2011-94. La dernière visiteuse (conte de Noël).
C’était à Bethléem à la pointe du jour. L’étoile venait de disparaître, le dernier pèlerin avait quitté l’étable, la Vierge avait bordé la paille, l’Enfant allait dormir enfin.
Mais dort-on la nuit de Noël ?…
Doucement la porte s’ouvrit, poussée, eût-on dit, par un souffle plus que par une main, et une femme parut sur le seuil, couverte de haillons, si vieille et si ridée que, dans son visage couleur de terre, sa bouche semblait n’être qu’une ride de plus.
En la voyant, Marie prit peur, comme si ç’avait été quelque mauvaise fée qui entrait.
Heureusement Jésus dormait!
L’âne et le boeuf mâchaient paisiblement leur paille et regardaient s’avancer l’étrangère sans marquer plus d’étonnement que s’ils la connaissaient depuis toujours. La Vierge, elle, ne la quittait pas des yeux. Chacun des pas qu’elle faisait lui semblait long comme des siècles.
La vieille continuait d’avancer, et voici maintenant qu’elle était au bord de la crèche.
Grâce à Dieu, Jésus dormait toujours.
Mais dort-on la nuit de Noël ?…
Soudain, Il ouvrit les paupières, et Sa mère fut bien étonnée de voir que les yeux de la femme et ceux de son Enfant étaient exactement pareils et brillaient de la même espérance.
La vieille alors se pencha sur la paille, tandis que sa main allait chercher dans le fouillis de ses haillons quelque chose qu’elle sembla mettre des siècles encore à trouver.
Marie la regardait toujours avec la même inquiétude.
Les bêtes la regardaient aussi, mais toujours sans surprise, comme si elles savaient par avance ce qui allait arriver.
Enfin, au bout de très longtemps, la vieille finit par tirer de ses hardes un objet caché dans sa main, et elle le remit à l’Enfant.
Après tous les trésors des Mages et les offrandes des bergers, quel était ce présent ?
D’où elle était, Marie ne pouvait pas le voir. Elle voyait seulement le dos courbé par l’âge, et qui se courbait plus encore en se penchant sur le berceau. Mais l’âne et le bœuf, eux, le voyaient et ne s’étonnaient toujours pas.
Cela encore dura bien longtemps.
Puis la vieille femme se releva, comme allégée du poids très lourd qui la tirait vers la terre. Ses épaules n’étaient plus voûtées, sa tête touchait presque le chaume, son visage avait retrouvé miraculeusement sa jeunesse. Et quand elle s’écarta du berceau pour regagner la porte et disparaître dans la nuit d’où elle était venue, Marie put voir enfin ce qu’était son mystérieux présent.
Eve (car c’était elle) venait de remettre à l’Enfant une petite pomme, la pomme du premier péché (et de tant d’autres qui suivirent!). Et la petite pomme rouge brillait aux mains du Nouveau-Né comme le globe du monde nouveau qui venait de naître avec Lui.
Jérôme et Jean Tharaud
(in « Les Contes de la Vierge »).

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Toujours aussi magnifiques et merveilleux, ces petits contes, loin de ce monde materiel et froid.
Cela me rappelle mon enfance, quand notre bon abbé auvergnat nous parlait de Noël avec son coeur. On n’arrivait plus à quitter son presbytére, tellement nous étions entourés de chaleur humaine (et d’un bon feu) ; nous étions heureux de vivre cette joie de la Naissance de notre Sauveur et surtout d’y participer, par notre imagination, sous le regard attendri d’une dame âgée, qui soulageait le prêtre par toutes ses attentions, attentions et gentillesses dont nous bénéficions aussi. Un de mes plus beaux souvenirs.
Beau conte.
Merci !
Bonsoir.
Merci pour ce beau conte, frère Maximilien.
C’est un texte très joli que je partage avec mes amis.
Merci
Cher Frère,
C’est un bel ensemble de méditations que vous nous avez donné au jour le jour et je vous en remercie de toute mon .. âme ; les textes du cardinal de Bérulle, particulièrement si pénétrants.
Joyeux Noël et union de prière au Mesnil-Marie !
Très cher frère,
Merci pour ce beau conte que je viens de lire à haute voix
et pour ce reportage sur votre magnifique crêche.
Que l’Enfant Jésus vous garde, ainsi que votre cher Lully.