyens, de multiples et incessantes pressions sont faites pour que les chrétiens en prennent à leur aise avec la loi divine – qui n’est rien d’autre que la pratique cohérente du véritable amour – , réinterprètent les commandements de Dieu et de Son Eglise, renoncent aux exigences de la sainteté et se calquent sur des modes comportementales qui ne sont rien d’autre que l’immoralité institutionnalisée…
J’ai alors repensé à ce qu’écrivait Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus de la Sainte Face :
« …si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres n’annonceraient plus l’Evangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang… » (manuscrit B).
Et je me suis demandé : parmi tous ceux qui se déclarent chrétiens, aujourd’hui, en France, combien sont prêts à répandre leur sang pour défendre la loi morale, comme le fit Saint Jean-Baptiste ? combien sont prêts à payer de leur vie leur attachement à Jésus-Christ vrai Dieu et vrai homme, comme le fit Saint Etienne ? combien sont prêts à défendre toutes les Vérités révélées par Dieu et transmises infailliblement par Son Eglise, quoi qu’il puisse leur en coûter, comme le fit Saint Laurent ? combien sont prêts à se laisser torturer et mettre en pièces plutôt que d’abandonner un seul point du dogme, comme l’a fait la « foule immense que nul ne pouvait dénombrer » des fidèles mis à mort par les païens, par les hérétiques, par les mahométans, par les huguenots, par les révolutionnaires, par les marxistes et par les socialistes, par les athées et par les satanistes ?
La charité, capable d’aller jusqu’au bout du plus extrême don de soi, et la cohérence la plus rigoureuse de son comportement avec ce que l’on professe des lèvres ne font-elles pas cruellement défaut même dans les rangs des fidèles ? L’Amour, l’Amour vrai dont parlait Sainte Thérèse, n’est-il pas éteint ? L’Amour est-il encore aimé, vraiment aimé, aimé avec cette cohérence qui embrasse chaque détail de la vie ?
J’ai lu dans « la Croix » – pardonnez-moi de citer un mauvais journal (« Lire ‘la Croix’, quelle croix ! » s’était un jour écrié le génial André Frossard) – le compte-rendu d’un sondage publié hier par « la Vie » (nul n’ignore que cet hebdomadaire n’est plus catholique depuis belle lurette), selon lequel seulement 56% des « catholiques pratiquants » croiraient en une vie après la mort, et seulement deux tiers d’entre eux adhèreraient aux dogmes les plus essentiels du christianisme (dont – excusez du peu – la création du monde par Dieu et la résurrection de N.S.J.C. !).
Sans doute conviendrait-il de définir ce qu’est pour « la Vie » un « catholique pratiquant » : à mon avis ce ne doit pas être quelqu’un qui va à la Messe tous les dimanches et fêtes d’obligation, qui prie quotidiennement, qui observe les commandements de Dieu et de l’Eglise, qui se confesse régulièrement, qui est attentif aux jours de pénitence et de jeûne, qui obéit au Pape… mais, bref, passons là-dessus pour en venir à cette conclusion : comment voulez-vous que ces prétendus catholiques soient capables de résister en face de la plus simple contradiction, des vexations de l’anti-christianisme militant, voire de la persécution – qu’elle soit psychologique ou physique – ?
Sans doute voyons-nous ici les résultats de plus de cinquante ans de catéchèse et de prédication indigentes, rendues stériles par le modernisme et le relativisme des pasteurs eux-mêmes.
Une fois de plus, je n’hésite pas à l’écrire : il vaudrait certainement bien mieux que ces pseudo-catholiques, fussent-ils prêtres ou même évêques, quittent carrément l’Eglise et – si ça leur chante – fondent leurs petites sectes modernichonnes (et de toute façon sans avenir) plutôt que de continuer à affaiblir et polluer la véritable Eglise du Christ !
Rome, basilique de Saint-Laurent-hors-les-murs, mosaïque de l’arc triomphal :
Le Christ en gloire entouré des saints Apôtres Pierre et Paul, des saints diacres martyrs Laurent et Etienne, et de Saint Hippolyte .
B – Lacrymosa dies illa : 10 août 1792.
Mais la joie spirituelle de la fête de l’un des plus glorieux martyrs de la Sainte Eglise est chaque année assombrie par l’anniversaire de la prise du palais des Tuileries, le 10 août 1792.
Cette date marque la chute de la royauté française. Et même si elle n’en est pas vraiment le début (voir par exemple ce que j’ai publié > ici), elle va entraîner un déchaînement de violences inouïes, être suivie par une quantité incroyables d’actes de vandalisme et de barbarie, une débauche de sacrilèges et de profanations, un invraisemblable déferlement de haine et de cruauté que personne n’eût pu imaginer dans un Royaume qui passait pour le plus chrétien d’Europe et le plus raffiné dans sa civilisation !
J’avais publié l’année dernière le témoignage de Pauline de Tourzel sur la prise des Tuileries (cf. > ici).
Avec Frère Maximilien-Marie, nous avons lu ce matin la relation qui en a été faite par le colonel de Pfyffer d’Altischoffen (voir > ici).
Nous avons pleuré d’émotion et d’indignation à ce récit qui montre le courage et la fidélité sans faille des Gardes Suisses et des derniers défenseurs de la famille royale, mais aussi la bassesse et la félonie de ceux qui prétendaient agir pour la liberté, l’égalité et la fraternité, et qui ne furent en réalité que les instruments de la régression de la France.
Après la prise du palais, les corps des Suisses sont défenestrés, dénudés, mutilés, brûlés…
Frère Maximilien-Marie m’a dit (et j’adhère moi-même totalement à ses paroles) :
« Plus que jamais, plus fort que jamais, plus profondément et plus résolument que jamais, je déteste, je hais et j’exècre la révolution !
C’est en raison de l’amour que j’ai pour Dieu et pour Ses saintes lois, en raison de l’amour que je porte à la France telle que Dieu la veut, que je me suis voué et consacré à combattre la révolution : avec la grâce de Dieu, je la combattrai jusqu’à mon dernier souffle sur cette terre, et je la combattrai encore au-delà de ma mort… »
A ceux qui s’étonneraient de lire que le verbe haïr est dans la bouche d’un religieux, il convient de préciser que si justement un moine est fait pour aimer – aimer selon Dieu s’entend -, cet amour exige nécessairement de repousser avec la dernière énergie tout ce qui est contraire à l’amour divin, de lutter contre tout ce qui s’oppose à cet amour, et de haïr tout ce qui tend à la destruction du règne d’amour du Coeur de Jésus.
Or la révolution n’est rien d’autre qu’une entreprise satanique, une manifestation de l’antéchrist, une tentative de faire échec aux desseins du Sacré-Coeur.
Lys d’un drapeau des Gardes Suisses qui fut ramassé par Cléry aux Tuileries
(Paris – musée Carnavalet)
C - In memoriam : 10 août 1982.
D’une manière très personnelle, ce 10 août marque cette année le trentième anniversaire du rappel à Dieu de la grand’mère paternelle de Frère Maximilien-Marie.
C’est par elle que notre Frère a des racines dans ce pays des Boutières où notre Mesnil-Marie est implanté.
Frère Maximilien-Marie m’a raconté que sa grand’mère avait demandé que le vieux cantique populaire « J’irai la voir un jour » fût chanté à ses funérailles.
En ce temps là, Monsieur l’archiprêtre de Saint-Martin de Valamas était l’un de ces bons prêtres qui avait gardé la foi, qui aimait Notre-Dame, dont le coeur cherchait à se modeler sur Celui du Bon Pasteur : il ne s’était, bien évidemment, pas opposé aux dernières volontés de la défunte, qui avait également précisé qu’elle voulait que l’on chantât la Messe des morts, c’est-à-dire les pièces grégoriennes de la liturgie des défunts.
Trente ans après, la paroisse de Saint-Martin de Valamas a été supprimée (dissoute dans une « paroisse » qui couvre le territoire de deux cantons) et il n’y a évidemment plus d’archiprêtre ; le prieuré – magnifique presbytère du XVIe siècle – est inoccupé ; la plupart des fidèles meurt sans le secours des sacrements ; aux messes d’enterrement – quand il y a encore une messe – on n’offre pas des suffrages pour les défunts (et on ne parle pas du purgatoire bien sûr) , mais on vient faire un geste de solidarité envers une famille en deuil ; enfin il est interdit aux prêtres d’accompagner la dépouille du défunt au cimetière, d’y bénir la tombe et d’y diriger les ultimes recommandations de l’âme !!!
Frère Maximilien-Marie a prévu d’être inhumé, normalement, dans la concession familiale où sa place est prête, au cimetière de Saint-Martin de Valamas.
Mais il est bien évidemment hors de question d’avoir à ses funérailles autre chose qu’une Sainte Messe de Requiem selon le rite latin traditionnel, et qui soit en outre célébrée par un prêtre vraiment catholique officiant habituellement avec cette liturgie.
Avec de telles exigences, notre Frère n’est pas certain qu’ « on » lui ouvre les portes de l’église de Saint-Martin de Valamas… du moins dans l’état actuel des choses.
Mais ce n’est pas irréversible car – grâces en soient à Dieu! – Frère Maximilien-Marie se porte plutôt bien et, sauf accident, il bénéficie d’une espérance de vie plus importante que les opposants à la liturgie traditionnelle que seulement quelques années séparent de la retraite : nous le savons bien, une partie de la crise moderniste sera résolue de manière biologique !
N’allez pas croire que mes pensées de ce soir sont morbides : finalement, la mort n’est un drame que pour ceux qui sont en dehors de la grâce de Notre-Seigneur et qui n’ont point d’espérance.
A quelques jours de la fête de l’Assomption, nous regardons plus que jamais avec ferveur vers le Ciel et vers l’Eternité qui nous est promise, et notre coeur chante avec une tendresse émue :
J’irai la voir un jour, au Ciel dans ma Patrie :
Oui, j’irai voir Marie, ma joie et mon amour ;
Au Ciel, au Ciel, au Ciel, j’irai la voir un jour !
Hugo van der Goes : la dormition de la Vierge
Pour aider le Refuge Notre-Dame de Compassion > ici.
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Joli petit village Saint-Martin de Valamas, que nous avons visité… Son église et le cimetière.
La révolution n’est rien d’autre qu’une entreprise satanique pour détruire la France !
Quel chant magnifique !….. « Au ciel ! au ciel ! au ciel, j’irai la voir un jour ! »
Au Ciel, au Ciel, au Ciel,
J’irai la voir toujours !
Merci cher Lully.
Grand merci pour vos excellents commentaires.
Je ne vais jamais à Versailles, en particulier à la pièce d’eau des SUISSES, sans une pensée pour eux.
Merci pour vos enseignements : ils sont très instructifs pour notre foi.
Merci, que DIEU vous bénisse !
Merci pour l’extraordinaire richesse de votre site !
… et d’écrire ce que, finalement, nous sommes encore nombreux à penser tout bas! trop bas peut être?
Mais aujourd’hui nous commémorions les martyrs des pontons de Rochefort, se peut-il que cela vous ait échappé?
J’ai hâte de lire vos commentaires sur ce sujet bien occulté de nos jours.
Et faites en sorte de rester encore longtemps parmi nous!
Formidables vos sermons et ces précisions sur la prise des Tuileries que je vais faire suivre à des guides de Paris.
Vous êtes pour nous ce que devraient être tous les grand’parents pour leurs petits enfants.
Mon internet fonctionne!
… Et je viens de lire vos merveilleux « 10 Aôut » .
Oui, la Révolution est satanique ; oui, nous devons la haïr!
Un grand merci pour vos belles méditations… à méditer.
Et heureux de savoir que votre espérance de vie surpasse celle des petits vieux modernistes.